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25/03 2019
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IL FAUT "IMPÉRATIVEMENT" REGROUPER LES PETITS EHPAD POUR GARANTIR LEUR VIABILITÉ (LUC BROUSSY)

(Par Sylvain LABAUNE, aux Rencontres santé de Nice)

NICE, 25 mars 2019 (APMnews) - Les petits établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) doivent être regroupés pour atteindre une taille critique de "200, 250 lits" afin d'être économiquement viables, a déclaré jeudi Luc Broussy, président de l'association France Silver Eco, lors des 6es Rencontres santé de Nice.

Les Rencontres santé de Nice, organisées jeudi et vendredi par le cabinet Didier Haas conseil, ont eu pour thème "Santé des aînés: éthique et efficience". Luc Broussy est intervenu jeudi après-midi lors de table ronde intitulée "Quelles solutions économiques et financements?"

Interrogé sur le modèle de financement des Ehpad, le président de France Silver Eco a affirmé qu'il faut "impérativement [les] regrouper" pour assurer la pérennité du service public, "menacé de disparaître par obsolescence", a-t-il soutenu.

Pour lui, "il faut avoir des Ehpad de 200, 250 lits [de manière] obligatoire, point barre [...], ce qui permettra au demeurant d'avoir des directeurs d'un peu meilleure qualité car dans un établissement de 60 lits il n'y a pas les mêmes directeurs que dans un établissement de 250 lits".

La vraie question "n'est pas de savoir combien il faut d'argent mais de savoir où le mettre". Pour cela, il faut définir si "l'objectif pour la société est de baisser absolument les prix en Ehpad, comme le demandent les familles, ou d'augmenter les ratios de personnel", a poursuivi Luc Broussy.

La Cour des comptes a défendu mercredi, dans un rapport, les petits Ehpad installés en zone rurale, soulignant que leur maillage favorise un service de proximité (cf dépêche du 21/03/2019 à 15:23).

La capacité moyenne dans les Ehpad était en 2015 de 56,2 places dans les communes très peu denses, de 75,3 places dans les communes peu denses, 86,8 dans celles de densité intermédiaire et de 87,6 dans celles densément peuplées, selon les données rapportées par la Cour.

Un Ehpad "isolé" ne peut pas tenir (Claude Evin)

Claude Evin, ancien ministre de la santé et ex-directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Ile-de-France, est intervenu lors de la table ronde. Un "Ehpad de 40 lits ne peut économiquement pas tenir aujourd'hui", a-t-il déclaré.

"Je comprends que les élus et la population soient attachés [à un petit Ehpad]". Mais "l'on pourra toujours trouver des financements complémentaires, ce n'est pas parce qu'on mettra de l'argent en plus qu'on améliorera la qualité de la prise en charge".

"Il faut sortir des positions idéologiques et rigides. On constate aujourd'hui qu'un Ehpad tout seul ne peut pas s'adapter aux besoins de la population. Or, il y a énormément d'Ehpad qui sont encore isolés, c'est notamment le cas de ceux publics", a-t-il poursuivi.

Pour lui, "on ne peut pas continuer comme ça". La mutualisation "d'un certain nombre de métiers fait qu'on ne peut pas par exemple recruter 0,20 ETP [équivalent temps plein] d'un qualiticien ou d'un psychologue".

Claude Evin a pointé un "système beaucoup trop cloisonné". "Il faut s'organiser autour des territoires mais les systèmes mis en place aujourd'hui reflètent en fait des cloisonnements: par exemple les CPTS [communautés professionnelles territoriales de santé] sont faites pour les libéraux et les GHT [groupements hospitaliers de territoire] uniquement pour les hôpitaux."

"Pourquoi nous n'avançons pas [dans la mutualisation]? Car personne n'a intérêt à travailler avec l'autre, disons les choses clairement", a-t-il déploré.

"Les hôpitaux doivent reconsidérer la question des Ehpad. Aujourd'hui, la priorité pour un établissement public c'est son plateau technique et on envoie souvent dans les Ehpad le personnel qui ne veut plus être dans les services actifs, dont on se débarrasse", a-t-il continué.

Interrogé sur l'idée d'une taille critique, Claude Evin a indiqué que "le regroupement ne veut pas dire construire des structures de 250 lits en supprimant toutes celles de 40 lits", mais cela repose plutôt sur "la question de pouvoir mutualiser tout ce qui peut l'être".

