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16/11 2023
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AVC: LES NEUROLOGUES ONT ENCORE DES INTERROGATIONS FACE À LA RÉFORME DES SOINS CRITIQUES

(Par Luu-Ly DO-QUANG, à la journée annuelle des référents et animateurs de filières AVC)

LILLE, 16 novembre 2023 (APMnews) - La réforme des autorisations en soins critiques, entrée en vigueur en juin, soulève encore des interrogations auprès des neurologues qui prennent en charge les accidents vasculaires cérébraux (AVC) concernant en particulier les unités de soins intensifs de neurologie vasculaire (USINV), a exposé l'ancien président de la Société française neurovasculaire (SFNV), le Pr Igor Sibon du CHU de Bordeaux, mercredi en marge du congrès de la société savante à Lille.

Le Pr Sibon faisait un point sur l'application des décrets réorganisant les soins critiques, publiés en avril 2022 (cf dépêche du 27/04/2022 à 13:39), dans le cadre de la journée nationale des référents et animateurs ARS (agences régionales de santé) des filières AVC, relevant "des difficultés" dans leur mise en œuvre mais aussi le fait que "des discussions sont encore possibles avec la DGOS [direction de l'offre de soins] et les ARS".

Des progrès sont en effet attendus par rapport à l'existant puisqu'en 2019, la France comptait en moyenne 13,6 lits d'USINV par million d'habitants, loin derrière l'Italie et l'Allemagne qui en comptent respectivement 28,2 et 29,9, ainsi qu'un nombre médian de thrombolyses intraveineuses bien inférieur et un délai d'administration de 64 minutes, qui reste trop élevé, a-t-il rappelé.

La France se positionne mieux en matière de thrombectomies mécaniques, avec 104 réalisées en moyenne par million d'habitants, mais derrière l'Allemagne également, qui en réalise 194 en moyenne. Il a été préconisé de plutôt renforcer les centres existants que d'en créer de nouveaux.

L'Académie nationale de médecine avait notamment recommandé de créer 75 lits d'USINV et d'augmenter le nombre de neurologues et de neuroradiologues interventionnels" en formation (cf dépêche du 03/10/2022 à 13:42), car la démographie de la spécialité est difficile, ce qui pèse sur la situation des unités neuro-vasculaires (UNV).

La SFNV avait interrogé les responsables de ces unités sur leur personnel: des postes sont vacants dans trois UNV de territoire sur quatre et une UNV de recours sur quatre (cf dépêche du 15/01/2021 à 17:00). Et selon un bilan plus récent, une vingtaine d'UNV se retrouvent dans une situation "difficile", avec cinq neurologues ou moins pour assurer la permanence des soins en établissement de santé (PDSES), et une quinzaine en situation "critique", avec trois neurologues maximums pour la PDSES.

Pour le Pr Sibon, les difficultés de mise en œuvre des deux décrets et de l'instruction associée concernant la réforme des soins critiques sont liées "à de petites différences entre les textes" et des interprétations qui peuvent en être faites.

Il note par exemple qu'il est question, pour la permanence médicale, d'organiser l'astreinte d'un médecin spécialisé en neurologie vasculaire "ou d'une autre discipline avec expertise en pathologie neurovasculaire, pouvant intervenir dans des délais compatibles avec la sécurité des soins". "Mais à quoi ça correspond, cette expertise neurovasculaire? Quels sont ces délais?", s'est demandé le neurologue.

Il s'est également interrogé sur les modalités d'organisation des structures définies par le décret, rappelant que "la réa n'est pas toujours sur site", et sur l'absence de délai de mise en conformité pour le personnel médical alors qu'un délai de cinq ans a été accordé pour le paramédical.

Ainsi, à la fois pour répondre aux recommandations de l'Académie de médecine ainsi qu'à celles de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) sur la PDSES (cf dépêche du 10/07/2023 à 19:03), il faut réfléchir à court terme aux moyens d'optimiser les ressources et envisager d'adapter les conditions de fonctionnement de la permanence des soins des centres de thrombectomie de mention A, a estimé le Pr Sibon.

Il faudrait également préciser la définition d'expertise neurovasculaire et réfléchir à des réorganisations territoriales.

A moyen terme, il a suggéré de réfléchir à la place d'une version "urgence" du diplôme interuniversitaire (DIU) en pathologie neurovasculaire et à celle du diplôme universitaire (DU) "urgences neurovasculaires" ainsi qu'à la création locale d'un DU "gestion de l'urgence neurovasculaire et de ses complications sur les 24 premières heures" destiné aux médecins intensivistes-réanimateurs (MIR), aux médecins anesthésistes-réanimateurs (MAR) et aux urgentistes.

Enfin, à long terme, il est nécessaire de renforcer les compétences et les ressources et pour cela, il faudrait réfléchir à la création d'une formation spécialisée transversale (FST) en soins critiques ou d'une option "soins critiques", peut-être neurovasculaires, pour les neurologues et réussir à augmenter le nombre de neurologues, a ajouté le neurologue.

