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07/05 2021
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DROGUES: LES SALLES DE CONSOMMATION À MOINDRE RISQUE "ONT FAIT LA PREUVE DE LEUR EFFICACITÉ" (MILDECA)

PARIS, 7 mai 2021 (APMnews) - Les salles de consommation à moindre risque (SCMR) "ont fait la preuve de leur efficacité", a estimé la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), s'appuyant sur l'évaluation scientifique réalisée par l'Inserm, dans un communiqué commun aux deux organismes publié vendredi.

L'ouverture de SCMR s'inscrit dans le cadre d'expérimentations prévues par l'article 43 de la loi du 26 janvier 2016 "de modernisation de notre système de santé" (cf dépêche du 08/04/2015 à 09:27).

Aujourd'hui, deux salles sont ouvertes en France, à Paris, depuis octobre 2016, et à Strasbourg, depuis novembre 2016. L'ouverture de celle de Marseille a été reportée sine die (cf dépêche du 18/06/2019 à 11:43).

L'évaluation publiée vendredi a été "commandée par la Mildeca à l'Inserm", est-il précisé dans le communiqué. Il était en effet prévu, dans cahier des charges de l'expérimentation, l'évaluation scientifique du dispositif, à la fois sur le volet de la santé publique, de l'ordre public (cf dépêche du 25/03/2016 à 11:39) et sur le volet médico-économique (cf dépêche du 18/07/2019 à 15:38).

"Conduite entre 2013 et 2021", cette évaluation "repose sur une approche pluridisciplinaire en santé publique (épidémiologie, économie de la santé et sociologie) qui a mobilisé plus de 40 scientifiques dans quatre équipes de recherche".

L'évaluation scientifique se décline donc en "trois volets":

  • Dans le premier volet, plusieurs indicateurs de santé (infections, visites aux urgences, etc.) ont été suivis dans une cohorte de 665 usagers de drogues (cohorte Cosinus). Une partie de ces usagers, à Paris et Strasbourg, fréquentait une SCMR, tandis que l'autre partie, à Bordeaux et Marseille, n'en fréquentait pas.
  • Dans l'étude Cosinus éco, les équipes de recherche ont réalisé "une évaluation médico-économique des SCMR, et notamment de leur rapport coût-efficacité sur le long terme, intégrant le coût des salles et les coûts sanitaires évités"
  • Le troisième volet est une "recherche sociologique portant sur l'acceptabilité sociale de la SCMR de Paris et son impact sur la tranquillité publique".

Les résultats de ces trois études sont présentés dans un rapport de 349 pages, publié sur le site de la Mildeca.

Dans le communiqué, il est précisé que sur le plan sanitaire, les résultats des analyses montrent "des effets positifs sur la santé": "les usagers des SCMR sont moins susceptibles que les usagers de drogues par injection qui ne les fréquentent pas de déclarer des pratiques à risque d'infection (VIH, virus de l’hépatite C) ou des abcès, d'avoir une overdose, d'aller aux urgences, de s'injecter dans l'espace public et de commettre des délits".

A l'inverse, ils ont moins de chances d'avoir eu une visite en médecine de ville par rapport au groupe non exposé aux SCMR, est-il indiqué dans le rapport. L'Inserm et la Mildeca estiment que cela "pourrait être lié à la plus grande précarité des populations utilisatrices des SCMR".

"La surreprésentation de patients SCMR n'ayant pas de couverture sociale et la relative 'nouveauté' de ces lieux expliquent ces limites, qui pourraient être dépassées au fil du temps notamment par une articulation plus forte des SCMR avec d'autres services ou professionnels du soin", ajoutent les deux organisations.

Un rapport coût-efficacité "acceptable"

"L'évaluation médico-économique estime à 11 millions d'euros les coûts médicaux évités chez les usagers de drogues fréquentant les SCMR, en extrapolant leur présence sur une période de 10 ans", ajoutent-elles.

Si ces coût médicaux évités "ne contrebalancent pas les coûts d'implémentation et de fonctionnement de ces structures sur 10 ans", elles estiment que "le rapport coût-efficacité est acceptable au regard des standards de la littérature internationale et du rapport coût-efficacité d'autres interventions de santé publique déjà mises en place en France".

En s'appuyant sur les modélisations réalisées, les deux organisations assurent que le rapport coût-efficacité pourrait même être "amélioré si les espaces de consommation étaient intégrés aux structures existantes", par exemple dans les centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogue (Caarud).

S'agissant de "l'acceptabilité sociale de la SCMR et son impact sur la tranquillité publique", elle "met en évidence une diversité des perceptions et des vécus vis-à-vis de la SCMR parisienne".

Au niveau national, l'Inserm et la Mildeca rappellent que les Français sont favorables, pour 80,2% aux SCMR, pour 75,9% "à l’ouverture de nouvelles SCMR" et pour 55,1% "à l'ouverture d'une SCMR dans leur propre quartier" (cf dépêche du 25/04/2019 à 02:01).

