Actualités de l'Urgence - APM

ARTICLE 51: DES EXPÉRIMENTATIONS TROP NOMBREUSES ET MAL PRÉPARÉES À L'ENTRÉE DANS LE DROIT COMMUN (COUR DES COMPTES)
Le chapitre IV du rapport, intitulé "Expérimenter pour reformer l'organisation et la tarification des soins", se penche sur les modalités de gestion et la transposition dans le droit commun de ces expérimentations d'innovation organisationnelle ou financière prévues par l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2018 (cf dépêche du 23/02/2018 à 12:06).
"Si le cadre général de conduite et d'évaluation des expérimentations a été modifié en profondeur, des adaptations du dispositif sont à envisager à très court terme afin d'assurer sa contribution à la transformation du système de santé", juge la Cour des comptes. Elle formule ainsi cinq recommandations:
- limiter le flux d'entrée de nouveaux projets
- procéder à une analyse globale de l'évaluation des expérimentations relevant d'une même thématique
- prévoir la généralisation anticipée des expérimentations les plus prometteuses et l'arrêt avant leur terme de celles n'ayant pas répondu aux attentes
- identifier, dès la mise en oeuvre des expérimentations, les conditions pratiques de leur généralisation
- organiser la conduite des chantiers de généralisation des expérimentations entre les services de l'Etat et de l'assurance maladie.
Avant la sortie du cadre expérimental, ces projets bénéficient d'une méthode "participative" et d'une gestion de programme 'structurée", selon le rapport.
Toutefois, la place donnée aux usagers apparaît "limitée". "Une participation des représentants des usagers pourrait être prévue au sein de chaque expérimentation, notamment en la valorisant dans les cahiers des charges", avance la Cour.
S'agissant de l'évaluation des expérimentations, elle est "systématique et indépendante". Elle repose sur une cellule qui réunit les équipes du ministère et de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) et supervise les travaux d'évaluation depuis l'autorisation des projets jusqu'à la remise de leur évaluation finale.
La cellule suit cependant simultanément une centaine d'évaluations. "Sa capacité à produire dans les délais impartis des évaluations de qualité […] est incertaine", est-il relevé.
Un trop grand nombre de projets autorisés
"Le nombre très élevé d'expérimentations, qui ne pourront pas toutes être généralisées, amène à s'interroger sur la stratégie d'ensemble et sur le mode de gestion du dispositif", pointe le rapport, rappelant que 122 projets avaient obtenu un feu vert en 2022 (cf dépêche du 16/11/2022 à 18:21).
Ce dynamisme s'expliquerait par la volonté du ministère de la santé en janvier 2019 de mobiliser plus fortement les agences régionales de santé (ARS), après avoir constaté que seuls trois projets avaient alors été autorisés.
"A la suite de cette mobilisation, le nombre de projets présentés a fortement augmenté […]. La part des projets autorisés a été multipliée par cinq entre 2018 et 2021", constate la Cour.
En conséquence, le tri permettant d'identifier les projets méritant d'être généralisés est devenu "complexe". "Le recours à de nouvelles expérimentations devrait désormais être particulièrement sélectif", recommande le rapport.
La Cour appelle également à faciliter l'arrêt des expérimentations dont les conditions de mise en oeuvre ne sont pas satisfaisantes en définissant des critères, tels que l'insuffisance du nombre de patients inclus.
Elle prend l'exemple de l'expérimentation de forfait de réorientation aux urgences, qui n'a inclus, au bout de 22 mois, que 18% des patients prévus. "[Sa] poursuite pourrait […] être réexaminée compte tenu des évolutions intervenues depuis 2020", est-il écrit.
Deux écueils à éviter au moment de la généralisation
Pour les projets qui ont vocation à entrer dans le droit commun, "la sortie du champ expérimental, qui n'est, pour l'essentiel, pas encore engagée […], constitue désormais l'étape prioritaire", fait valoir la Cour. D'autant qu'une "vague" d'expérimentations arrive à échéance en 2023 (35) et 2024 (38).
Or, "l'anticipation des travaux nécessaire à la sortie du cadre expérimental et à la généralisation a jusqu'ici largement fait défaut", déplore le rapport.
Deux principaux écueils seraient à éviter, selon la Cour. Le premier serait de poursuivre les expérimentations sans échéance précise et le second serait de gérer les évolutions du droit commun expérimentation par expérimentation, "sans perspective globale, sans méthode générale d'accompagnement des professionnels de santé et sans maîtrise de l'impact sur les dépenses d'assurance maladie".
Pour préparer au mieux la généralisation des projets, il faut également définir une méthode de travail ainsi qu'un pilotage très anticipé par rapport aux échéances. "Cela suppose notamment de disposer du rapport d'évaluation avant la fin de l'expérimentation", est-il souligné.
Or, dans le cas de l'article 51, le législateur a prévu une restitution du rapport final d'évaluation six mois au plus tard après la date de fin de l'expérimentation, "créant ainsi le risque d'une interruption avant l'éventuelle entrée du dispositif expérimenté dans le droit commun", est-il soulevé.
