Actualités de l'Urgence - APM

ACCOUCHEMENTS EXTRAHOSPITALIERS: SÉCURISATION DU SMUR PAR LE DÉTACHEMENT D'UNE SAGE-FEMME AU CHI DES VALLÉES DE L'ARIÈGE
RENNES, 16 octobre 2025 (APMnews) - Au centre hospitalier intercommunal des Vallées de l'Ariège (Chiva), l'intervention d'une sage-femme avec le Smur permet de sécuriser l'urgence obstétricale en cas d'accouchement inopiné extrahospitalier, notamment en cas de prématurité ou de naissances de jumeaux, a estimé mercredi Laurie Bouffartigues, sage-femme coordinatrice dans cet hôpital, à l'occasion des journées de la Société française de médecine périnatale (SFMP), organisées jusqu'à vendredi à Rennes.
En décembre 2023, un décret sur les conditions techniques de fonctionnement de l'activité autorisée de médecine d'urgence a prévu que dans le cadre d'une prise en charge médicale préhospitalière ou d'un transfert, "l'équipage d'un Smur peut être renforcé par des professionnels de santé disposant d'une compétence spécialisée, notamment par des sages-femmes" (cf dépêche du 02/01/2024 à 19:27).
Au Chiva, qui dispose d'une maternité de niveau IIa, cette collaboration a été initiée dès 2002 en raison du caractère rural et montagneux du département, qui dispose par ailleurs d'un maillage serré de casernes de sapeurs-pompiers, a rappelé Laurie Bouffartigues.
L'idée de l'intervention d'une sage-femme lors de sortie Smur visait à sécuriser à la fois les secouristes, les urgentistes et les parturientes lors d'un accouchement inopiné extrahospitalier.
En cas d'appel au 15, 18 ou 112 pour un accouchement imminent, le centre de régulation évalue le risque d'accouchement à domicile et, si ce risque est important, il contacte le bloc obstétrical pour connaître la disponibilité des sages-femmes alors en poste.
La règle de l'établissement est de maintenir un minimum de deux sages-femmes physiquement dans la maternité (habituellement quatre en journée et trois la nuit). Le détachement est refusé s'il y a plus de trois patientes au bloc.
Quand une sage-femme peut partir, elle prend le sac à dos de matériel d'accouchement puis elle rejoint les pompiers avec un véhicule léger du Smur, souvent au domicile de la patiente.
"Les urgentistes sont en général ravis quand une sage-femme peut se détacher car cela permet de les sécuriser car ils sont peu habitués à l'obstétrique", a fait valoir Laurie Bouffartigues.
La sage-femme peut également exercer une forme de compagnonnage avec l'urgentiste pour les accouchements physiologiques. "Soit on le fait à quatre mains, soit on le leur fait faire" pour qu'il puisse progresser.
En cas d'accouchement dystocique ou de besoin de réanimation néonatale, "là, on apporte notre expertise de sage-femme habituée à la pathologie", a relaté Laurie Bouffartigues.
Des formations sont également organisées dans toutes les casernes du département par un de ses collègues pour enseigner aux pompiers les bons gestes de l'accouchement physiologique.
Le Chiva dispose de chambres réservées dans un hôtel pour les patientes habitant loin de la maternité.
Des situations complexes et des questions sur les limites techniques
Seules des sages-femmes ayant déjà de l'expérience sont détachées avec le Smur en raison notamment des caractéristiques de la population locale qui complexifient parfois la situation, a souligné Laurie Bouffartigues.
"On a un bassin de population qui n'est pas facile et très hétérogène", avec "beaucoup de vulnérabilités" et de personnes opposées à la médicalisation qui ont choisi d'avoir un accouchement non assisté à domicile ou assisté mais non physiologique, a-t-elle expliqué. "On peut avoir des refus de soins, des refus de gestes, des refus de revenir à l'hôpital."