"Il faut sortir des modèles actuels pour créer par exemple des GCS [groupements de coopération sanitaire], avec des partenariats entre établissements privés et publics", a-t-il insisté.

Vers des Ehpad "intégrés"?

Également présents aux Rencontres santé de Nice, le président de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP), Lamine Gharbi, et Anne Moutel-Seiller, directrice générale du groupe Ugecam (Union pour la gestion des établissements des caisses de l’assurance maladie), ont fait part de visions opposées quant à l'organisation territoriale des Ehpad lors d'une autre table ronde jeudi après-midi.

Pour Lamine Gharbi, il faut tendre vers des "Ehpad intégrés", c'est-à-dire des établissement faisant partie d'une filière de soins complète. "Je suis parti de ce principe lorsque j'ai créé mon groupe [Cap Santé] il y a 25 ans en offrant une prise en charge avec du MCO [médecine, chirurgie et obstétrique], des urgences, du SSR [soins de suite et de réadaptation], de la psychiatrie, des Ehpad et de l'HAD [hospitalisation à domicile]".

En intervenant sur l'ensemble de la filière, "mon taux d'hospitalisation des patients en Ehpad est de 1,5% contre 7% de moyenne [nationale] parce que j'ai des infirmières et médecins d'HAD qui interviennent dans les Ehpad avant que le patient ne se dégrade", a affirmé Lamine Gharbi.

De l'avis d'Anne Moutel-Seiller, il ne faut pas "chercher obligatoirement à avoir des offres totalement intégrées". A l'Ugecam, le principe est "plutôt le partenariat et la coopération avec les autres offres du territoire".

Il s'agit "d'identifier les expertises notamment gériatriques du territoire pour les articuler entre elles, de rendre l'offre de soins plus lisible notamment pour les généralistes qui se retrouvent parfois seuls face à sa complexité".

"Le DMP [dossier médical partagé] est un levier essentiel de la coopération, il permet de faire travailler ensemble les acteurs du territoire. En Ehpad, les informations du dossier de liaison d'urgence sont très utiles lors d'un passage aux urgences d'un résident, cela le facilite en termes de qualité et de rapidité du séjour", a poursuivi la directrice générale de l'Ugecam.

syl/nc/APMnews

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(Par Sylvain LABAUNE, aux Rencontres santé de Nice)

NICE, 25 mars 2019 (APMnews) - Les petits établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) doivent être regroupés pour atteindre une taille critique de "200, 250 lits" afin d'être économiquement viables, a déclaré jeudi Luc Broussy, président de l'association France Silver Eco, lors des 6es Rencontres santé de Nice.

Les Rencontres santé de Nice, organisées jeudi et vendredi par le cabinet Didier Haas conseil, ont eu pour thème "Santé des aînés: éthique et efficience". Luc Broussy est intervenu jeudi après-midi lors de table ronde intitulée "Quelles solutions économiques et financements?"

Interrogé sur le modèle de financement des Ehpad, le président de France Silver Eco a affirmé qu'il faut "impérativement [les] regrouper" pour assurer la pérennité du service public, "menacé de disparaître par obsolescence", a-t-il soutenu.

Pour lui, "il faut avoir des Ehpad de 200, 250 lits [de manière] obligatoire, point barre [...], ce qui permettra au demeurant d'avoir des directeurs d'un peu meilleure qualité car dans un établissement de 60 lits il n'y a pas les mêmes directeurs que dans un établissement de 250 lits".

La vraie question "n'est pas de savoir combien il faut d'argent mais de savoir où le mettre". Pour cela, il faut définir si "l'objectif pour la société est de baisser absolument les prix en Ehpad, comme le demandent les familles, ou d'augmenter les ratios de personnel", a poursuivi Luc Broussy.

La Cour des comptes a défendu mercredi, dans un rapport, les petits Ehpad installés en zone rurale, soulignant que leur maillage favorise un service de proximité (cf dépêche du 21/03/2019 à 15:23).

La capacité moyenne dans les Ehpad était en 2015 de 56,2 places dans les communes très peu denses, de 75,3 places dans les communes peu denses, 86,8 dans celles de densité intermédiaire et de 87,6 dans celles densément peuplées, selon les données rapportées par la Cour.

