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11/06 2019
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DRÔME: LE DÉCÈS D'UN BÉBÉ IN UTERO À DIE PROBABLEMENT INTERVENU DÈS LES PREMIERS APPELS (RAPPORT MISSION D'INSPECTION)

LYON, 11 juin 2019 (APMnews) - Le décès d'un bébé in utero à Die (Drôme) le 18 février semble être survenu très rapidement et une prise en charge plus rapide de la maman n'aurait pas modifié le pronostic foetal, indique la mission d'inspection dans son rapport dont APMnews a eu connaissance.

Ce rapport a été établi dans le cadre de la mission d'inspection qui a été diligentée fin février par le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes, Jean-Yves Grall, à la suite du décès d'un enfant in utero le 18 février à Die (Drôme) (cf dépêche du 20/02/2019 à 16:47 et dépêche du 04/03/2019 à 13:48).

Dans son rapport d'une vingtaine de pages, la mission indique que la parturiente, âgée de 38 ans et déjà mère de deux enfants, présentait "une grossesse à haut risque". Elle réside à Chatillon-en-Diois, à "17 minutes de Die".

A Die, la maternité (moins de 100 accouchements par an) a été fermée fin 2017 et transformée en centre périnatal de proximité (CPP). Celui-ci a été placé sous la responsabilité du centre hospitalier de Valence qui dispose lui-même d'une maternité de niveau 2B et d'un hélicoptère sanitaire pouvant effectuer des sorties nocturnes.

Dans un communiqué diffusé vendredi soir, l'ARS souligne, en se fondant sur les résultats de la mission, que ce dispositif "est adapté à la prise en charge et au suivi de toutes les grossesses, et notamment des grossesses à risque". "Une convention signée avec l’hôtel hospitalier permet par ailleurs un rapprochement de la maternité, par la patiente, en particulier en situation de grossesse à risque".

En 2018, le CPP de Die a suivi 78 grossesses et effectué 3.042 consultations. Près d’une dizaine de femmes enceintes a pu bénéficier des transports Smur terrestres ou héliportés.

Depuis début 2019, plus de 1.500 consultations ont été réalisées au CPP de Die et des patientes ont pu bénéficier de l’hébergement en hôtel hospitalier à Valence, ajoute l'ARS.

Détaillant le déroulement des faits survenus le 18 février, la mission d'inspection indique, dans son rapport dont APMnews a pris connaissance, que le conjoint de la parturiente a appelé les sapeurs-pompiers à 20h01 pour des manifestations cliniques liées à la grossesse commencées vers 18h45.

Les pompiers sont arrivés à 20h12. Un appel a été passé à ce moment-là à la cellule de régulation de l'hélicoptère du Samu de Valence.

La maman a été conduite aux urgences de l'hôpital de Die et examinée par le médecin de permanence "qui appréhende le degré de gravité", souligne la mission. L'héliSmur de Valence a décollé, avec une sage-femme et un médecin urgentiste, à 21h27, et atterri sur l'hélisurface de Die 10 minutes plus tard. Après examen médical, la décision a été prise de transférer la patiente à l'hôpital de Montélimar, établissement où elle voulait accoucher. Elle a donné naissance à 22h58 à un garçon mort-né.

"Le lendemain, la mère a quitté l'établissement contre avis médical", observe la mission.

La mission qui a analysé l'impact du déroulé de la prise en charge sur la santé de la mère et de l'enfant, juge "probable" qu'à 20h01, le décès du foetus était déjà intervenu et "très probable à quasi certain" qu'il l'était à l'arrivée aux urgences du CH de Die, moins d'une heure plus tard.

Elle souligne le "dévouement" des professionnels intervenus ce jour-là, "en particulier celui des pompiers bénévoles, et du médecin et de l'infirmière des urgences de Die".

Le parcours médical "morcelé" de la parturiente pendant sa grossesse

Cela ne l'empêche toutefois pas d'émettre des critiques sur le parcours médical suivi par la parturiente pendant sa grossesse, de constater des "écarts" par rapport aux recommandations nationales, par exemple sur l'absence de coordination des intervenants, et de pointer le "retard de déclenchement" de l'HéliSmur le 18 février.

