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20/09 2021
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COVID-19: HUIT PATIENTS ONT FAIT L'OBJET D'UNE ÉVACUATION SANITAIRE DEPUIS TAHITI VERS PARIS

(Par Geoffroy LANG)

PARIS, 20 septembre 2021 (APMnews) - Une opération de transfert inédite, baptisée "Manuea", a été organisée durant le week-end entre Tahiti et Paris afin de soulager les capacités hospitalières polynésiennes face à la progression de l'épidémie de Covid-19 dans le territoire ultramarin, a-t-on appris lundi auprès du Pr Pierre Carli, président du Conseil national de l'urgence hospitalière (CNUH) et directeur du Samu de Paris.

"On est en train de gravir progressivement les barreaux d’une échelle que nous avons construite il y a plus d’un an et qu’on avait travaillée à l’exercice d’abord", a expliqué le Pr Carli, contacté lundi par APMnews, en rappelant les précédentes opérations de transfert inédites réalisées depuis le début de la crise sanitaire du Covid-19 avec les évacuations "Chardon" en TGV durant la première vague en métropole (cf dépêche du 12/10/2020 à 18:38), puis les évacuations sanitaires aériennes organisées dans les départements ultramarins depuis avec "un pic de 48 patients dans la semaine précédente" en Martinique, soit "4 vols à 12 patients".

Durant le week-end, huit patients polynésiens en réanimation pour des formes graves du Covid-19 ont été évacués depuis Tahiti vers Paris avec une escale à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe).

"On ne cherche pas de record, on essaye juste de pousser au maximum de nos capacités de soins", a mis en garde le Pr Carli, en soulignant que le centre hospitalier de la Polynésie française (CHPF) était "totalement isolé" alors que l'Australie et la Nouvelle-Zélande n'acceptaient pas de patients Covid, tandis que la Nouvelle-Calédonie devait elle-même faire face à une forte pression épidémique (cf dépêche du 09/09/2021 à 15:04).

Le directeur du Samu de Paris, qui a participé à l'organisation de l'opération "Manuea", a expliqué que ces évacuations sanitaires avaient une nouvelle fois pour objectif de soulager les capacités hospitalières ultramarines, "pour que leur machine à soigner se remette à tourner à un régime raisonnable et qu’ils puissent reprendre leurs filières de soins dans les meilleurs délais, avec un enjeu majeur sur l’état de leur hôpital et notamment l’état de leurs équipes soignantes qui ont travaillé au-delà de l’épuisement".

La Polynésie française comptait vendredi 208 patients hospitalisés pour des formes graves ou sévères du Covid-19, dont 46 patients en réanimation, selon le bilan communiqué par la direction de la santé de Polynésie.

"La spécificité, c’était la distance", a souligné Pierre Carli alors que cette évacuation sanitaire s'est faite sur une distance inédite de 17.000 km pour près de 22 heures de vol, avec une escale en Guadeloupe afin de recharger les réserves d'oxygène et de kérosène de l'appareil, un Airbus A350-900.

"Une réanimation éphémère volante"

"On a appris maintenant à maîtriser les consommations d’oxygène, aussi bien dans la prise en charge et la sélection des patients", a-t-il expliqué, "le concept qu’on a développé, ce n’est pas celui d’une évacuation sanitaire, c’est de fabriquer une réanimation éphémère volante dans laquelle on puisse faire transiter les patients pour qu’il n’y ait aucune rupture de charge dans leur prise en charge thérapeutique".

"À l’intérieur de l’avion, vous retrouvez les éléments constitutifs d’une réanimation Covid classique : une zone rouge, une zone de sas pour rentrer à l’intérieur et une zone verte, de vie", a-t-il détaillé.

"À l’intérieur de la zone rouge, on a installé des civières aériennes d’un modèle très récent, qui peuvent prendre des patients relativement lourds, jusqu’à 150 kg, autour desquelles nous disposons du matériel avec une qualité et une quantité de soins supérieures à celles d’une évacuation sanitaire classique", a-t-il poursuivi.

Avec près de 2 tonnes de matériel embarqué, cet avion offre également aux équipes accompagnant ces transferts "la possibilité de faire plus d’examens complémentaires": "On fait les gaz du sang toutes les trois heures, le iono[gramme sanguin] toutes les 4 heures, on en a les possibilités avec de la biologie embarquée."

