Actualités de l'Urgence - APM

DIFFICULTÉS D'ACCÈS AUX SOINS: L'URGENTISTE MATHIAS WARGON MET EN GARDE CONTRE LES SOLUTIONS "SIMPLISTES"
Jean-François Rousset (Ensemble pour la République, Aveyron), président de cette commission dont Christophe Naegelen (Liot, Vosges) est rapporteur, a rappelé lors du début des travaux qu'avait été lancée, avant la dissolution de l'Assemblée nationale, une commission d'enquête à l'objet similaire mais "dont le périmètre était davantage resserré sur l'hôpital public" (cf dépêche du 26/02/2025 à 17:00).
Parmi les premières personnalités auditionnées, Mathias Wargon a préconisé d'éviter d'épouser les positions "simplistes" de "ceux qui pensent que former et embaucher à tout prix permettra de résoudre les problèmes", mais aussi de ceux "qui pensent que l'on pourra toujours faire mieux avec moins".
Au fil des réformes, les mesures mises en place sont "rarement évaluées" et, quand elles le sont, elles "ne mènent jamais à l'arrêt des dispositifs, même s'ils sont peu satisfaisants, et on retire rarement le financement", a-t-il pointé.
Résultat: le système se "complexifie, les mesures s'entassent", avec un empilement de "couches de financement qui ne sont pas dédiées aux soins".
"L'excellence qui devrait être la base de notre système n'est plus une exigence", a estimé l'urgentiste. "On croit que les indicateurs vont résoudre tous les problèmes, c'est du reporting en permanence", a-t-il déroulé, appelant à "retrouver nos valeurs". "On croit que [les indicateurs] vont remplacer le leadership, le management et l'humanité."
Il a appelé à des propositions "innovantes" au lieu des "sempiternels discours sur l'augmentation des lits, dont on sait pertinemment que l'on ne pourra pas la réaliser", notamment faute de personnels en nombre suffisant.
"Il faudrait déjà que l'on puisse sortir les patients de l'hôpital [lorsque leur hospitalisation n'est pas ou plus nécessaire] pour avoir une idée des besoins en lits", a-t-il exposé, insistant à plusieurs reprises sur la pertinence du recours à l'hospitalisation à domicile (HAD), au domicile du patient ou en Ehpad, et sur les économies qui pourraient ainsi être réalisées.
"Il y a besoin de lits, mais pas n'importe où", a-t-il considéré, notant par exemple des besoins en soins médicaux et de réadaptation (SMR).
L'ambulatoire "n'est pas assez financé", a-t-il par ailleurs observé, estimant qu'il devrait être davantage développé pour "le programmé". "Il faut distribuer les moyens au bon endroit", a-t-il défendu.
Le problème des "lits brancards" est, selon lui, à la fois celui de l'organisation de l'hôpital et des urgences. Mathias Wargon a relaté avoir, depuis qu'il dirige les urgences du CH de Saint-Denis (en 2017), réussi à diminuer "les temps d'attente de trois heures, sans augmenter le personnel".
Il a précisé que son service, organisé en plusieurs flux selon les types de prise en charge, était passé de 55.000 passages en 2017 à 65.000 en 2024. "Une fois que j'ai réorganisé les urgences, j'ai vu où il manquait du personnel, où il n'y en avait pas besoin, et j'ai demandé des moyens à ma direction en sachant où les mettre."
Le service des urgences du CH de Saint-Denis n'a "pas de patients dans les couloirs", a-t-il assuré. "Il faut s'organiser."
Les temps d'attente aux urgences dégradent les conditions d'exercice dans ces services, ce qui entraîne "la fuite" des urgentistes, a-t-il rapporté. "Beaucoup vont en réanimation" et d'autres "dans les centres de soins non programmés".
Des "portes d'entrée" vers les plateaux techniques
Egalement présent lors de cette première séance d'auditions de la commission d'enquête, Emmanuel Vigneron, géographe et membre du Haut conseil de la santé publique (HCSP), a estimé que la création de centres de santé gérés par l'hôpital public serait "une très bonne piste à creuser".
