Actualités de l'Urgence - APM

24/11 2021
Retour

URGENCES DÉBORDÉES DANS UN CONTEXTE MULTI-ÉPIDÉMIQUE: LE CHU DE RENNES EN APPELLE À LA POPULATION

RENNES, 24 novembre 2021 (APMnews) - Face à la flambée des hospitalisations pour Covid-19 et à la forte augmentation des passages aux urgences dans un contexte multi-épidémique, le CHU de Rennes a appelé la population à recourir à la régulation avant de venir aux urgences et à s'engager sur le respect des gestes barrières, mercredi lors d'une conférence de presse.

Face à l'augmentation du niveau d'activité d'accueil des urgences adultes et à la forte reprise de l'admission de patients Covid, dans un contexte de tension sur les ressources humaines déjà très largement mobilisées d'une part, et de saturation des capacités d'hospitalisation d'autre part, le CHU de Rennes a déclenché son plan blanc vendredi (niveau 2 de son plan de mobilisation interne), rappelle-t-on (cf dépêche du 22/11/2021 à 18:36).

La directrice générale, Véronique Anatole-Touzet, a souligné une "dégradation majeure" sur le plan épidémique avec un taux d'incidence du Covid-19 qui a plus que doublé à Rennes Métropole. Le taux d'incidence était mardi (sur 7 jours glissants) de 179 cas pour 100.000 (140,6 en Bretagne et 164,9 en Ille-et-Vilaine).

"En 15 jours, le nombre de cas Covid a été multiplié par deux et nous avons aujourd'hui 50 patients Covid hospitalisés (contre 22 le 10 novembre) dont 16 en soins critiques (13 en réanimation, et 3 en soins continus), 29 en médecine, 4 en SSR [soins de suite et de réadaptation], et un en USLD [unité de soins longue durée]", a-t-elle décrit.

Face à cette "flambée épidémique", le CHU de Rennes a mobilisé son plan réanimation (niveau 2bis) pour passer de 65 à 69 lits de réanimation (dont 16 pour le Covid). L'activité des blocs opératoires a été diminuée en raison d'une pénurie d'anesthésistes, des blocs de chirurgie cardiaque sont mobilisés pour la réanimation Covid et en médecine, les capacités sont augmentées.

"Cela pourrait conduire à des reports de prise en charge", a-t-elle pointé.

La très forte tension que connaissent les urgences a aussi motivé le déclenchement du plan blanc avec une hausse en particulier depuis septembre de près de 20% des passages aux urgences par rapport à 2019, malgré le plan de soutien massif mis en place ces dernières années et malgré de nouveaux renforts (+12 équivalents temps plein -ETP- aux urgences en infirmières, aides-soignants, brancardiers). Le nombre de passages aux urgences grimpe à 180 par jour avec des pics à 200 au lieu de 165.

Il persiste des difficultés d'aval malgré une augmentation de 100 lits de médecine en 5 ans en post-urgences. "Nous avons toujours besoin de lits d'aval de médecine polyvalents", a constaté la DG.

Malgré les tensions importantes sur le plan des ressources humaines, le CHU n'a procédé à ce jour à aucune fermeture de lits, a-t-elle précisé.

Les équipes travaillent pour arriver à augmenter le nombre de lits d'aval en médecine, notamment avec la chirurgie de l'hôpital Sud.

S'y ajoute une flambée aux urgences pédiatriques notamment due aux problématiques pédopsychiatriques très fortes qui crée une pression sur les lits et l'épidémie de bronchiolite.

La DG espère éviter les déprogrammations. L'unité hivernale a été mobilisée.

"Les messages, c'est en premier lieu pour la population d'appeler le 15 avant de venir aux urgences et quand vous le pouvez, faites appel à votre médecin traitant en priorité. C'est fondamental pour diminuer la pression sur le CHU", a déclaré Véronique Anatole-Touzet.

Elle a aussi encouragé à la vaccination contre le Covid et à faire sa dose de rappel pour ceux qui ont déjà été vaccinés.

Elle a aussi souligné la mobilisation territoriale, tout juste sortie d'une réunion avec tous les établissements du territoire. Les réunions de coordination territoriale en lien avec l'agence régionale de santé (ARS) ont repris afin de mobiliser l'ensemble des établissements du territoire.

"Ils sont tous en difficulté de recrutement. Il nous faut trouver des ressources en médecins, infirmiers, aides-soignants pour faire face à cette hausse d'activité", a-t-elle estimé.

"Malgré les mesures du Ségur, nous sommes tous en tension, sans parler de l'épuisement général des équipes par ces deux années de pression sur l'activité hospitalière", a-t-elle commenté.

Elle a aussi évoqué les clusters (2 en ce moment au CHU) et l'impact des classes fermées sur le personnel.