"On a aussi de l’échographie embarquée, avec des gens qui savent le faire, et tout le matériel nécessaire à l’aggravation d’un patient y compris une ecmo [extracorporeal membrane oxygenation], un circuit de CEC [circulation extraporelle] qui peut être implanté si un patient se retrouvait dans une grande défaillance viscérale comme cela peut se produire avec un patient Covid", a-t-il ajouté.

Ces transferts s'accompagnent d'une "densité de personnel forte", soit un médecin et deux infirmiers pour deux patients.

Une trentaine de personnels mobilisés

"Au côté de l’équipe médicale, il y a des secouristes entraînés à transporter les patients de l’intérieur vers l’extérieur, et à la manutention des patients, à pouvoir réaliser leur nursing", a complété le Pierre Carli, "pour un vol de 10 à 12 patients, il y a 30 personnes à bord".

"Comme pour les opérations Chardon, on n’est pas à la charge des équipes qui prennent en charge les patients, on est à leur décharge: ils nous prêtent leurs ambulances vides le temps de transporter les patients depuis l’hôpital mais ce sont les équipes de l’avion qui vont chercher les patients en réanimation, qui restent le temps nécessaire dans les réanimations pour stabiliser les patients sur le matériel qui va les accompagner jusqu’au service dans lequel ils seront définitivement hospitalisés", a mis en exergue le directeur du Samu de Paris.

"Il n’y a aucune rupture en termes de matériel de soins, nous appliquons tout le traitement, y compris dans ses détails de kinésithérapie, qui a été mis en place en réanimation", a-t-il insisté.

Le fait que ces transferts soient menés par les équipes des établissements d'accueil leur permet d'être "directement opérationnelles" car elles "travaillent avec le matériel qu’elles utilisent quotidiennement, contrairement à la réserve", a pointé le Pr Carli.

Depuis les opérations Chardon, les critères de sélection des patients ont évolué avec un poids maximal excluant plus élevé, de près de 130 kg contre 110 précédemment, notamment en raison de la qualité des civières employées (charge maximale de 150 kg avec le matériel) et de l'accessibilité plus simple des avions par rapport aux rames TGV.

gl/ab/APMnews

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(Par Geoffroy LANG)

PARIS, 20 septembre 2021 (APMnews) - Une opération de transfert inédite, baptisée "Manuea", a été organisée durant le week-end entre Tahiti et Paris afin de soulager les capacités hospitalières polynésiennes face à la progression de l'épidémie de Covid-19 dans le territoire ultramarin, a-t-on appris lundi auprès du Pr Pierre Carli, président du Conseil national de l'urgence hospitalière (CNUH) et directeur du Samu de Paris.

"On est en train de gravir progressivement les barreaux d’une échelle que nous avons construite il y a plus d’un an et qu’on avait travaillée à l’exercice d’abord", a expliqué le Pr Carli, contacté lundi par APMnews, en rappelant les précédentes opérations de transfert inédites réalisées depuis le début de la crise sanitaire du Covid-19 avec les évacuations "Chardon" en TGV durant la première vague en métropole (cf dépêche du 12/10/2020 à 18:38), puis les évacuations sanitaires aériennes organisées dans les départements ultramarins depuis avec "un pic de 48 patients dans la semaine précédente" en Martinique, soit "4 vols à 12 patients".

Durant le week-end, huit patients polynésiens en réanimation pour des formes graves du Covid-19 ont été évacués depuis Tahiti vers Paris avec une escale à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe).

"On ne cherche pas de record, on essaye juste de pousser au maximum de nos capacités de soins", a mis en garde le Pr Carli, en soulignant que le centre hospitalier de la Polynésie française (CHPF) était "totalement isolé" alors que l'Australie et la Nouvelle-Zélande n'acceptaient pas de patients Covid, tandis que la Nouvelle-Calédonie devait elle-même faire face à une forte pression épidémique (cf dépêche du 09/09/2021 à 15:04).

Le directeur du Samu de Paris, qui a participé à l'organisation de l'opération "Manuea", a expliqué que ces évacuations sanitaires avaient une nouvelle fois pour objectif de soulager les capacités hospitalières ultramarines, "pour que leur machine à soigner se remette à tourner à un régime raisonnable et qu’ils puissent reprendre leurs filières de soins dans les meilleurs délais, avec un enjeu majeur sur l’état de leur hôpital et notamment l’état de leurs équipes soignantes qui ont travaillé au-delà de l’épuisement".

