Actualités de l'Urgence - APM

12/07 2022
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LES DIFFICULTÉS DE L'HÔPITAL ONT MARQUÉ LES PREMIÈRES QUESTIONS AU GOUVERNEMENT DU QUINQUENNAT

(Par Bruno DECOTTIGNIES et Geoffroy LANG, à l'Assemblée nationale)

PARIS, 12 juillet 2022 (APMnews) - Le nouveau ministre de la santé et de la prévention, François Braun, a fait face aux interrogations et aux inquiétudes de plusieurs députés de l'opposition comme de la majorité mardi, lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, les premières du quinquennat.

Le ministre a été sollicité à de nombreuses reprises par la nouvelle assemblée, marquée par un nombre de groupes en hausse (10 groupes pour la 16e législature contre 9 pour la précédente).

"Depuis plusieurs mois, les soignants de tous les hôpitaux du pays sont exsangues de la pandémie et de leurs conditions de travail", a-t-il été interpellé par Mélanie Thomin (PS-Nupes, Finistère), dès le début de la séance, alors que la députée soulignait que les établissements hospitaliers subissaient de surcroît "une hémorragie de démissions qui aggrave ces difficultés".

Elle a par ailleurs critiqué les recommandations formulées par la mission flash sur les urgences et les soins non programmés conduite par François Braun avant son entrée au gouvernement (cf dépêche du 01/07/2022 à 20:27, dépêche du 11/07/2022 à 18:43 et dépêche du 12/07/2022 à 12:50), en estimant que celles-ci ne constituaient "pas une réponse aux crises que vont subir les urgences cet été".

La députée du Finistère s'est notamment fait l'écho des difficultés rencontrées par le centre hospitalier (CH) de Carhaix, "menacé comme tous les hôpitaux en zone rurale".

Le député de la majorité présidentielle Jérémie Patrier Leitus (Horizon-Ensemble, Calvados) s'est lui aussi interrogé sur la "capacité des services d'urgence à assurer une prise en charge sûre et de qualité cet été", en se demandant si "les mesures qui seront appliquées" seront suffisantes pour soutenir les "services d'urgence et [les] personnels mobilisés".

Il a notamment cité le CH de Lisieux, dont les urgences avaient fermé pendant trois semaines de nuit en août 2021 et dont les urgences pédiatriques ferment à nouveau "de 8h à 8h" ce mardi soir, mais aussi le cas du CHU de Nice, contraint de restreindre l'accès à ses urgences depuis lundi soir, faute de personnel en nombre suffisant (cf dépêche du 12/07/2022 à 18:09).

Face à ces critiques et ces craintes, le ministre de la santé et la prévention a reconnu une situation difficile mais a défendu son approche: "Ce ne sont pas des solutions qui vont résoudre tous les problèmes du système de santé, ni même de l'hôpital […], ce sont des solutions qui [...] s'appellent du damage control, pour arrêter l'hémorragie avant de soigner réellement le patient."

François Braun défend son approche

"Ma mission en tant que ministre de la santé, en tant que médecin, c'est de permettre à chaque Français d'être pris en charge correctement, de façon adéquate, lorsque cela est nécessaire", a-t-il assuré, s'empressant d'ajouter que "de façon adéquate, ça ne veut pas dire tout systématiquement dans un service d'urgence".

"Nos services d'urgence font face à une tension qui a des raisons multiples", a poursuivi François Braun, en citant une "mauvaise articulation entre la ville et l'hôpital", une "démographie médicale inadaptée", des "soignants mobilisés pendant deux ans et demi pendant cette crise et maintenant épuisés".

"Les propositions qui ont été déclinées reposent sur la responsabilité de chacun d'entre nous", a-t-il enchaîné avant d'égrener plusieurs de ces mesures: "En appelant le 15 avant de se déplacer aux urgences, en étant réorienté en se présentant dans un service d'urgence vers une solution plus adaptée, en jouant sur la disponibilité des professionnels avec des mesures d'attractivité et, pour la première fois, la reconnaissance de la notion de pénibilité du travail de nuit, enfin une meilleure coordination entre la ville et l'hôpital."

"Les urgences vitales sont et seront toujours assurées sur tout le territoire", a assuré le ministre sous les protestations issues des deux extrêmes de l'hémicycle. "Il est hors de question de dégrader la prise en charge des urgences de nos citoyens qui en ont le plus besoin."

Nicolas Sansu (GDR-Nupes, Cher), qui interrogeait la première ministre, Elisabeth Borne, a mentionné "plus de 120" services d'urgence "en souffrance" et la fermeture de "milliers de lits" cet été, sans préciser s'il évoquait les fermetures estivales habituelles en période de congés, ou des fermetures faute de personnel.

Il a aussi cité les difficultés de maternités comme celle d'Orléans (cf dépêche du 05/07/2022 à 09:37), et des parturientes obligées de parcourir "50, voire 80 kilomètres faute de personnel soignant", pour accoucher.

"Face à cette situation critique, vos réponses valident une rupture du service public, en normalisant le fonctionnement en mode dégradé des urgences la nuit, voire même en incitant à leur fermeture au nom d'une mutualisation de moyens. Les inégalités territoriales vont ainsi s'accentuer", a-t-il attaqué.