"Nous avons un contexte épidémique au sens pluriel avec une reprise Covid au démarrage fulgurant, des bronchiolites en pédiatrie arrivées plus tôt que d'habitude et la grippe", a expliqué le Pr Jean-Yves Gauvrit, président de la commission médicale d'établissement (CME).

À cela s'ajoute l'augmentation massive des patients aux urgences depuis fin août-début septembre dont une grande partie a des maladies graves qui nécessitent une hospitalisation.

Le Pr Gauvrit a rappelé que le variant delta est beaucoup plus contagieux. "Les solutions que nous mettons en place depuis 18 mois, c'est de plus en plus difficile de le faire", a-t-il noté.

Il a appelé "à une réponse collective". "Nous alertons la population sur le contexte sanitaire et sur la gestion des arrivées aux urgences", a-t-il indiqué.

"C'est la première fois que nous avons le variant delta en hiver", a pointé le Pr Pierre Tattevin, chef de service des maladies infectieuses. En réanimation, la moitié des patients ne sont pas vaccinés et l'autre moitié est au moment où elle devrait avoir le rappel (5-7 mois). La "note d'espoir", c'est d'arriver à ce que les rappels puissent atténuer l'épidémie. Il a aussi rappelé l'importance des gestes barrières: le relâchement n'était pas trop gênant pendant l'été, mais avec le froid, c'est différent.

Une hausse d'activité multifactorielle

La forte hausse d'activité aux urgences s'explique par plusieurs facteurs: la rentrée des scolaires et des universitaires avec des jeunes qui n'ont pas de médecin traitant, le report d'activité, l'impact de fermetures dans d'autres établissements (les urgences d'un CH voisin fermées depuis 12 mois, d'autres de façon ponctuelle), un transfert de la médecine générale elle-même saturée du fait de son implication dans la vaccination et de son activité, des difficultés d'aval, a détaillé le Pr Louis Soulat, chef de service Samu-Smur-urgences adultes.

Il a regretté "les patients sur les brancards" quand il y a un pic à 120 patients aux urgences et a partagé son inquiétude pour les semaines qui viennent.

Encourager la population à passer la régulation est d'autant plus judicieux qu'il y a une expérimentation de service d'accès aux soins (SAS) dont la mission est d'organiser les parcours et d'éviter les passages aux urgences non justifiés.

Le Dr Amélie Ryckewaert, pédiatre aux urgences pédiatriques, a rapporté une hausse d'activité de 30% en octobre par rapport à la même période en 2019 (et +16% en septembre). Elle a encouragé à la prévention: "un bébé de moins de 6 mois n'a pas à passer de bras en bras et à recevoir des bisous de personnes malades". Elle a rappelé la baisse des bronchiolites en 2020 quand les gestes barrières étaient bien appliqués et avec le confinement. "Si on s'y met tous, on peut ralentir l'épidémie de bronchiolite" et les hospitalisations des bébés, a-t-elle encouragé.

Elle a aussi cité les gastro-entérites qui arrivent et la hausse d'activité qui découle de la crise avec "des adolescents qui vont mal" et qui ont des difficultés à accéder aux soins.

Un problème majeur de recrutement

Interrogée sur la grève des soignants qui a débuté depuis 10 jours au service des urgences, Véronique Anatole-Touzet a indiqué que des discussions étaient en cours.

Au-delà des renforts réalisés (médicaux et paramédicaux), "nous sommes aujourd'hui dans l'incapacité de recruter. Le développement de la réanimation Covid s'est fait sans renfort de soignants. Nous avons 30 postes infirmiers et aides-soignants vacants sur le CHU. C'est assez peu par rapport à d'autres. Mais nous ne trouvons plus de ressources. Nous allons faire appel à la réserve sanitaire."

"Notre grosse difficulté aujourd'hui ce n'est pas un problème budgétaire mais de ressources humaines, et ce dans tous les CHU", a-t-elle développé.

De même, les établissements du territoire rencontrent la même difficulté et cela empêche d'ouvrir des lits supplémentaires, notamment avec la clinique de la Sagesse et l'Hôpital privé Saint-Grégoire, a-t-elle cité.

"Le problème de recrutement, c'est la clef du sujet", a-t-elle insisté. "Et encore une fois nous sommes un CHU plus protégé que d'autres sur cette question et le taux d'absentéisme est de 6%, un des plus bas des CHU de France. Le personnel travaille", a-t-elle ajouté.

sl/ab/APMnews

Les données APM Santé sont la propriété de APM International. Toute copie, republication ou redistribution des données APM Santé, notamment via la mise en antémémoire, l'encadrement ou des moyens similaires, est expressément interdite sans l'accord préalable écrit de APM. APM ne sera pas responsable des erreurs ou des retards dans les données ou de toutes actions entreprises en fonction de celles-ci ou toutes décisions prises sur la base du service. APM, APM Santé et le logo APM International, sont des marques d'APM International dans le monde. Pour de plus amples informations sur les autres services d'APM, veuillez consulter le site Web public d'APM à l'adresse www.apmnews.com

Copyright © APM-Santé - Tous droits réservés.