Un Ehpad "isolé" ne peut pas tenir (Claude Evin)

Claude Evin, ancien ministre de la santé et ex-directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Ile-de-France, est intervenu lors de la table ronde. Un "Ehpad de 40 lits ne peut économiquement pas tenir aujourd'hui", a-t-il déclaré.

"Je comprends que les élus et la population soient attachés [à un petit Ehpad]". Mais "l'on pourra toujours trouver des financements complémentaires, ce n'est pas parce qu'on mettra de l'argent en plus qu'on améliorera la qualité de la prise en charge".

"Il faut sortir des positions idéologiques et rigides. On constate aujourd'hui qu'un Ehpad tout seul ne peut pas s'adapter aux besoins de la population. Or, il y a énormément d'Ehpad qui sont encore isolés, c'est notamment le cas de ceux publics", a-t-il poursuivi.

Pour lui, "on ne peut pas continuer comme ça". La mutualisation "d'un certain nombre de métiers fait qu'on ne peut pas par exemple recruter 0,20 ETP [équivalent temps plein] d'un qualiticien ou d'un psychologue".

Claude Evin a pointé un "système beaucoup trop cloisonné". "Il faut s'organiser autour des territoires mais les systèmes mis en place aujourd'hui reflètent en fait des cloisonnements: par exemple les CPTS [communautés professionnelles territoriales de santé] sont faites pour les libéraux et les GHT [groupements hospitaliers de territoire] uniquement pour les hôpitaux."

"Pourquoi nous n'avançons pas [dans la mutualisation]? Car personne n'a intérêt à travailler avec l'autre, disons les choses clairement", a-t-il déploré.

"Les hôpitaux doivent reconsidérer la question des Ehpad. Aujourd'hui, la priorité pour un établissement public c'est son plateau technique et on envoie souvent dans les Ehpad le personnel qui ne veut plus être dans les services actifs, dont on se débarrasse", a-t-il continué.

Interrogé sur l'idée d'une taille critique, Claude Evin a indiqué que "le regroupement ne veut pas dire construire des structures de 250 lits en supprimant toutes celles de 40 lits", mais cela repose plutôt sur "la question de pouvoir mutualiser tout ce qui peut l'être".

"Il faut sortir des modèles actuels pour créer par exemple des GCS [groupements de coopération sanitaire], avec des partenariats entre établissements privés et publics", a-t-il insisté.

Vers des Ehpad "intégrés"?

Également présents aux Rencontres santé de Nice, le président de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP), Lamine Gharbi, et Anne Moutel-Seiller, directrice générale du groupe Ugecam (Union pour la gestion des établissements des caisses de l’assurance maladie), ont fait part de visions opposées quant à l'organisation territoriale des Ehpad lors d'une autre table ronde jeudi après-midi.

Pour Lamine Gharbi, il faut tendre vers des "Ehpad intégrés", c'est-à-dire des établissement faisant partie d'une filière de soins complète. "Je suis parti de ce principe lorsque j'ai créé mon groupe [Cap Santé] il y a 25 ans en offrant une prise en charge avec du MCO [médecine, chirurgie et obstétrique], des urgences, du SSR [soins de suite et de réadaptation], de la psychiatrie, des Ehpad et de l'HAD [hospitalisation à domicile]".

En intervenant sur l'ensemble de la filière, "mon taux d'hospitalisation des patients en Ehpad est de 1,5% contre 7% de moyenne [nationale] parce que j'ai des infirmières et médecins d'HAD qui interviennent dans les Ehpad avant que le patient ne se dégrade", a affirmé Lamine Gharbi.

De l'avis d'Anne Moutel-Seiller, il ne faut pas "chercher obligatoirement à avoir des offres totalement intégrées". A l'Ugecam, le principe est "plutôt le partenariat et la coopération avec les autres offres du territoire".

Il s'agit "d'identifier les expertises notamment gériatriques du territoire pour les articuler entre elles, de rendre l'offre de soins plus lisible notamment pour les généralistes qui se retrouvent parfois seuls face à sa complexité".

"Le DMP [dossier médical partagé] est un levier essentiel de la coopération, il permet de faire travailler ensemble les acteurs du territoire. En Ehpad, les informations du dossier de liaison d'urgence sont très utiles lors d'un passage aux urgences d'un résident, cela le facilite en termes de qualité et de rapidité du séjour", a poursuivi la directrice générale de l'Ugecam.

syl/nc/APMnews

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