Alors qu'il s'agissait d'une grossesse à risque, justifiant, selon les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS), un suivi par un gynécologue-obstétricien, la mission a dénombré "une multiplicité d'intervenants", la parturiente ayant été vue par une dizaine de professionnels de santé au cours de sa grossesse (4 sages-femmes dont 2 libérales, 2 échographistes libéraux, une échographiste au CPP et 2 médecins gynécologues-obstétriciens), sans qu'aucun n'assure un rôle de coordination.

Cette "multiplicité d'intervenants depuis le début de la grossesse jusqu'à l'accouchement n'a pas permis au CPP de jouer pleinement son rôle, ni dans le suivi de la grossesse, ni pour la coordination des professionnels, ni pour la préparation de l'accouchement", déplore la mission qui précise que cette situation est "pour partie de la responsabilité de la famille".

Elle note aussi une "hétérogénéité" des supports des dossiers médicaux utilisés, comme un "dossier papier" à la maternité de Montélimar, ce qui a fait "obstacle à la bonne traçabilité des suivis périnataux". Elle précise qu'elle a aussi constaté la disparition de certains éléments de dossiers médicaux et qu'elle "s'interroge sur la pratique de partage d'informations médicales par le dossier dit Audipog".

Constat d'un dysfonctionnement dans l'organisation de la régulation

Par ailleurs, après avoir analysé la prise en charge effectuée le 18 février, après l'appel du conjoint de la parturiente en fin de journée, la mission indique que le médecin régulateur du Samu 26 en poste à ce moment n'a pas eu "une appréciation appropriée de l'urgence de la situation", conduisant à "un retard de déclenchement du moyen héliporté".

Employant même le terme de "dysfonctionnement", elle explique cette situation par le fait que le médecin régulateur s'occupait d'un patient aux urgences, à un autre étage, ce qui est contraire aux recommandations de la HAS qui indiquent que la fonction de médecin régulateur doit être, lorsqu'elle est assurée, exclusive de toute autre fonction.

Pour la mission, il semble aussi que "les modalités de gestion concertée des appels entre régulateurs médicaux et permanenciers ne sont pas stabilisées". "Le fait qu'un hélicoptère, mis en réserve par un ARM, pilote prévenu, n'ait pas décollé alors que celui-ci, posé sur l'hélistation est parfaitement visible depuis le centre de régulation des appels (...) tempère la défaillance de régulation soulevé et révèle une défaillance majeure d'organisation du Samu 26-CRRA [centre de réception et de régulation des appels]", écrit-elle.

Orienter systématiquement les grossesses à risque vers la maternité (2B) de Valence

En conclusion, la mission "insiste sur la nécessaire anticipation" dans le cas des grossesses à risque et "l'urgence de la prise en charge dans une maternité disposant des ressources médicales et d'un plateau technique adapté pour prendre en charge la mère et l'enfant dans les meilleures conditions".

"D'où l'importance d'envisager pour les grossesses à risque du Diois et du Haut-Diois une orientation systématique et si possible avant l'accouchement vers la maternité de Valence en prévoyant, si nécessaire, la prise en charge dans un hôtel hospitalier à proximité pour les parturientes proches du terme".

La mission tient cependant "à souligner le climat de défiance d’une partie de la population du Diois et du Haut-Diois et certains professionnels, libéraux en particulier, vis-à-vis du nouveau dispositif [du CPP] et particulièrement à l’encontre du CH de Valence associé dans son esprit à la fermeture de la maternité de Die".

"L’adossement du CPP de Die au CH de Valence constitue cependant la clé de voute du dispositif pour sécuriser la prise en charge des grossesses dans le Diois", insiste-t-elle.

Audit externe du fonctionnement du secteur urgences-Samu de Valence

Lors d'une conférence de presse organisée vendredi à Valence, aux côtés du préfet du département, pour présenter les conclusions de cette mission, le directeur général de l'ARS a annoncé le lancement d'une mission d’audit externe sur le fonctionnement du secteur urgences-Samu-Smur à Valence, a-t-on appris auprès de l'agence.