Une pique pour les Smur paramédicaux

"Comment accepter que des équipes d'urgence partent sans médecin? Comment accepter qu'une femme n'accouche pas là où elle s'est préparée? Comment affirmer que la solution serait de faire appel à la médecine de ville alors même que la désertification médicale avance inexorablement? Comment accepter le versement de primes de 3.000 voire 5.000 euros à des personnels soignants pour l'été, provoquant division et dégoût parmi les anciens qui n'y auraient pas droit?", a questionné Nicolas Sansu. "Comment comprendre votre inflexibilité pour ne pas réintégrer tous les soignants dont nous avons besoin?"

Le député a appelé à la revalorisation significative des rémunérations des soignants, à l'encadrement strict de l'intérim, à la "mise en place d'un véritable plan équilibré de structuration de l'hôpital public avec les moyens afférents".

Au contraire, Jean-François Rousset (Renaissance, Aveyron) a sans surprise salué l'action politique des cinq dernières années mais a déploré les difficultés actuelles du système, plaçant ses espoirs dans les concertations à venir et demandant au ministre d'exposer ses priorités.

"Nous pourrons, avec des oppositions responsables, bâtir les compromis nécessaires pour l'intérêt supérieur de la nation et la santé de nos concitoyens" a notamment répondu le ministre.

Passer d'un système d'offre de soins à une réponse aux besoins de santé

"Démographie médicale inadaptée, gestion par les coûts et non par les besoins, perte de sens et d'attractivité pour certains métiers, autant de défis auxquels j'ai déjà commencé à m'atteler", a-t-il ajouté, rappelant vouloir passer d'un "système basé sur l'offre" à un système "dont la seule finalité doit être la réponse aux besoins de santé de nos concitoyens".

"Nous réparerons notre système de santé, nous le rendrons plus humain, nous le rendrons plus efficace", a-t-il assuré, la première étape étant la "conférence des parties prenantes" à venir (cf dépêche du 06/07/2022 à 19:13).

"Je n'entends pas, depuis mon bureau du ministère, dire à chacun ce qu'il doit faire", a-t-il déclaré.

François Braun a par ailleurs été interrogé par Bénédicte Auzanot (RN, Vaucluse) sur la perspective d'une réintégration des soignants non vaccinés. Le ministre lui a répondu que de nouveaux développements seraient possibles à l'automne, comme indiqué la veille dans le cadre de la discussion générale sur le projet de loi de veille et de sécurité sanitaire en matière de lutte contre la Covid-19 (cf dépêche du 12/07/2022 à 11:51).

bd-gl/nc/APMnews

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(Par Bruno DECOTTIGNIES et Geoffroy LANG, à l'Assemblée nationale)

PARIS, 12 juillet 2022 (APMnews) - Le nouveau ministre de la santé et de la prévention, François Braun, a fait face aux interrogations et aux inquiétudes de plusieurs députés de l'opposition comme de la majorité mardi, lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, les premières du quinquennat.

Le ministre a été sollicité à de nombreuses reprises par la nouvelle assemblée, marquée par un nombre de groupes en hausse (10 groupes pour la 16e législature contre 9 pour la précédente).

"Depuis plusieurs mois, les soignants de tous les hôpitaux du pays sont exsangues de la pandémie et de leurs conditions de travail", a-t-il été interpellé par Mélanie Thomin (PS-Nupes, Finistère), dès le début de la séance, alors que la députée soulignait que les établissements hospitaliers subissaient de surcroît "une hémorragie de démissions qui aggrave ces difficultés".

Elle a par ailleurs critiqué les recommandations formulées par la mission flash sur les urgences et les soins non programmés conduite par François Braun avant son entrée au gouvernement (cf dépêche du 01/07/2022 à 20:27, dépêche du 11/07/2022 à 18:43 et dépêche du 12/07/2022 à 12:50), en estimant que celles-ci ne constituaient "pas une réponse aux crises que vont subir les urgences cet été".

La députée du Finistère s'est notamment fait l'écho des difficultés rencontrées par le centre hospitalier (CH) de Carhaix, "menacé comme tous les hôpitaux en zone rurale".

Le député de la majorité présidentielle Jérémie Patrier Leitus (Horizon-Ensemble, Calvados) s'est lui aussi interrogé sur la "capacité des services d'urgence à assurer une prise en charge sûre et de qualité cet été", en se demandant si "les mesures qui seront appliquées" seront suffisantes pour soutenir les "services d'urgence et [les] personnels mobilisés".

Il a notamment cité le CH de Lisieux, dont les urgences avaient fermé pendant trois semaines de nuit en août 2021 et dont les urgences pédiatriques ferment à nouveau "de 8h à 8h" ce mardi soir, mais aussi le cas du CHU de Nice, contraint de restreindre l'accès à ses urgences depuis lundi soir, faute de personnel en nombre suffisant (cf dépêche du 12/07/2022 à 18:09).

