Actualités de l'Urgence - APM

03/09 2019
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LES PREMIÈRES ANNONCES SUR LES URGENCES SUSCITENT DES RÉACTIONS TRÈS PARTAGÉES

PARIS, 3 septembre 2019 (APMnews) - Les premières décisions prises pour désengorger les urgences, annoncées lundi soir par la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, suscitent des réactions très partagées, la Société française de la médecine d'urgence (SFMU) et Samu-Urgences de France se déclarant optimistes, tandis que le collectif Inter-urgences et plusieurs syndicats déplorent un manque de réponses à leurs revendications.

La ministre des solidarités et de la santé a dévoilé lundi, à l'occasion d'un déplacement au CHU de Poitiers, une première série de mesures pour désengorger les urgences hospitalières, à la suite de la mission confiée au député Thomas Mesnier et au Pr Pierre Carli, rappelle-t-on (cf dépêche du 03/09/2019 à 09:32). La ministre doit recevoir les acteurs hospitaliers et libéraux lundi 9 septembre pour compléter et formaliser ces décisions.

Avec ces annonces, "on a une batterie de mesures qui s’intéressent non pas spécifiquement aux services d’urgence, où on a toujours dit que c'était le symptôme de la maladie et pas la maladie, mais qui s’intéressent bien à l’amont et à l’aval", a réagi François Braun, président de Samu-Urgences de France (SUdF), contacté mardi par APMnews.

"A l’amont en renforçant le rôle de la plateforme de régulation médicale du Samu, en aval en donnant la possibilité de faire des entrées directes, déjà pour les personnes âgées, mais on espère pour d’autres types de patients", a-t-il poursuivi. "Et puis à l’intérieur des urgences en nous donnant de l’air avec la mise en place des infirmières en pratique avancée".

"Il faut qu’on avance sur la régulation médicale préalable", a ajouté le président de SUdF, "en mettant au même endroit et sous un numéro unique la régulation de l’aide médicale urgente et de la permanence des soins".

François Braun a également insisté sur la nécessité d’approfondir la "gestion de l’aval", en ne se contentant "pas seulement des entrées directes pour les personnes âgées" mais en travaillant plus globalement sur "la notion du besoin journalier minimum en lits".

Alors que son syndicat a cosigné un communiqué de soutien au mouvement du Collectif Inter-urgences, le président de SUdF a nuancé sa position: "on est solidaire de l’ensemble des syndicats hospitaliers qui poussent pour une attractivité des carrières à l’hôpital, qu’elles soient médicales ou paramédicales, mais on ne partage pas forcément toutes les demandes et tous les points de vue".

Contactée mardi par APMnews, la présidente de la Société française de médecine d'urgence (SFMU) a également estimé que ces premières annonces "vont dans le bon sens".

"[La ministre] a bien compris la problématique, [elle] s’appuie sur des exemples concrets qui marchent", a-t-elle commenté. La présidente de la SFMU a également appelé à la création d’un "numéro d’appel santé avec une plateforme unique qui soit le pivot d’orientation du besoin de santé urgent".

Elle a souligné qu’un travail devrait également être mené sur la démographie médicale "car la qualité des soins passe par la qualité de vie au travail".

La présidente de la SFMU a également salué "la création d'infirmiers en pratique avancée 'urgences'", mais en s’inscrivant en faux sur la volonté d’inclure la possibilité de réaliser "un diagnostic à l'aide d'un algorithme" dans ce cadre. "Le diagnostic médical relève d’un médecin, c’est là où il y a un risque et la SMFU sera extrêmement vigilante là-dessus", a-t-elle prévenu.

La déception est en revanche de mise au sein du collectif Inter-urgences, qui déplore de ne pas être entendu sur ses revendications portant sur le renforcement des effectifs et du nombre de lits d'aval.

"Les bed managers et les filières courtes gériatriques existent déjà, mais si la question des lits est niée, ça n'avancera pas", a déploré Hugo Huon, président du collectif, interrogé mardi par APMnews. Il est prévu "une réorganisation des urgences à moyens constants, mais on ne peut pas opposer organisation et moyens".

Quid des lits en gériatrie?

Le collectif a également relevé d'autres "points d'achoppement" avec le contenu des propositions de Thomas Mesnier et Pierre Carli, qui ont reçu cinq de ses représentants mardi matin dans le cadre de leur mission.

