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22/09 2021
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LES RELATIONS ENTRE ÉLUS LOCAUX ET REPRÉSENTANTS DU POUVOIR CENTRAL ONT ÉTÉ SOUVENT DIFFICILES PENDANT LA CRISE SANITAIRE

(Par Sylvain LABAUNE, aux Rencontres de la FHP)

MARSEILLE, 22 septembre 2021 (APMnews) - Les relations entre élus de territoire et responsables de l'Etat ont été souvent difficiles au cours de la crise Covid-19 et de nombreuses améliorations sont à réaliser, ont rapporté plusieurs intervenants lors des XXe Rencontres annuelles de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) qui se tiennent jusqu'à mercredi à Marseille.

La question de ces relations entre élus locaux, ministères et agences régionales de santé (ARS) a été souvent abordée lors des différentes tables rondes.

Pendant la crise sanitaire, il y a eu "un ministère en charge de la santé tout-puissant, omniprésent, avec une volonté de rester indépendant et autonome, de ne pas travailler avec les autres", a affirmé Renaud Muselier, président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca).

Les élus "se sont retrouvés dans une situation où ils ont dû affronter les aléas scientifiques d'un côté", et de l'autre, "les débats permanents sur la façon dont nous devions gérer cette crise", a-t-il continué.

"Pour ma part, les relations ont été chaotiques avec Olivier Véran [ministre des solidarités et de la santé]" même si depuis "nous avons normalisé nos relations", a-t-il souligné.

"Nous avons essayé en permanence d'apporter des réponses à notre niveau." Les présidents de Région ont été obligés de "sortir de leurs compétences" dans ce "désastre sanitaire", jusqu'à "aller chercher des masques en Chine" alors que "ce n'est pas fondamentalement notre métier initial", a-t-il ironisé.

En Paca, la Région a ainsi dû aider l'ARS en fournissant "15 millions de masques", a-t-il précisé.

"J'estime que le ministère de la santé a travaillé seul, qu'il n'a pas voulu travailler avec le ministère de l'intérieur pour la gestion générale de la crise", ni "avec le ministère de la défense ou les distributeurs pharmaceutiques". Cela "prouve bien qu'il y a des difficultés dans les structures d'Etat" du fait que "chaque ministère veut garder son pouvoir".

La bonne gestion de la santé en région dépend de la qualité de la relation entretenue avec les ARS, a affirmé Renaud Muselier. Quand les élus "arrivent à travailler au niveau local" avec les agences, ils font "ce lien de fluidité et de facilité qui permet d'aller au plus proche des territoires pour être le plus efficace possible".

La "vraie difficulté" maintenant est de savoir si la "rigidité naturelle de notre pays va reprendre le dessus après la crise Covid", a-t-il continué.

"L'ensemble des présidents de Région de France sont pour une décentralisation avec une forme de direction sanitaire, copilotée par les présidents de Région et l'ARS, sous l'autorité du pouvoir central pour être au plus proche" des territoires dans les actions à mener, a plaidé Renaud Muselier.

Prenant l'exemple du projet de modernisation de l'Assistance publique-hôpitaux de Marseille (AP-HM), il a déclaré que "ce n'était pas de la responsabilité" des collectivités territoriales de le soutenir à hauteur de 130 millions d'euros (M€) dont 31 M€ de la Région Paca pour un coût total de 337 M€. "Cela n'est pas dans nos compétences, pourtant on ne peut pas ne pas le faire" face aux carences de l'Etat.

Le conseil régional de Paca travaille également avec l'ARS pour la lutte contre les déserts médicaux et la pénurie de soignants, a-t-il souligné. La formation des aides-soignants et des infirmiers est de la compétence de la Région, et en Paca "nous formons plus de 10.000 soignants pour l'année 2021-2022" grâce à la "réouverture de 1.200 postes supplémentaires", puis "10.000 nouveaux" pour l'année universitaire suivante.

