Actualités de l'Urgence - APM

14/05 2018
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CH DE CAYENNE: 17 URGENTISTES MENACENT TOUJOURS DE DÉMISSIONNER EN L'ABSENCE D'ACCORD

CAYENNE, 14 mai 2018 (APMnews) - La crise aux urgences du centre hospitalier (CH) de Cayenne se poursuit en l'absence d'accord entre la direction et les 17 urgentistes démissionnaires, malgré une première rencontre qui s'est tenue vendredi entre les deux parties, a indiqué dimanche à APMnews Pierre Chesneau, urgentiste et représentant local du syndicat Samu-Urgences de France.

Dans cet établissement, 17 urgentistes ont déposé jeudi 3 mai des préavis de démission et de mise en disponibilité pour protester contre la pénurie chronique de personnel médical (cf dépêche du 09/05/2018 à 17:33).

Si aucune solution n'est trouvée avant le 3 juillet (les préavis ayant une durée de 2 mois), le fonctionnement du service pourrait être très fortement contraint par le départ des praticiens.

"Nous avons eu un premier rendez-vous vendredi 11 mai avec la direction de l'hôpital", a indiqué dimanche Pierre Chesneau à APMnews dans une réponse écrite.

"Plusieurs constats ont été faits: nous sommes bien 17 à vouloir quitter l'hôpital; que les démissionnaires restent ou partent, dans tous les cas, le planning des mois de juin, juillet, août et d'après n'est pas réalisable en l'état; le nombre nécessaire de médecins pour le planning va être arrêté en commun dans les jours qui viennent", a-t-il indiqué.

"Apres ces constats, il va être nécessaire d'envisager comment peut fonctionner le service", a poursuivi le représentant syndical.

Interrogé vendredi par APMnews, Pierre Chesneau a confirmé qu'il manquait actuellement 15 urgentistes pour "assurer le fonctionnement normal du service". "Nous sommes actuellement 25 et nous devrions être 40".

Départ d'une "dizaine" d'urgentistes en 2017

Si le service fait face depuis plusieurs années à un problème de recrutement, la situation s'est aggravée en 2017 avec le départ "d'une dizaine d'urgentistes titulaires", dont "2 praticiens qui exerçaient depuis plus de 20 ans" aux urgences, a-t-il expliqué.

"La plupart de ces praticiens n'ont pas quitté la Guyane mais sont partis exercer en libéral ou dans d'autres établissements. Cela montre à quel point les conditions de travail sont difficiles au CH de Cayenne à cause d'horaires importants qui rendent l'établissement peu attractif pour les médecins", poursuit-il.

Pierre Chesneau indique que plusieurs "lignes de garde" sont actuellement supprimées en conséquence des départs récents, le service accueillant en moyenne "50.000 passages par an".

"Le manque d'effectifs est devenu vraiment dangereux pour les patients. Notre dépôt collectif de démissions est un coup de sang car ce n'est vraiment plus possible de travailler dans ces conditions", alerte-t-il.

De plus, "sur les 17 urgentistes démissionnaires, 2 vont définitivement partir car ils ont remis des demandes de mise en disponibilité qui ont été acceptées par la direction", a annoncé Pierre Chesneau.

Concernant les négociations avec la direction, le représentant syndical explique que les urgentistes démissionnaires ont refusé jusqu'à vendredi de rencontrer la gouvernance du CH car "la présidente de la CME [commission médicale d'établissement] a pris parti en affichant son soutien à la direction le 4 mai, au lendemain de notre dépôt de démission".

"Nous avons fait une demande auprès du conseil de l'ordre des médecins de Guyane et des médecins universitaires pour obtenir une médiation extérieure", a indiqué Pierre Chesneau.

Dans un communiqué diffusé mardi 8 mai, l'ARS Guyane a exhorté la direction et les urgentistes à reprendre le dialogue, tout en exigeant de la part de l'établissement la présentation "sous huitaine" d'un plan d'action visant à améliorer les "conditions de travail et d'exercice", rappelle-t-on.

Dans deux courriers datés de 2017 dont APMnews a eu copie, les urgentistes ont respectivement alerté la direction du CH de Cayenne et l'agence régionale de santé (ARS) Guyane sur les conséquences de la pénurie de personnel médical.

"La sursaturation du service des urgences entraîne une détérioration de la qualité de la prise en charge des patients. Le personnel travaille désormais en insécurité professionnelle [...] Il existe une souffrance au travail chez les médecins, un état de burn-out [...] et un sentiment d'abandon par la direction", est-il indiqué dans le courrier adressé à la direction du CH.

