Actualités de l'Urgence - APM

AVC: EFFICACITÉ DE L'ORIENTATION PRÉHOSPITALIÈRE POUR INITIER LA THROMBECTOMIE, SELON CERTAINS CRITÈRES
ISSY-LES-MOULINEAUX (Hauts-de-Seine), 16 novembre 2017 (APMnews) - L'orientation préhospitalière vers un centre de neuroradiologie semble faisable et efficace pour initier rapidement la thrombectomie en cas de suspicion d'un accident vasculaire cérébral (AVC) lié à l'occlusion d'un gros tronc artériel mais suivant des critères précis, selon une étude menée en Occitanie présentée mercredi à la journée nationale des référents et animateurs de filière AVC, en parallèle du congrès de la Société française neurovasculaire (SFNV), à Issy-les-Moulineaux.
La thrombectomie a démontré son efficacité dans le traitement des AVC ischémiques provoqués par l'occlusion d'un gros tronc, dans les 6 heures après, le début des symptômes. Elle peut-être réalisée en complément à la thrombolyse ou en cas de contre-indication de cette dernière, initiée d'emblée, rappelle-t-on.
Mais la décision de réaliser une thrombectomie ne doit pas retarder la thrombolyse et inversement. Cependant, la thrombectomie ne pouvant être réalisée que dans des centres de neuroradiologie et en raison de l'équipement d'imagerie nécessaire, il reste à déterminer la stratégie optimale pour avoir les délais d'initiation du traitement les plus courts.
Le Dr Caroline Arquizan du CHU de Montpellier a présenté la procédure mise en place en Occitanie pour les candidats à la thrombectomie et les résultats à 18 mois.
A la phase préhospitalère, deux stratégies sont possibles en cas de suspicion de l'occlusion d'un gros tronc.
La première (dite drip and ship en anglais) consiste à diriger le patient vers l'unité neurovasculaire (UNV) de proximité ou le service d'accueil des urgences (SAU) pour initier le plus rapidement possible la thrombolyse sur place pour l'UNV ou à distance en lien avec l'UNV pour le SAU (téléthrombolyse) puis éventuellement, le transférer vers l'UNV de recours disposant d'un centre de neuroradiologie.
Avec la seconde (dite mother ship), dès l'alerte, le patient est orienté directement vers l'UNV de recours adossé à un centre de neuroradiologie qui peut être plus éloigné, ce qui permet d'initier plus rapidement la thrombectomie et pourrait rendre le traitement plus efficace.
Mais ce "déroutage" préhospitalier n'a pas démontré son efficacité dans des études pour la prise en charge des occlusions d'un gros tronc et des patients éligibles à la thrombolyse risquent de ne pas pouvoir en bénéficier, a souligné le Dr Arquizan. En cas de déroutages inappropriés trop nombreux, la capacité d'accueil risque d'être dépassée et des patients peuvent être mal sélectionnés sur la base d'un score NIHSS élevé alors qu'ils n'ont pas d'occlusion d'un gros tronc.
Après un an de réflexion entre les UNV, les SAU et le Samu, une procédure de déroutage préhospitalier a été mise en place en janvier 2016 dans la zone d'Occitanie correspondant à l'ex-Languedoc-Roussillon.
L'UNV de recours est au CHU de Montpellier, qui dispose d'une "structure spécialisée, les urgences tête et cou, l'Utec, qui assure un accueil 24 heure sur 24, 7 jours sur 7". Elle dispose notamment d'urgentistes, de neurologues, de neuroradiologues et d'autres spécialistes nécessaires (réanimateurs, ophtalmologues, médecins ORL...) et les neurologues de l'UNV sont prévenus dès qu'une alerte de suspicion d'AVC est adressée pour prendre en charge le patient dès son arrivée.
Le territoire comprend quatre UNV de proximité, au CHU de Nîmes et aux CH de Béziers (Hérault), Narbonne (Aude) et Perpignan (Pyrénées-Orientales). Deux CH, à Millau(Aveyron) et Mende (Lozère), sont reliés au CHU de Montpellier pour réaliser la téléthrombolyse.
