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17/01 2018
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ENDOMÉTRIOSE: APPROCHE DIAGNOSTIQUE GRADUÉE ET PRISE EN CHARGE PLURIDISCIPLINAIRE ET INDIVIDUALISÉE (RECOMMANDATIONS HAS)

SAINT-DENIS (Seine-Saint-Denis), 17 janvier 2018 (APMnews) - Les nouvelles recommandations sur la prise en charge de l'endométriose de la Haute autorité de santé (HAS) et du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), publiées mercredi, mettent l'accent sur une approche diagnostique graduée et la nécessité d'une prise en charge pluridisciplinaire et individualisée.

Cette maladie caractérisée par la migration de tissu endométrial en dehors de l'utérus peut rester asymptomatique, et dans ce cas ne nécessite pas de prise en charge. Celle-ci s'impose en revanche lorsqu'elle a un retentissement fonctionnel, générant des douleurs pelviennes, chroniques ou aiguës, et une infertilité.

L'endométriose commence à être mieux reconnue grâce aux campagnes d'information menées depuis 2016. Jusqu'alors le diagnostic de cette maladie n'était posé que de nombreuses années après le début des symptômes, rappelle-t-on. Le CNGOF avait cependant averti fin 2016 que cette reconnaissance ne devait pas entraîner une inflation des gestes invasifs, comme la coelioscopie, rappelle-t-on (cf dépêche du 05/12/2016 à 09:38).

En l'absence de symptômes, il n’est pas recommandé de proposer un dépistage systématique dans des populations à risque augmenté, que ce soit sur des facteurs génétiques (endométriose chez une apparentée) ou sur des facteurs de risque menstruels (volume menstruel augmenté, cycles courts, premières règles précoces). En outre une surveillance systématique par imagerie des patientes traitées pour endométriose et asymptomatiques n’est pas recommandée. Les données de la littérature ne sont pas en faveur d’une progression de l’endométriose au fil du temps, que ce soit en termes de volume ou de nombre des lésions, souligne la HAS.

Les principaux symptômes sont des menstruations difficiles et douloureuses résistantes aux antalgiques (pouvant être à l’origine d’un absentéisme fréquent), des douleurs pendant les rapports sexuels, des douleurs à la défécation, des problèmes urinaires.

La stratégie diagnostique repose en 1ère intention sur l'interrogatoire dirigé, l'examen clinique et l'échographie pelvienne. En cas de discordance entre l'imagerie et les symptômes, des examens plus spécialisés, réalisés par des praticiens référents, doivent être effectués: examen pelvien orienté avec recherche d'une endométriose profonde, échographie endovaginale ou IRM pelvienne.

C'est seulement en l'absence de détection de lésion caractéristique par ces examens de 2e intention, qu'une coelioscopie diagnostique peut être envisagée, si une endométriose superficielle est suspectée, avec des symptômes évocateurs. Cet examen doit s'insérer dans une stratégie de prise en charge des douleurs ou de l'infertilité, insiste la HAS.

En cas d'endométriose profonde confirmée par les examens de 2e intention, les localisations urinaires et digestives doivent être recherchées, et des examens de 3e intention sont proposés, avant chirurgie d'exérèse, adaptés au bilan pré-opératoire de chaque localisation viscérale.

Un traitement adapté et individualisé

Au chapitre des traitements, l'objectif principal est de réduire voire supprimer les douleurs. En l'absence de désir de grossesse, le traitement repose d'abord sur une contraception estro-progestative ou un système intra-utérin libérant le lévonorgestrel.

Les agonistes de la GnRH sont indiqués en 2e intention, en association à un progestatif et un estrogène. La contraception microprogestative orale au désogestrel, l'implant à l'étonogestrel, sont également indiqués en 2e intention.

Une chirurgie peut être envisagée, en fonction de l'efficacité et des effets indésirables des traitements médicamenteux, de l'intensité des douleurs, de la localisation de l'endométriose, de la qualité de vie et des attentes de la patiente, ainsi que du désir de grossesse.

Dans ce contexte, il n'y a pas de preuve pour recommander systématiquement un traitement hormonal pré-opératoire pour réduire le risque de complication chirurgicale, faciliter la chirurgie ou diminuer le risque de récidive.