Informations professionnelles

24/11 2021
Retour

URGENCES DÉBORDÉES DANS UN CONTEXTE MULTI-ÉPIDÉMIQUE: LE CHU DE RENNES EN APPELLE À LA POPULATION

RENNES, 24 novembre 2021 (APMnews) - Face à la flambée des hospitalisations pour Covid-19 et à la forte augmentation des passages aux urgences dans un contexte multi-épidémique, le CHU de Rennes a appelé la population à recourir à la régulation avant de venir aux urgences et à s'engager sur le respect des gestes barrières, mercredi lors d'une conférence de presse.

Face à l'augmentation du niveau d'activité d'accueil des urgences adultes et à la forte reprise de l'admission de patients Covid, dans un contexte de tension sur les ressources humaines déjà très largement mobilisées d'une part, et de saturation des capacités d'hospitalisation d'autre part, le CHU de Rennes a déclenché son plan blanc vendredi (niveau 2 de son plan de mobilisation interne), rappelle-t-on (cf dépêche du 22/11/2021 à 18:36).

La directrice générale, Véronique Anatole-Touzet, a souligné une "dégradation majeure" sur le plan épidémique avec un taux d'incidence du Covid-19 qui a plus que doublé à Rennes Métropole. Le taux d'incidence était mardi (sur 7 jours glissants) de 179 cas pour 100.000 (140,6 en Bretagne et 164,9 en Ille-et-Vilaine).

"En 15 jours, le nombre de cas Covid a été multiplié par deux et nous avons aujourd'hui 50 patients Covid hospitalisés (contre 22 le 10 novembre) dont 16 en soins critiques (13 en réanimation, et 3 en soins continus), 29 en médecine, 4 en SSR [soins de suite et de réadaptation], et un en USLD [unité de soins longue durée]", a-t-elle décrit.

Face à cette "flambée épidémique", le CHU de Rennes a mobilisé son plan réanimation (niveau 2bis) pour passer de 65 à 69 lits de réanimation (dont 16 pour le Covid). L'activité des blocs opératoires a été diminuée en raison d'une pénurie d'anesthésistes, des blocs de chirurgie cardiaque sont mobilisés pour la réanimation Covid et en médecine, les capacités sont augmentées.

"Cela pourrait conduire à des reports de prise en charge", a-t-elle pointé.

La très forte tension que connaissent les urgences a aussi motivé le déclenchement du plan blanc avec une hausse en particulier depuis septembre de près de 20% des passages aux urgences par rapport à 2019, malgré le plan de soutien massif mis en place ces dernières années et malgré de nouveaux renforts (+12 équivalents temps plein -ETP- aux urgences en infirmières, aides-soignants, brancardiers). Le nombre de passages aux urgences grimpe à 180 par jour avec des pics à 200 au lieu de 165.

Il persiste des difficultés d'aval malgré une augmentation de 100 lits de médecine en 5 ans en post-urgences. "Nous avons toujours besoin de lits d'aval de médecine polyvalents", a constaté la DG.

Malgré les tensions importantes sur le plan des ressources humaines, le CHU n'a procédé à ce jour à aucune fermeture de lits, a-t-elle précisé.

Les équipes travaillent pour arriver à augmenter le nombre de lits d'aval en médecine, notamment avec la chirurgie de l'hôpital Sud.

S'y ajoute une flambée aux urgences pédiatriques notamment due aux problématiques pédopsychiatriques très fortes qui crée une pression sur les lits et l'épidémie de bronchiolite.

La DG espère éviter les déprogrammations. L'unité hivernale a été mobilisée.

"Les messages, c'est en premier lieu pour la population d'appeler le 15 avant de venir aux urgences et quand vous le pouvez, faites appel à votre médecin traitant en priorité. C'est fondamental pour diminuer la pression sur le CHU", a déclaré Véronique Anatole-Touzet.

Elle a aussi encouragé à la vaccination contre le Covid et à faire sa dose de rappel pour ceux qui ont déjà été vaccinés.

Elle a aussi souligné la mobilisation territoriale, tout juste sortie d'une réunion avec tous les établissements du territoire. Les réunions de coordination territoriale en lien avec l'agence régionale de santé (ARS) ont repris afin de mobiliser l'ensemble des établissements du territoire.

"Ils sont tous en difficulté de recrutement. Il nous faut trouver des ressources en médecins, infirmiers, aides-soignants pour faire face à cette hausse d'activité", a-t-elle estimé.

