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26/05 2021
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BAISSE CONFIRMÉE DES CRISES CARDIAQUES ET INFARCTUS CÉRÉBRAUX DANS LES HÔPITAUX EN FRANCE LORS DE LA PREMIÈRE VAGUE DE COVID-19

SAINT-MAURICE (Val-de-Marne), 26 mai 2021 (APMnews) - En France, en 2020, les admissions aux urgences et les hospitalisations pour infarctus du myocarde et accidents vasculaires cérébraux (AVC) ont baissé en 2020 par rapport à la période 2017-2019 lors de la première vague de l'épidémie de Covid-19, selon les données présentées mardi aux Rencontres de Santé publique France (SPF).

Coordinatrice du programme de surveillance des maladies cardio- et neurovasculaires pour SPF, Valérie Olié a présenté ces résultats lors d'une session sur les conséquences de la crise sanitaire sur le recours aux soins des malades chroniques, confirmant de précédents travaux (cf dépêche du 18/01/2021 à 15:44 et dépêche du 05/02/2021 à 18:33).

Lors de la première vague épidémique, au premier trimestre 2020, cette crise sanitaire "sans précédent" s'est accompagnée d'une activation du plan blanc dans les hôpitaux, avec une déprogrammation des activités non urgentes, et d'une saturation des lignes d'appel du Samu et des services de réanimation dans certaines régions, a-t-elle rappelé.

Pour limiter la propagation de l'infection à Sars-CoV-2, un premier confinement national de la population a été mis en place du 17 mars au 11 mai 2020 (semaines 12 à 19), imposant une limitation des déplacements en particulier et générant un fort impact psychologique.

Dans cette étude menée par Amélie Gabet de SPF, avec la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) notamment, les chercheurs ont voulu évaluer l'impact de la crise et des mesures mises en oeuvre sur en particulier deux pathologies à risque vital, deux urgences vitales dont la survie et les séquelles dépendent du délai de prise en charge à l'hôpital, les AVC et les infarctus du myocarde. En France, en moyenne, 120.000 personnes sont hospitalisées par an pour un AVC et 60.000 pour un infarctus du myocarde, a rappelé Valérie Olié.

Pour cela, les chercheurs ont utilisé la base de données d'admission aux urgences Oscour*, qui couvre 93,3% des services d'accueil des urgences (SAU) hôpitaux, et le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI) en MCO pour tous les courts séjours dans le public et le privé (version fast-track disponible en septembre 2020).

Ils ont recherché les admissions aux urgences du 3 février au 31 mai 2020 (semaines 6 à 22) et les hospitalisations complètes du 1er janvier au 14 juin 2020 (semaines 1 à 24) puis sur les périodes équivalentes pour 2017-2019 afin de calculer un ratio de taux d'incidence (IRR) des AVC et des infarctus du myocarde, après ajustement sur les tendances des années précédentes.

Ils ont également regardé l'évolution de la gravité et des complications spécifiques des AVC et des infarctus, respectivement les troubles du langage et paralysie, d'une part, et les chocs cardiogéniques, ruptures cardiaques, troubles du rythme et de la conduction, et insuffisances cardiaques, d'autre part, puis estimé le rapport des chances (OR) hebdomadaire entre 2020 et 2017-2019, ajusté sur la tendance, l'âge et le sexe.

Enfin, ils ont calculé l'IRR hebdomadaire de la mortalité hospitalière et de la mortalité toutes causes à 30 jours hors hôpital.

Des hausses marquées au début du premier confinement

S'appuyant sur les courbes des admissions hebdomadaires aux urgences, Valérie Olié a souligné "une diminution importante, pendant le premier confinement, à la fois pour les AVC et les infarctus du myocarde", en particulier pour ceux sans élévation du segment ST. Les calculs des IRR indiquent que la baisse pendant le confinement est de 25% pour ces derniers (par rapport à 2017-2019), de 19% pour les infarctus avec élévation du segment ST, de 16% pour les AVC ischémiques et de 22% pour les AVC hémorragiques.

L'analyse des IRR montre aussi d'importantes disparités régionales de l'évolution du recours aux urgences. "La diminution des admissions pour AVC et infarctus du myocarde n'a pas été de même ampleur sur tout le territoire", particulièrement marquée en Ile-de-France à la différence du Grand Est, a-t-elle poursuivi. "De manière assez étonnante, la réduction est significative en Bretagne alors qu'elle a été relativement peu touchée par la première vague et de manière générale, les variations régionales étaient assez indépendantes du niveau épidémique."