Enfin, les soignants sont encore confrontés à des questions sur les limites techniques de cette pratique. "Jusqu'où aller en extrahospitalier? Peut-on poser un KTVO [cathéter veineux ombilical] sans la présence du Smur pédiatrique? […] Peut-on aller jusqu'à faire une délivrance artificielle et une révision utérine à domicile même en milieu peu aseptisé avec les risques infectieux que ça comporte?"
Outre une bonne connaissance du matériel apporté, ces situations nécessitent aussi "beaucoup d'esprit d'équipe", a fait valoir Laurie Bouffartigues. "Quand on sort en Smur, on s'est rendu compte que la sage-femme devait souvent prendre le lead à la demande du médecin, ce qui n'est pas facile" et nécessite de se former à cette pratique car il faut diriger le médecin, l'infirmier et le conducteur Smur.
Avec ses collègues, elle estime qu'il faudrait construire une formation théorique à l'accouchement inopiné extrahospitalier pour les nouvelles sages-femmes qui intègrent l'équipe mais également pour les acteurs des urgences. Une formation à la réanimation du nouveau-né, à laquelle sont conviés les conducteurs du Smur ainsi que les infirmiers et les médecins, a déjà été mise en place.
Pour Laurie Bouffartigues, il pourrait être intéressant de diffuser les protocoles de collaboration entre sages-femmes et Smur mis en œuvre au Chiva ou de renforcer la formation des Smur sur l'accouchement inopiné et sur la réanimation du nouveau-né en dehors d'un hôpital.
Le Pr Tahar Chouihed, chef du service des urgences et du Samu du CHU de Nancy, a jugé cette collaboration très intéressante. Il a dit essayer d'organiser une astreinte de sage-femme dans son établissement pour être en mesure de faire participer une sage-femme aux sorties du Smur mais se heurter au coût de la mesure. Il élabore actuellement avec le chef du pôle de gynécologie-obstétrique, le Pr Olivier Morel, un projet médico-économique pour valoriser ce dispositif.
Pour lui, il faudrait également développer le guidage des mains de l'urgentiste par visioconférence.
cb/nc/APMnews
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ACCOUCHEMENTS EXTRAHOSPITALIERS: SÉCURISATION DU SMUR PAR LE DÉTACHEMENT D'UNE SAGE-FEMME AU CHI DES VALLÉES DE L'ARIÈGE
RENNES, 16 octobre 2025 (APMnews) - Au centre hospitalier intercommunal des Vallées de l'Ariège (Chiva), l'intervention d'une sage-femme avec le Smur permet de sécuriser l'urgence obstétricale en cas d'accouchement inopiné extrahospitalier, notamment en cas de prématurité ou de naissances de jumeaux, a estimé mercredi Laurie Bouffartigues, sage-femme coordinatrice dans cet hôpital, à l'occasion des journées de la Société française de médecine périnatale (SFMP), organisées jusqu'à vendredi à Rennes.
En décembre 2023, un décret sur les conditions techniques de fonctionnement de l'activité autorisée de médecine d'urgence a prévu que dans le cadre d'une prise en charge médicale préhospitalière ou d'un transfert, "l'équipage d'un Smur peut être renforcé par des professionnels de santé disposant d'une compétence spécialisée, notamment par des sages-femmes" (cf dépêche du 02/01/2024 à 19:27).
Au Chiva, qui dispose d'une maternité de niveau IIa, cette collaboration a été initiée dès 2002 en raison du caractère rural et montagneux du département, qui dispose par ailleurs d'un maillage serré de casernes de sapeurs-pompiers, a rappelé Laurie Bouffartigues.
L'idée de l'intervention d'une sage-femme lors de sortie Smur visait à sécuriser à la fois les secouristes, les urgentistes et les parturientes lors d'un accouchement inopiné extrahospitalier.
En cas d'appel au 15, 18 ou 112 pour un accouchement imminent, le centre de régulation évalue le risque d'accouchement à domicile et, si ce risque est important, il contacte le bloc obstétrical pour connaître la disponibilité des sages-femmes alors en poste.
