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18/12 2025
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ALSACE: MARC NOIZET QUITTE LE GHRMSA AVEC UN "SENTIMENT DE RÉUSSITE COLLECTIVE" DANS LA GESTION DU COVID ET UN SERVICE REMIS D'APLOMB

(Par Geoffroy LANG)

MULHOUSE (Haut-Rhin), 18 décembre 2025 (APMnews) - Avant de rejoindre l'agence régionale de santé (ARS) Mayotte, en janvier 2026, le Dr Marc Noizet est revenu, lors d'un entretien accordé lundi soir à APMnews, sur les temps forts qui ont jalonné sa chefferie de service aux urgences du groupe hospitalier de la région de Mulhouse et Sud-Alsace (GHRMSA).

Le Dr Noizet s'apprête à quitter la chefferie de service des urgences du GHRMSA ainsi que la présidence du syndicat professionnel Samu-Urgences de France (SUdF) pour rejoindre l'ARS mahoraise comme conseiller médical auprès du directeur général, Sergio Albarello (cf dépêche du 17/12/2025 à 19:37).

Arrivé à la chefferie de service des urgences du GHRMSA fin 2019, d'abord à mi-temps, avant de passer à temps plein en janvier 2020, le Dr Marc Noizet a décrit lundi à APMnews la situation complexe qui l'attendait alors à Mulhouse: "un service qui était dans un processus que l'on peut qualifier d'effondrement, avec 17 médecins qui [avaient] quitté le service en 12 mois".

"Quand j'arrive, il ne reste que six médecins sur une cible à 37, et sept chefs de service se sont succédé en neuf ans, et donc c'est un service qui […] s'est dégradé progressivement", a-t-il poursuivi, relatant l'inquiétude partagée tant par les soignants que par la direction de l'hôpital et l'agence régionale de santé (ARS) Grand Est quant au risque de fermeture du service.

Après une vague d'arrêts de travail "pour épuisement professionnel" des 17 internes en médecine officiant au service des urgences à l'automne 2019 (cf dépêche du 03/10/2019 à 17:39 et dépêche du 16/10/2019 à 18:29), le nouveau chef du service a également dû composer dès son arrivée avec une grève du personnel paramédical des urgences en raison de la dégradation de leurs conditions de travail et de celles de la prise en charge des patients.

"Donc, je suis recruté pour relancer la machine, travailler sur les points qui avaient occasionné cette spirale négative et relancer un mode d'organisation au niveau attendu", a retracé Marc Noizet, avec comme priorité la conception d'un plan de continuité d'activité: "Comment on peut fermer le service sans occasionner de perte de chance pour la population."

"Je continue de faire mon diagnostic, de m'imprégner de l'établissement et de la cible attendue, pour rédiger le plan d'action et reconstruire le service, et alors qu'on est en train de faire ça, tout à coup, on est happés par cette vague Covid qui s'abat sur la ville de façon très brutale", a recontextualisé le Dr Noizet. Le GHRMSA a été le premier hôpital français à faire face à des admissions massives de patients atteints du coronavirus début mars 2020 (cf dépêche du 24/03/2020 à 18:27 et dépêche du 26/03/2020 à 18:52), du fait de l'apparition d'un foyer de contamination à l'issue d'un rassemblement évangéliste qui avait réuni plus de 3.000 personnes près de Mulhouse (cf dépêche du 03/03/2020 à 22:54), rappelle-t-on.

"C'était une intensité hors du commun. On n'a pas compté nos heures de travail, et encore moins nos heures de repos, on était sur la brèche tous les jours, tout le temps. Il a fallu inventer beaucoup de choses parce que le système de santé n'était absolument pas prêt à encaisser une crise de cette violence", s'est-il remémoré. "J'étais seul, je n'avais pas d'adjoint pour adapter le service, c'était évidemment une complexité supplémentaire, mais un urgentiste, c'est un médecin qui se prépare à la crise. Quelque part, c'était la consécration d'une vie."

