Actualités de l'Urgence - APM

23/11 2023
Retour

EHPAD: LE RECOURS À L'HAD ASSOCIÉ À UNE RÉDUCTION DES DÉPENSES HOSPITALIÈRES (IRDES)

PARIS, 23 novembre 2023 (APMnews) - Le recours à l'hospitalisation à domicile (HAD) en Ehpad est associé à une réduction des transferts des résidents à l'hôpital et aux urgences tout en augmentant le recours aux soins palliatifs en fin de vie, ce qui conduit à une baisse significative des dépenses hospitalières de 6.000 € par semestre pour 100 résidents, selon une étude de l'Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes) sur la période 2015-2017.

Autorisée depuis 2007, l'intervention de l'HAD en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) a augmenté "doucement" au cours des dernières années, avec 252.000 journées en 2015, 360.000 en 2017 et 625.000 en 2021, rappelle l'Irdes dans cette étude rendue publique la semaine dernière et portant sur 5.373 Ehpad dans 12 régions.

Une plus forte augmentation du nombre de résidents pris en charge en HAD a été observée en 2020 lors de la pandémie de Covid-19 (avec une moindre hausse du nombre de journées, impliquant des durées de séjour moins longues) mais ce nombre a baissé dès 2021, une fois le pic de la crise passé (cf dépêche du 18/01/2023 à 15:45).

L'analyse de l'Irdes est fondée sur les données du Système national des données de santé (SNDS), appariées à la base de données Resid-Ehpad pour les années 2014 à 2017, ce qui date un peu et donne une vision de cette prise en charge avant la crise sanitaire, mais permet de détailler la pratique de l'HAD en Ehpad ainsi que son impact sur les soins hospitaliers et les dépenses associées.

Le nombre d'admissions en HAD de résidents d'Ehpad par semestre a presque doublé entre 2015 et 2017, passant de 0,5 pour 100 résidents à 0,9.

Pour autant, le recours à l'HAD en Ehpad restait sur cette période beaucoup moins fréquent que les hospitalisations classiques. En moyenne pour 100 résidents en Ehpad, l'étude fait état au premier semestre 2017 de 29,5 admissions en médecine et chirurgie, dont 16,3 non programmées (urgences), ainsi que 12,7 passages aux urgences non suivis d'une hospitalisation.

Sur la période de l'analyse, les prises en charge les plus fréquentes par l'HAD en Ehpad étaient les pansements complexes (33% des admissions et 55% des journées) et les soins palliatifs (31% des admissions et 27% des journées), suivis par le traitement de la douleur (15% des admissions et 13% des journées) et par les traitements intraveineux (10% des admissions et 7% des journées).

La proportion de résidents décédés en Ehpad ayant eu des soins palliatifs a augmenté entre les premiers semestres 2015 et 2017, passant de 6,1% à 8,1%, principalement en raison d'une augmentation des soins palliatifs en HAD. Les séjours hospitaliers en soins palliatifs sont restés constants sur la même période.

"Pour établir un effet causal de l'HAD sur l'évolution de la consommation de soins hospitaliers, [l'Irdes a] identifié les Ehpad qui ont introduit pour la première fois l'HAD et étudié les changements d'évolution de la consommation de soins des résidents."

Elle observe que ces 1.460 établissements "nouveaux utilisateurs" (27% de la cohorte initiale) ont eu en moyenne 3,5 admissions en HAD pour 100 résidents le premier semestre puis une moyenne d'une admission en HAD pour 100 résidents les semestres suivants.

Ils différaient du groupe témoin d'Ehpad n'ayant jamais fait appel à l'HAD (ou pas depuis un an) car ils étaient plus grands (87 résidents par semestre, soit 9 de plus) et leurs résidents avaient un âge moyen et des taux de mortalité légèrement plus élevés mais ils avaient un nombre de maladies chroniques similaire.

Il existait toutefois déjà des différences significatives de recours et de dépenses hospitalières des résidents avant le passage en HAD: 30 admissions en médecine et chirurgie pour 100 résidents par semestre pour les "nouveaux utilisateurs", contre 25 dans les Ehpad témoins. Le recours aux urgences et les dépenses globales d'hospitalisation étaient également plus élevés. Cependant, il n'y avait pas de différences significatives sur le nombre de recours aux soins palliatifs (en moyenne cinq résidents sur 100 en fin de vie).

