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13/01 2015
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AP-HP: POLÉMIQUE AUTOUR D'UN ÉLÈVE INFIRMIER, ANCIEN PRÉDICATEUR CONDAMNÉ POUR TERRORISME (PRESSE)

PARIS, 12 janvier 2014 (APM) - La présence à l'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) d'un élève infirmier, ancien prédicateur condamné pour terrorisme et présenté comme le "mentor" des deux frères impliqués dans la tuerie de Charlie Hebdo, suscite depuis dimanche la polémique sur les réseaux sociaux et dans la profession.

L'information, révélée dimanche par Le Parisien puis développée par Libération, a provoqué de l'étonnement voire de l'indignation, tandis que l'ordre infirmier réclamait aussitôt un rendez-vous "en urgence" avec la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Marisol Touraine.

Elle intervient dans un contexte marqué par l'émotion suscitée en France par la fusillade qui a décimé mercredi la rédaction de l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo et les attaques perpétrées contre une policière à Montrouge (Hauts-de-Seine) jeudi et une épicerie casher du XIIème arrondissement de Paris vendredi, faisant au total 17 morts et plusieurs blessés. Près de 4 millions de personnes ont participé dimanche en France à des rassemblements citoyens pour protester contre le terrorisme, manifester pour la liberté d'expression et rendre hommage aux victimes.

Selon Le Parisien, Farid Benyettou a intégré courant décembre 2014 les urgences de la Pitié-Salpêtrière en tant qu'infirmier stagiaire, dans le cadre de la fin de ses études débutées en 2011 dans l'un des 18 instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi) de l'AP-HP, aussitôt après être sorti de prison.

Farid Benyettou, âgé de 33 ans, a été condamné le 14 mai 2008 par le tribunal correctionnel de Paris à six ans de prison ferme, dont quatre ans de sûreté pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste", rappellent Le Parisien et Libération.

Figure du XIXème arrondissement de Paris et de la mosquée Adda'wa, Farid Benyettou est présenté comme l'ex-"émir" de la "filière des Buttes-Chaumont", qui recrutait et formait des jeunes envoyés en Irak pour combattre à partir de 2004, selon les quotidiens.

Selon Libération, "Chérif Kouachi, mort vendredi dans l'assaut policier à Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne)" et coauteur avec son frère Saïd de la tuerie de Charlie Hebdo, "a été condamné dans le même dossier, et affirmait à l'époque que Benyettou lui expliquait que 'c'était écrit dans les textes que c'est bien de mourir en martyr'".

UN RETRAIT DU PLANNING CONCERTE AVEC LA POLICE

Compte tenu de ces éléments et à la suite de la fusillade à Charlie Hebdo, le directeur de l'AP-HP, Martin Hirsch, a décidé dès mercredi de retirer Farid Benyettou du planning des urgences de la Pitié-Salpêtrière, rapporte le Parisien, notant qu'il aurait dû être présent dans la nuit de vendredi à samedi.

Dans un communiqué mis en ligne dimanche, l'AP-HP a confirmé certains de ces éléments, indiquant d'abord que "la situation de cet élève infirmier est régulière et elle est connue, depuis le début de sa scolarité, tant par la direction de l'école où il est scolarisé que des services de police".

"Les événements dramatiques de cette semaine nous ont conduit à prendre l'initiative, en liaison avec les autorités de police, de ne pas le maintenir dans le planning du service où il terminait son dernier stage, cette période n'étant pas indispensable à la validation de son stage, pour laquelle il sera soumis à l'évaluation de droit commun comme les autres élèves infirmiers", ajoute l'institution.

L'AP-HP précise ensuite qu'une "condamnation portée sur le casier judiciaire interdit d'être recruté sur un emploi public, mais sans interdire de passer le diplôme, qui peut être valorisé dans d'autres lieux d'exercice que les établissements publics".

INCOMPREHENSION POUR L'ORDRE INFIRMIER

"Donc il y aurait des infirmiers qui, dans certaines structures, pourraient avoir une moralité différente?", s'interroge Karim Mameri, secrétaire général de l'ordre infirmier, joint lundi par l'APM.

Alerté et sollicité par de nombreux confrères suite aux révélations du Parisien, il a précisé que l'ordre infirmier devrait être reçu prochainement par le cabinet de Marisol Touraine pour évoquer ce dossier.