"La chance, dans le domaine de la santé, c'est que quand le système est en crise, comme c'était le cas, tout le monde se relève, et chaque membre de l'hôpital est venu nous aider même si son pan d'activité s'était arrêté", a-t-il souligné. "Je pense aux chirurgiens qui sont venus aux urgences pour nous aider là où ils pouvaient, à la direction, qui avait tout arrêté pour se concentrer sur l'adaptation de crise. C'était quelque chose d'hyperdynamique et performant. Nous avons adapté autant que possible le système pour offrir le meilleur des soins au plus grand nombre."

Un "sentiment de réussite collective" dans la gestion du Covid-19

S'il a rappelé le rôle essentiel des transferts de près de 300 patients depuis le Haut-Rhin pour parvenir à faire face à la première vague de l'épidémie, avec la mise en place des évacuations "Chardon" en TGV (cf dépêche du 12/10/2020 à 18:38 et dépêche du 12/10/2020 à 18:08), Marc Noizet a aussi fait état d'un "sentiment de réussite collective" dans l'adaptation de son établissement face au Covid-19: "Il y a tellement de gens qui ont dû mettre la main à la pâte et qui ont eu des actions déterminantes pour la réussite, sur de petites choses comme sur de grandes choses, c'est vraiment un collectif qui, tout à coup, a trouvé une cohésion."

Alors que l'épidémie était venue percuter de plein fouet ses premiers efforts pour reconstruire le service d'urgences du GHRMSA, il a souhaité tirer profit de la mobilisation extraordinaire de l'hôpital et de son service pour relancer à la dynamique de projet au sortir de la première vague, en juin 2020: "Très tôt, l'établissement a mis en place une cellule de soutien, dans le bien-être et le soutien psychologique, qui a fonctionné et qui continue aujourd'hui à fonctionner. Cela fait partie des choses qu'on a gardées [cf dépêche du 11/06/2020 à 18:42 et dépêche du 21/08/2020 à 18:26]."

"Pendant toute la crise, je me suis appuyé sur un cabinet d'ingénieurs qui avait mis à disposition des ressources à mes côtés", a-t-il repris. "Je les ai utilisées pour préparer le coup d'après, c'est-à-dire les moments où on sort de la crise. D'une part, il faut capitaliser sur tout ce que l'on a fait pendant cette crise et d'autre part, il faut lancer la dynamique suivante, ne pas laisser les gens s'appesantir et redonner une dynamique très positive pour porter le service derrière."

En s'appuyant sur un retour d'expérience de l'ensemble du personnel des urgences durant le Covid, un nouveau projet de service a été élaboré et présenté dès le 11 juin 2020 afin de répondre aux "problématiques organisationnelles", "de liens fonctionnels avec le reste de l'établissement", "d'attractivité", "de système d'information" ou encore "de modernité de l'outil de travail".

"On a essayé de répondre de manière posée à chacun des points noirs du diagnostic qu'on avait réalisé", a résumé Marc Noizet, faisant remarquer qu'il s'était également appuyé sur les précédents travaux menés par la direction du GHRMSA, sur la Société française de médecine d'urgence (SFMU) et sur un audit extérieur, pour proposer un plan d'action allant de mesures de très court terme à des projets de restructuration plus lointains, comme la reconstruction d'un bâtiment neuf pour les urgences et les soins critiques, qui doit aboutir en 2028 (cf dépêche du 01/12/2023 à 12:28).

"Cela s'est vraiment étalé sur une longue période et chacun des points que nous avions identifiés à cette époque-ci a aujourd'hui été réalisé, cela veut dire qu'on n'avait pas trop mal vu, ni dans la temporalité ni sur les objectifs, parce que la dynamique a été retrouvée dans le service aujourd'hui", a-t-il pointé.

Il a également concédé que la gestion de la crise du Covid avait paradoxalement pu bénéficier à la reconstruction de son service d'urgence, tout en le légitimant pour pouvoir la mener: "La crise sanitaire m'a propulsé devant les caméras, il a fallu expliquer ce qu'on faisait, montrer qu'on y arrivait, témoigner de la difficulté. Derrière ça, j'ai eu une visibilité nationale dans le métier parce que j'ai participé à des conférences en ligne pour expliquer ce qu'on vivait, comment nous nous étions adaptés, et elles ont servi la cause d'autres établissements."