Après la chirurgie, en revanche, un traitement hormonal, de préférence pris en continu, est recommandé afin de réduire le risque de récidive douloureuse et d'améliorer la qualité de vie. La poursuite de ce traitement est préconisée tant qu'il est bien toléré et qu'il n'y a pas de désir de grossesse.

Les agonistes de la GnRH ne sont pas recommandés en postopératoire pour prévenir la récidive d'endométriome.

Concernant les "nouveaux traitements" de l'endométriose, ils ne peuvent encore être recommandés. Ainsi, pour les anti-aromatases, les modulateurs sélectifs des récepteurs aux estrogènes (SERM) ou à la progestérone (SPRM), "la littérature est insuffisante pour apporter une preuve de [leur] intérêt en pratique clinique", estime la HAS.

L'antagoniste de la GnRH élagolix ne peut encore être recommandé en dehors d'essais cliniques sur la base des données actuelles, même s'il apparaît efficace pour réduire les dysménorrhées et les douleurs pelviennes non cycliques à 3 et 6 mois. Il est associé à des effets indésirables de type syndrome climatérique, baisse de la densité minérale osseuse et céphalées.

L'anti-TNF alpha infliximab quant à lui n'apporte pas de bénéfice sur la réduction des symptômes douloureux ni le volume des lésions.

Au niveau des antalgiques, les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) au long cours ne sont pas recommandés en raison de leurs effets secondaires.

Une prise en charge pluridisciplinaire, via des centres experts

Dans l'argumentaire scientifique ayant servi de base à l'élaboration des recommandations, les auteurs soulignent que "les difficultés à conduire des travaux permettant de conclure à l’efficacité d’une conduite thérapeutique selon l'evidence based medicine limitent le nombre d’études disponibles. Il reste cependant à constater que les thérapeutiques, complémentaires ou non, pharmacologiques ou non, associent toujours un acte technique à un acte humain".

"L’efficacité des thérapeutiques passe donc également par l’acte humain dans des proportions très variables. La prise en charge de la douleur répond au modèle bio-psycho-social dans une approche holistique par une attention soutenue portée au patient. L’approche pluridisciplinaire devient donc indispensable dans les soins à apporter aux patientes souffrant d’endométriose".

"La démarche diagnostique, l’évaluation de toutes les dimensions de la symptomatologie douloureuse et du contexte thymique associées à la définition des objectifs de la patiente en termes de fertilité et de douleur devraient conduire à une adaptation des traitements et du temps où ils sont proposés. Cette nécessité d’une stratégie de prise en charge globale médicale, chirurgicale et complémentaire devrait être proposée par le recours aux centres experts", estiment-ils.

La HAS souligne ainsi que la prise en charge doit être faite par des équipes pluridisciplinaires "comprenant des radiologues spécialisés, des gynécologues médicaux et chirurgiens gynécologues, urologues et digestifs, des praticiens spécialisés en aide médico-psychologique, des praticiens de la douleur et des psychologues".

Cette prise en charge "doit être individualisée en fonction des symptômes et des attentes des patientes".

En outre, afin d’améliorer la prise en charge et réduire le retard de diagnostic, la HAS souligne que des "centres spécialisés de dépistage précoce et de prise en charge pluridisciplinaire de l’endométriose" sont expérimentés dans plusieurs structures hospitalières. "Ces centres ont aussi pour missions de faciliter la collaboration entre secteur public et secteur privé, ainsi que le partage de connaissances sur la maladie et le développement de la recherche".

Des critères de définition de ces centres experts vont être publiés dans le courant du mois dans 2 revues spécialisées, a indiqué à APMnews le Pr Emile Daraï de l'hôpital Tenon à Paris (AP-HP), qui abrite l'un de ces centres. Ces critères de définition sont des critères structurels (réunion de concertation pluridisciplinaire -RCP), de lien avec des structures d'assistance médicale à la procréation (AMP), et des critères d'activité pour les formes sévères et complexes (nombre d'interventions par centre et par chirurgien).