Il a rappelé qu'il fallait rester vigilants dans l'interprétation des textes.

ld/nc/APMnews

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AVC: LES NEUROLOGUES ONT ENCORE DES INTERROGATIONS FACE À LA RÉFORME DES SOINS CRITIQUES

(Par Luu-Ly DO-QUANG, à la journée annuelle des référents et animateurs de filières AVC)

LILLE, 16 novembre 2023 (APMnews) - La réforme des autorisations en soins critiques, entrée en vigueur en juin, soulève encore des interrogations auprès des neurologues qui prennent en charge les accidents vasculaires cérébraux (AVC) concernant en particulier les unités de soins intensifs de neurologie vasculaire (USINV), a exposé l'ancien président de la Société française neurovasculaire (SFNV), le Pr Igor Sibon du CHU de Bordeaux, mercredi en marge du congrès de la société savante à Lille.

Le Pr Sibon faisait un point sur l'application des décrets réorganisant les soins critiques, publiés en avril 2022 (cf dépêche du 27/04/2022 à 13:39), dans le cadre de la journée nationale des référents et animateurs ARS (agences régionales de santé) des filières AVC, relevant "des difficultés" dans leur mise en œuvre mais aussi le fait que "des discussions sont encore possibles avec la DGOS [direction de l'offre de soins] et les ARS".

Des progrès sont en effet attendus par rapport à l'existant puisqu'en 2019, la France comptait en moyenne 13,6 lits d'USINV par million d'habitants, loin derrière l'Italie et l'Allemagne qui en comptent respectivement 28,2 et 29,9, ainsi qu'un nombre médian de thrombolyses intraveineuses bien inférieur et un délai d'administration de 64 minutes, qui reste trop élevé, a-t-il rappelé.

La France se positionne mieux en matière de thrombectomies mécaniques, avec 104 réalisées en moyenne par million d'habitants, mais derrière l'Allemagne également, qui en réalise 194 en moyenne. Il a été préconisé de plutôt renforcer les centres existants que d'en créer de nouveaux.

L'Académie nationale de médecine avait notamment recommandé de créer 75 lits d'USINV et d'augmenter le nombre de neurologues et de neuroradiologues interventionnels" en formation (cf dépêche du 03/10/2022 à 13:42), car la démographie de la spécialité est difficile, ce qui pèse sur la situation des unités neuro-vasculaires (UNV).

La SFNV avait interrogé les responsables de ces unités sur leur personnel: des postes sont vacants dans trois UNV de territoire sur quatre et une UNV de recours sur quatre (cf dépêche du 15/01/2021 à 17:00). Et selon un bilan plus récent, une vingtaine d'UNV se retrouvent dans une situation "difficile", avec cinq neurologues ou moins pour assurer la permanence des soins en établissement de santé (PDSES), et une quinzaine en situation "critique", avec trois neurologues maximums pour la PDSES.

Pour le Pr Sibon, les difficultés de mise en œuvre des deux décrets et de l'instruction associée concernant la réforme des soins critiques sont liées "à de petites différences entre les textes" et des interprétations qui peuvent en être faites.

Il note par exemple qu'il est question, pour la permanence médicale, d'organiser l'astreinte d'un médecin spécialisé en neurologie vasculaire "ou d'une autre discipline avec expertise en pathologie neurovasculaire, pouvant intervenir dans des délais compatibles avec la sécurité des soins". "Mais à quoi ça correspond, cette expertise neurovasculaire? Quels sont ces délais?", s'est demandé le neurologue.

Il s'est également interrogé sur les modalités d'organisation des structures définies par le décret, rappelant que "la réa n'est pas toujours sur site", et sur l'absence de délai de mise en conformité pour le personnel médical alors qu'un délai de cinq ans a été accordé pour le paramédical.

Ainsi, à la fois pour répondre aux recommandations de l'Académie de médecine ainsi qu'à celles de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) sur la PDSES (cf dépêche du 10/07/2023 à 19:03), il faut réfléchir à court terme aux moyens d'optimiser les ressources et envisager d'adapter les conditions de fonctionnement de la permanence des soins des centres de thrombectomie de mention A, a estimé le Pr Sibon.

Il faudrait également préciser la définition d'expertise neurovasculaire et réfléchir à des réorganisations territoriales.

A moyen terme, il a suggéré de réfléchir à la place d'une version "urgence" du diplôme interuniversitaire (DIU) en pathologie neurovasculaire et à celle du diplôme universitaire (DU) "urgences neurovasculaires" ainsi qu'à la création locale d'un DU "gestion de l'urgence neurovasculaire et de ses complications sur les 24 premières heures" destiné aux médecins intensivistes-réanimateurs (MIR), aux médecins anesthésistes-réanimateurs (MAR) et aux urgentistes.

Enfin, à long terme, il est nécessaire de renforcer les compétences et les ressources et pour cela, il faudrait réfléchir à la création d'une formation spécialisée transversale (FST) en soins critiques ou d'une option "soins critiques", peut-être neurovasculaires, pour les neurologues et réussir à augmenter le nombre de neurologues, a ajouté le neurologue.

Il a rappelé qu'il fallait rester vigilants dans l'interprétation des textes.

ld/nc/APMnews

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