Malgré ces différences de niveau, l'hypothèse de tendances communes avant le passage en HAD est vérifiée, ce qui permet une "estimation d'impact par double différence".

Graphes réalisés par l'Irdes
Graphes réalisés par l'Irdes


Dans les établissements ayant utilisé l'HAD pour la première fois, l'Irdes a constaté une baisse des admissions à l'hôpital (deux admissions en moins en médecine et chirurgie pour 100 résidents par semestre) et aux urgences (une admission non programmée et une visite aux urgences non suivie d'hospitalisation en moins pour 100 résidents par semestre).

En parallèle, le nombre de résidents en fin de vie pris en charge par une équipe de soins palliatifs a augmenté de plus de quatre recours pour 100 résidents décédés par semestre après la première intervention de l'HAD, ce qui a doublé le nombre de résidents pris en charge en soins palliatifs.

L'Irdes s'est penchée sur les dépenses totales remboursables par l'assurance maladie liées aux hospitalisations des résidents (médecine et chirurgie, HAD, soins de suite et de réadaptation -SSR, désormais SMR-, urgences et transports sanitaires).

"La dépense totale moyenne par semestre sur les deux ans et demi suivant la première intervention de l'HAD est significativement réduite de 6.000 € par semestre pour 100 résidents dans les Ehpad" nouveaux utilisateurs de l'HAD.

Le détail montre qu'en moyenne, sur les deux ans et demi suivant la première HAD et par semestre, les dépenses de médecine et chirurgie ont été réduites de 7.927 €, les dépenses des services d'urgences de 474 € et les dépenses de transport de 1.551 €. "A contrario, les dépenses d'HAD ont augmenté de 4.330 € par semestre en moyenne", note l'Irdes.

Il n'y a pas de variation significative des dépenses en SSR.

Une qualité des soins améliorée

Pour les auteurs de l'étude, ces résultats montrent par ailleurs que l'intervention de l'HAD en Ehpad améliore la qualité des soins, en assurant des soins fournis habituellement à l'hôpital en Ehpad, ce qui réduit le risque de détérioration physique et psychique lié à un transfert à l'hôpital.

Elle permet aussi d'augmenter le recours aux soins palliatifs et "d'éviter des passages aux urgences, non suivis d'hospitalisation, ce qui peut être lié à une expertise médicale coordonnée imposée dans le cadre de l'HAD".

Toutefois, même si l'HAD en Ehpad apparaît comme un outil qui peut améliorer l'efficience des soins, le nombre d'admissions dans ce dispositif est "relativement faible au regard du nombre de transferts hospitaliers, qui étaient 30 fois plus fréquents au premier semestre de 2017", font valoir les auteurs.

Pour eux, l'HAD "ne semble pas pouvoir combler à elle seule le manque de personnel et de compétence médicale en Ehpad" et il serait "inéquitable" de faire reposer sur ce dispositif des soins essentiels et courants (pansements complexes, soins palliatifs…) car "tous les établissements et tous les résidents ne pourraient pas [y] accéder".

Enfin, "faire déplacer une équipe hospitalière pour des besoins de soins courants peut être peu soutenable économiquement et du point de vue environnemental (coût de transport élevé, etc.)", ajoute-t-elle.

L'Irdes conclut que les résultats de l'étude montrent la contribution de l'HAD à l'amélioration des soins dans les Ehpad, mais également l'importance des hospitalisations évitables des résidents.

Ils "soulignent ainsi la nécessité de reconsidérer le niveau de financement approprié et les compétences internes nécessaires pour assurer les besoins de soins courants en Ehpad, tout en poursuivant la coordination avec les équipes hospitalières d'HAD afin de préserver l'état de santé des résidents, de réduire les hospitalisations et de répondre à l'ensemble de leurs besoins de soins, notamment en fin de vie".

Améliorer les soins en Ehpad: quel impact de l'intervention des équipes d'HAD?, Anne Penneau, Zeynep Or (Irdes), Questions d'économie de la santé n°283, novembre 2023

cb/ab/APMnews

Les données APM Santé sont la propriété de APM International. Toute copie, republication ou redistribution des données APM Santé, notamment via la mise en antémémoire, l'encadrement ou des moyens similaires, est expressément interdite sans l'accord préalable écrit de APM. APM ne sera pas responsable des erreurs ou des retards dans les données ou de toutes actions entreprises en fonction de celles-ci ou toutes décisions prises sur la base du service. APM, APM Santé et le logo APM International, sont des marques d'APM International dans le monde. Pour de plus amples informations sur les autres services d'APM, veuillez consulter le site Web public d'APM à l'adresse www.apmnews.com

Copyright © APM-Santé - Tous droits réservés.