"Malgré les mesures du Ségur, nous sommes tous en tension, sans parler de l'épuisement général des équipes par ces deux années de pression sur l'activité hospitalière", a-t-elle commenté.

Elle a aussi évoqué les clusters (2 en ce moment au CHU) et l'impact des classes fermées sur le personnel.

"Nous avons un contexte épidémique au sens pluriel avec une reprise Covid au démarrage fulgurant, des bronchiolites en pédiatrie arrivées plus tôt que d'habitude et la grippe", a expliqué le Pr Jean-Yves Gauvrit, président de la commission médicale d'établissement (CME).

À cela s'ajoute l'augmentation massive des patients aux urgences depuis fin août-début septembre dont une grande partie a des maladies graves qui nécessitent une hospitalisation.

Le Pr Gauvrit a rappelé que le variant delta est beaucoup plus contagieux. "Les solutions que nous mettons en place depuis 18 mois, c'est de plus en plus difficile de le faire", a-t-il noté.

Il a appelé "à une réponse collective". "Nous alertons la population sur le contexte sanitaire et sur la gestion des arrivées aux urgences", a-t-il indiqué.

"C'est la première fois que nous avons le variant delta en hiver", a pointé le Pr Pierre Tattevin, chef de service des maladies infectieuses. En réanimation, la moitié des patients ne sont pas vaccinés et l'autre moitié est au moment où elle devrait avoir le rappel (5-7 mois). La "note d'espoir", c'est d'arriver à ce que les rappels puissent atténuer l'épidémie. Il a aussi rappelé l'importance des gestes barrières: le relâchement n'était pas trop gênant pendant l'été, mais avec le froid, c'est différent.

Une hausse d'activité multifactorielle

La forte hausse d'activité aux urgences s'explique par plusieurs facteurs: la rentrée des scolaires et des universitaires avec des jeunes qui n'ont pas de médecin traitant, le report d'activité, l'impact de fermetures dans d'autres établissements (les urgences d'un CH voisin fermées depuis 12 mois, d'autres de façon ponctuelle), un transfert de la médecine générale elle-même saturée du fait de son implication dans la vaccination et de son activité, des difficultés d'aval, a détaillé le Pr Louis Soulat, chef de service Samu-Smur-urgences adultes.

Il a regretté "les patients sur les brancards" quand il y a un pic à 120 patients aux urgences et a partagé son inquiétude pour les semaines qui viennent.

Encourager la population à passer la régulation est d'autant plus judicieux qu'il y a une expérimentation de service d'accès aux soins (SAS) dont la mission est d'organiser les parcours et d'éviter les passages aux urgences non justifiés.

Le Dr Amélie Ryckewaert, pédiatre aux urgences pédiatriques, a rapporté une hausse d'activité de 30% en octobre par rapport à la même période en 2019 (et +16% en septembre). Elle a encouragé à la prévention: "un bébé de moins de 6 mois n'a pas à passer de bras en bras et à recevoir des bisous de personnes malades". Elle a rappelé la baisse des bronchiolites en 2020 quand les gestes barrières étaient bien appliqués et avec le confinement. "Si on s'y met tous, on peut ralentir l'épidémie de bronchiolite" et les hospitalisations des bébés, a-t-elle encouragé.

Elle a aussi cité les gastro-entérites qui arrivent et la hausse d'activité qui découle de la crise avec "des adolescents qui vont mal" et qui ont des difficultés à accéder aux soins.

Un problème majeur de recrutement

Interrogée sur la grève des soignants qui a débuté depuis 10 jours au service des urgences, Véronique Anatole-Touzet a indiqué que des discussions étaient en cours.

Au-delà des renforts réalisés (médicaux et paramédicaux), "nous sommes aujourd'hui dans l'incapacité de recruter. Le développement de la réanimation Covid s'est fait sans renfort de soignants. Nous avons 30 postes infirmiers et aides-soignants vacants sur le CHU. C'est assez peu par rapport à d'autres. Mais nous ne trouvons plus de ressources. Nous allons faire appel à la réserve sanitaire."

"Notre grosse difficulté aujourd'hui ce n'est pas un problème budgétaire mais de ressources humaines, et ce dans tous les CHU", a-t-elle développé.

De même, les établissements du territoire rencontrent la même difficulté et cela empêche d'ouvrir des lits supplémentaires, notamment avec la clinique de la Sagesse et l'Hôpital privé Saint-Grégoire, a-t-elle cité.

"Le problème de recrutement, c'est la clef du sujet", a-t-elle insisté. "Et encore une fois nous sommes un CHU plus protégé que d'autres sur cette question et le taux d'absentéisme est de 6%, un des plus bas des CHU de France. Le personnel travaille", a-t-elle ajouté.

sl/ab/APMnews

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies pour réaliser des statistiques de visites.