Xavier Bertrand plaide pour la création d'Ordam

Xavier Bertrand, président du conseil régional des Hauts-de-France, ancien ministre de la santé (2005 à 2007) et candidat à l'élection présidentielle de 2022, est également intervenu lors des Rencontres FHP.

"Je ne suis pas le papa des ARS, moi j'ai travaillé avec les ARH [agences régionales de l'hospitalisation] et j'ai toujours pensé que les ARS étaient une construction beaucoup trop large", a-t-il déclaré.

Xavier Bertrand est revenu au ministère de la santé en novembre 2010, tandis que les ARS ont été préfigurées puis créées officiellement au 1er avril 2010, note-t-on.

Le problème de la gestion de la santé en région est la "direction qui est donnée par le ministère [de la santé] et par Bercy", laquelle est animée par "une double contrainte: budgétaire et réglementaire", a-t-il poursuivi.

"Tout ceci ne fonctionnera que lorsque Paris s'occupera de la stratégie, en s'assurant que les tarifs ne sont pas différents d'une région à l'autre entre le privé et le public", de même que les "conditions de remboursement". "Pour le reste, mais bon sang, que l'on fasse confiance aux territoires et aux élus locaux !", a dit Xavier Bertrand.

Le "pilotage de la santé dans les territoires ne doit plus se faire sans les élus et doit être confié aux élus", a-t-il plaidé.

Il faut aller vers la "création d'Ordam [objectifs régionaux de dépenses d'assurance maladie] de façon à ce que les collectivités qui veulent faire plus que d'autres puissent mettre plus de moyens et avoir plus d'efficacité", a-t-il dit.

Selon lui, la création d'Ordam ne va pas favoriser les inégalités entre les régions riches et les plus pauvres car actuellement le rattrapage se fait quand "le ministre de la santé décide d'accorder des moyens supplémentaires à une région pour compenser les inégalités". La part de l'Ordam, en complément de l'Ondam, doit justement "permettre de mettre en plus cette part supplémentaire".

Xavier Bertrand a également plaidé pour la création d'un "conseiller territorial" qui représenterait seul le "couple département et région", c'est-à-dire "que l'on aurait le maire qui est aussi à l'intercommunalité et d'autre part, un conseiller territorial qui représenterait les deux".

"Sinon comment voulez-vous faire aujourd'hui pour avoir un pilotage par les élus ? Je pense qu'il y a le président de la Région mais il y a aussi besoin du département pour tout ce qui relève du médico-social, donc mon idée c'est d'avoir le maire et le conseiller territorial", a-t-il insisté.

En début de crise, les relations ont été "très difficiles" avec les élus (DG ARS Paca)

Pendant la crise sanitaire, il y a eu différentes phases dans la relation avec les élus, a expliqué Philippe De Mester, directeur général de l'ARS Paca, lors des Rencontres FHP.

Les débuts ont été "très difficiles pour tout le monde" car pendant la 1re vague "nous étions dominés par la peur, face à une maladie qu'on ne connaissait pas" avec des "décisions extrêmement lourdes qui ont dû être prises notamment sur la déprogrammation chirurgicale", a-t-il rapporté.

La conciliation entre "les impératifs posés par le pouvoir central et la volonté du terrain" est "toujours une équation difficile à résoudre".

Il manquait d'"outils numériques pour connaître la réalité de la situation", les élus "demandaient des informations mais nous ne les avions pas", a-t-il continué.

Il y a eu des difficultés également "parce que nous n'avions pas les outils de prévention", notamment les masques. "Si on a pu finalement surmonter cette problématique, c'est parce que nous avons développé une coopération très forte avec les collectivités et les Régions", a-t-il poursuivi.