La procédure mise en place concerne les fortes suspicions d'une occlusion d'un gros tronc, c'est-à-dire avec d'abord un début brutal et le déficit complet d'un hémicorps chez une personne autonome, a indiqué le Dr Arquizan.
A ces deux critères de déficit massif, s'ajoute un autre parmi les quatre suivants:
- une contre-indication connue à la thrombolyse (risque hémorragique, chirurgie récente, hémorragie récente, AVC de moins de 3 mois, prise d'anticoagulants...)
- un temps de transport similaire (différence de 10 minutes maximum) entre l'UNV de proximité et l'UNV de recours
- un délai d'admission en unité de proximité estimé supérieur à 3h30 après le début des symptômes
- une heure de début inconnue ou découverte moins de 6 heures.
Le Dr Arquizan a fait observer que le Samu évaluait le temps de transport à partir à la fois des cartes routières et aériennes. Le patient est dérouté en cas d'accord entre le Samu et les neurologues des UNV.
50 patients déroutés en 18 mois
Entre janvier 2016 et juin 2017, 2.276 alertes ont été émises pour une suspicion d'AVC et dans 73% des cas, il s'agissait bien d'un AVC ischémique. Un traitement de recanalisation a pu être administré à 570 patients dont 211 par thrombolyse seule, 190 par thrombectomie seule et 169 le traitement combiné. Parmi les 359 patients ayant reçu une thrombectomie, la moitié avait été transférée des autres UNV et 50 patients en particulier avaient été déroutés en phase préhospitalière.
Parmi ces 50 patients, finalement 68% avaient bien un AVC ischémique, 12% avaient une hémorragie cérébrale et 20% une atteinte neurologique avec présentation pseudovasculaire trompeuse (stroke mimics). Ces deux dernières situations peuvent induire un score NIHSS élevé.
Le principal motif de déroutage était la présence d'une contre-indication à la thrombolyse (36%), suivi d'une équidistance entre les UNV (22%), le choix médical (16%), l'heure de début inconnue (12%), un délai d'admission trop long (8%), une heure de début estimée à plus de 4h30.
Dans 82% des cas, les critères de déroutage étaient respectés (critères de déficit massif et un autre), en particulier parmi 28 patients dont l'AVC ischémique était confirmé. Les critères étaient également retrouvés dans la moitié des patients ayant eu finalement un AVC hémorragique et 20% avec un stroke mimics.
Enfin, parmi les 34 patients déroutés avec un AVC ischémique confirmé, ils étaient 25 (74%) à avoir une occlusion du gros tronc dont 20 ont été traités par thrombectomie et parmi eux, 5 par thrombolyse également. Parmi les 5 derniers, un a été traité par thrombolyse seule.
Globalement, ces données suggèrent que la procédure de déroutage préhospitalier pour les candidats à la thrombectomie est "très faisable et efficace mais pour des patients très bien sélectionnés avec un déficit sévère et un autre critère", a conclu le Dr Arquizan. "Le respect des critères est essentiel et pour les autres cas de figure, il faut attendre les résultats des essais cliniques randomisés, contrôlés."
L'intérêt de cette approche est de mettre en place "une collaboration étroite avec les services préhospitaliers, l'UNV de recours, le centre de neuroradiologie et les UNV de proximité, avec la participation des neurologues à la régulation", a-t-elle commenté.
Cependant, cette procédure est confrontée à des problèmes de territoire pour les pompiers en particulier, aux difficultés de déterminer le meilleur transport et de retour du patient dans l'UNV d'origine le cas échéant, avec laquelle une convention doit être établie.
Interrogée sur l'impact de cette organisation pour les UNV, le Dr Arquizan a pointé un risque de forte augmentation de l'activité pour l'UNV de recours avec des besoins qui semblent importants, d'autant qu'a posteriori, il apparaît que des patients auraient pu être déroutés. "Il faut aussi gérer les appels pour les demandes de déroutage."