Il a aussi annoncé le co-financement, dans le cadre du contrat local de santé (CLS) du Diois, d'un poste de chargé de mission infirmier pour développer la sensibilisation des habitants du territoire sur le dispositif mis en place pour le suivi et la prise en charge des parturientes.

san/sl/APMnews

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LYON, 11 juin 2019 (APMnews) - Le décès d'un bébé in utero à Die (Drôme) le 18 février semble être survenu très rapidement et une prise en charge plus rapide de la maman n'aurait pas modifié le pronostic foetal, indique la mission d'inspection dans son rapport dont APMnews a eu connaissance.

Ce rapport a été établi dans le cadre de la mission d'inspection qui a été diligentée fin février par le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes, Jean-Yves Grall, à la suite du décès d'un enfant in utero le 18 février à Die (Drôme) (cf dépêche du 20/02/2019 à 16:47 et dépêche du 04/03/2019 à 13:48).

Dans son rapport d'une vingtaine de pages, la mission indique que la parturiente, âgée de 38 ans et déjà mère de deux enfants, présentait "une grossesse à haut risque". Elle réside à Chatillon-en-Diois, à "17 minutes de Die".

A Die, la maternité (moins de 100 accouchements par an) a été fermée fin 2017 et transformée en centre périnatal de proximité (CPP). Celui-ci a été placé sous la responsabilité du centre hospitalier de Valence qui dispose lui-même d'une maternité de niveau 2B et d'un hélicoptère sanitaire pouvant effectuer des sorties nocturnes.

Dans un communiqué diffusé vendredi soir, l'ARS souligne, en se fondant sur les résultats de la mission, que ce dispositif "est adapté à la prise en charge et au suivi de toutes les grossesses, et notamment des grossesses à risque". "Une convention signée avec l’hôtel hospitalier permet par ailleurs un rapprochement de la maternité, par la patiente, en particulier en situation de grossesse à risque".

En 2018, le CPP de Die a suivi 78 grossesses et effectué 3.042 consultations. Près d’une dizaine de femmes enceintes a pu bénéficier des transports Smur terrestres ou héliportés.

Depuis début 2019, plus de 1.500 consultations ont été réalisées au CPP de Die et des patientes ont pu bénéficier de l’hébergement en hôtel hospitalier à Valence, ajoute l'ARS.

Détaillant le déroulement des faits survenus le 18 février, la mission d'inspection indique, dans son rapport dont APMnews a pris connaissance, que le conjoint de la parturiente a appelé les sapeurs-pompiers à 20h01 pour des manifestations cliniques liées à la grossesse commencées vers 18h45.

Les pompiers sont arrivés à 20h12. Un appel a été passé à ce moment-là à la cellule de régulation de l'hélicoptère du Samu de Valence.

La maman a été conduite aux urgences de l'hôpital de Die et examinée par le médecin de permanence "qui appréhende le degré de gravité", souligne la mission. L'héliSmur de Valence a décollé, avec une sage-femme et un médecin urgentiste, à 21h27, et atterri sur l'hélisurface de Die 10 minutes plus tard. Après examen médical, la décision a été prise de transférer la patiente à l'hôpital de Montélimar, établissement où elle voulait accoucher. Elle a donné naissance à 22h58 à un garçon mort-né.

"Le lendemain, la mère a quitté l'établissement contre avis médical", observe la mission.

La mission qui a analysé l'impact du déroulé de la prise en charge sur la santé de la mère et de l'enfant, juge "probable" qu'à 20h01, le décès du foetus était déjà intervenu et "très probable à quasi certain" qu'il l'était à l'arrivée aux urgences du CH de Die, moins d'une heure plus tard.

Elle souligne le "dévouement" des professionnels intervenus ce jour-là, "en particulier celui des pompiers bénévoles, et du médecin et de l'infirmière des urgences de Die".

Le parcours médical "morcelé" de la parturiente pendant sa grossesse

Cela ne l'empêche toutefois pas d'émettre des critiques sur le parcours médical suivi par la parturiente pendant sa grossesse, de constater des "écarts" par rapport aux recommandations nationales, par exemple sur l'absence de coordination des intervenants, et de pointer le "retard de déclenchement" de l'HéliSmur le 18 février.