Les résultats pour les hospitalisations au niveau national sont similaires, avec une baisse importante à la fois pour les AVC et les infarctus du myocarde en 2020 par rapport à 2017-2019. La baisse du taux d'hospitalisation pour AVC atteint 27% sur les premières semaines du confinement, avec un effet globalement similaire entre les types d'AVC ainsi qu'entre hommes et femmes mais plus marqué chez les seniors de 85 ans et plus (-35%).

Pour les infarctus du myocarde, la diminution atteint même 40%, lors des premières semaines du confinement également, avec un effet plus marqué pour les cas sans élévation du segment ST qu'avec (jusqu'à -50% vs -36%). La baisse est également plus forte chez les patients de 85 ans et plus.

Il apparaît que moins de patients ont utilisé leur véhicule personnel pour se rendre aux urgences.

Concernant la gravité des patients hospitalisés, elle apparaît "légèrement" en augmentation pour les AVC mais "pas tellement plus" pour les infarctus du myocarde en 2020 par rapport à 2017-2019. En revanche, la durée moyenne de séjour est beaucoup plus courte dans les deux cas.

Enfin, la mortalité des patients ayant eu un AVC a augmenté, que ce soit la mortalité hospitalière et la mortalité extrahospitalière à 30 jours, jusqu'à respectivement +30% au tout début du confinement et +70% en semaine 15. La mortalité hospitalière était par ailleurs plus marquée chez les moins de 65 ans et pour les AVC hémorragiques, mais elle n'a globalement pas duré dans le temps au décours du confinement et après.

Pour les infarctus du myocarde, des fluctuations importantes dans le temps apparaissent, rendant l'interprétation plus difficile. "Seule une surmortalité précoce, c'est-à-dire dans les trois jours, a été observée au cours des deux premières semaines du confinement", a précisé Valérie Olié (+56%, jusqu'à +82% pour les cas avec élévation du segment ST).

Globalement, ces résultats peuvent s'expliquer par "une peur du Covid-19 et de l'hôpital, ce qui a pu entraîner une baisse des appels aux secours en cas de symptômes". "Dans certains cas, la saturation des lignes d'urgence a pu aussi limiter l'accès à l'hôpital"; pour les plus de 85 ans, le moindre recours aux soins doit être le fait des personnes institutionnalisées ou vivant seules.

Il est également possible que des personnes soient décédées d'un AVC ou d'un infarctus du myocarde sans recours à l'hospitalisation, que les cas moins sévères n'ont pas eu recours aux soins et que l'incidence ait diminué du fait d'une baisse de la pollution pendant le confinement, des efforts physiques et stress professionnels et des décès par Covid-19, a commenté la chercheuse.

Des messages avaient été diffusés à la population générale sur la nécessité de continuer à consulter pour les malades chroniques et d'appeler les secours au plus vite en cas de symptômes d'infarctus. Les données pour les infarctus du myocarde en particulier montrent, lors du deuxième confinement, une baisse également des admissions aux urgences mais moins importante que lors du premier confinement.

Trouver qui sont ces patients non vus aux urgences

D'autres données sont en cours sur la mortalité par cause, en particulier à domicile, et une étude est nécessaire pour évaluer l'impact au long cours chez les patients non hospitalisés, a conclu Valérie Olié.

Lors de la discussion, elle a indiqué que des analyses porteraient sur les facteurs de risque, dans les limites de ce que peut permettre une base de données médico-administratives, pour, par exemple, identifier une hypertension artérielle non traitée et déterminer si cela a pu avoir un impact ou non dans la survenue des événements étudiés.

"Pour le moment, les conséquences cardiovasculaires, en dehors de cette baisse du recours, ne sont pas majeures, avec une hausse de la mortalité assez limitée dans le temps; on se demande où sont passés les cas d'infarctus du myocarde et d'AVC non vus aux urgences alors que les premières analyses ne montrent pas de hausse de la mortalité cardiovasculaire à domicile, ce qui semble assez étonnant…"

Valérie Olié a estimé qu'une part des patients a eu de faibles déficits ou un accident ischémique transitoire (AIT) notamment mais qu'ils vont récidiver, avec un événement plus grave. Des baisses similaires ont été observées dans d'autres pays, qui cherchent aussi ces patients car "on ignore encore si ce sont des cas peu graves qu'on va voir venir plus tard ou si certains sont décédés à domicile".

ld/ab/APMnews

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SAINT-MAURICE (Val-de-Marne), 26 mai 2021 (APMnews) - En France, en 2020, les admissions aux urgences et les hospitalisations pour infarctus du myocarde et accidents vasculaires cérébraux (AVC) ont baissé en 2020 par rapport à la période 2017-2019 lors de la première vague de l'épidémie de Covid-19, selon les données présentées mardi aux Rencontres de Santé publique France (SPF).