Lors des vagues suivantes, "nous avons avancé et progressé" dans la relation de l'ARS avec les élus. Il y a eu notamment "un travail formidable sur la vaccination. Et si les débuts de la campagne ont été lents, ce n'est pas du tout à cause d'une impéritie de l'administration" mais d'un problème d'approvisionnement de la part des fabricants de vaccins, a précisé Philippe De Mester.

syl/ab/APMnews

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(Par Sylvain LABAUNE, aux Rencontres de la FHP)

MARSEILLE, 22 septembre 2021 (APMnews) - Les relations entre élus de territoire et responsables de l'Etat ont été souvent difficiles au cours de la crise Covid-19 et de nombreuses améliorations sont à réaliser, ont rapporté plusieurs intervenants lors des XXe Rencontres annuelles de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) qui se tiennent jusqu'à mercredi à Marseille.

La question de ces relations entre élus locaux, ministères et agences régionales de santé (ARS) a été souvent abordée lors des différentes tables rondes.

Pendant la crise sanitaire, il y a eu "un ministère en charge de la santé tout-puissant, omniprésent, avec une volonté de rester indépendant et autonome, de ne pas travailler avec les autres", a affirmé Renaud Muselier, président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca).

Les élus "se sont retrouvés dans une situation où ils ont dû affronter les aléas scientifiques d'un côté", et de l'autre, "les débats permanents sur la façon dont nous devions gérer cette crise", a-t-il continué.

"Pour ma part, les relations ont été chaotiques avec Olivier Véran [ministre des solidarités et de la santé]" même si depuis "nous avons normalisé nos relations", a-t-il souligné.

"Nous avons essayé en permanence d'apporter des réponses à notre niveau." Les présidents de Région ont été obligés de "sortir de leurs compétences" dans ce "désastre sanitaire", jusqu'à "aller chercher des masques en Chine" alors que "ce n'est pas fondamentalement notre métier initial", a-t-il ironisé.

En Paca, la Région a ainsi dû aider l'ARS en fournissant "15 millions de masques", a-t-il précisé.

"J'estime que le ministère de la santé a travaillé seul, qu'il n'a pas voulu travailler avec le ministère de l'intérieur pour la gestion générale de la crise", ni "avec le ministère de la défense ou les distributeurs pharmaceutiques". Cela "prouve bien qu'il y a des difficultés dans les structures d'Etat" du fait que "chaque ministère veut garder son pouvoir".

La bonne gestion de la santé en région dépend de la qualité de la relation entretenue avec les ARS, a affirmé Renaud Muselier. Quand les élus "arrivent à travailler au niveau local" avec les agences, ils font "ce lien de fluidité et de facilité qui permet d'aller au plus proche des territoires pour être le plus efficace possible".

La "vraie difficulté" maintenant est de savoir si la "rigidité naturelle de notre pays va reprendre le dessus après la crise Covid", a-t-il continué.

"L'ensemble des présidents de Région de France sont pour une décentralisation avec une forme de direction sanitaire, copilotée par les présidents de Région et l'ARS, sous l'autorité du pouvoir central pour être au plus proche" des territoires dans les actions à mener, a plaidé Renaud Muselier.

Prenant l'exemple du projet de modernisation de l'Assistance publique-hôpitaux de Marseille (AP-HM), il a déclaré que "ce n'était pas de la responsabilité" des collectivités territoriales de le soutenir à hauteur de 130 millions d'euros (M€) dont 31 M€ de la Région Paca pour un coût total de 337 M€. "Cela n'est pas dans nos compétences, pourtant on ne peut pas ne pas le faire" face aux carences de l'Etat.

Le conseil régional de Paca travaille également avec l'ARS pour la lutte contre les déserts médicaux et la pénurie de soignants, a-t-il souligné. La formation des aides-soignants et des infirmiers est de la compétence de la Région, et en Paca "nous formons plus de 10.000 soignants pour l'année 2021-2022" grâce à la "réouverture de 1.200 postes supplémentaires", puis "10.000 nouveaux" pour l'année universitaire suivante.

Xavier Bertrand plaide pour la création d'Ordam

Xavier Bertrand, président du conseil régional des Hauts-de-France, ancien ministre de la santé (2005 à 2007) et candidat à l'élection présidentielle de 2022, est également intervenu lors des Rencontres FHP.