Informations professionnelles

23/11 2023
Retour

EHPAD: LE RECOURS À L'HAD ASSOCIÉ À UNE RÉDUCTION DES DÉPENSES HOSPITALIÈRES (IRDES)

PARIS, 23 novembre 2023 (APMnews) - Le recours à l'hospitalisation à domicile (HAD) en Ehpad est associé à une réduction des transferts des résidents à l'hôpital et aux urgences tout en augmentant le recours aux soins palliatifs en fin de vie, ce qui conduit à une baisse significative des dépenses hospitalières de 6.000 € par semestre pour 100 résidents, selon une étude de l'Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes) sur la période 2015-2017.

Autorisée depuis 2007, l'intervention de l'HAD en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) a augmenté "doucement" au cours des dernières années, avec 252.000 journées en 2015, 360.000 en 2017 et 625.000 en 2021, rappelle l'Irdes dans cette étude rendue publique la semaine dernière et portant sur 5.373 Ehpad dans 12 régions.

Une plus forte augmentation du nombre de résidents pris en charge en HAD a été observée en 2020 lors de la pandémie de Covid-19 (avec une moindre hausse du nombre de journées, impliquant des durées de séjour moins longues) mais ce nombre a baissé dès 2021, une fois le pic de la crise passé (cf dépêche du 18/01/2023 à 15:45).

L'analyse de l'Irdes est fondée sur les données du Système national des données de santé (SNDS), appariées à la base de données Resid-Ehpad pour les années 2014 à 2017, ce qui date un peu et donne une vision de cette prise en charge avant la crise sanitaire, mais permet de détailler la pratique de l'HAD en Ehpad ainsi que son impact sur les soins hospitaliers et les dépenses associées.

Le nombre d'admissions en HAD de résidents d'Ehpad par semestre a presque doublé entre 2015 et 2017, passant de 0,5 pour 100 résidents à 0,9.

Pour autant, le recours à l'HAD en Ehpad restait sur cette période beaucoup moins fréquent que les hospitalisations classiques. En moyenne pour 100 résidents en Ehpad, l'étude fait état au premier semestre 2017 de 29,5 admissions en médecine et chirurgie, dont 16,3 non programmées (urgences), ainsi que 12,7 passages aux urgences non suivis d'une hospitalisation.

Sur la période de l'analyse, les prises en charge les plus fréquentes par l'HAD en Ehpad étaient les pansements complexes (33% des admissions et 55% des journées) et les soins palliatifs (31% des admissions et 27% des journées), suivis par le traitement de la douleur (15% des admissions et 13% des journées) et par les traitements intraveineux (10% des admissions et 7% des journées).

La proportion de résidents décédés en Ehpad ayant eu des soins palliatifs a augmenté entre les premiers semestres 2015 et 2017, passant de 6,1% à 8,1%, principalement en raison d'une augmentation des soins palliatifs en HAD. Les séjours hospitaliers en soins palliatifs sont restés constants sur la même période.

"Pour établir un effet causal de l'HAD sur l'évolution de la consommation de soins hospitaliers, [l'Irdes a] identifié les Ehpad qui ont introduit pour la première fois l'HAD et étudié les changements d'évolution de la consommation de soins des résidents."

Elle observe que ces 1.460 établissements "nouveaux utilisateurs" (27% de la cohorte initiale) ont eu en moyenne 3,5 admissions en HAD pour 100 résidents le premier semestre puis une moyenne d'une admission en HAD pour 100 résidents les semestres suivants.

Ils différaient du groupe témoin d'Ehpad n'ayant jamais fait appel à l'HAD (ou pas depuis un an) car ils étaient plus grands (87 résidents par semestre, soit 9 de plus) et leurs résidents avaient un âge moyen et des taux de mortalité légèrement plus élevés mais ils avaient un nombre de maladies chroniques similaire.