Coordinatrice du programme de surveillance des maladies cardio- et neurovasculaires pour SPF, Valérie Olié a présenté ces résultats lors d'une session sur les conséquences de la crise sanitaire sur le recours aux soins des malades chroniques, confirmant de précédents travaux (cf dépêche du 18/01/2021 à 15:44 et dépêche du 05/02/2021 à 18:33).

Lors de la première vague épidémique, au premier trimestre 2020, cette crise sanitaire "sans précédent" s'est accompagnée d'une activation du plan blanc dans les hôpitaux, avec une déprogrammation des activités non urgentes, et d'une saturation des lignes d'appel du Samu et des services de réanimation dans certaines régions, a-t-elle rappelé.

Pour limiter la propagation de l'infection à Sars-CoV-2, un premier confinement national de la population a été mis en place du 17 mars au 11 mai 2020 (semaines 12 à 19), imposant une limitation des déplacements en particulier et générant un fort impact psychologique.

Dans cette étude menée par Amélie Gabet de SPF, avec la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) notamment, les chercheurs ont voulu évaluer l'impact de la crise et des mesures mises en oeuvre sur en particulier deux pathologies à risque vital, deux urgences vitales dont la survie et les séquelles dépendent du délai de prise en charge à l'hôpital, les AVC et les infarctus du myocarde. En France, en moyenne, 120.000 personnes sont hospitalisées par an pour un AVC et 60.000 pour un infarctus du myocarde, a rappelé Valérie Olié.

Pour cela, les chercheurs ont utilisé la base de données d'admission aux urgences Oscour*, qui couvre 93,3% des services d'accueil des urgences (SAU) hôpitaux, et le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI) en MCO pour tous les courts séjours dans le public et le privé (version fast-track disponible en septembre 2020).

Ils ont recherché les admissions aux urgences du 3 février au 31 mai 2020 (semaines 6 à 22) et les hospitalisations complètes du 1er janvier au 14 juin 2020 (semaines 1 à 24) puis sur les périodes équivalentes pour 2017-2019 afin de calculer un ratio de taux d'incidence (IRR) des AVC et des infarctus du myocarde, après ajustement sur les tendances des années précédentes.

Ils ont également regardé l'évolution de la gravité et des complications spécifiques des AVC et des infarctus, respectivement les troubles du langage et paralysie, d'une part, et les chocs cardiogéniques, ruptures cardiaques, troubles du rythme et de la conduction, et insuffisances cardiaques, d'autre part, puis estimé le rapport des chances (OR) hebdomadaire entre 2020 et 2017-2019, ajusté sur la tendance, l'âge et le sexe.

Enfin, ils ont calculé l'IRR hebdomadaire de la mortalité hospitalière et de la mortalité toutes causes à 30 jours hors hôpital.

Des hausses marquées au début du premier confinement

S'appuyant sur les courbes des admissions hebdomadaires aux urgences, Valérie Olié a souligné "une diminution importante, pendant le premier confinement, à la fois pour les AVC et les infarctus du myocarde", en particulier pour ceux sans élévation du segment ST. Les calculs des IRR indiquent que la baisse pendant le confinement est de 25% pour ces derniers (par rapport à 2017-2019), de 19% pour les infarctus avec élévation du segment ST, de 16% pour les AVC ischémiques et de 22% pour les AVC hémorragiques.

L'analyse des IRR montre aussi d'importantes disparités régionales de l'évolution du recours aux urgences. "La diminution des admissions pour AVC et infarctus du myocarde n'a pas été de même ampleur sur tout le territoire", particulièrement marquée en Ile-de-France à la différence du Grand Est, a-t-elle poursuivi. "De manière assez étonnante, la réduction est significative en Bretagne alors qu'elle a été relativement peu touchée par la première vague et de manière générale, les variations régionales étaient assez indépendantes du niveau épidémique."

