Actualités de l'Urgence - APM

26/05 2021
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LES URGENTISTES ET LA FHF MONTENT AU CRÉNEAU POUR PROTESTER CONTRE LA CRÉATION D'UN NUMÉRO UNIQUE D'URGENCE

PARIS, 26 mai 2021 (APMnews) - Les présidents de la Fédération hospitalière de France (FHF), la Société française de médecine d'urgence (SFMU), du Conseil national de l'urgence hospitalière (CNUH) et de Samu-Urgences de France (SUdF) ont fait bloc pour protester contre la création d'un numéro d'urgence unique au sein de la proposition de loi sur la sécurité civile du député Fabien Matras (LREM, Var), mercredi lors d'une conférence de presse commune.

Cette conférence de presse se tenait en amont de l'examen de la proposition de loi en séance publique à l'Assemblée nationale, après que les membres de la commission des lois de la chambre haute ont introduit mi-mai dans l'article 31 du texte la "mise en place une expérimentation visant à instituer un numéro unique d’appel d’urgence" (cf dépêche du 12/05/2021 à 18:29).

Cette mesure avait déjà fait l'objet d'une tribune dans le Journal du Dimanche JDD) signée par près de 250 élus et personnalités du monde de la santé trois jours auparavant (cf dépêche du 25/05/2021 à 13:26).

"Il y a un problème de méthode", a souligné d'emblée Frédéric Valletoux, le président de la FHF, "on n’a pas eu de débat et on n’a pas été entendus par l’Assemblée nationale", avant de pointer "un problème pour l’organisation de soins alors qu’il y a une expérimentation de service d’accès aux soins [SAS] dans une trentaine de départements".

"L’arrivée d’un numéro unique bouscule et vient remettre complétement à plat ces avancées", a-t-il ajouté.

"Nous sommes furieux, nous sommes encore dans la crise sanitaire et nous voyons arriver des manoeuvres visant à imposer des visions archaïques et dangereuses de la gestion des appels d’urgence", a enchaîné le Dr François Braun, président de SUdF, en accusant la proposition de loi de "faire passer des principes anciens, non adaptés, en catimini".

"Dans cette loi, il y a des articles qui ont un effet direct sur la santé de nos concitoyens, en particulier cet article 31 sur le numéro unique tel qu’il a été présenté en première lecture", a-t-il poursuivi, "ce numéro fourre-tout est totalement incompatible avec la vraie modernisation du système qui est en route depuis plusieurs mois maintenant, celle du service d’accès aux soins".

Un affaiblissant de la régulation médicale

Pour le Pr Pierre Carli, président du CNUH, la création d'un numéro unique pour les appels d'urgence "paraît plus simple" mais serait "simplement simpliste".

"On va tout mélanger dans un grand panier", a-t-il développer, "tout ce qui est de l’urgence, qu’elle soit médicale ou pas".

En reléguant la régulation médicale aux appels non urgents, le directeur du Samu de Paris craint de voir ainsi disparaître la possibilité "[d']envoyer directement dans les cas les plus graves nos équipes de réanimation sur le terrain", de "laisser les gens à domicile et les confier à la médecine générale si c'est nécessaire" ou d'acheminer les patients qui l'exigent "directement dans les services de réanimation".

"Et la conséquence la plus grave de tout ça, c’est qu’on va avoir de plus en plus de patients qui arrivent en ambulance dans les urgences, souvent pour des motifs qui n’ont rien à voir avec l’hospitalisation", a-t-il complété.

De son côté le Pr Karim Tazarourte, président de la SFMU, a rappelé les deux rapports produits sur les numéros d'urgence par les Inspections générales des affaires sociales (Igas) et de l'administration (IGA) d'une part, et la mission interministérielle Marcus d'autre part (cf dépêche du 10/12/2018 à 16:16 et dépêche du 10/01/2020 à 19:13): "La conclusion de ces rapports, c’est que le débat est complexe".