Dans bon nombre d'endroits du territoire, "ce n'est pas tellement d'hôpitaux dont on a besoin", mais plutôt "d'avoir des portes d'entrée vers les plateaux techniques".
Il a aussi soulevé la question de la bonne répartition des lits d'hôpital, car "les taux d'occupation ne sont pas partout les mêmes". Et "il est évident qu'en psychiatrie, il n'y en a plus assez", a-t-il souligné.
S'agissant de la répartition des ressources humaines, Mathias Wargon, partisan de la "paramédicalisation" des Smur, a aussi suggéré que dans les service d'accès aux soins (SAS), des infirmières pourraient délivrer des conseils, "au lieu de mettre systématiquement des médecins qui répondent au téléphone".
Le risque d'une régulation généralisée des urgences est "qu'une partie des patients échappe" aux prises en charge, a-t-il aussi prévenu. Tous ne vont pas appeler le 15 et, parmi ceux qui le font, "tous ne vont pas aller chez le généraliste" si c'est l'orientation indiquée.
Mathias Wargon a par ailleurs précisé qu'il n'y avait pas d'infirmier en pratique avancée (IPA) dans son service, mentionnant que les infirmières expérimentées "régressent si elles deviennent IPA", du point de vue de la valorisation de leur ancienneté.
Sur les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue), il a précisé avoir "réussi à remonter [son] service d'urgence grâce à ces médecins étrangers". Il a souligné leur faible rémunération et en la matière "la concurrence d'autres pays, l'Allemagne notamment", ainsi qu'une "certaine inégalité selon les spécialités" lors des épreuves de vérification de connaissances (EVC) (cf dépêche du 12/03/2025 à 18:32).
Des jurys "se permettent ainsi de prendre moins de gens que ceux qui ont la moyenne", a-t-il désapprouvé, soulignant le niveau élevé d'exigence du concours.
mlb/nc/APMnews
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DIFFICULTÉS D'ACCÈS AUX SOINS: L'URGENTISTE MATHIAS WARGON MET EN GARDE CONTRE LES SOLUTIONS "SIMPLISTES"
Jean-François Rousset (Ensemble pour la République, Aveyron), président de cette commission dont Christophe Naegelen (Liot, Vosges) est rapporteur, a rappelé lors du début des travaux qu'avait été lancée, avant la dissolution de l'Assemblée nationale, une commission d'enquête à l'objet similaire mais "dont le périmètre était davantage resserré sur l'hôpital public" (cf dépêche du 26/02/2025 à 17:00).
Parmi les premières personnalités auditionnées, Mathias Wargon a préconisé d'éviter d'épouser les positions "simplistes" de "ceux qui pensent que former et embaucher à tout prix permettra de résoudre les problèmes", mais aussi de ceux "qui pensent que l'on pourra toujours faire mieux avec moins".
Au fil des réformes, les mesures mises en place sont "rarement évaluées" et, quand elles le sont, elles "ne mènent jamais à l'arrêt des dispositifs, même s'ils sont peu satisfaisants, et on retire rarement le financement", a-t-il pointé.
Résultat: le système se "complexifie, les mesures s'entassent", avec un empilement de "couches de financement qui ne sont pas dédiées aux soins".
"L'excellence qui devrait être la base de notre système n'est plus une exigence", a estimé l'urgentiste. "On croit que les indicateurs vont résoudre tous les problèmes, c'est du reporting en permanence", a-t-il déroulé, appelant à "retrouver nos valeurs". "On croit que [les indicateurs] vont remplacer le leadership, le management et l'humanité."
Il a appelé à des propositions "innovantes" au lieu des "sempiternels discours sur l'augmentation des lits, dont on sait pertinemment que l'on ne pourra pas la réaliser", notamment faute de personnels en nombre suffisant.