Une crise motrice pour la renaissance des urgences

"Il aurait sans doute fallu plusieurs mois, voire plusieurs années pour [y parvenir], et là, tout à coup, tout le monde s'est dit: 'Ce mec-là, il connaît son métier, c'est bon, on le croit et on l'écoute'", a-t-il poursuivi. "Et à partir de là, grâce à cette communication, le fait de discuter avec les gens et de montrer que vous êtes quelqu'un de confiance, progressivement, ça a fait tache d'huile et on a un [urgentiste] qui est venu, puis deux, et puis trois ou quatre, etc."

Une dynamique analogue s'est produite avec les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) grâce à la mise en place de programmes d'accueil, d'accompagnement et de formation de ces médecins: "Une fois que vous en avez deux ou trois qui viennent d'une équipe et qui disent 'là c'est vraiment bien', vous en avez d'autres qui arrivent, cela fait très vite boule de neige", a relaté l'urgentiste.

"Et cinq ans plus tard [en 2025, NDLR], l'équipe est constituée de 32 médecins et a trouvé une assise avec des cadres, des référents d'unité et des plus jeunes qui arrivent", a constaté Marc Noizet. "L'attractivité, d'une manière générale, a été retrouvée."

Durant cette période, les urgences du GHRMSA ont également usé de toutes les opportunités possibles pour optimiser leur activité, avec l'installation d'un centre de soins non programmés en proximité (cf dépêche du 28/04/2021 à 17:51); la mise en place d'un protocole de réorientation des patients vers la médecine de ville et l'expérimentation d'un Smur paramédicalisé en 2021; une opération de réhabilitation des locaux en 2022; la mise en place du service d'accès aux soins (SAS) en 2023; et l'arrivée d'infirmières en pratique avancée (IPA) aux urgences en 2023 et 2024.

"Ça a été un très beau terrain d'expérimentation, parce que, comme il fallait reconstruire, moderniser, on s'est instruit de ce qui avait été décrit par ceux qui avaient pensé l'évolution de la médecine d'urgence", a résumé Marc Noizet.

"C'était l'homme de la situation", salue Corinne Krencker

"Nous sommes arrivés, moi un tout petit peu avant lui, en ne sachant pas forcément tout ce qui se passait aux urgences, avec un service en grande difficulté et en absence de projet", s'est remémoré la directrice du GHRMSA, Corinne Krencker, jointe mardi par APMnews.

Arrivée début 2019 dans le Haut-Rhin après avoir quitté la direction du centre hospitalier (CH) de Bourg-en-Bresse, la directrice a découvert des urgences dont les locaux "n'étaient pas à la hauteur d'un service qui avait beaucoup crû en activité" et qui était en proie à des tensions chroniques de ressources humaines.

"C'était un challenge, pour lui comme pour moi, de reconstruire un service en partant d'une feuille blanche", a-t-elle souligné, en saluant l'action du chef de service qui l'a accompagnée pendant cinq ans: "C'était l'homme de la situation, c'était un grand défi pour nous et c'est quelqu'un qui a une vision de ce qu'est un hôpital, notamment sur un grand territoire comme le nôtre. Il a du leadership."

Si elle reconnaît que la prise en charge des soins non programmés continue de présenter "toujours des complications, avec une activité qui continue d'augmenter", elle a également mis en exergue les évolutions organisationnelles accomplies au cours des cinq années passées, avec la constitution d'un service d'accès aux soins (SAS) organisé sous forme de groupement de coopération sanitaire (GCS), des unités d'urgence préfigurant les antennes médicales d'urgence créées par la réforme des conditions d'implantation et de fonctionnement de l'activité de médecine d'urgence, en décembre 2023 (cf dépêche du 02/01/2024 à 19:27), l'expérimentation d'un Smur paramédical et la livraison à venir du bâtiment "Oxygène", qui accueillera l'ensemble des activités d'urgence et de soins critiques du GHRMSA en 2028.

"On a eu la chance d'être accompagnés dans cette démarche, notamment financièrement [cf dépêche du 02/06/2025 à 18:03]", a souligné Corinne Krencker, qui estime aussi que la crise sanitaire a finalement permis d'accélérer le processus de reconstruction du service d'urgence: "Si on regarde les choses avec un peu de recul, cela a permis de reconstruire les choses plus vite."