"Pour appel d’urgence, dans la majorité des cas c’est un appel qui concerne la santé", a-t-il cependant mis en avant, "la plupart du temps, avec notre population qui vieillit et qui se chronicise, l’urgence santé […] n’est pas au premier plan".

Avec la création d'un numéro unique et la multiplication d'interlocuteurs, le président de la SFMU craint une perte d'efficacité délétère dans le traitement des appels relevant de l'urgence médicale: "Un appel santé, à chaque que vous tombez sur un opérateur non-métier, c’est une perte de chance."

"On ne se rend pas assez compte que dans notre pays on a une pépite qui est cette régulation médicale", a abondé François Braun, "le SAS c’est améliorer encore cette réponse".

Le président de SUdF a rapporté que les premières expérimentations du SAS avaient permis d'obtenir un taux d'appels décrochés en moins de 30% dans 95% des cas.

Une inquiétude sur le respect du secret médical

Il a également fait part de ses inquiétudes face à l'absence d'une garantie concernant le secret médical en laissant la sécurité civile superviser les appels d'urgence: "Quand vous appeler le Samu aujourd’hui, le SAS demain, vous êtes immédiatement dans le cadre du secret médical; nous n’avons aucune garantie de ce qu’il se passerait lorsque ces informations arriveraient dans un service du ministère de l’intérieur".

Dans la lignée des conclusions de la mission Marcus, Pierre Carli a plaidé pour un système deux numéros: un numéro secours et un numéro santé.

"Le numéro que nous voulons voir instaurer c’est un numéro commun", a-t-il développé, avant d'ajouter par la suite que "le principe du numéro commun, c’est que l’on conserve ce qui marche là où ça marche".

"Nous soutenons le maintien de deux plates-formes interconnectées: une plate-forme santé avec toutes les garanties du secret médicale, elle se construit autour du SAS, accessible par un numéro générique [...] et une plate-forme police-secours", a abondé François Braun.

Le président de SUdF a indiqué que le ministère des solidarités et de la santé s'était "prononcé pour que le débat ait lieu et que tout soit mis sur la table".

"Nous sommes tout à fait prêt à discuter et à apporter nos arguments", a-t-il insisté, "il faut que nos parlementaires prennent de la hauteur".

gl/ab/APMnews

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PARIS, 26 mai 2021 (APMnews) - Les présidents de la Fédération hospitalière de France (FHF), la Société française de médecine d'urgence (SFMU), du Conseil national de l'urgence hospitalière (CNUH) et de Samu-Urgences de France (SUdF) ont fait bloc pour protester contre la création d'un numéro d'urgence unique au sein de la proposition de loi sur la sécurité civile du député Fabien Matras (LREM, Var), mercredi lors d'une conférence de presse commune.

Cette conférence de presse se tenait en amont de l'examen de la proposition de loi en séance publique à l'Assemblée nationale, après que les membres de la commission des lois de la chambre haute ont introduit mi-mai dans l'article 31 du texte la "mise en place une expérimentation visant à instituer un numéro unique d’appel d’urgence" (cf dépêche du 12/05/2021 à 18:29).

Cette mesure avait déjà fait l'objet d'une tribune dans le Journal du Dimanche JDD) signée par près de 250 élus et personnalités du monde de la santé trois jours auparavant (cf dépêche du 25/05/2021 à 13:26).

"Il y a un problème de méthode", a souligné d'emblée Frédéric Valletoux, le président de la FHF, "on n’a pas eu de débat et on n’a pas été entendus par l’Assemblée nationale", avant de pointer "un problème pour l’organisation de soins alors qu’il y a une expérimentation de service d’accès aux soins [SAS] dans une trentaine de départements".

"L’arrivée d’un numéro unique bouscule et vient remettre complétement à plat ces avancées", a-t-il ajouté.

"Nous sommes furieux, nous sommes encore dans la crise sanitaire et nous voyons arriver des manoeuvres visant à imposer des visions archaïques et dangereuses de la gestion des appels d’urgence", a enchaîné le Dr François Braun, président de SUdF, en accusant la proposition de loi de "faire passer des principes anciens, non adaptés, en catimini".