S'il ne conteste par la possibilité de réinsertion pour d'anciens délinquants ou criminels, il s'étonne de la position de l'AP-HP, déplorant que l'Etat puisse "accompagner" un futur soignant en dépit de tels antécédents.

Il pointe l'incompatibilité entre le passé de l'étudiant et la profession de soignant, qui suppose un contact avec des personnes vulnérables, et une obligation de prodiguer des soins "quelle que soit sa confession ou sa croyance".

Rappelant que l'ordre, dans sa mission d'inscription des infirmiers au tableau, est chargé de contrôler la moralité et la probité des demandeurs, notamment au vu du casier judiciaire, Karim Mameri doute que l'étudiant puisse un jour être autorisé par l'ordre à exercer en France.

"Le casier judiciaire d'infirmiers peut ne pas être vierge", relève-t-il, mais il estime "à titre personnel" que la gravité de certains crimes ou délits sont un obstacle à l'inscription au tableau. Il cite en exemple le refus opposé par l'ordre infirmier à un ancien médecin radié de l'ordre et condamné à plusieurs années d'emprisonnement pour viols.

Dans un communiqué diffusé lundi, la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (Fnesi) a estimé qu'un "débat" était nécessaire entre les différents acteurs concernés par le sujet.

"Cependant, face à ce cas individuel qui pose des problèmes de cohérence, nous pensons qu'il est aujourd'hui nécessaire de ne pas réagir sous l'effet de l'émoi collectif afin que notre République conserve les valeurs de liberté défendues par les disparus et par ceux qui ont défilé [dimanche] dans les rues", écrit la Fnesi.

Notant que "l'ensemble de la communauté infirmière se questionne aujourd'hui sur les critères d'accessibilité aux formations sanitaires et sociales, principalement concernant les modalités judiciaires d'accès aux formations", la Fnesi considère que la "sélection en formation ne peut se baser sur des critères idéologiques, ethniques, culturels ou religieux".

"De plus l'opportunité de se réinsérer dans la société, après une période d'incarcération, notamment par l'accès à l'enseignement et à une formation est une marque de progressisme social", observe-t-elle.

Sollicitée par l'APM, l'AP-HP n'a pas donné suite.

vg/ab/APM polsan

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PARIS, 12 janvier 2014 (APM) - La présence à l'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) d'un élève infirmier, ancien prédicateur condamné pour terrorisme et présenté comme le "mentor" des deux frères impliqués dans la tuerie de Charlie Hebdo, suscite depuis dimanche la polémique sur les réseaux sociaux et dans la profession.

L'information, révélée dimanche par Le Parisien puis développée par Libération, a provoqué de l'étonnement voire de l'indignation, tandis que l'ordre infirmier réclamait aussitôt un rendez-vous "en urgence" avec la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Marisol Touraine.

Elle intervient dans un contexte marqué par l'émotion suscitée en France par la fusillade qui a décimé mercredi la rédaction de l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo et les attaques perpétrées contre une policière à Montrouge (Hauts-de-Seine) jeudi et une épicerie casher du XIIème arrondissement de Paris vendredi, faisant au total 17 morts et plusieurs blessés. Près de 4 millions de personnes ont participé dimanche en France à des rassemblements citoyens pour protester contre le terrorisme, manifester pour la liberté d'expression et rendre hommage aux victimes.

Selon Le Parisien, Farid Benyettou a intégré courant décembre 2014 les urgences de la Pitié-Salpêtrière en tant qu'infirmier stagiaire, dans le cadre de la fin de ses études débutées en 2011 dans l'un des 18 instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi) de l'AP-HP, aussitôt après être sorti de prison.

Farid Benyettou, âgé de 33 ans, a été condamné le 14 mai 2008 par le tribunal correctionnel de Paris à six ans de prison ferme, dont quatre ans de sûreté pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste", rappellent Le Parisien et Libération.

Figure du XIXème arrondissement de Paris et de la mosquée Adda'wa, Farid Benyettou est présenté comme l'ex-"émir" de la "filière des Buttes-Chaumont", qui recrutait et formait des jeunes envoyés en Irak pour combattre à partir de 2004, selon les quotidiens.