Les résultats pour les hospitalisations au niveau national sont similaires, avec une baisse importante à la fois pour les AVC et les infarctus du myocarde en 2020 par rapport à 2017-2019. La baisse du taux d'hospitalisation pour AVC atteint 27% sur les premières semaines du confinement, avec un effet globalement similaire entre les types d'AVC ainsi qu'entre hommes et femmes mais plus marqué chez les seniors de 85 ans et plus (-35%).

Pour les infarctus du myocarde, la diminution atteint même 40%, lors des premières semaines du confinement également, avec un effet plus marqué pour les cas sans élévation du segment ST qu'avec (jusqu'à -50% vs -36%). La baisse est également plus forte chez les patients de 85 ans et plus.

Il apparaît que moins de patients ont utilisé leur véhicule personnel pour se rendre aux urgences.

Concernant la gravité des patients hospitalisés, elle apparaît "légèrement" en augmentation pour les AVC mais "pas tellement plus" pour les infarctus du myocarde en 2020 par rapport à 2017-2019. En revanche, la durée moyenne de séjour est beaucoup plus courte dans les deux cas.

Enfin, la mortalité des patients ayant eu un AVC a augmenté, que ce soit la mortalité hospitalière et la mortalité extrahospitalière à 30 jours, jusqu'à respectivement +30% au tout début du confinement et +70% en semaine 15. La mortalité hospitalière était par ailleurs plus marquée chez les moins de 65 ans et pour les AVC hémorragiques, mais elle n'a globalement pas duré dans le temps au décours du confinement et après.

Pour les infarctus du myocarde, des fluctuations importantes dans le temps apparaissent, rendant l'interprétation plus difficile. "Seule une surmortalité précoce, c'est-à-dire dans les trois jours, a été observée au cours des deux premières semaines du confinement", a précisé Valérie Olié (+56%, jusqu'à +82% pour les cas avec élévation du segment ST).

Globalement, ces résultats peuvent s'expliquer par "une peur du Covid-19 et de l'hôpital, ce qui a pu entraîner une baisse des appels aux secours en cas de symptômes". "Dans certains cas, la saturation des lignes d'urgence a pu aussi limiter l'accès à l'hôpital"; pour les plus de 85 ans, le moindre recours aux soins doit être le fait des personnes institutionnalisées ou vivant seules.

Il est également possible que des personnes soient décédées d'un AVC ou d'un infarctus du myocarde sans recours à l'hospitalisation, que les cas moins sévères n'ont pas eu recours aux soins et que l'incidence ait diminué du fait d'une baisse de la pollution pendant le confinement, des efforts physiques et stress professionnels et des décès par Covid-19, a commenté la chercheuse.

Des messages avaient été diffusés à la population générale sur la nécessité de continuer à consulter pour les malades chroniques et d'appeler les secours au plus vite en cas de symptômes d'infarctus. Les données pour les infarctus du myocarde en particulier montrent, lors du deuxième confinement, une baisse également des admissions aux urgences mais moins importante que lors du premier confinement.

Trouver qui sont ces patients non vus aux urgences

D'autres données sont en cours sur la mortalité par cause, en particulier à domicile, et une étude est nécessaire pour évaluer l'impact au long cours chez les patients non hospitalisés, a conclu Valérie Olié.

Lors de la discussion, elle a indiqué que des analyses porteraient sur les facteurs de risque, dans les limites de ce que peut permettre une base de données médico-administratives, pour, par exemple, identifier une hypertension artérielle non traitée et déterminer si cela a pu avoir un impact ou non dans la survenue des événements étudiés.

"Pour le moment, les conséquences cardiovasculaires, en dehors de cette baisse du recours, ne sont pas majeures, avec une hausse de la mortalité assez limitée dans le temps; on se demande où sont passés les cas d'infarctus du myocarde et d'AVC non vus aux urgences alors que les premières analyses ne montrent pas de hausse de la mortalité cardiovasculaire à domicile, ce qui semble assez étonnant…"

Valérie Olié a estimé qu'une part des patients a eu de faibles déficits ou un accident ischémique transitoire (AIT) notamment mais qu'ils vont récidiver, avec un événement plus grave. Des baisses similaires ont été observées dans d'autres pays, qui cherchent aussi ces patients car "on ignore encore si ce sont des cas peu graves qu'on va voir venir plus tard ou si certains sont décédés à domicile".

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