"Je ne suis pas le papa des ARS, moi j'ai travaillé avec les ARH [agences régionales de l'hospitalisation] et j'ai toujours pensé que les ARS étaient une construction beaucoup trop large", a-t-il déclaré.

Xavier Bertrand est revenu au ministère de la santé en novembre 2010, tandis que les ARS ont été préfigurées puis créées officiellement au 1er avril 2010, note-t-on.

Le problème de la gestion de la santé en région est la "direction qui est donnée par le ministère [de la santé] et par Bercy", laquelle est animée par "une double contrainte: budgétaire et réglementaire", a-t-il poursuivi.

"Tout ceci ne fonctionnera que lorsque Paris s'occupera de la stratégie, en s'assurant que les tarifs ne sont pas différents d'une région à l'autre entre le privé et le public", de même que les "conditions de remboursement". "Pour le reste, mais bon sang, que l'on fasse confiance aux territoires et aux élus locaux !", a dit Xavier Bertrand.

Le "pilotage de la santé dans les territoires ne doit plus se faire sans les élus et doit être confié aux élus", a-t-il plaidé.

Il faut aller vers la "création d'Ordam [objectifs régionaux de dépenses d'assurance maladie] de façon à ce que les collectivités qui veulent faire plus que d'autres puissent mettre plus de moyens et avoir plus d'efficacité", a-t-il dit.

Selon lui, la création d'Ordam ne va pas favoriser les inégalités entre les régions riches et les plus pauvres car actuellement le rattrapage se fait quand "le ministre de la santé décide d'accorder des moyens supplémentaires à une région pour compenser les inégalités". La part de l'Ordam, en complément de l'Ondam, doit justement "permettre de mettre en plus cette part supplémentaire".

Xavier Bertrand a également plaidé pour la création d'un "conseiller territorial" qui représenterait seul le "couple département et région", c'est-à-dire "que l'on aurait le maire qui est aussi à l'intercommunalité et d'autre part, un conseiller territorial qui représenterait les deux".

"Sinon comment voulez-vous faire aujourd'hui pour avoir un pilotage par les élus ? Je pense qu'il y a le président de la Région mais il y a aussi besoin du département pour tout ce qui relève du médico-social, donc mon idée c'est d'avoir le maire et le conseiller territorial", a-t-il insisté.

En début de crise, les relations ont été "très difficiles" avec les élus (DG ARS Paca)

Pendant la crise sanitaire, il y a eu différentes phases dans la relation avec les élus, a expliqué Philippe De Mester, directeur général de l'ARS Paca, lors des Rencontres FHP.

Les débuts ont été "très difficiles pour tout le monde" car pendant la 1re vague "nous étions dominés par la peur, face à une maladie qu'on ne connaissait pas" avec des "décisions extrêmement lourdes qui ont dû être prises notamment sur la déprogrammation chirurgicale", a-t-il rapporté.

La conciliation entre "les impératifs posés par le pouvoir central et la volonté du terrain" est "toujours une équation difficile à résoudre".

Il manquait d'"outils numériques pour connaître la réalité de la situation", les élus "demandaient des informations mais nous ne les avions pas", a-t-il continué.

Il y a eu des difficultés également "parce que nous n'avions pas les outils de prévention", notamment les masques. "Si on a pu finalement surmonter cette problématique, c'est parce que nous avons développé une coopération très forte avec les collectivités et les Régions", a-t-il poursuivi.

Lors des vagues suivantes, "nous avons avancé et progressé" dans la relation de l'ARS avec les élus. Il y a eu notamment "un travail formidable sur la vaccination. Et si les débuts de la campagne ont été lents, ce n'est pas du tout à cause d'une impéritie de l'administration" mais d'un problème d'approvisionnement de la part des fabricants de vaccins, a précisé Philippe De Mester.

syl/ab/APMnews

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