"L'étude des traces de consommation (seringues, emballages de médicaments, etc.) dans un périmètre géographique proche de la SCMR parisienne met en évidence une diminution significative des seringues abandonnées dans l’espace public, leur nombre ayant été divisé par 3 depuis l’ouverture de la salle", est-il avancé dans le communiqué.

Concernant la tranquillité publique, "des difficultés sont relevées par une partie des riverains concernant la persistance d'injections dans l’espace public dans certaines rues autour de la SCMR", tandis que d'autres riverains "constatent une diminution des injections dans l'espace public".

Vers des SCMR dans les structures déjà existantes?

Pour la Mildeca, "les SCMR ont fait la preuve de leur efficacité", même si "elles ne résolvent pas toutefois, à elles seules, l'ensemble des problèmes de santé et de tranquillité liés à l'usage de drogues".

"L'évaluation des expérimentations menées à Paris et Strasbourg démontre cependant que de nouvelles implantations méritent d'être étudiées, en fonction des contextes locaux, en complément des autres dispositifs d'accompagnement, de RDRD [réduction des risques et des dommages], et de sécurisation de l'espace public", ajoute-t-elle dans le communiqué commun avec l'Inserm.

En conclusion du rapport, l'Inserm indique que "selon les résultats obtenus, les SCMR constituent vraisemblablement une intervention de santé et de tranquillité publique efficiente".

"La pérennité des dispositifs existants apparaît utile et une mise à l'échelle nationale de cette intervention est recommandable", ajoute-t-il, suggérant également d'ouvrir les salles "sur des créneaux plus larges".

Pour l'institut, "cette évaluation montre que le dispositif déployé à Paris et Strasbourg pourrait être renforcé et transposé également dans les lieux où des Caarud ou Csapa [centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie] reçoivent des [personnes qui injectent des substances] caractérisés par des conditions de vie précaires".

"La possibilité d'offrir des services d’'aller vers' dans des lieux où les consommations apparaissent dispersées sur un territoire pourrait être envisagée et est actuellement documenté dans des études locales en cours sur d'autres villes", assure-t-il.

"Ainsi, ces résultats plaident en faveur d'une extension de ces SCMR, qui pourraient être proposées à la fois dans des structures existantes, en adaptant les services et le fonctionnement à la réalité des usagers ou dans des dispositifs autonomes de type SCMR à l'instar de ceux existants à Paris et Strasbourg", conclut-t-il

af/nc/APMnews

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PARIS, 7 mai 2021 (APMnews) - Les salles de consommation à moindre risque (SCMR) "ont fait la preuve de leur efficacité", a estimé la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), s'appuyant sur l'évaluation scientifique réalisée par l'Inserm, dans un communiqué commun aux deux organismes publié vendredi.

L'ouverture de SCMR s'inscrit dans le cadre d'expérimentations prévues par l'article 43 de la loi du 26 janvier 2016 "de modernisation de notre système de santé" (cf dépêche du 08/04/2015 à 09:27).

Aujourd'hui, deux salles sont ouvertes en France, à Paris, depuis octobre 2016, et à Strasbourg, depuis novembre 2016. L'ouverture de celle de Marseille a été reportée sine die (cf dépêche du 18/06/2019 à 11:43).

L'évaluation publiée vendredi a été "commandée par la Mildeca à l'Inserm", est-il précisé dans le communiqué. Il était en effet prévu, dans cahier des charges de l'expérimentation, l'évaluation scientifique du dispositif, à la fois sur le volet de la santé publique, de l'ordre public (cf dépêche du 25/03/2016 à 11:39) et sur le volet médico-économique (cf dépêche du 18/07/2019 à 15:38).

"Conduite entre 2013 et 2021", cette évaluation "repose sur une approche pluridisciplinaire en santé publique (épidémiologie, économie de la santé et sociologie) qui a mobilisé plus de 40 scientifiques dans quatre équipes de recherche".

L'évaluation scientifique se décline donc en "trois volets":

  • Dans le premier volet, plusieurs indicateurs de santé (infections, visites aux urgences, etc.) ont été suivis dans une cohorte de 665 usagers de drogues (cohorte Cosinus). Une partie de ces usagers, à Paris et Strasbourg, fréquentait une SCMR, tandis que l'autre partie, à Bordeaux et Marseille, n'en fréquentait pas.
  • Dans l'étude Cosinus éco, les équipes de recherche ont réalisé "une évaluation médico-économique des SCMR, et notamment de leur rapport coût-efficacité sur le long terme, intégrant le coût des salles et les coûts sanitaires évités"
  • Le troisième volet est une "recherche sociologique portant sur l'acceptabilité sociale de la SCMR de Paris et son impact sur la tranquillité publique".

Les résultats de ces trois études sont présentés dans un rapport de 349 pages, publié sur le site de la Mildeca.