"Les délais de prise en charge aux urgences s'allongent considérablement [...] Il est désormais régulier que 3 à 10 patients passent 24 heures aux urgences, sur un brancard", est-il notamment écrit dans celui adressé à l'ARS.

"Les laisser partir serait une grande perte"

Dans un communiqué diffusé vendredi, 62 praticiens du CH de Cayenne ont assuré les urgentistes démissionnaires de leur "entier soutien".

"La situation des urgences se détériore depuis 2 ans. En dépit des alertes répétées [...], aucune réponse ni aucune amélioration n’a été apportée", affirment-ils.

"Nous sommes solidaires de nos confrères et comprenons le point de non-retour dans lequel ils se trouvent après avoir lutté pendant des mois pour maintenir la qualité des soins due aux patients", poursuivent-ils.

"La médecine d’urgence est un travail de spécialiste. De nombreux médecins urgentistes expérimentés ont déjà quitté le service. Ces urgentistes ont acquis au fil des années une expertise du terrain irremplaçable. Les laisser partir serait une grande perte pour l’hôpital et pour l’ensemble de la population", s'inquiètent-ils.

En outre, "le service d’accueil des urgences reste la porte d’entrée de l’hôpital et son mal être retentit sur l’ensemble de l’hôpital et sur la prise en charge des patients [...] De nombreuses promesses ont été faites et n’ont toujours pas été tenues [...] Nous sommes tous épuisés de cet immobilisme et attendons des actions concrètes", concluent-ils.

Selon la radio locale Péyi Guyane, une rencontre a eu lieu samedi matin entre la Collectivité territoriale de Guyane (CTG) et l'ARS Guyane au sujet de la crise des urgences. Il aurait notamment été évoqué comme solution la mobilisation à court terme de la réserve sanitaire, l'ARS indiquant par ailleurs que "5 urgentistes" ont déjà été trouvés et qu'il en faudrait "5 autres" pour atteindre "l'objectif minimum de 35", selon ce média.

Cette crise survient près d'un an après la signature, en juin 2017, d'un protocole d'accord sur le développement de l'offre hospitalière et les conditions de travail au CH de Cayenne qui avait mis fin à deux mois et demi de grève (cf dépêche du 12/06/2017 à 14:10).

syl/sl/APMnews

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CAYENNE, 14 mai 2018 (APMnews) - La crise aux urgences du centre hospitalier (CH) de Cayenne se poursuit en l'absence d'accord entre la direction et les 17 urgentistes démissionnaires, malgré une première rencontre qui s'est tenue vendredi entre les deux parties, a indiqué dimanche à APMnews Pierre Chesneau, urgentiste et représentant local du syndicat Samu-Urgences de France.

Dans cet établissement, 17 urgentistes ont déposé jeudi 3 mai des préavis de démission et de mise en disponibilité pour protester contre la pénurie chronique de personnel médical (cf dépêche du 09/05/2018 à 17:33).

Si aucune solution n'est trouvée avant le 3 juillet (les préavis ayant une durée de 2 mois), le fonctionnement du service pourrait être très fortement contraint par le départ des praticiens.

"Nous avons eu un premier rendez-vous vendredi 11 mai avec la direction de l'hôpital", a indiqué dimanche Pierre Chesneau à APMnews dans une réponse écrite.

"Plusieurs constats ont été faits: nous sommes bien 17 à vouloir quitter l'hôpital; que les démissionnaires restent ou partent, dans tous les cas, le planning des mois de juin, juillet, août et d'après n'est pas réalisable en l'état; le nombre nécessaire de médecins pour le planning va être arrêté en commun dans les jours qui viennent", a-t-il indiqué.

"Apres ces constats, il va être nécessaire d'envisager comment peut fonctionner le service", a poursuivi le représentant syndical.

Interrogé vendredi par APMnews, Pierre Chesneau a confirmé qu'il manquait actuellement 15 urgentistes pour "assurer le fonctionnement normal du service". "Nous sommes actuellement 25 et nous devrions être 40".

Départ d'une "dizaine" d'urgentistes en 2017

Si le service fait face depuis plusieurs années à un problème de recrutement, la situation s'est aggravée en 2017 avec le départ "d'une dizaine d'urgentistes titulaires", dont "2 praticiens qui exerçaient depuis plus de 20 ans" aux urgences, a-t-il expliqué.

