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29/10 2016
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ANGERS: UNE PERMANENCIÈRE DU CENTRE 15 CONDAMNÉE EN APPEL, LA RELAXE DU CHU CONFIRMÉE

ANGERS, 28 octobre 2016 (APM) - Une ancienne permanencière du Samu-centre 15 d'Angers a été condamnée à un an de prison avec sursis mais sans inscription à son casier judiciaire à la suite d'un décès survenu en 2009, alors que la relaxe du CHU a été confirmée, a-t-on appris auprès de la direction générale du CHU et de la Cour d'appel d'Angers.

En première instance, par une décision du 16 mars 2015, le tribunal correctionnel d'Angers avait relaxé le CHU et la permanencière auxiliaire de régulation médicale (Parm) qui étaient poursuivis pour homicide involontaire par le mari d'une jeune femme de 27 ans, Stéphanie Rousset, décédée le 9 avril 2009 d'une embolie pulmonaire foudroyante.

Le mari avait appelé le 15 ce jour-là, un peu avant 8h30, en indiquant que sa femme ne se sentait pas bien, ne parvenant plus à parler et à respirer. Mais les échanges avec la permanencière avaient été compliqués en raison de plusieurs coupures téléphoniques. Lorsque le Samu était arrivé sur place 40 minutes après le premier appel, la jeune femme était inconsciente. Transportée au CHU, elle n'avait pas pu être réanimée.

Le mari avait porté plainte contre le CHU, lui reprochant des dysfonctionnements dans l'organisation et un manque d'effectifs au centre 15, et contre la permanencière, estimant qu'elle avait mal analysé la situation et aurait dû réagir plus rapidement.

Le procureur de la République d'Angers avait interjeté appel de la relaxe du CHU et de la permanencière.

Dans un arrêt rendu mardi, la Cour d'appel a confirmé la relaxe du CHU mais a condamné l'ancienne permanencière.

Il lui est reproché de ne pas avoir tenu compte des mots clés prononcés par l'entourage de la jeune femme alors qu'ils auraient dû lui permettre d'évaluer le niveau de priorité à P0 ou P1. Les appels reçus par les Parm peuvent être classés selon trois niveaux à partir d'une liste de mots clés: P0 qui déclenche une équipe Smur suivi d'une régulation prioritaire, P1 qui conduit à une régulation prioritaire et P2 pour lequel la régulation peut être mise en attente sans risque pour le patient.

L'ancienne permanencière soutient qu'au cours des échanges téléphoniques qu'elle a eus avec l'entourage de la patiente décédée, elle n'a pas disposé des mots clés justifiant d'une priorité P0 ou P1, indique la Cour d'appel. Cependant lors du deuxième appel à 8h24, le mari de la jeune femme a déclaré notamment qu'elle n'arrivait plus à respirer et, lors de l'appel retransféré par les pompiers à 8h29, il mentionnait que ses mains se pliaient toutes seules, "ce qui constitue indéniablement un mouvement anormal", note-t-elle.

En ces 5 minutes, la Parm a entendu au moins deux des mots clés mais elle n'en a pas tiré la conséquence prévue par le protocole, à savoir saisir immédiatement le médecin régulateur, lequel se trouvait dans la même pièce et n'était pas rendu indisponible par le transfert de consignes en cours qu'il était parfaitement en mesure d'interrompre en cas d'urgence, est-il précisé dans l'arrêt. Elle aurait également pu à défaut déclencher elle-même les secours.

"Elle s'est bornée après avoir entendu le premier de ces mots-clés à demander l'envoi d'une ambulance sans urgence particulière et n'a pas modifié cette disposition après avoir entendu le deuxième", lui reproche la Cour.

Elle estime que par ce simple fait, "quelles que soient les conditions de travail, l'absence de formation plus étendue, la difficulté de [la permanencière] à supporter les contraintes de son travail, il y a eu une erreur commise par cette professionnelle' qui exerçait cette fonction depuis plus de 10 ans et connaissait les détails du protocole.

La Cour d'appel juge que "cette erreur dans le classement de priorité [que la permanencière] n'a corrigé à aucun moment" est d'une "particulière gravité dans ce qu'il a retardé l'envoi de secours utile dans un moment où la rapidité de l'intervention est primordiale".

Elle évoque une "faute caractérisée" car cette erreur a "exposé la personne en souffrance à un risque d'une particulière gravité" que la Parm ne pouvait ignorer.

La Cour observe qu'il n'est pas possible d'établir qu'une prise en charge médicale adaptée plus rapide aurait permis de manière certaine de sauver la patiente. Elle insiste sur "le caractère aléatoire des chances de survie" car, selon un médecin expert, le taux de mortalité en milieu hospitalier des patients atteints d'embolie pulmonaire varie de 15% à 60%.

Toutefois "cela ne démontre pas que l'utilité d'une intervention est nulle dans de tels cas" et "le retard apporté à l'intervention a fait perdre à Mme Rousset toute chance de survie, ce qui établit le lien de causalité entre la faute commise et le décès de cette dernière".

===La direction générale du CHU surprise par le jugement

Contactée vendredi par l'APM, la direction générale du CHU s'est déclarée "surprise" par la condamnation de l'ancienne permanencière car le procureur en appel avait confirmé le jugement de première instance, c'est-à-dire la relaxe. N'ayant pas eu la notification des attendus, elle ne peut pas encore préciser les suites qu'elle lui donnera.

Elle assure qu'elle accompagnera l'ancienne Parm, quelle que soit sa décision sur les suites à donner au jugement, dans le respect de la personne décédée.