"Le médico-social et le social ne sont pas abordés, on le dénonce car la pauvreté, l'isolement, augmentent les passages aux urgences", a précisé Hugo Huon.

Sur l'attractivité des professions, les chargés de mission "pensent que les protocoles de coopération ou la refonte du référentiel des aides-soignants vont suffire. Il y a une négation du mal-être et de la pénibilité du travail, ils sont fermés à l'idée d'une augmentation de salaire et des effectifs".

La question des infirmiers en pratique avancée (IPA) aux urgences doit également être affinée, selon lui. Il n'y a "pas un problème de compétences aux urgences, mais un problème de désorganisation du système, il faut des IPA de soins primaires qui vont suppléer des généralistes", a plaidé Hugon Huon, craignant de voir des infirmiers "aux compétences élargies" mais "ne nécessitant pas deux ans de formation".

Dans un communiqué de mardi, l'Union nationale des infirmiers de pratique avancée (Unipa) "se réjouit que les propositions qu’elle a faites le 27 août, à la table ronde de la mission 'Urgences', aient été entendues". Mais "pour que l’implantation des IPA réussisse, le gouvernement doit lui en donner les moyens. Pour le moment, les IPA diplômés depuis juillet 2019 ne connaissent toujours pas le modèle économique de leur exercice", observe l'organisation.

Le collectif Inter-urgences tient sa prochaine assemblée générale mardi 10 septembre. Plusieurs organisations, dont le collectif le "Printemps de la psychiatrie", l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf), le Syndicat national des médecins hospitaliers (SNMH)-FO, Action praticiens hôpital (APH), Jeunes médecins, Samu-Urgences de France et le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes réanimateurs élargi (SNPHAR-E), ont appelé les médecins à y participer.

La CGT Santé et action sociale a, pour sa part, appelé à la grève et à des manifestations mercredi 11 septembre, à Paris et en régions.

La ministre "ne propose pas plus de lits mais plus d'organisation", a regretté Christophe Prudhomme, porte-parole de l'Amuf et représentant de la CGT Santé et action sociale. Or "fonctionner à flux tendu est en contradiction avec le fonctionnement de l'hôpital", c'est "inacceptable pour le personnel comme pour les patients".

"On a besoin de mesures d'urgence, de desserrer la contrainte budgétaire sur les hôpitaux, après on discute de mesures de réorganisation qui n'auront des effets que dans deux, trois ans", a-t-il défendu.

La vidéo-assistance de la régulation médicale des Samu, à destination des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), ne lui paraît pas non plus être une réponse suffisante. "Si vous faites une prescription en télémédecine, si vous n'avez pas d'infirmière pour l'appliquer, ça ne sert à rien", a-t-il critiqué, rappelant la revendication de l'intersyndicale du secteur de l'aide aux personnes âgées et de l'Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA) de créer 40.000 pour ce secteur.

"Dans 8 cas sur 10, les personnes âgées n'ont rien à faire à l'hôpital, et elles resteraient dans les Ehpad si les infirmiers et les médecins y étaient en nombre suffisant", a pointé Christophe Prudhomme.

Olivier Varnet, secrétaire général du SNMH-FO, partage le même constat. "C'est parce qu'il manque de personnel dans les Ehpad que la ministre propose cette mesure, c'est scandaleux", a-t-il commenté. Par ailleurs, Agnès Buzyn "n'a pas dit qu'il n'y aurait plus de fermeture de lits", a-t-il renchéri. "Quand il y a des lits en gériatrie, [les services] prennent [les patients]."

L'accès direct en médecine, "ça fait des années qu'on essaie de faire ça, mais pour cela, il faudrait qu'il y ait suffisamment de lits en médecine de gériatrie aiguë", a abondé Renaud Péquignot, vice-président d'APH, également sollicité mardi. Il a dénoncé "un écran de fumée" qui "va faire monter l'exaspération".