Il existait toutefois déjà des différences significatives de recours et de dépenses hospitalières des résidents avant le passage en HAD: 30 admissions en médecine et chirurgie pour 100 résidents par semestre pour les "nouveaux utilisateurs", contre 25 dans les Ehpad témoins. Le recours aux urgences et les dépenses globales d'hospitalisation étaient également plus élevés. Cependant, il n'y avait pas de différences significatives sur le nombre de recours aux soins palliatifs (en moyenne cinq résidents sur 100 en fin de vie).

Malgré ces différences de niveau, l'hypothèse de tendances communes avant le passage en HAD est vérifiée, ce qui permet une "estimation d'impact par double différence".

Graphes réalisés par l'Irdes
Graphes réalisés par l'Irdes


Dans les établissements ayant utilisé l'HAD pour la première fois, l'Irdes a constaté une baisse des admissions à l'hôpital (deux admissions en moins en médecine et chirurgie pour 100 résidents par semestre) et aux urgences (une admission non programmée et une visite aux urgences non suivie d'hospitalisation en moins pour 100 résidents par semestre).

En parallèle, le nombre de résidents en fin de vie pris en charge par une équipe de soins palliatifs a augmenté de plus de quatre recours pour 100 résidents décédés par semestre après la première intervention de l'HAD, ce qui a doublé le nombre de résidents pris en charge en soins palliatifs.

L'Irdes s'est penchée sur les dépenses totales remboursables par l'assurance maladie liées aux hospitalisations des résidents (médecine et chirurgie, HAD, soins de suite et de réadaptation -SSR, désormais SMR-, urgences et transports sanitaires).

"La dépense totale moyenne par semestre sur les deux ans et demi suivant la première intervention de l'HAD est significativement réduite de 6.000 € par semestre pour 100 résidents dans les Ehpad" nouveaux utilisateurs de l'HAD.

Le détail montre qu'en moyenne, sur les deux ans et demi suivant la première HAD et par semestre, les dépenses de médecine et chirurgie ont été réduites de 7.927 €, les dépenses des services d'urgences de 474 € et les dépenses de transport de 1.551 €. "A contrario, les dépenses d'HAD ont augmenté de 4.330 € par semestre en moyenne", note l'Irdes.

Il n'y a pas de variation significative des dépenses en SSR.

Une qualité des soins améliorée

Pour les auteurs de l'étude, ces résultats montrent par ailleurs que l'intervention de l'HAD en Ehpad améliore la qualité des soins, en assurant des soins fournis habituellement à l'hôpital en Ehpad, ce qui réduit le risque de détérioration physique et psychique lié à un transfert à l'hôpital.

Elle permet aussi d'augmenter le recours aux soins palliatifs et "d'éviter des passages aux urgences, non suivis d'hospitalisation, ce qui peut être lié à une expertise médicale coordonnée imposée dans le cadre de l'HAD".

Toutefois, même si l'HAD en Ehpad apparaît comme un outil qui peut améliorer l'efficience des soins, le nombre d'admissions dans ce dispositif est "relativement faible au regard du nombre de transferts hospitaliers, qui étaient 30 fois plus fréquents au premier semestre de 2017", font valoir les auteurs.

Pour eux, l'HAD "ne semble pas pouvoir combler à elle seule le manque de personnel et de compétence médicale en Ehpad" et il serait "inéquitable" de faire reposer sur ce dispositif des soins essentiels et courants (pansements complexes, soins palliatifs…) car "tous les établissements et tous les résidents ne pourraient pas [y] accéder".

Enfin, "faire déplacer une équipe hospitalière pour des besoins de soins courants peut être peu soutenable économiquement et du point de vue environnemental (coût de transport élevé, etc.)", ajoute-t-elle.

L'Irdes conclut que les résultats de l'étude montrent la contribution de l'HAD à l'amélioration des soins dans les Ehpad, mais également l'importance des hospitalisations évitables des résidents.

Ils "soulignent ainsi la nécessité de reconsidérer le niveau de financement approprié et les compétences internes nécessaires pour assurer les besoins de soins courants en Ehpad, tout en poursuivant la coordination avec les équipes hospitalières d'HAD afin de préserver l'état de santé des résidents, de réduire les hospitalisations et de répondre à l'ensemble de leurs besoins de soins, notamment en fin de vie".

Améliorer les soins en Ehpad: quel impact de l'intervention des équipes d'HAD?, Anne Penneau, Zeynep Or (Irdes), Questions d'économie de la santé n°283, novembre 2023

cb/ab/APMnews

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies pour réaliser des statistiques de visites.