Recommandation de bonne pratique: Prise en charge de l'endométriose, HAS 2018

cd/ab/APMnews

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ENDOMÉTRIOSE: APPROCHE DIAGNOSTIQUE GRADUÉE ET PRISE EN CHARGE PLURIDISCIPLINAIRE ET INDIVIDUALISÉE (RECOMMANDATIONS HAS)

SAINT-DENIS (Seine-Saint-Denis), 17 janvier 2018 (APMnews) - Les nouvelles recommandations sur la prise en charge de l'endométriose de la Haute autorité de santé (HAS) et du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), publiées mercredi, mettent l'accent sur une approche diagnostique graduée et la nécessité d'une prise en charge pluridisciplinaire et individualisée.

Cette maladie caractérisée par la migration de tissu endométrial en dehors de l'utérus peut rester asymptomatique, et dans ce cas ne nécessite pas de prise en charge. Celle-ci s'impose en revanche lorsqu'elle a un retentissement fonctionnel, générant des douleurs pelviennes, chroniques ou aiguës, et une infertilité.

L'endométriose commence à être mieux reconnue grâce aux campagnes d'information menées depuis 2016. Jusqu'alors le diagnostic de cette maladie n'était posé que de nombreuses années après le début des symptômes, rappelle-t-on. Le CNGOF avait cependant averti fin 2016 que cette reconnaissance ne devait pas entraîner une inflation des gestes invasifs, comme la coelioscopie, rappelle-t-on (cf dépêche du 05/12/2016 à 09:38).

En l'absence de symptômes, il n’est pas recommandé de proposer un dépistage systématique dans des populations à risque augmenté, que ce soit sur des facteurs génétiques (endométriose chez une apparentée) ou sur des facteurs de risque menstruels (volume menstruel augmenté, cycles courts, premières règles précoces). En outre une surveillance systématique par imagerie des patientes traitées pour endométriose et asymptomatiques n’est pas recommandée. Les données de la littérature ne sont pas en faveur d’une progression de l’endométriose au fil du temps, que ce soit en termes de volume ou de nombre des lésions, souligne la HAS.

Les principaux symptômes sont des menstruations difficiles et douloureuses résistantes aux antalgiques (pouvant être à l’origine d’un absentéisme fréquent), des douleurs pendant les rapports sexuels, des douleurs à la défécation, des problèmes urinaires.

La stratégie diagnostique repose en 1ère intention sur l'interrogatoire dirigé, l'examen clinique et l'échographie pelvienne. En cas de discordance entre l'imagerie et les symptômes, des examens plus spécialisés, réalisés par des praticiens référents, doivent être effectués: examen pelvien orienté avec recherche d'une endométriose profonde, échographie endovaginale ou IRM pelvienne.

C'est seulement en l'absence de détection de lésion caractéristique par ces examens de 2e intention, qu'une coelioscopie diagnostique peut être envisagée, si une endométriose superficielle est suspectée, avec des symptômes évocateurs. Cet examen doit s'insérer dans une stratégie de prise en charge des douleurs ou de l'infertilité, insiste la HAS.

En cas d'endométriose profonde confirmée par les examens de 2e intention, les localisations urinaires et digestives doivent être recherchées, et des examens de 3e intention sont proposés, avant chirurgie d'exérèse, adaptés au bilan pré-opératoire de chaque localisation viscérale.

Un traitement adapté et individualisé

Au chapitre des traitements, l'objectif principal est de réduire voire supprimer les douleurs. En l'absence de désir de grossesse, le traitement repose d'abord sur une contraception estro-progestative ou un système intra-utérin libérant le lévonorgestrel.

Les agonistes de la GnRH sont indiqués en 2e intention, en association à un progestatif et un estrogène. La contraception microprogestative orale au désogestrel, l'implant à l'étonogestrel, sont également indiqués en 2e intention.

Une chirurgie peut être envisagée, en fonction de l'efficacité et des effets indésirables des traitements médicamenteux, de l'intensité des douleurs, de la localisation de l'endométriose, de la qualité de vie et des attentes de la patiente, ainsi que du désir de grossesse.