Face à ces critiques et ces craintes, le ministre de la santé et la prévention a reconnu une situation difficile mais a défendu son approche: "Ce ne sont pas des solutions qui vont résoudre tous les problèmes du système de santé, ni même de l'hôpital […], ce sont des solutions qui [...] s'appellent du damage control, pour arrêter l'hémorragie avant de soigner réellement le patient."

François Braun défend son approche

"Ma mission en tant que ministre de la santé, en tant que médecin, c'est de permettre à chaque Français d'être pris en charge correctement, de façon adéquate, lorsque cela est nécessaire", a-t-il assuré, s'empressant d'ajouter que "de façon adéquate, ça ne veut pas dire tout systématiquement dans un service d'urgence".

"Nos services d'urgence font face à une tension qui a des raisons multiples", a poursuivi François Braun, en citant une "mauvaise articulation entre la ville et l'hôpital", une "démographie médicale inadaptée", des "soignants mobilisés pendant deux ans et demi pendant cette crise et maintenant épuisés".

"Les propositions qui ont été déclinées reposent sur la responsabilité de chacun d'entre nous", a-t-il enchaîné avant d'égrener plusieurs de ces mesures: "En appelant le 15 avant de se déplacer aux urgences, en étant réorienté en se présentant dans un service d'urgence vers une solution plus adaptée, en jouant sur la disponibilité des professionnels avec des mesures d'attractivité et, pour la première fois, la reconnaissance de la notion de pénibilité du travail de nuit, enfin une meilleure coordination entre la ville et l'hôpital."

"Les urgences vitales sont et seront toujours assurées sur tout le territoire", a assuré le ministre sous les protestations issues des deux extrêmes de l'hémicycle. "Il est hors de question de dégrader la prise en charge des urgences de nos citoyens qui en ont le plus besoin."

Nicolas Sansu (GDR-Nupes, Cher), qui interrogeait la première ministre, Elisabeth Borne, a mentionné "plus de 120" services d'urgence "en souffrance" et la fermeture de "milliers de lits" cet été, sans préciser s'il évoquait les fermetures estivales habituelles en période de congés, ou des fermetures faute de personnel.

Il a aussi cité les difficultés de maternités comme celle d'Orléans (cf dépêche du 05/07/2022 à 09:37), et des parturientes obligées de parcourir "50, voire 80 kilomètres faute de personnel soignant", pour accoucher.

"Face à cette situation critique, vos réponses valident une rupture du service public, en normalisant le fonctionnement en mode dégradé des urgences la nuit, voire même en incitant à leur fermeture au nom d'une mutualisation de moyens. Les inégalités territoriales vont ainsi s'accentuer", a-t-il attaqué.

Une pique pour les Smur paramédicaux

"Comment accepter que des équipes d'urgence partent sans médecin? Comment accepter qu'une femme n'accouche pas là où elle s'est préparée? Comment affirmer que la solution serait de faire appel à la médecine de ville alors même que la désertification médicale avance inexorablement? Comment accepter le versement de primes de 3.000 voire 5.000 euros à des personnels soignants pour l'été, provoquant division et dégoût parmi les anciens qui n'y auraient pas droit?", a questionné Nicolas Sansu. "Comment comprendre votre inflexibilité pour ne pas réintégrer tous les soignants dont nous avons besoin?"

Le député a appelé à la revalorisation significative des rémunérations des soignants, à l'encadrement strict de l'intérim, à la "mise en place d'un véritable plan équilibré de structuration de l'hôpital public avec les moyens afférents".

Au contraire, Jean-François Rousset (Renaissance, Aveyron) a sans surprise salué l'action politique des cinq dernières années mais a déploré les difficultés actuelles du système, plaçant ses espoirs dans les concertations à venir et demandant au ministre d'exposer ses priorités.

"Nous pourrons, avec des oppositions responsables, bâtir les compromis nécessaires pour l'intérêt supérieur de la nation et la santé de nos concitoyens" a notamment répondu le ministre.

Passer d'un système d'offre de soins à une réponse aux besoins de santé

"Démographie médicale inadaptée, gestion par les coûts et non par les besoins, perte de sens et d'attractivité pour certains métiers, autant de défis auxquels j'ai déjà commencé à m'atteler", a-t-il ajouté, rappelant vouloir passer d'un "système basé sur l'offre" à un système "dont la seule finalité doit être la réponse aux besoins de santé de nos concitoyens".

"Nous réparerons notre système de santé, nous le rendrons plus humain, nous le rendrons plus efficace", a-t-il assuré, la première étape étant la "conférence des parties prenantes" à venir (cf dépêche du 06/07/2022 à 19:13).

"Je n'entends pas, depuis mon bureau du ministère, dire à chacun ce qu'il doit faire", a-t-il déclaré.

François Braun a par ailleurs été interrogé par Bénédicte Auzanot (RN, Vaucluse) sur la perspective d'une réintégration des soignants non vaccinés. Le ministre lui a répondu que de nouveaux développements seraient possibles à l'automne, comme indiqué la veille dans le cadre de la discussion générale sur le projet de loi de veille et de sécurité sanitaire en matière de lutte contre la Covid-19 (cf dépêche du 12/07/2022 à 11:51).

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