"La plupart de ces praticiens n'ont pas quitté la Guyane mais sont partis exercer en libéral ou dans d'autres établissements. Cela montre à quel point les conditions de travail sont difficiles au CH de Cayenne à cause d'horaires importants qui rendent l'établissement peu attractif pour les médecins", poursuit-il.

Pierre Chesneau indique que plusieurs "lignes de garde" sont actuellement supprimées en conséquence des départs récents, le service accueillant en moyenne "50.000 passages par an".

"Le manque d'effectifs est devenu vraiment dangereux pour les patients. Notre dépôt collectif de démissions est un coup de sang car ce n'est vraiment plus possible de travailler dans ces conditions", alerte-t-il.

De plus, "sur les 17 urgentistes démissionnaires, 2 vont définitivement partir car ils ont remis des demandes de mise en disponibilité qui ont été acceptées par la direction", a annoncé Pierre Chesneau.

Concernant les négociations avec la direction, le représentant syndical explique que les urgentistes démissionnaires ont refusé jusqu'à vendredi de rencontrer la gouvernance du CH car "la présidente de la CME [commission médicale d'établissement] a pris parti en affichant son soutien à la direction le 4 mai, au lendemain de notre dépôt de démission".

"Nous avons fait une demande auprès du conseil de l'ordre des médecins de Guyane et des médecins universitaires pour obtenir une médiation extérieure", a indiqué Pierre Chesneau.

Dans un communiqué diffusé mardi 8 mai, l'ARS Guyane a exhorté la direction et les urgentistes à reprendre le dialogue, tout en exigeant de la part de l'établissement la présentation "sous huitaine" d'un plan d'action visant à améliorer les "conditions de travail et d'exercice", rappelle-t-on.

Dans deux courriers datés de 2017 dont APMnews a eu copie, les urgentistes ont respectivement alerté la direction du CH de Cayenne et l'agence régionale de santé (ARS) Guyane sur les conséquences de la pénurie de personnel médical.

"La sursaturation du service des urgences entraîne une détérioration de la qualité de la prise en charge des patients. Le personnel travaille désormais en insécurité professionnelle [...] Il existe une souffrance au travail chez les médecins, un état de burn-out [...] et un sentiment d'abandon par la direction", est-il indiqué dans le courrier adressé à la direction du CH.

"Les délais de prise en charge aux urgences s'allongent considérablement [...] Il est désormais régulier que 3 à 10 patients passent 24 heures aux urgences, sur un brancard", est-il notamment écrit dans celui adressé à l'ARS.

"Les laisser partir serait une grande perte"

Dans un communiqué diffusé vendredi, 62 praticiens du CH de Cayenne ont assuré les urgentistes démissionnaires de leur "entier soutien".

"La situation des urgences se détériore depuis 2 ans. En dépit des alertes répétées [...], aucune réponse ni aucune amélioration n’a été apportée", affirment-ils.

"Nous sommes solidaires de nos confrères et comprenons le point de non-retour dans lequel ils se trouvent après avoir lutté pendant des mois pour maintenir la qualité des soins due aux patients", poursuivent-ils.

"La médecine d’urgence est un travail de spécialiste. De nombreux médecins urgentistes expérimentés ont déjà quitté le service. Ces urgentistes ont acquis au fil des années une expertise du terrain irremplaçable. Les laisser partir serait une grande perte pour l’hôpital et pour l’ensemble de la population", s'inquiètent-ils.

En outre, "le service d’accueil des urgences reste la porte d’entrée de l’hôpital et son mal être retentit sur l’ensemble de l’hôpital et sur la prise en charge des patients [...] De nombreuses promesses ont été faites et n’ont toujours pas été tenues [...] Nous sommes tous épuisés de cet immobilisme et attendons des actions concrètes", concluent-ils.

Selon la radio locale Péyi Guyane, une rencontre a eu lieu samedi matin entre la Collectivité territoriale de Guyane (CTG) et l'ARS Guyane au sujet de la crise des urgences. Il aurait notamment été évoqué comme solution la mobilisation à court terme de la réserve sanitaire, l'ARS indiquant par ailleurs que "5 urgentistes" ont déjà été trouvés et qu'il en faudrait "5 autres" pour atteindre "l'objectif minimum de 35", selon ce média.

Cette crise survient près d'un an après la signature, en juin 2017, d'un protocole d'accord sur le développement de l'offre hospitalière et les conditions de travail au CH de Cayenne qui avait mis fin à deux mois et demi de grève (cf dépêche du 12/06/2017 à 14:10).

syl/sl/APMnews

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