Dans ce contexte, il n'y a pas de preuve pour recommander systématiquement un traitement hormonal pré-opératoire pour réduire le risque de complication chirurgicale, faciliter la chirurgie ou diminuer le risque de récidive.

Après la chirurgie, en revanche, un traitement hormonal, de préférence pris en continu, est recommandé afin de réduire le risque de récidive douloureuse et d'améliorer la qualité de vie. La poursuite de ce traitement est préconisée tant qu'il est bien toléré et qu'il n'y a pas de désir de grossesse.

Les agonistes de la GnRH ne sont pas recommandés en postopératoire pour prévenir la récidive d'endométriome.

Concernant les "nouveaux traitements" de l'endométriose, ils ne peuvent encore être recommandés. Ainsi, pour les anti-aromatases, les modulateurs sélectifs des récepteurs aux estrogènes (SERM) ou à la progestérone (SPRM), "la littérature est insuffisante pour apporter une preuve de [leur] intérêt en pratique clinique", estime la HAS.

L'antagoniste de la GnRH élagolix ne peut encore être recommandé en dehors d'essais cliniques sur la base des données actuelles, même s'il apparaît efficace pour réduire les dysménorrhées et les douleurs pelviennes non cycliques à 3 et 6 mois. Il est associé à des effets indésirables de type syndrome climatérique, baisse de la densité minérale osseuse et céphalées.

L'anti-TNF alpha infliximab quant à lui n'apporte pas de bénéfice sur la réduction des symptômes douloureux ni le volume des lésions.

Au niveau des antalgiques, les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) au long cours ne sont pas recommandés en raison de leurs effets secondaires.

Une prise en charge pluridisciplinaire, via des centres experts

Dans l'argumentaire scientifique ayant servi de base à l'élaboration des recommandations, les auteurs soulignent que "les difficultés à conduire des travaux permettant de conclure à l’efficacité d’une conduite thérapeutique selon l'evidence based medicine limitent le nombre d’études disponibles. Il reste cependant à constater que les thérapeutiques, complémentaires ou non, pharmacologiques ou non, associent toujours un acte technique à un acte humain".

"L’efficacité des thérapeutiques passe donc également par l’acte humain dans des proportions très variables. La prise en charge de la douleur répond au modèle bio-psycho-social dans une approche holistique par une attention soutenue portée au patient. L’approche pluridisciplinaire devient donc indispensable dans les soins à apporter aux patientes souffrant d’endométriose".

"La démarche diagnostique, l’évaluation de toutes les dimensions de la symptomatologie douloureuse et du contexte thymique associées à la définition des objectifs de la patiente en termes de fertilité et de douleur devraient conduire à une adaptation des traitements et du temps où ils sont proposés. Cette nécessité d’une stratégie de prise en charge globale médicale, chirurgicale et complémentaire devrait être proposée par le recours aux centres experts", estiment-ils.

La HAS souligne ainsi que la prise en charge doit être faite par des équipes pluridisciplinaires "comprenant des radiologues spécialisés, des gynécologues médicaux et chirurgiens gynécologues, urologues et digestifs, des praticiens spécialisés en aide médico-psychologique, des praticiens de la douleur et des psychologues".

Cette prise en charge "doit être individualisée en fonction des symptômes et des attentes des patientes".

En outre, afin d’améliorer la prise en charge et réduire le retard de diagnostic, la HAS souligne que des "centres spécialisés de dépistage précoce et de prise en charge pluridisciplinaire de l’endométriose" sont expérimentés dans plusieurs structures hospitalières. "Ces centres ont aussi pour missions de faciliter la collaboration entre secteur public et secteur privé, ainsi que le partage de connaissances sur la maladie et le développement de la recherche".

Des critères de définition de ces centres experts vont être publiés dans le courant du mois dans 2 revues spécialisées, a indiqué à APMnews le Pr Emile Daraï de l'hôpital Tenon à Paris (AP-HP), qui abrite l'un de ces centres. Ces critères de définition sont des critères structurels (réunion de concertation pluridisciplinaire -RCP), de lien avec des structures d'assistance médicale à la procréation (AMP), et des critères d'activité pour les formes sévères et complexes (nombre d'interventions par centre et par chirurgien).

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