"Il faudrait déjà que l'on puisse sortir les patients de l'hôpital [lorsque leur hospitalisation n'est pas ou plus nécessaire] pour avoir une idée des besoins en lits", a-t-il exposé, insistant à plusieurs reprises sur la pertinence du recours à l'hospitalisation à domicile (HAD), au domicile du patient ou en Ehpad, et sur les économies qui pourraient ainsi être réalisées.
"Il y a besoin de lits, mais pas n'importe où", a-t-il considéré, notant par exemple des besoins en soins médicaux et de réadaptation (SMR).
L'ambulatoire "n'est pas assez financé", a-t-il par ailleurs observé, estimant qu'il devrait être davantage développé pour "le programmé". "Il faut distribuer les moyens au bon endroit", a-t-il défendu.
Le problème des "lits brancards" est, selon lui, à la fois celui de l'organisation de l'hôpital et des urgences. Mathias Wargon a relaté avoir, depuis qu'il dirige les urgences du CH de Saint-Denis (en 2017), réussi à diminuer "les temps d'attente de trois heures, sans augmenter le personnel".
Il a précisé que son service, organisé en plusieurs flux selon les types de prise en charge, était passé de 55.000 passages en 2017 à 65.000 en 2024. "Une fois que j'ai réorganisé les urgences, j'ai vu où il manquait du personnel, où il n'y en avait pas besoin, et j'ai demandé des moyens à ma direction en sachant où les mettre."
Le service des urgences du CH de Saint-Denis n'a "pas de patients dans les couloirs", a-t-il assuré. "Il faut s'organiser."
Les temps d'attente aux urgences dégradent les conditions d'exercice dans ces services, ce qui entraîne "la fuite" des urgentistes, a-t-il rapporté. "Beaucoup vont en réanimation" et d'autres "dans les centres de soins non programmés".
Des "portes d'entrée" vers les plateaux techniques
Egalement présent lors de cette première séance d'auditions de la commission d'enquête, Emmanuel Vigneron, géographe et membre du Haut conseil de la santé publique (HCSP), a estimé que la création de centres de santé gérés par l'hôpital public serait "une très bonne piste à creuser".
Dans bon nombre d'endroits du territoire, "ce n'est pas tellement d'hôpitaux dont on a besoin", mais plutôt "d'avoir des portes d'entrée vers les plateaux techniques".
Il a aussi soulevé la question de la bonne répartition des lits d'hôpital, car "les taux d'occupation ne sont pas partout les mêmes". Et "il est évident qu'en psychiatrie, il n'y en a plus assez", a-t-il souligné.
S'agissant de la répartition des ressources humaines, Mathias Wargon, partisan de la "paramédicalisation" des Smur, a aussi suggéré que dans les service d'accès aux soins (SAS), des infirmières pourraient délivrer des conseils, "au lieu de mettre systématiquement des médecins qui répondent au téléphone".
Le risque d'une régulation généralisée des urgences est "qu'une partie des patients échappe" aux prises en charge, a-t-il aussi prévenu. Tous ne vont pas appeler le 15 et, parmi ceux qui le font, "tous ne vont pas aller chez le généraliste" si c'est l'orientation indiquée.
Mathias Wargon a par ailleurs précisé qu'il n'y avait pas d'infirmier en pratique avancée (IPA) dans son service, mentionnant que les infirmières expérimentées "régressent si elles deviennent IPA", du point de vue de la valorisation de leur ancienneté.
Sur les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue), il a précisé avoir "réussi à remonter [son] service d'urgence grâce à ces médecins étrangers". Il a souligné leur faible rémunération et en la matière "la concurrence d'autres pays, l'Allemagne notamment", ainsi qu'une "certaine inégalité selon les spécialités" lors des épreuves de vérification de connaissances (EVC) (cf dépêche du 12/03/2025 à 18:32).
Des jurys "se permettent ainsi de prendre moins de gens que ceux qui ont la moyenne", a-t-il désapprouvé, soulignant le niveau élevé d'exigence du concours.
mlb/nc/APMnews