(Cour des comptes, rapport annuel 2023 sur l'application des LFSS, chapitre IV)
mg/nc/APMnews
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ARTICLE 51: DES EXPÉRIMENTATIONS TROP NOMBREUSES ET MAL PRÉPARÉES À L'ENTRÉE DANS LE DROIT COMMUN (COUR DES COMPTES)
Le chapitre IV du rapport, intitulé "Expérimenter pour reformer l'organisation et la tarification des soins", se penche sur les modalités de gestion et la transposition dans le droit commun de ces expérimentations d'innovation organisationnelle ou financière prévues par l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2018 (cf dépêche du 23/02/2018 à 12:06).
"Si le cadre général de conduite et d'évaluation des expérimentations a été modifié en profondeur, des adaptations du dispositif sont à envisager à très court terme afin d'assurer sa contribution à la transformation du système de santé", juge la Cour des comptes. Elle formule ainsi cinq recommandations:
- limiter le flux d'entrée de nouveaux projets
- procéder à une analyse globale de l'évaluation des expérimentations relevant d'une même thématique
- prévoir la généralisation anticipée des expérimentations les plus prometteuses et l'arrêt avant leur terme de celles n'ayant pas répondu aux attentes
- identifier, dès la mise en oeuvre des expérimentations, les conditions pratiques de leur généralisation
- organiser la conduite des chantiers de généralisation des expérimentations entre les services de l'Etat et de l'assurance maladie.
Avant la sortie du cadre expérimental, ces projets bénéficient d'une méthode "participative" et d'une gestion de programme 'structurée", selon le rapport.
Toutefois, la place donnée aux usagers apparaît "limitée". "Une participation des représentants des usagers pourrait être prévue au sein de chaque expérimentation, notamment en la valorisant dans les cahiers des charges", avance la Cour.
S'agissant de l'évaluation des expérimentations, elle est "systématique et indépendante". Elle repose sur une cellule qui réunit les équipes du ministère et de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) et supervise les travaux d'évaluation depuis l'autorisation des projets jusqu'à la remise de leur évaluation finale.
La cellule suit cependant simultanément une centaine d'évaluations. "Sa capacité à produire dans les délais impartis des évaluations de qualité […] est incertaine", est-il relevé.
Un trop grand nombre de projets autorisés
"Le nombre très élevé d'expérimentations, qui ne pourront pas toutes être généralisées, amène à s'interroger sur la stratégie d'ensemble et sur le mode de gestion du dispositif", pointe le rapport, rappelant que 122 projets avaient obtenu un feu vert en 2022 (cf dépêche du 16/11/2022 à 18:21).
Ce dynamisme s'expliquerait par la volonté du ministère de la santé en janvier 2019 de mobiliser plus fortement les agences régionales de santé (ARS), après avoir constaté que seuls trois projets avaient alors été autorisés.
"A la suite de cette mobilisation, le nombre de projets présentés a fortement augmenté […]. La part des projets autorisés a été multipliée par cinq entre 2018 et 2021", constate la Cour.
En conséquence, le tri permettant d'identifier les projets méritant d'être généralisés est devenu "complexe". "Le recours à de nouvelles expérimentations devrait désormais être particulièrement sélectif", recommande le rapport.
La Cour appelle également à faciliter l'arrêt des expérimentations dont les conditions de mise en oeuvre ne sont pas satisfaisantes en définissant des critères, tels que l'insuffisance du nombre de patients inclus.
Elle prend l'exemple de l'expérimentation de forfait de réorientation aux urgences, qui n'a inclus, au bout de 22 mois, que 18% des patients prévus. "[Sa] poursuite pourrait […] être réexaminée compte tenu des évolutions intervenues depuis 2020", est-il écrit.
Deux écueils à éviter au moment de la généralisation
Pour les projets qui ont vocation à entrer dans le droit commun, "la sortie du champ expérimental, qui n'est, pour l'essentiel, pas encore engagée […], constitue désormais l'étape prioritaire", fait valoir la Cour. D'autant qu'une "vague" d'expérimentations arrive à échéance en 2023 (35) et 2024 (38).
Or, "l'anticipation des travaux nécessaire à la sortie du cadre expérimental et à la généralisation a jusqu'ici largement fait défaut", déplore le rapport.
Deux principaux écueils seraient à éviter, selon la Cour. Le premier serait de poursuivre les expérimentations sans échéance précise et le second serait de gérer les évolutions du droit commun expérimentation par expérimentation, "sans perspective globale, sans méthode générale d'accompagnement des professionnels de santé et sans maîtrise de l'impact sur les dépenses d'assurance maladie".
Pour préparer au mieux la généralisation des projets, il faut également définir une méthode de travail ainsi qu'un pilotage très anticipé par rapport aux échéances. "Cela suppose notamment de disposer du rapport d'évaluation avant la fin de l'expérimentation", est-il souligné.
Or, dans le cas de l'article 51, le législateur a prévu une restitution du rapport final d'évaluation six mois au plus tard après la date de fin de l'expérimentation, "créant ainsi le risque d'une interruption avant l'éventuelle entrée du dispositif expérimenté dans le droit commun", est-il soulevé.
(Cour des comptes, rapport annuel 2023 sur l'application des LFSS, chapitre IV)
mg/nc/APMnews