Au moment de voir partir Marc Noizet, la directrice a confié à APMnews: "Le défi que je lui ai fixé, c'est d'être présent pour l'inauguration du bâtiment Oxygène."

gl/san/lb/APMnews

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(Par Geoffroy LANG)

MULHOUSE (Haut-Rhin), 18 décembre 2025 (APMnews) - Avant de rejoindre l'agence régionale de santé (ARS) Mayotte, en janvier 2026, le Dr Marc Noizet est revenu, lors d'un entretien accordé lundi soir à APMnews, sur les temps forts qui ont jalonné sa chefferie de service aux urgences du groupe hospitalier de la région de Mulhouse et Sud-Alsace (GHRMSA).

Le Dr Noizet s'apprête à quitter la chefferie de service des urgences du GHRMSA ainsi que la présidence du syndicat professionnel Samu-Urgences de France (SUdF) pour rejoindre l'ARS mahoraise comme conseiller médical auprès du directeur général, Sergio Albarello (cf dépêche du 17/12/2025 à 19:37).

Arrivé à la chefferie de service des urgences du GHRMSA fin 2019, d'abord à mi-temps, avant de passer à temps plein en janvier 2020, le Dr Marc Noizet a décrit lundi à APMnews la situation complexe qui l'attendait alors à Mulhouse: "un service qui était dans un processus que l'on peut qualifier d'effondrement, avec 17 médecins qui [avaient] quitté le service en 12 mois".

"Quand j'arrive, il ne reste que six médecins sur une cible à 37, et sept chefs de service se sont succédé en neuf ans, et donc c'est un service qui […] s'est dégradé progressivement", a-t-il poursuivi, relatant l'inquiétude partagée tant par les soignants que par la direction de l'hôpital et l'agence régionale de santé (ARS) Grand Est quant au risque de fermeture du service.

Après une vague d'arrêts de travail "pour épuisement professionnel" des 17 internes en médecine officiant au service des urgences à l'automne 2019 (cf dépêche du 03/10/2019 à 17:39 et dépêche du 16/10/2019 à 18:29), le nouveau chef du service a également dû composer dès son arrivée avec une grève du personnel paramédical des urgences en raison de la dégradation de leurs conditions de travail et de celles de la prise en charge des patients.

"Donc, je suis recruté pour relancer la machine, travailler sur les points qui avaient occasionné cette spirale négative et relancer un mode d'organisation au niveau attendu", a retracé Marc Noizet, avec comme priorité la conception d'un plan de continuité d'activité: "Comment on peut fermer le service sans occasionner de perte de chance pour la population."

"Je continue de faire mon diagnostic, de m'imprégner de l'établissement et de la cible attendue, pour rédiger le plan d'action et reconstruire le service, et alors qu'on est en train de faire ça, tout à coup, on est happés par cette vague Covid qui s'abat sur la ville de façon très brutale", a recontextualisé le Dr Noizet. Le GHRMSA a été le premier hôpital français à faire face à des admissions massives de patients atteints du coronavirus début mars 2020 (cf dépêche du 24/03/2020 à 18:27 et dépêche du 26/03/2020 à 18:52), du fait de l'apparition d'un foyer de contamination à l'issue d'un rassemblement évangéliste qui avait réuni plus de 3.000 personnes près de Mulhouse (cf dépêche du 03/03/2020 à 22:54), rappelle-t-on.

"C'était une intensité hors du commun. On n'a pas compté nos heures de travail, et encore moins nos heures de repos, on était sur la brèche tous les jours, tout le temps. Il a fallu inventer beaucoup de choses parce que le système de santé n'était absolument pas prêt à encaisser une crise de cette violence", s'est-il remémoré. "J'étais seul, je n'avais pas d'adjoint pour adapter le service, c'était évidemment une complexité supplémentaire, mais un urgentiste, c'est un médecin qui se prépare à la crise. Quelque part, c'était la consécration d'une vie."

"La chance, dans le domaine de la santé, c'est que quand le système est en crise, comme c'était le cas, tout le monde se relève, et chaque membre de l'hôpital est venu nous aider même si son pan d'activité s'était arrêté", a-t-il souligné. "Je pense aux chirurgiens qui sont venus aux urgences pour nous aider là où ils pouvaient, à la direction, qui avait tout arrêté pour se concentrer sur l'adaptation de crise. C'était quelque chose d'hyperdynamique et performant. Nous avons adapté autant que possible le système pour offrir le meilleur des soins au plus grand nombre."

