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25/01 2019
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LE CNGOF MET EN GARDE CONTRE UNE MÉTHODE DE SIMULATION D'ACCOUCHEMENT PROMUE POUR RÉDUIRE LES CÉSARIENNES EN URGENCE

PARIS, 25 janvier 2019 (APMnews) - Le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) met en garde, dans un communiqué publié vendredi, contre une méthode de simulation de l'accouchement, appelée SIM 37, qui permettrait de prédire la possibilité d'un accouchement par voie basse ou la nécessité de programmer une césarienne.

Le collège a été interpellé par une association ayant pour objectif de lutter contre les violences obstétricales et gynécologiques, l'Institut de recherche et d'actions pour la santé des femmes (Irasf). Cette dernière a publié mercredi un communiqué dénonçant "une pratique commerciale au service de la césarienne: le SIM 37".

Cette méthode, qui utilise l'IRM, repose sur la détection de la dystocie céphalo-pelvienne (la différence de taille entre la tête du foetus et le bassin de la mère). Elle a été développée et est promue par le Dr Olivier Ami, gynécologue-obstétricien libéral, qui exerce à la clinique de La Muette à Paris (groupe Ramsay-Générale de santé). Il a fondé la société Babyprogress qui commercialise le SIM 37.

La "mission" de cet outil, selon le site internet de Babyprogress, est de "réduire les accouchements traumatiques, réduire les césariennes en urgence, réduire les césariennes inutiles".

Pour le CNGOF, il s'agit d'une "méthode onéreuse et sans bénéfice ou intérêts prouvés". Il souligne "l’absence de preuves scientifiques justifiant de proposer cette méthode aux femmes enceintes", et que "ce procédé n’a jamais fait l’objet d’une évaluation pertinente et sérieuse. Il n’existe aucune étude publiée dans des revues à comité de lecture permettant de vérifier les hypothèses proposées".

"Nous sommes allés voir" la méthode proposée, "mais c'est du vent, ce n'est pas sérieux sur le plan méthodologique, il n'y a pas de données" fiables, a indiqué vendredi le Pr Philippe Deruelle (hôpitaux universitaires de Strasbourg), secrétaire général du CNGOF, interrogé par APMnews.

Le Dr Ami développe cette méthode depuis quelques années. Il l'a récemment promue sur le plan commercial, "sans véritables données. Il n'a rien publié", ajoute le Pr Deruelle.

Cette méthode a été proposée en juin 2017 par la clinique de l'Estrée à Stains (Seine-Saint-Denis) (groupe Elsan), probablement par un basculement des patientes de La Muette, qui n'a pas d'IRM, souhaitant bénéficier de cet examen, notent les observateurs.

Selon les investigations menées par l'Irasf, "il s’avère que le Docteur Olivier Ami a mis en oeuvre un examen médical qualifié de 'pure folie' par ses pairs. Selon notre enquête, des chercheurs spécialisés en obstétrique et qui préfèrent garder l’anonymat se sont penchés sur le SIM37 et ont déclaré que 'cette pratique est complètement infondée, non reconnue, animée par l’appât du gain'".

Un procédé commercial particulièrement onéreux

L'association souligne qu'à la clinique de La Muette, le taux de césarienne s'élève à 43,5%, soit plus du double par rapport à la moyenne nationale, de 20,2%, en 2016.

Elle dénonce également les "postulats" du Dr Ami sur les pathologies foetales qui seraient liées à la "disproportion entre le canal vaginal et la tête du foetus", telles que l'autisme, les hémorragies cérébrales du foetus et les conséquences sur le QI des bébés en devenir.

Toujours selon l'association, le Dr Ami "prétend que 'dans huit à neuf générations, les femmes, et partout dans le monde, ne pourront plus accoucher par voie basse'. Il ajoute que: 'c’est à cause des césariennes que la sélection des femmes capables d’enfanter par voie basse ne s’est pas faite'." Une théorie renversée par la co-présidente de l'Irasf, July Bouhallier, paléoanthropologue spécialiste des modifications du bassin et de l’accouchement dans l’évolution humaine, qui explique que les césariennes n’ont pas d’influence sur la morphologie pelvienne ni sur l’évolution humaine.