"Pour les UNV de proximité, il n'y a pas d'effet négatif pour le moment sur l'activité. Et pour les patients, selon les critères établis, il n'y a pas de perte de chance", a-t-elle ajouté.
ld/ab/APMnews
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AVC: EFFICACITÉ DE L'ORIENTATION PRÉHOSPITALIÈRE POUR INITIER LA THROMBECTOMIE, SELON CERTAINS CRITÈRES
ISSY-LES-MOULINEAUX (Hauts-de-Seine), 16 novembre 2017 (APMnews) - L'orientation préhospitalière vers un centre de neuroradiologie semble faisable et efficace pour initier rapidement la thrombectomie en cas de suspicion d'un accident vasculaire cérébral (AVC) lié à l'occlusion d'un gros tronc artériel mais suivant des critères précis, selon une étude menée en Occitanie présentée mercredi à la journée nationale des référents et animateurs de filière AVC, en parallèle du congrès de la Société française neurovasculaire (SFNV), à Issy-les-Moulineaux.
La thrombectomie a démontré son efficacité dans le traitement des AVC ischémiques provoqués par l'occlusion d'un gros tronc, dans les 6 heures après, le début des symptômes. Elle peut-être réalisée en complément à la thrombolyse ou en cas de contre-indication de cette dernière, initiée d'emblée, rappelle-t-on.
Mais la décision de réaliser une thrombectomie ne doit pas retarder la thrombolyse et inversement. Cependant, la thrombectomie ne pouvant être réalisée que dans des centres de neuroradiologie et en raison de l'équipement d'imagerie nécessaire, il reste à déterminer la stratégie optimale pour avoir les délais d'initiation du traitement les plus courts.
Le Dr Caroline Arquizan du CHU de Montpellier a présenté la procédure mise en place en Occitanie pour les candidats à la thrombectomie et les résultats à 18 mois.
A la phase préhospitalère, deux stratégies sont possibles en cas de suspicion de l'occlusion d'un gros tronc.
La première (dite drip and ship en anglais) consiste à diriger le patient vers l'unité neurovasculaire (UNV) de proximité ou le service d'accueil des urgences (SAU) pour initier le plus rapidement possible la thrombolyse sur place pour l'UNV ou à distance en lien avec l'UNV pour le SAU (téléthrombolyse) puis éventuellement, le transférer vers l'UNV de recours disposant d'un centre de neuroradiologie.
Avec la seconde (dite mother ship), dès l'alerte, le patient est orienté directement vers l'UNV de recours adossé à un centre de neuroradiologie qui peut être plus éloigné, ce qui permet d'initier plus rapidement la thrombectomie et pourrait rendre le traitement plus efficace.
Mais ce "déroutage" préhospitalier n'a pas démontré son efficacité dans des études pour la prise en charge des occlusions d'un gros tronc et des patients éligibles à la thrombolyse risquent de ne pas pouvoir en bénéficier, a souligné le Dr Arquizan. En cas de déroutages inappropriés trop nombreux, la capacité d'accueil risque d'être dépassée et des patients peuvent être mal sélectionnés sur la base d'un score NIHSS élevé alors qu'ils n'ont pas d'occlusion d'un gros tronc.
Après un an de réflexion entre les UNV, les SAU et le Samu, une procédure de déroutage préhospitalier a été mise en place en janvier 2016 dans la zone d'Occitanie correspondant à l'ex-Languedoc-Roussillon.
L'UNV de recours est au CHU de Montpellier, qui dispose d'une "structure spécialisée, les urgences tête et cou, l'Utec, qui assure un accueil 24 heure sur 24, 7 jours sur 7". Elle dispose notamment d'urgentistes, de neurologues, de neuroradiologues et d'autres spécialistes nécessaires (réanimateurs, ophtalmologues, médecins ORL...) et les neurologues de l'UNV sont prévenus dès qu'une alerte de suspicion d'AVC est adressée pour prendre en charge le patient dès son arrivée.
Le territoire comprend quatre UNV de proximité, au CHU de Nîmes et aux CH de Béziers (Hérault), Narbonne (Aude) et Perpignan (Pyrénées-Orientales). Deux CH, à Millau(Aveyron) et Mende (Lozère), sont reliés au CHU de Montpellier pour réaliser la téléthrombolyse.