"Nous attendons la reprise du groupe de travail sur l'évolution du statut des praticiens hospitaliers", a-t-il pointé par ailleurs. Celui-ci avait été interrompu avant les élections professionnelles des personnels paramédicaux. Les syndicats espèrent y faire entendre leur demande de revalorisation salariale. "On n'arrive plus à recruter", a-t-il souligné.

gl-mlb/ab/APMnews

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PARIS, 3 septembre 2019 (APMnews) - Les premières décisions prises pour désengorger les urgences, annoncées lundi soir par la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, suscitent des réactions très partagées, la Société française de la médecine d'urgence (SFMU) et Samu-Urgences de France se déclarant optimistes, tandis que le collectif Inter-urgences et plusieurs syndicats déplorent un manque de réponses à leurs revendications.

La ministre des solidarités et de la santé a dévoilé lundi, à l'occasion d'un déplacement au CHU de Poitiers, une première série de mesures pour désengorger les urgences hospitalières, à la suite de la mission confiée au député Thomas Mesnier et au Pr Pierre Carli, rappelle-t-on (cf dépêche du 03/09/2019 à 09:32). La ministre doit recevoir les acteurs hospitaliers et libéraux lundi 9 septembre pour compléter et formaliser ces décisions.

Avec ces annonces, "on a une batterie de mesures qui s’intéressent non pas spécifiquement aux services d’urgence, où on a toujours dit que c'était le symptôme de la maladie et pas la maladie, mais qui s’intéressent bien à l’amont et à l’aval", a réagi François Braun, président de Samu-Urgences de France (SUdF), contacté mardi par APMnews.

"A l’amont en renforçant le rôle de la plateforme de régulation médicale du Samu, en aval en donnant la possibilité de faire des entrées directes, déjà pour les personnes âgées, mais on espère pour d’autres types de patients", a-t-il poursuivi. "Et puis à l’intérieur des urgences en nous donnant de l’air avec la mise en place des infirmières en pratique avancée".

"Il faut qu’on avance sur la régulation médicale préalable", a ajouté le président de SUdF, "en mettant au même endroit et sous un numéro unique la régulation de l’aide médicale urgente et de la permanence des soins".

François Braun a également insisté sur la nécessité d’approfondir la "gestion de l’aval", en ne se contentant "pas seulement des entrées directes pour les personnes âgées" mais en travaillant plus globalement sur "la notion du besoin journalier minimum en lits".

Alors que son syndicat a cosigné un communiqué de soutien au mouvement du Collectif Inter-urgences, le président de SUdF a nuancé sa position: "on est solidaire de l’ensemble des syndicats hospitaliers qui poussent pour une attractivité des carrières à l’hôpital, qu’elles soient médicales ou paramédicales, mais on ne partage pas forcément toutes les demandes et tous les points de vue".

Contactée mardi par APMnews, la présidente de la Société française de médecine d'urgence (SFMU) a également estimé que ces premières annonces "vont dans le bon sens".

"[La ministre] a bien compris la problématique, [elle] s’appuie sur des exemples concrets qui marchent", a-t-elle commenté. La présidente de la SFMU a également appelé à la création d’un "numéro d’appel santé avec une plateforme unique qui soit le pivot d’orientation du besoin de santé urgent".

Elle a souligné qu’un travail devrait également être mené sur la démographie médicale "car la qualité des soins passe par la qualité de vie au travail".

La présidente de la SFMU a également salué "la création d'infirmiers en pratique avancée 'urgences'", mais en s’inscrivant en faux sur la volonté d’inclure la possibilité de réaliser "un diagnostic à l'aide d'un algorithme" dans ce cadre. "Le diagnostic médical relève d’un médecin, c’est là où il y a un risque et la SMFU sera extrêmement vigilante là-dessus", a-t-elle prévenu.

La déception est en revanche de mise au sein du collectif Inter-urgences, qui déplore de ne pas être entendu sur ses revendications portant sur le renforcement des effectifs et du nombre de lits d'aval.

"Les bed managers et les filières courtes gériatriques existent déjà, mais si la question des lits est niée, ça n'avancera pas", a déploré Hugo Huon, président du collectif, interrogé mardi par APMnews. Il est prévu "une réorganisation des urgences à moyens constants, mais on ne peut pas opposer organisation et moyens".

Quid des lits en gériatrie?

Le collectif a également relevé d'autres "points d'achoppement" avec le contenu des propositions de Thomas Mesnier et Pierre Carli, qui ont reçu cinq de ses représentants mardi matin dans le cadre de leur mission.