"Dans cette loi, il y a des articles qui ont un effet direct sur la santé de nos concitoyens, en particulier cet article 31 sur le numéro unique tel qu’il a été présenté en première lecture", a-t-il poursuivi, "ce numéro fourre-tout est totalement incompatible avec la vraie modernisation du système qui est en route depuis plusieurs mois maintenant, celle du service d’accès aux soins".

Un affaiblissant de la régulation médicale

Pour le Pr Pierre Carli, président du CNUH, la création d'un numéro unique pour les appels d'urgence "paraît plus simple" mais serait "simplement simpliste".

"On va tout mélanger dans un grand panier", a-t-il développer, "tout ce qui est de l’urgence, qu’elle soit médicale ou pas".

En reléguant la régulation médicale aux appels non urgents, le directeur du Samu de Paris craint de voir ainsi disparaître la possibilité "[d']envoyer directement dans les cas les plus graves nos équipes de réanimation sur le terrain", de "laisser les gens à domicile et les confier à la médecine générale si c'est nécessaire" ou d'acheminer les patients qui l'exigent "directement dans les services de réanimation".

"Et la conséquence la plus grave de tout ça, c’est qu’on va avoir de plus en plus de patients qui arrivent en ambulance dans les urgences, souvent pour des motifs qui n’ont rien à voir avec l’hospitalisation", a-t-il complété.

De son côté le Pr Karim Tazarourte, président de la SFMU, a rappelé les deux rapports produits sur les numéros d'urgence par les Inspections générales des affaires sociales (Igas) et de l'administration (IGA) d'une part, et la mission interministérielle Marcus d'autre part (cf dépêche du 10/12/2018 à 16:16 et dépêche du 10/01/2020 à 19:13): "La conclusion de ces rapports, c’est que le débat est complexe".

"Pour appel d’urgence, dans la majorité des cas c’est un appel qui concerne la santé", a-t-il cependant mis en avant, "la plupart du temps, avec notre population qui vieillit et qui se chronicise, l’urgence santé […] n’est pas au premier plan".

Avec la création d'un numéro unique et la multiplication d'interlocuteurs, le président de la SFMU craint une perte d'efficacité délétère dans le traitement des appels relevant de l'urgence médicale: "Un appel santé, à chaque que vous tombez sur un opérateur non-métier, c’est une perte de chance."

"On ne se rend pas assez compte que dans notre pays on a une pépite qui est cette régulation médicale", a abondé François Braun, "le SAS c’est améliorer encore cette réponse".

Le président de SUdF a rapporté que les premières expérimentations du SAS avaient permis d'obtenir un taux d'appels décrochés en moins de 30% dans 95% des cas.

Une inquiétude sur le respect du secret médical

Il a également fait part de ses inquiétudes face à l'absence d'une garantie concernant le secret médical en laissant la sécurité civile superviser les appels d'urgence: "Quand vous appeler le Samu aujourd’hui, le SAS demain, vous êtes immédiatement dans le cadre du secret médical; nous n’avons aucune garantie de ce qu’il se passerait lorsque ces informations arriveraient dans un service du ministère de l’intérieur".

Dans la lignée des conclusions de la mission Marcus, Pierre Carli a plaidé pour un système deux numéros: un numéro secours et un numéro santé.

"Le numéro que nous voulons voir instaurer c’est un numéro commun", a-t-il développé, avant d'ajouter par la suite que "le principe du numéro commun, c’est que l’on conserve ce qui marche là où ça marche".

"Nous soutenons le maintien de deux plates-formes interconnectées: une plate-forme santé avec toutes les garanties du secret médicale, elle se construit autour du SAS, accessible par un numéro générique [...] et une plate-forme police-secours", a abondé François Braun.

Le président de SUdF a indiqué que le ministère des solidarités et de la santé s'était "prononcé pour que le débat ait lieu et que tout soit mis sur la table".

"Nous sommes tout à fait prêt à discuter et à apporter nos arguments", a-t-il insisté, "il faut que nos parlementaires prennent de la hauteur".

gl/ab/APMnews

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