"Cette hypothèse est un très vieux mythe, la corrélation entre la taille de la tête du foetus et le bassin paraît évidente. De là à pouvoir prédire les chances d'accoucher par voie basse, c'est beaucoup plus compliqué que ça", explique le Pr Deruelle à APMnews.

La tête n'a ainsi pas toujours le même diamètre selon la position du foetus en présentation céphalique lors de l'accouchement: si elle est repliée vers l'avant, menton vers le thorax, on a le diamètre le plus petit, qui facilite le passage du foetus. A contrario, si la tête est fléchie vers l'arrière, le diamètre en présentation est beaucoup plus grand, et la tête passe alors moins bien.

"Cette notion dépend de la position de la tête du bébé, mais aussi de la manière dont les contractions vont se faire. Il y a en outre une imprécision sur l'estimation du poids et de la taille du bébé", souligne le Pr Deruelle.

Selon lui, cette méthode est "une manière de justifier des césariennes programmées non justifiées et de mettre en place un procédé commercial", particulièrement onéreux, proposé à 900 €.

"Devant ces évidences, il est important d’informer les femmes et les couples sur le caractère expérimental et hasardeux de cet examen, de son coût outrancier (900€), de son usage pour vendre et potentiellement perpétuer des césariennes qui nous semblent inutiles, de véhiculer des données scientifiques fausses, voire dangereuses et incomplètes pour les femmes, d’instrumentaliser les violences obstétricales et enfin de s’enrichir d’une certaine façon sur le dos des victimes de violences obstétricales et gynécologiques", déclare l'Irasf.

"Le Dr Ami nous a dit que 1.000 femmes environ avaient fait le SIM 37", a indiqué l'association à APMnews.

L'association attend également du Dr Ami la publication de ses données, ainsi que "les preuves d’obtention du consentement libre et éclairé des femmes pour participer à une recherche expérimentale, la preuve du dépôt du projet d’étude, des assurances d’expérimentations, des protocoles d’expérimentations, la liste des personnes qui constituent le comité scientifique et éthique, le laboratoire et l’équipe de chercheurs qui travaillent avec le Dr Olivier Ami, les résultats des publications".

Le Dr Ami n'a pas pu être joint par APMnews vendredi en fin d'après-midi.

cd/fbk/APMnews

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PARIS, 25 janvier 2019 (APMnews) - Le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) met en garde, dans un communiqué publié vendredi, contre une méthode de simulation de l'accouchement, appelée SIM 37, qui permettrait de prédire la possibilité d'un accouchement par voie basse ou la nécessité de programmer une césarienne.

Le collège a été interpellé par une association ayant pour objectif de lutter contre les violences obstétricales et gynécologiques, l'Institut de recherche et d'actions pour la santé des femmes (Irasf). Cette dernière a publié mercredi un communiqué dénonçant "une pratique commerciale au service de la césarienne: le SIM 37".

Cette méthode, qui utilise l'IRM, repose sur la détection de la dystocie céphalo-pelvienne (la différence de taille entre la tête du foetus et le bassin de la mère). Elle a été développée et est promue par le Dr Olivier Ami, gynécologue-obstétricien libéral, qui exerce à la clinique de La Muette à Paris (groupe Ramsay-Générale de santé). Il a fondé la société Babyprogress qui commercialise le SIM 37.

La "mission" de cet outil, selon le site internet de Babyprogress, est de "réduire les accouchements traumatiques, réduire les césariennes en urgence, réduire les césariennes inutiles".

Pour le CNGOF, il s'agit d'une "méthode onéreuse et sans bénéfice ou intérêts prouvés". Il souligne "l’absence de preuves scientifiques justifiant de proposer cette méthode aux femmes enceintes", et que "ce procédé n’a jamais fait l’objet d’une évaluation pertinente et sérieuse. Il n’existe aucune étude publiée dans des revues à comité de lecture permettant de vérifier les hypothèses proposées".

"Nous sommes allés voir" la méthode proposée, "mais c'est du vent, ce n'est pas sérieux sur le plan méthodologique, il n'y a pas de données" fiables, a indiqué vendredi le Pr Philippe Deruelle (hôpitaux universitaires de Strasbourg), secrétaire général du CNGOF, interrogé par APMnews.