Selon Libération, "Chérif Kouachi, mort vendredi dans l'assaut policier à Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne)" et coauteur avec son frère Saïd de la tuerie de Charlie Hebdo, "a été condamné dans le même dossier, et affirmait à l'époque que Benyettou lui expliquait que 'c'était écrit dans les textes que c'est bien de mourir en martyr'".

UN RETRAIT DU PLANNING CONCERTE AVEC LA POLICE

Compte tenu de ces éléments et à la suite de la fusillade à Charlie Hebdo, le directeur de l'AP-HP, Martin Hirsch, a décidé dès mercredi de retirer Farid Benyettou du planning des urgences de la Pitié-Salpêtrière, rapporte le Parisien, notant qu'il aurait dû être présent dans la nuit de vendredi à samedi.

Dans un communiqué mis en ligne dimanche, l'AP-HP a confirmé certains de ces éléments, indiquant d'abord que "la situation de cet élève infirmier est régulière et elle est connue, depuis le début de sa scolarité, tant par la direction de l'école où il est scolarisé que des services de police".

"Les événements dramatiques de cette semaine nous ont conduit à prendre l'initiative, en liaison avec les autorités de police, de ne pas le maintenir dans le planning du service où il terminait son dernier stage, cette période n'étant pas indispensable à la validation de son stage, pour laquelle il sera soumis à l'évaluation de droit commun comme les autres élèves infirmiers", ajoute l'institution.

L'AP-HP précise ensuite qu'une "condamnation portée sur le casier judiciaire interdit d'être recruté sur un emploi public, mais sans interdire de passer le diplôme, qui peut être valorisé dans d'autres lieux d'exercice que les établissements publics".

INCOMPREHENSION POUR L'ORDRE INFIRMIER

"Donc il y aurait des infirmiers qui, dans certaines structures, pourraient avoir une moralité différente?", s'interroge Karim Mameri, secrétaire général de l'ordre infirmier, joint lundi par l'APM.

Alerté et sollicité par de nombreux confrères suite aux révélations du Parisien, il a précisé que l'ordre infirmier devrait être reçu prochainement par le cabinet de Marisol Touraine pour évoquer ce dossier.

S'il ne conteste par la possibilité de réinsertion pour d'anciens délinquants ou criminels, il s'étonne de la position de l'AP-HP, déplorant que l'Etat puisse "accompagner" un futur soignant en dépit de tels antécédents.

Il pointe l'incompatibilité entre le passé de l'étudiant et la profession de soignant, qui suppose un contact avec des personnes vulnérables, et une obligation de prodiguer des soins "quelle que soit sa confession ou sa croyance".

Rappelant que l'ordre, dans sa mission d'inscription des infirmiers au tableau, est chargé de contrôler la moralité et la probité des demandeurs, notamment au vu du casier judiciaire, Karim Mameri doute que l'étudiant puisse un jour être autorisé par l'ordre à exercer en France.

"Le casier judiciaire d'infirmiers peut ne pas être vierge", relève-t-il, mais il estime "à titre personnel" que la gravité de certains crimes ou délits sont un obstacle à l'inscription au tableau. Il cite en exemple le refus opposé par l'ordre infirmier à un ancien médecin radié de l'ordre et condamné à plusieurs années d'emprisonnement pour viols.

Dans un communiqué diffusé lundi, la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (Fnesi) a estimé qu'un "débat" était nécessaire entre les différents acteurs concernés par le sujet.

"Cependant, face à ce cas individuel qui pose des problèmes de cohérence, nous pensons qu'il est aujourd'hui nécessaire de ne pas réagir sous l'effet de l'émoi collectif afin que notre République conserve les valeurs de liberté défendues par les disparus et par ceux qui ont défilé [dimanche] dans les rues", écrit la Fnesi.

Notant que "l'ensemble de la communauté infirmière se questionne aujourd'hui sur les critères d'accessibilité aux formations sanitaires et sociales, principalement concernant les modalités judiciaires d'accès aux formations", la Fnesi considère que la "sélection en formation ne peut se baser sur des critères idéologiques, ethniques, culturels ou religieux".

"De plus l'opportunité de se réinsérer dans la société, après une période d'incarcération, notamment par l'accès à l'enseignement et à une formation est une marque de progressisme social", observe-t-elle.

Sollicitée par l'APM, l'AP-HP n'a pas donné suite.

vg/ab/APM polsan

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