La procédure mise en place concerne les fortes suspicions d'une occlusion d'un gros tronc, c'est-à-dire avec d'abord un début brutal et le déficit complet d'un hémicorps chez une personne autonome, a indiqué le Dr Arquizan.
A ces deux critères de déficit massif, s'ajoute un autre parmi les quatre suivants:
- une contre-indication connue à la thrombolyse (risque hémorragique, chirurgie récente, hémorragie récente, AVC de moins de 3 mois, prise d'anticoagulants...)
- un temps de transport similaire (différence de 10 minutes maximum) entre l'UNV de proximité et l'UNV de recours
- un délai d'admission en unité de proximité estimé supérieur à 3h30 après le début des symptômes
- une heure de début inconnue ou découverte moins de 6 heures.
Le Dr Arquizan a fait observer que le Samu évaluait le temps de transport à partir à la fois des cartes routières et aériennes. Le patient est dérouté en cas d'accord entre le Samu et les neurologues des UNV.
50 patients déroutés en 18 mois
Entre janvier 2016 et juin 2017, 2.276 alertes ont été émises pour une suspicion d'AVC et dans 73% des cas, il s'agissait bien d'un AVC ischémique. Un traitement de recanalisation a pu être administré à 570 patients dont 211 par thrombolyse seule, 190 par thrombectomie seule et 169 le traitement combiné. Parmi les 359 patients ayant reçu une thrombectomie, la moitié avait été transférée des autres UNV et 50 patients en particulier avaient été déroutés en phase préhospitalière.
Parmi ces 50 patients, finalement 68% avaient bien un AVC ischémique, 12% avaient une hémorragie cérébrale et 20% une atteinte neurologique avec présentation pseudovasculaire trompeuse (stroke mimics). Ces deux dernières situations peuvent induire un score NIHSS élevé.
Le principal motif de déroutage était la présence d'une contre-indication à la thrombolyse (36%), suivi d'une équidistance entre les UNV (22%), le choix médical (16%), l'heure de début inconnue (12%), un délai d'admission trop long (8%), une heure de début estimée à plus de 4h30.
Dans 82% des cas, les critères de déroutage étaient respectés (critères de déficit massif et un autre), en particulier parmi 28 patients dont l'AVC ischémique était confirmé. Les critères étaient également retrouvés dans la moitié des patients ayant eu finalement un AVC hémorragique et 20% avec un stroke mimics.
Enfin, parmi les 34 patients déroutés avec un AVC ischémique confirmé, ils étaient 25 (74%) à avoir une occlusion du gros tronc dont 20 ont été traités par thrombectomie et parmi eux, 5 par thrombolyse également. Parmi les 5 derniers, un a été traité par thrombolyse seule.
Globalement, ces données suggèrent que la procédure de déroutage préhospitalier pour les candidats à la thrombectomie est "très faisable et efficace mais pour des patients très bien sélectionnés avec un déficit sévère et un autre critère", a conclu le Dr Arquizan. "Le respect des critères est essentiel et pour les autres cas de figure, il faut attendre les résultats des essais cliniques randomisés, contrôlés."
L'intérêt de cette approche est de mettre en place "une collaboration étroite avec les services préhospitaliers, l'UNV de recours, le centre de neuroradiologie et les UNV de proximité, avec la participation des neurologues à la régulation", a-t-elle commenté.
Cependant, cette procédure est confrontée à des problèmes de territoire pour les pompiers en particulier, aux difficultés de déterminer le meilleur transport et de retour du patient dans l'UNV d'origine le cas échéant, avec laquelle une convention doit être établie.
Interrogée sur l'impact de cette organisation pour les UNV, le Dr Arquizan a pointé un risque de forte augmentation de l'activité pour l'UNV de recours avec des besoins qui semblent importants, d'autant qu'a posteriori, il apparaît que des patients auraient pu être déroutés. "Il faut aussi gérer les appels pour les demandes de déroutage."
"Pour les UNV de proximité, il n'y a pas d'effet négatif pour le moment sur l'activité. Et pour les patients, selon les critères établis, il n'y a pas de perte de chance", a-t-elle ajouté.
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