Un "sentiment de réussite collective" dans la gestion du Covid-19

S'il a rappelé le rôle essentiel des transferts de près de 300 patients depuis le Haut-Rhin pour parvenir à faire face à la première vague de l'épidémie, avec la mise en place des évacuations "Chardon" en TGV (cf dépêche du 12/10/2020 à 18:38 et dépêche du 12/10/2020 à 18:08), Marc Noizet a aussi fait état d'un "sentiment de réussite collective" dans l'adaptation de son établissement face au Covid-19: "Il y a tellement de gens qui ont dû mettre la main à la pâte et qui ont eu des actions déterminantes pour la réussite, sur de petites choses comme sur de grandes choses, c'est vraiment un collectif qui, tout à coup, a trouvé une cohésion."

Alors que l'épidémie était venue percuter de plein fouet ses premiers efforts pour reconstruire le service d'urgences du GHRMSA, il a souhaité tirer profit de la mobilisation extraordinaire de l'hôpital et de son service pour relancer à la dynamique de projet au sortir de la première vague, en juin 2020: "Très tôt, l'établissement a mis en place une cellule de soutien, dans le bien-être et le soutien psychologique, qui a fonctionné et qui continue aujourd'hui à fonctionner. Cela fait partie des choses qu'on a gardées [cf dépêche du 11/06/2020 à 18:42 et dépêche du 21/08/2020 à 18:26]."

"Pendant toute la crise, je me suis appuyé sur un cabinet d'ingénieurs qui avait mis à disposition des ressources à mes côtés", a-t-il repris. "Je les ai utilisées pour préparer le coup d'après, c'est-à-dire les moments où on sort de la crise. D'une part, il faut capitaliser sur tout ce que l'on a fait pendant cette crise et d'autre part, il faut lancer la dynamique suivante, ne pas laisser les gens s'appesantir et redonner une dynamique très positive pour porter le service derrière."

En s'appuyant sur un retour d'expérience de l'ensemble du personnel des urgences durant le Covid, un nouveau projet de service a été élaboré et présenté dès le 11 juin 2020 afin de répondre aux "problématiques organisationnelles", "de liens fonctionnels avec le reste de l'établissement", "d'attractivité", "de système d'information" ou encore "de modernité de l'outil de travail".

"On a essayé de répondre de manière posée à chacun des points noirs du diagnostic qu'on avait réalisé", a résumé Marc Noizet, faisant remarquer qu'il s'était également appuyé sur les précédents travaux menés par la direction du GHRMSA, sur la Société française de médecine d'urgence (SFMU) et sur un audit extérieur, pour proposer un plan d'action allant de mesures de très court terme à des projets de restructuration plus lointains, comme la reconstruction d'un bâtiment neuf pour les urgences et les soins critiques, qui doit aboutir en 2028 (cf dépêche du 01/12/2023 à 12:28).

"Cela s'est vraiment étalé sur une longue période et chacun des points que nous avions identifiés à cette époque-ci a aujourd'hui été réalisé, cela veut dire qu'on n'avait pas trop mal vu, ni dans la temporalité ni sur les objectifs, parce que la dynamique a été retrouvée dans le service aujourd'hui", a-t-il pointé.

Il a également concédé que la gestion de la crise du Covid avait paradoxalement pu bénéficier à la reconstruction de son service d'urgence, tout en le légitimant pour pouvoir la mener: "La crise sanitaire m'a propulsé devant les caméras, il a fallu expliquer ce qu'on faisait, montrer qu'on y arrivait, témoigner de la difficulté. Derrière ça, j'ai eu une visibilité nationale dans le métier parce que j'ai participé à des conférences en ligne pour expliquer ce qu'on vivait, comment nous nous étions adaptés, et elles ont servi la cause d'autres établissements."