Le Dr Ami développe cette méthode depuis quelques années. Il l'a récemment promue sur le plan commercial, "sans véritables données. Il n'a rien publié", ajoute le Pr Deruelle.

Cette méthode a été proposée en juin 2017 par la clinique de l'Estrée à Stains (Seine-Saint-Denis) (groupe Elsan), probablement par un basculement des patientes de La Muette, qui n'a pas d'IRM, souhaitant bénéficier de cet examen, notent les observateurs.

Selon les investigations menées par l'Irasf, "il s’avère que le Docteur Olivier Ami a mis en oeuvre un examen médical qualifié de 'pure folie' par ses pairs. Selon notre enquête, des chercheurs spécialisés en obstétrique et qui préfèrent garder l’anonymat se sont penchés sur le SIM37 et ont déclaré que 'cette pratique est complètement infondée, non reconnue, animée par l’appât du gain'".

Un procédé commercial particulièrement onéreux

L'association souligne qu'à la clinique de La Muette, le taux de césarienne s'élève à 43,5%, soit plus du double par rapport à la moyenne nationale, de 20,2%, en 2016.

Elle dénonce également les "postulats" du Dr Ami sur les pathologies foetales qui seraient liées à la "disproportion entre le canal vaginal et la tête du foetus", telles que l'autisme, les hémorragies cérébrales du foetus et les conséquences sur le QI des bébés en devenir.

Toujours selon l'association, le Dr Ami "prétend que 'dans huit à neuf générations, les femmes, et partout dans le monde, ne pourront plus accoucher par voie basse'. Il ajoute que: 'c’est à cause des césariennes que la sélection des femmes capables d’enfanter par voie basse ne s’est pas faite'." Une théorie renversée par la co-présidente de l'Irasf, July Bouhallier, paléoanthropologue spécialiste des modifications du bassin et de l’accouchement dans l’évolution humaine, qui explique que les césariennes n’ont pas d’influence sur la morphologie pelvienne ni sur l’évolution humaine.

"Cette hypothèse est un très vieux mythe, la corrélation entre la taille de la tête du foetus et le bassin paraît évidente. De là à pouvoir prédire les chances d'accoucher par voie basse, c'est beaucoup plus compliqué que ça", explique le Pr Deruelle à APMnews.

La tête n'a ainsi pas toujours le même diamètre selon la position du foetus en présentation céphalique lors de l'accouchement: si elle est repliée vers l'avant, menton vers le thorax, on a le diamètre le plus petit, qui facilite le passage du foetus. A contrario, si la tête est fléchie vers l'arrière, le diamètre en présentation est beaucoup plus grand, et la tête passe alors moins bien.

"Cette notion dépend de la position de la tête du bébé, mais aussi de la manière dont les contractions vont se faire. Il y a en outre une imprécision sur l'estimation du poids et de la taille du bébé", souligne le Pr Deruelle.

Selon lui, cette méthode est "une manière de justifier des césariennes programmées non justifiées et de mettre en place un procédé commercial", particulièrement onéreux, proposé à 900 €.

"Devant ces évidences, il est important d’informer les femmes et les couples sur le caractère expérimental et hasardeux de cet examen, de son coût outrancier (900€), de son usage pour vendre et potentiellement perpétuer des césariennes qui nous semblent inutiles, de véhiculer des données scientifiques fausses, voire dangereuses et incomplètes pour les femmes, d’instrumentaliser les violences obstétricales et enfin de s’enrichir d’une certaine façon sur le dos des victimes de violences obstétricales et gynécologiques", déclare l'Irasf.

"Le Dr Ami nous a dit que 1.000 femmes environ avaient fait le SIM 37", a indiqué l'association à APMnews.

L'association attend également du Dr Ami la publication de ses données, ainsi que "les preuves d’obtention du consentement libre et éclairé des femmes pour participer à une recherche expérimentale, la preuve du dépôt du projet d’étude, des assurances d’expérimentations, des protocoles d’expérimentations, la liste des personnes qui constituent le comité scientifique et éthique, le laboratoire et l’équipe de chercheurs qui travaillent avec le Dr Olivier Ami, les résultats des publications".

Le Dr Ami n'a pas pu être joint par APMnews vendredi en fin d'après-midi.

cd/fbk/APMnews

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