La règle de l'établissement est de maintenir un minimum de deux sages-femmes physiquement dans la maternité (habituellement quatre en journée et trois la nuit). Le détachement est refusé s'il y a plus de trois patientes au bloc.
Quand une sage-femme peut partir, elle prend le sac à dos de matériel d'accouchement puis elle rejoint les pompiers avec un véhicule léger du Smur, souvent au domicile de la patiente.
"Les urgentistes sont en général ravis quand une sage-femme peut se détacher car cela permet de les sécuriser car ils sont peu habitués à l'obstétrique", a fait valoir Laurie Bouffartigues.
La sage-femme peut également exercer une forme de compagnonnage avec l'urgentiste pour les accouchements physiologiques. "Soit on le fait à quatre mains, soit on le leur fait faire" pour qu'il puisse progresser.
En cas d'accouchement dystocique ou de besoin de réanimation néonatale, "là, on apporte notre expertise de sage-femme habituée à la pathologie", a relaté Laurie Bouffartigues.
Des formations sont également organisées dans toutes les casernes du département par un de ses collègues pour enseigner aux pompiers les bons gestes de l'accouchement physiologique.
Le Chiva dispose de chambres réservées dans un hôtel pour les patientes habitant loin de la maternité.
Des situations complexes et des questions sur les limites techniques
Seules des sages-femmes ayant déjà de l'expérience sont détachées avec le Smur en raison notamment des caractéristiques de la population locale qui complexifient parfois la situation, a souligné Laurie Bouffartigues.
"On a un bassin de population qui n'est pas facile et très hétérogène", avec "beaucoup de vulnérabilités" et de personnes opposées à la médicalisation qui ont choisi d'avoir un accouchement non assisté à domicile ou assisté mais non physiologique, a-t-elle expliqué. "On peut avoir des refus de soins, des refus de gestes, des refus de revenir à l'hôpital."
Enfin, les soignants sont encore confrontés à des questions sur les limites techniques de cette pratique. "Jusqu'où aller en extrahospitalier? Peut-on poser un KTVO [cathéter veineux ombilical] sans la présence du Smur pédiatrique? […] Peut-on aller jusqu'à faire une délivrance artificielle et une révision utérine à domicile même en milieu peu aseptisé avec les risques infectieux que ça comporte?"
Outre une bonne connaissance du matériel apporté, ces situations nécessitent aussi "beaucoup d'esprit d'équipe", a fait valoir Laurie Bouffartigues. "Quand on sort en Smur, on s'est rendu compte que la sage-femme devait souvent prendre le lead à la demande du médecin, ce qui n'est pas facile" et nécessite de se former à cette pratique car il faut diriger le médecin, l'infirmier et le conducteur Smur.
Avec ses collègues, elle estime qu'il faudrait construire une formation théorique à l'accouchement inopiné extrahospitalier pour les nouvelles sages-femmes qui intègrent l'équipe mais également pour les acteurs des urgences. Une formation à la réanimation du nouveau-né, à laquelle sont conviés les conducteurs du Smur ainsi que les infirmiers et les médecins, a déjà été mise en place.
Pour Laurie Bouffartigues, il pourrait être intéressant de diffuser les protocoles de collaboration entre sages-femmes et Smur mis en œuvre au Chiva ou de renforcer la formation des Smur sur l'accouchement inopiné et sur la réanimation du nouveau-né en dehors d'un hôpital.
Le Pr Tahar Chouihed, chef du service des urgences et du Samu du CHU de Nancy, a jugé cette collaboration très intéressante. Il a dit essayer d'organiser une astreinte de sage-femme dans son établissement pour être en mesure de faire participer une sage-femme aux sorties du Smur mais se heurter au coût de la mesure. Il élabore actuellement avec le chef du pôle de gynécologie-obstétrique, le Pr Olivier Morel, un projet médico-économique pour valoriser ce dispositif.
Pour lui, il faudrait également développer le guidage des mains de l'urgentiste par visioconférence.
cb/nc/APMnews