La Polynésie française comptait vendredi 208 patients hospitalisés pour des formes graves ou sévères du Covid-19, dont 46 patients en réanimation, selon le bilan communiqué par la direction de la santé de Polynésie.

"La spécificité, c’était la distance", a souligné Pierre Carli alors que cette évacuation sanitaire s'est faite sur une distance inédite de 17.000 km pour près de 22 heures de vol, avec une escale en Guadeloupe afin de recharger les réserves d'oxygène et de kérosène de l'appareil, un Airbus A350-900.

"Une réanimation éphémère volante"

"On a appris maintenant à maîtriser les consommations d’oxygène, aussi bien dans la prise en charge et la sélection des patients", a-t-il expliqué, "le concept qu’on a développé, ce n’est pas celui d’une évacuation sanitaire, c’est de fabriquer une réanimation éphémère volante dans laquelle on puisse faire transiter les patients pour qu’il n’y ait aucune rupture de charge dans leur prise en charge thérapeutique".

"À l’intérieur de l’avion, vous retrouvez les éléments constitutifs d’une réanimation Covid classique : une zone rouge, une zone de sas pour rentrer à l’intérieur et une zone verte, de vie", a-t-il détaillé.

"À l’intérieur de la zone rouge, on a installé des civières aériennes d’un modèle très récent, qui peuvent prendre des patients relativement lourds, jusqu’à 150 kg, autour desquelles nous disposons du matériel avec une qualité et une quantité de soins supérieures à celles d’une évacuation sanitaire classique", a-t-il poursuivi.

Avec près de 2 tonnes de matériel embarqué, cet avion offre également aux équipes accompagnant ces transferts "la possibilité de faire plus d’examens complémentaires": "On fait les gaz du sang toutes les trois heures, le iono[gramme sanguin] toutes les 4 heures, on en a les possibilités avec de la biologie embarquée."

"On a aussi de l’échographie embarquée, avec des gens qui savent le faire, et tout le matériel nécessaire à l’aggravation d’un patient y compris une ecmo [extracorporeal membrane oxygenation], un circuit de CEC [circulation extraporelle] qui peut être implanté si un patient se retrouvait dans une grande défaillance viscérale comme cela peut se produire avec un patient Covid", a-t-il ajouté.

Ces transferts s'accompagnent d'une "densité de personnel forte", soit un médecin et deux infirmiers pour deux patients.

Une trentaine de personnels mobilisés

"Au côté de l’équipe médicale, il y a des secouristes entraînés à transporter les patients de l’intérieur vers l’extérieur, et à la manutention des patients, à pouvoir réaliser leur nursing", a complété le Pierre Carli, "pour un vol de 10 à 12 patients, il y a 30 personnes à bord".

"Comme pour les opérations Chardon, on n’est pas à la charge des équipes qui prennent en charge les patients, on est à leur décharge: ils nous prêtent leurs ambulances vides le temps de transporter les patients depuis l’hôpital mais ce sont les équipes de l’avion qui vont chercher les patients en réanimation, qui restent le temps nécessaire dans les réanimations pour stabiliser les patients sur le matériel qui va les accompagner jusqu’au service dans lequel ils seront définitivement hospitalisés", a mis en exergue le directeur du Samu de Paris.

"Il n’y a aucune rupture en termes de matériel de soins, nous appliquons tout le traitement, y compris dans ses détails de kinésithérapie, qui a été mis en place en réanimation", a-t-il insisté.

Le fait que ces transferts soient menés par les équipes des établissements d'accueil leur permet d'être "directement opérationnelles" car elles "travaillent avec le matériel qu’elles utilisent quotidiennement, contrairement à la réserve", a pointé le Pr Carli.

Depuis les opérations Chardon, les critères de sélection des patients ont évolué avec un poids maximal excluant plus élevé, de près de 130 kg contre 110 précédemment, notamment en raison de la qualité des civières employées (charge maximale de 150 kg avec le matériel) et de l'accessibilité plus simple des avions par rapport aux rames TGV.

gl/ab/APMnews

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