Dans le communiqué, il est précisé que sur le plan sanitaire, les résultats des analyses montrent "des effets positifs sur la santé": "les usagers des SCMR sont moins susceptibles que les usagers de drogues par injection qui ne les fréquentent pas de déclarer des pratiques à risque d'infection (VIH, virus de l’hépatite C) ou des abcès, d'avoir une overdose, d'aller aux urgences, de s'injecter dans l'espace public et de commettre des délits".

A l'inverse, ils ont moins de chances d'avoir eu une visite en médecine de ville par rapport au groupe non exposé aux SCMR, est-il indiqué dans le rapport. L'Inserm et la Mildeca estiment que cela "pourrait être lié à la plus grande précarité des populations utilisatrices des SCMR".

"La surreprésentation de patients SCMR n'ayant pas de couverture sociale et la relative 'nouveauté' de ces lieux expliquent ces limites, qui pourraient être dépassées au fil du temps notamment par une articulation plus forte des SCMR avec d'autres services ou professionnels du soin", ajoutent les deux organisations.

Un rapport coût-efficacité "acceptable"

"L'évaluation médico-économique estime à 11 millions d'euros les coûts médicaux évités chez les usagers de drogues fréquentant les SCMR, en extrapolant leur présence sur une période de 10 ans", ajoutent-elles.

Si ces coût médicaux évités "ne contrebalancent pas les coûts d'implémentation et de fonctionnement de ces structures sur 10 ans", elles estiment que "le rapport coût-efficacité est acceptable au regard des standards de la littérature internationale et du rapport coût-efficacité d'autres interventions de santé publique déjà mises en place en France".

En s'appuyant sur les modélisations réalisées, les deux organisations assurent que le rapport coût-efficacité pourrait même être "amélioré si les espaces de consommation étaient intégrés aux structures existantes", par exemple dans les centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogue (Caarud).

S'agissant de "l'acceptabilité sociale de la SCMR et son impact sur la tranquillité publique", elle "met en évidence une diversité des perceptions et des vécus vis-à-vis de la SCMR parisienne".

Au niveau national, l'Inserm et la Mildeca rappellent que les Français sont favorables, pour 80,2% aux SCMR, pour 75,9% "à l’ouverture de nouvelles SCMR" et pour 55,1% "à l'ouverture d'une SCMR dans leur propre quartier" (cf dépêche du 25/04/2019 à 02:01).

"L'étude des traces de consommation (seringues, emballages de médicaments, etc.) dans un périmètre géographique proche de la SCMR parisienne met en évidence une diminution significative des seringues abandonnées dans l’espace public, leur nombre ayant été divisé par 3 depuis l’ouverture de la salle", est-il avancé dans le communiqué.

Concernant la tranquillité publique, "des difficultés sont relevées par une partie des riverains concernant la persistance d'injections dans l’espace public dans certaines rues autour de la SCMR", tandis que d'autres riverains "constatent une diminution des injections dans l'espace public".

Vers des SCMR dans les structures déjà existantes?

Pour la Mildeca, "les SCMR ont fait la preuve de leur efficacité", même si "elles ne résolvent pas toutefois, à elles seules, l'ensemble des problèmes de santé et de tranquillité liés à l'usage de drogues".

"L'évaluation des expérimentations menées à Paris et Strasbourg démontre cependant que de nouvelles implantations méritent d'être étudiées, en fonction des contextes locaux, en complément des autres dispositifs d'accompagnement, de RDRD [réduction des risques et des dommages], et de sécurisation de l'espace public", ajoute-t-elle dans le communiqué commun avec l'Inserm.

En conclusion du rapport, l'Inserm indique que "selon les résultats obtenus, les SCMR constituent vraisemblablement une intervention de santé et de tranquillité publique efficiente".

"La pérennité des dispositifs existants apparaît utile et une mise à l'échelle nationale de cette intervention est recommandable", ajoute-t-il, suggérant également d'ouvrir les salles "sur des créneaux plus larges".

Pour l'institut, "cette évaluation montre que le dispositif déployé à Paris et Strasbourg pourrait être renforcé et transposé également dans les lieux où des Caarud ou Csapa [centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie] reçoivent des [personnes qui injectent des substances] caractérisés par des conditions de vie précaires".

"La possibilité d'offrir des services d’'aller vers' dans des lieux où les consommations apparaissent dispersées sur un territoire pourrait être envisagée et est actuellement documenté dans des études locales en cours sur d'autres villes", assure-t-il.

"Ainsi, ces résultats plaident en faveur d'une extension de ces SCMR, qui pourraient être proposées à la fois dans des structures existantes, en adaptant les services et le fonctionnement à la réalité des usagers ou dans des dispositifs autonomes de type SCMR à l'instar de ceux existants à Paris et Strasbourg", conclut-t-il

af/nc/APMnews

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