Alors qu'il s'agissait d'une grossesse à risque, justifiant, selon les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS), un suivi par un gynécologue-obstétricien, la mission a dénombré "une multiplicité d'intervenants", la parturiente ayant été vue par une dizaine de professionnels de santé au cours de sa grossesse (4 sages-femmes dont 2 libérales, 2 échographistes libéraux, une échographiste au CPP et 2 médecins gynécologues-obstétriciens), sans qu'aucun n'assure un rôle de coordination.

Cette "multiplicité d'intervenants depuis le début de la grossesse jusqu'à l'accouchement n'a pas permis au CPP de jouer pleinement son rôle, ni dans le suivi de la grossesse, ni pour la coordination des professionnels, ni pour la préparation de l'accouchement", déplore la mission qui précise que cette situation est "pour partie de la responsabilité de la famille".

Elle note aussi une "hétérogénéité" des supports des dossiers médicaux utilisés, comme un "dossier papier" à la maternité de Montélimar, ce qui a fait "obstacle à la bonne traçabilité des suivis périnataux". Elle précise qu'elle a aussi constaté la disparition de certains éléments de dossiers médicaux et qu'elle "s'interroge sur la pratique de partage d'informations médicales par le dossier dit Audipog".

Constat d'un dysfonctionnement dans l'organisation de la régulation

Par ailleurs, après avoir analysé la prise en charge effectuée le 18 février, après l'appel du conjoint de la parturiente en fin de journée, la mission indique que le médecin régulateur du Samu 26 en poste à ce moment n'a pas eu "une appréciation appropriée de l'urgence de la situation", conduisant à "un retard de déclenchement du moyen héliporté".

Employant même le terme de "dysfonctionnement", elle explique cette situation par le fait que le médecin régulateur s'occupait d'un patient aux urgences, à un autre étage, ce qui est contraire aux recommandations de la HAS qui indiquent que la fonction de médecin régulateur doit être, lorsqu'elle est assurée, exclusive de toute autre fonction.

Pour la mission, il semble aussi que "les modalités de gestion concertée des appels entre régulateurs médicaux et permanenciers ne sont pas stabilisées". "Le fait qu'un hélicoptère, mis en réserve par un ARM, pilote prévenu, n'ait pas décollé alors que celui-ci, posé sur l'hélistation est parfaitement visible depuis le centre de régulation des appels (...) tempère la défaillance de régulation soulevé et révèle une défaillance majeure d'organisation du Samu 26-CRRA [centre de réception et de régulation des appels]", écrit-elle.

Orienter systématiquement les grossesses à risque vers la maternité (2B) de Valence

En conclusion, la mission "insiste sur la nécessaire anticipation" dans le cas des grossesses à risque et "l'urgence de la prise en charge dans une maternité disposant des ressources médicales et d'un plateau technique adapté pour prendre en charge la mère et l'enfant dans les meilleures conditions".

"D'où l'importance d'envisager pour les grossesses à risque du Diois et du Haut-Diois une orientation systématique et si possible avant l'accouchement vers la maternité de Valence en prévoyant, si nécessaire, la prise en charge dans un hôtel hospitalier à proximité pour les parturientes proches du terme".

La mission tient cependant "à souligner le climat de défiance d’une partie de la population du Diois et du Haut-Diois et certains professionnels, libéraux en particulier, vis-à-vis du nouveau dispositif [du CPP] et particulièrement à l’encontre du CH de Valence associé dans son esprit à la fermeture de la maternité de Die".

"L’adossement du CPP de Die au CH de Valence constitue cependant la clé de voute du dispositif pour sécuriser la prise en charge des grossesses dans le Diois", insiste-t-elle.

Audit externe du fonctionnement du secteur urgences-Samu de Valence

Lors d'une conférence de presse organisée vendredi à Valence, aux côtés du préfet du département, pour présenter les conclusions de cette mission, le directeur général de l'ARS a annoncé le lancement d'une mission d’audit externe sur le fonctionnement du secteur urgences-Samu-Smur à Valence, a-t-on appris auprès de l'agence.

Il a aussi annoncé le co-financement, dans le cadre du contrat local de santé (CLS) du Diois, d'un poste de chargé de mission infirmier pour développer la sensibilisation des habitants du territoire sur le dispositif mis en place pour le suivi et la prise en charge des parturientes.

san/sl/APMnews

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