Une crise motrice pour la renaissance des urgences

"Il aurait sans doute fallu plusieurs mois, voire plusieurs années pour [y parvenir], et là, tout à coup, tout le monde s'est dit: 'Ce mec-là, il connaît son métier, c'est bon, on le croit et on l'écoute'", a-t-il poursuivi. "Et à partir de là, grâce à cette communication, le fait de discuter avec les gens et de montrer que vous êtes quelqu'un de confiance, progressivement, ça a fait tache d'huile et on a un [urgentiste] qui est venu, puis deux, et puis trois ou quatre, etc."

Une dynamique analogue s'est produite avec les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) grâce à la mise en place de programmes d'accueil, d'accompagnement et de formation de ces médecins: "Une fois que vous en avez deux ou trois qui viennent d'une équipe et qui disent 'là c'est vraiment bien', vous en avez d'autres qui arrivent, cela fait très vite boule de neige", a relaté l'urgentiste.

"Et cinq ans plus tard [en 2025, NDLR], l'équipe est constituée de 32 médecins et a trouvé une assise avec des cadres, des référents d'unité et des plus jeunes qui arrivent", a constaté Marc Noizet. "L'attractivité, d'une manière générale, a été retrouvée."

Durant cette période, les urgences du GHRMSA ont également usé de toutes les opportunités possibles pour optimiser leur activité, avec l'installation d'un centre de soins non programmés en proximité (cf dépêche du 28/04/2021 à 17:51); la mise en place d'un protocole de réorientation des patients vers la médecine de ville et l'expérimentation d'un Smur paramédicalisé en 2021; une opération de réhabilitation des locaux en 2022; la mise en place du service d'accès aux soins (SAS) en 2023; et l'arrivée d'infirmières en pratique avancée (IPA) aux urgences en 2023 et 2024.

"Ça a été un très beau terrain d'expérimentation, parce que, comme il fallait reconstruire, moderniser, on s'est instruit de ce qui avait été décrit par ceux qui avaient pensé l'évolution de la médecine d'urgence", a résumé Marc Noizet.

"C'était l'homme de la situation", salue Corinne Krencker

"Nous sommes arrivés, moi un tout petit peu avant lui, en ne sachant pas forcément tout ce qui se passait aux urgences, avec un service en grande difficulté et en absence de projet", s'est remémoré la directrice du GHRMSA, Corinne Krencker, jointe mardi par APMnews.

Arrivée début 2019 dans le Haut-Rhin après avoir quitté la direction du centre hospitalier (CH) de Bourg-en-Bresse, la directrice a découvert des urgences dont les locaux "n'étaient pas à la hauteur d'un service qui avait beaucoup crû en activité" et qui était en proie à des tensions chroniques de ressources humaines.

"C'était un challenge, pour lui comme pour moi, de reconstruire un service en partant d'une feuille blanche", a-t-elle souligné, en saluant l'action du chef de service qui l'a accompagnée pendant cinq ans: "C'était l'homme de la situation, c'était un grand défi pour nous et c'est quelqu'un qui a une vision de ce qu'est un hôpital, notamment sur un grand territoire comme le nôtre. Il a du leadership."

Si elle reconnaît que la prise en charge des soins non programmés continue de présenter "toujours des complications, avec une activité qui continue d'augmenter", elle a également mis en exergue les évolutions organisationnelles accomplies au cours des cinq années passées, avec la constitution d'un service d'accès aux soins (SAS) organisé sous forme de groupement de coopération sanitaire (GCS), des unités d'urgence préfigurant les antennes médicales d'urgence créées par la réforme des conditions d'implantation et de fonctionnement de l'activité de médecine d'urgence, en décembre 2023 (cf dépêche du 02/01/2024 à 19:27), l'expérimentation d'un Smur paramédical et la livraison à venir du bâtiment "Oxygène", qui accueillera l'ensemble des activités d'urgence et de soins critiques du GHRMSA en 2028.

"On a eu la chance d'être accompagnés dans cette démarche, notamment financièrement [cf dépêche du 02/06/2025 à 18:03]", a souligné Corinne Krencker, qui estime aussi que la crise sanitaire a finalement permis d'accélérer le processus de reconstruction du service d'urgence: "Si on regarde les choses avec un peu de recul, cela a permis de reconstruire les choses plus vite."

Au moment de voir partir Marc Noizet, la directrice a confié à APMnews: "Le défi que je lui ai fixé, c'est d'être présent pour l'inauguration du bâtiment Oxygène."

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