L'ancienne permanencière travaille actuellement au CHU, ainsi que le mari de la jeune femme décédée.

cb/fb/APM polsan

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ANGERS: UNE PERMANENCIÈRE DU CENTRE 15 CONDAMNÉE EN APPEL, LA RELAXE DU CHU CONFIRMÉE

ANGERS, 28 octobre 2016 (APM) - Une ancienne permanencière du Samu-centre 15 d'Angers a été condamnée à un an de prison avec sursis mais sans inscription à son casier judiciaire à la suite d'un décès survenu en 2009, alors que la relaxe du CHU a été confirmée, a-t-on appris auprès de la direction générale du CHU et de la Cour d'appel d'Angers.

En première instance, par une décision du 16 mars 2015, le tribunal correctionnel d'Angers avait relaxé le CHU et la permanencière auxiliaire de régulation médicale (Parm) qui étaient poursuivis pour homicide involontaire par le mari d'une jeune femme de 27 ans, Stéphanie Rousset, décédée le 9 avril 2009 d'une embolie pulmonaire foudroyante.

Le mari avait appelé le 15 ce jour-là, un peu avant 8h30, en indiquant que sa femme ne se sentait pas bien, ne parvenant plus à parler et à respirer. Mais les échanges avec la permanencière avaient été compliqués en raison de plusieurs coupures téléphoniques. Lorsque le Samu était arrivé sur place 40 minutes après le premier appel, la jeune femme était inconsciente. Transportée au CHU, elle n'avait pas pu être réanimée.

Le mari avait porté plainte contre le CHU, lui reprochant des dysfonctionnements dans l'organisation et un manque d'effectifs au centre 15, et contre la permanencière, estimant qu'elle avait mal analysé la situation et aurait dû réagir plus rapidement.

Le procureur de la République d'Angers avait interjeté appel de la relaxe du CHU et de la permanencière.

Dans un arrêt rendu mardi, la Cour d'appel a confirmé la relaxe du CHU mais a condamné l'ancienne permanencière.

Il lui est reproché de ne pas avoir tenu compte des mots clés prononcés par l'entourage de la jeune femme alors qu'ils auraient dû lui permettre d'évaluer le niveau de priorité à P0 ou P1. Les appels reçus par les Parm peuvent être classés selon trois niveaux à partir d'une liste de mots clés: P0 qui déclenche une équipe Smur suivi d'une régulation prioritaire, P1 qui conduit à une régulation prioritaire et P2 pour lequel la régulation peut être mise en attente sans risque pour le patient.

L'ancienne permanencière soutient qu'au cours des échanges téléphoniques qu'elle a eus avec l'entourage de la patiente décédée, elle n'a pas disposé des mots clés justifiant d'une priorité P0 ou P1, indique la Cour d'appel. Cependant lors du deuxième appel à 8h24, le mari de la jeune femme a déclaré notamment qu'elle n'arrivait plus à respirer et, lors de l'appel retransféré par les pompiers à 8h29, il mentionnait que ses mains se pliaient toutes seules, "ce qui constitue indéniablement un mouvement anormal", note-t-elle.

En ces 5 minutes, la Parm a entendu au moins deux des mots clés mais elle n'en a pas tiré la conséquence prévue par le protocole, à savoir saisir immédiatement le médecin régulateur, lequel se trouvait dans la même pièce et n'était pas rendu indisponible par le transfert de consignes en cours qu'il était parfaitement en mesure d'interrompre en cas d'urgence, est-il précisé dans l'arrêt. Elle aurait également pu à défaut déclencher elle-même les secours.

"Elle s'est bornée après avoir entendu le premier de ces mots-clés à demander l'envoi d'une ambulance sans urgence particulière et n'a pas modifié cette disposition après avoir entendu le deuxième", lui reproche la Cour.

Elle estime que par ce simple fait, "quelles que soient les conditions de travail, l'absence de formation plus étendue, la difficulté de [la permanencière] à supporter les contraintes de son travail, il y a eu une erreur commise par cette professionnelle' qui exerçait cette fonction depuis plus de 10 ans et connaissait les détails du protocole.

La Cour d'appel juge que "cette erreur dans le classement de priorité [que la permanencière] n'a corrigé à aucun moment" est d'une "particulière gravité dans ce qu'il a retardé l'envoi de secours utile dans un moment où la rapidité de l'intervention est primordiale".

Elle évoque une "faute caractérisée" car cette erreur a "exposé la personne en souffrance à un risque d'une particulière gravité" que la Parm ne pouvait ignorer.

La Cour observe qu'il n'est pas possible d'établir qu'une prise en charge médicale adaptée plus rapide aurait permis de manière certaine de sauver la patiente. Elle insiste sur "le caractère aléatoire des chances de survie" car, selon un médecin expert, le taux de mortalité en milieu hospitalier des patients atteints d'embolie pulmonaire varie de 15% à 60%.

Toutefois "cela ne démontre pas que l'utilité d'une intervention est nulle dans de tels cas" et "le retard apporté à l'intervention a fait perdre à Mme Rousset toute chance de survie, ce qui établit le lien de causalité entre la faute commise et le décès de cette dernière".

===La direction générale du CHU surprise par le jugement

Contactée vendredi par l'APM, la direction générale du CHU s'est déclarée "surprise" par la condamnation de l'ancienne permanencière car le procureur en appel avait confirmé le jugement de première instance, c'est-à-dire la relaxe. N'ayant pas eu la notification des attendus, elle ne peut pas encore préciser les suites qu'elle lui donnera.

Elle assure qu'elle accompagnera l'ancienne Parm, quelle que soit sa décision sur les suites à donner au jugement, dans le respect de la personne décédée.

L'ancienne permanencière travaille actuellement au CHU, ainsi que le mari de la jeune femme décédée.

cb/fb/APM polsan