"Le médico-social et le social ne sont pas abordés, on le dénonce car la pauvreté, l'isolement, augmentent les passages aux urgences", a précisé Hugo Huon.

Sur l'attractivité des professions, les chargés de mission "pensent que les protocoles de coopération ou la refonte du référentiel des aides-soignants vont suffire. Il y a une négation du mal-être et de la pénibilité du travail, ils sont fermés à l'idée d'une augmentation de salaire et des effectifs".

La question des infirmiers en pratique avancée (IPA) aux urgences doit également être affinée, selon lui. Il n'y a "pas un problème de compétences aux urgences, mais un problème de désorganisation du système, il faut des IPA de soins primaires qui vont suppléer des généralistes", a plaidé Hugon Huon, craignant de voir des infirmiers "aux compétences élargies" mais "ne nécessitant pas deux ans de formation".

Dans un communiqué de mardi, l'Union nationale des infirmiers de pratique avancée (Unipa) "se réjouit que les propositions qu’elle a faites le 27 août, à la table ronde de la mission 'Urgences', aient été entendues". Mais "pour que l’implantation des IPA réussisse, le gouvernement doit lui en donner les moyens. Pour le moment, les IPA diplômés depuis juillet 2019 ne connaissent toujours pas le modèle économique de leur exercice", observe l'organisation.

Le collectif Inter-urgences tient sa prochaine assemblée générale mardi 10 septembre. Plusieurs organisations, dont le collectif le "Printemps de la psychiatrie", l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf), le Syndicat national des médecins hospitaliers (SNMH)-FO, Action praticiens hôpital (APH), Jeunes médecins, Samu-Urgences de France et le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes réanimateurs élargi (SNPHAR-E), ont appelé les médecins à y participer.

La CGT Santé et action sociale a, pour sa part, appelé à la grève et à des manifestations mercredi 11 septembre, à Paris et en régions.

La ministre "ne propose pas plus de lits mais plus d'organisation", a regretté Christophe Prudhomme, porte-parole de l'Amuf et représentant de la CGT Santé et action sociale. Or "fonctionner à flux tendu est en contradiction avec le fonctionnement de l'hôpital", c'est "inacceptable pour le personnel comme pour les patients".

"On a besoin de mesures d'urgence, de desserrer la contrainte budgétaire sur les hôpitaux, après on discute de mesures de réorganisation qui n'auront des effets que dans deux, trois ans", a-t-il défendu.

La vidéo-assistance de la régulation médicale des Samu, à destination des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), ne lui paraît pas non plus être une réponse suffisante. "Si vous faites une prescription en télémédecine, si vous n'avez pas d'infirmière pour l'appliquer, ça ne sert à rien", a-t-il critiqué, rappelant la revendication de l'intersyndicale du secteur de l'aide aux personnes âgées et de l'Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA) de créer 40.000 pour ce secteur.

"Dans 8 cas sur 10, les personnes âgées n'ont rien à faire à l'hôpital, et elles resteraient dans les Ehpad si les infirmiers et les médecins y étaient en nombre suffisant", a pointé Christophe Prudhomme.

Olivier Varnet, secrétaire général du SNMH-FO, partage le même constat. "C'est parce qu'il manque de personnel dans les Ehpad que la ministre propose cette mesure, c'est scandaleux", a-t-il commenté. Par ailleurs, Agnès Buzyn "n'a pas dit qu'il n'y aurait plus de fermeture de lits", a-t-il renchéri. "Quand il y a des lits en gériatrie, [les services] prennent [les patients]."

L'accès direct en médecine, "ça fait des années qu'on essaie de faire ça, mais pour cela, il faudrait qu'il y ait suffisamment de lits en médecine de gériatrie aiguë", a abondé Renaud Péquignot, vice-président d'APH, également sollicité mardi. Il a dénoncé "un écran de fumée" qui "va faire monter l'exaspération".

"Nous attendons la reprise du groupe de travail sur l'évolution du statut des praticiens hospitaliers", a-t-il pointé par ailleurs. Celui-ci avait été interrompu avant les élections professionnelles des personnels paramédicaux. Les syndicats espèrent y faire entendre leur demande de revalorisation salariale. "On n'arrive plus à recruter", a-t-il souligné.

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