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28/09 2023
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FACE À UNE PÉNURIE ATTENDUE DE CARDIOLOGUES INTERVENTIONNELS, L'ACADÉMIE DE MÉDECINE FAIT DES PROPOSITIONS

PARIS, 28 septembre 2023 (APMnews) - Le nombre de cardiologues interventionnels aptes à traiter en urgence des syndromes coronaires aigus est amené à diminuer dans les prochaines années, mettant en péril l'accessibilité 24 h/24 et 7 j/7 de ce traitement, constate l'Académie de médecine dans un rapport rendu public jeudi qui fait des propositions pour y faire face.

"Environ 60.000 syndromes coronaires aigus avec sus-décalage du segment ST font l'objet d'une angioplastie en urgence par an, avec une augmentation d'environ 4% par an", rappelle l'Académie.

A l'heure actuelle, la prise en charge de ces urgences coronaires avec possibilité de réalisation en urgence d'une angioplastie transluminale percutanée dans les 60 à 90 minutes après le premier contact médical est "satisfaisante", soulignent les auteurs du rapport dont le rapporteur est le Pr Christian Spaulding.

En effet, "95% de la population est à proximité (moins d'une heure de transport) d'une salle de cathétérisme. Seules des régions montagneuses (au sein du Massif central, des Alpes et des Pyrénées ainsi qu'en Corse) et quelques autres zones (notamment dans le Grand Est, la Bourgogne-Franche Comté, la Normandie) sont à plus d'une heure de transport.

Ces interventions en urgence sont réalisées dans 46% des cas dans des hôpitaux généraux, dans 27% dans des CHU et dans 27% dans des centres privés. On compte aujourd'hui 212 centres d'angioplastie (207 en métropole) où officient 1.093 cardiologues interventionnels. "Il n'y a pas besoin d'ouverture de centre supplémentaire", estiment les auteurs.

Mais plusieurs problèmes se posent. D'abord, "pour assurer une astreinte de cardiologie interventionnelle, une équipe composée d'un minimum de cinq cardiologues interventionnels est nécessaire". Dès à présent, "si ce nombre est facilement atteint dans les grands centres hospitaliers universitaires, la composition des listes d'astreintes est plus difficile dans certains centres hospitaliers généraux ou dans des centres privés".

Ensuite, parmi les 1.093 cardiologues interventionnels, 38% ont plus de 55 ans et 25% plus de 60 ans. Des calculs prenant en compte l'âge supposé de départ en retraite font estimer qu'"il faudra former 273 cardiologues interventionnels dans les cinq prochaines années pour remplacer les départs en retraite, soit plus de 50 par an".

Un chiffre qui pourrait être majoré, pour d'autres raisons. D'une part, le nombre de femmes, bien qu'aujourd'hui très minoritaire (7% des cardiologues interventionnels), est amené à croître, ce qui a des conséquences avec l'impossibilité de poursuivre une activité exposant aux rayonnements ionisants durant la grossesse puis le congé maternité. D'autre part, les aspirations des jeunes médecins en termes d'équilibre entre vie professionnelle et vie privée ont évolué. Or, les astreintes de cardiologie interventionnelle sont lourdes.

De ce fait, une certaine désaffection pour cette discipline a été observée. De plus, les académiciens constatent que la répartition des postes dans les différentes régions n'est pas en adéquation avec la demande; ainsi, des candidats à Reims ou Clermont-Ferrand peuvent ne pas trouver de poste alors qu'en Ile-de-France des postes ne sont pas pourvus.

Plus largement, est aussi constatée une pénurie de cardiologues en raison d'un nombre insuffisant de médecins formés dans cette spécialité, ce qui rend difficile pour certains centres d'assurer une permanence des soins en unité de soins intensifs cardiologiques (Usic), et ce d'autant plus que la mise en œuvre de la réduction du temps de travail et du repos de garde obligatoire complexifie encore la situation.

Six propositions

Pour faire face à ces difficultés annoncées, les auteurs du rapport avancent d'abord l'idée d'un regroupement de centres qui "permettrait de concentrer sur un site les moyens techniques et humains". Mais c'est pour souligner immédiatement le défaut de cette idée: cela risquerait dans certaines régions d'"augmenter le délai d'accès".

Ils font six autres propositions. Ils recommandent notamment d'"adapter le nombre de cardiologues en formation par le troisième cycle des études médicales ('docteur junior") au nombre de départs en retraite et aux modifications de pratique médicale" et d'assouplir les modalités de choix des lieux de stage.

Ensuite, ils recommandent de "créer une commission d'équivalence pour reconnaître les formations en cardiologie interventionnelle obtenues en dehors du troisième cycle des études médicales", par exemple à l'étranger, et "développer les passerelles", par exemple pour des médecins étrangers et pour des cardiologues déjà en exercice désirant s'orienter vers l'interventionnel. Il faudrait aussi "rendre plus attractif l'exercice de la cardiologie interventionnelle", notamment via une revalorisation du statut de praticien hospitalier et une revalorisation des astreintes.

Enfin, de façon large, il est proposé d'"engager une réflexion avec tous les acteurs impliqués dans la prise en charge des urgences coronaires", au niveau régional en particulier. L'objectif serait d'aller vers "des collaborations entre établissements et des collaborations avec la médecine préhospitalière".

Sont également évoqués (mais sans faire partie des recommandations) la réalisation des gestes interventionnels cardiologiques par des non-cardiologues, comme les radiologues interventionnels, après une formation, ce qui "permettrait d'élargir les listes d'astreinte", ainsi que "la robotisation de la coronarographie et de l'angioplastie".

Une robotisation "permettra peut-être une prise en charge à distance: mise en place du matériel par des interventionnels non-cardiologues, voire des infirmières de pratique avancée, avec une réalisation ou supervision à distance par un cardiologue interventionnel".

Rapport de l'Académie de médecine

fb/ab/APMnews

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FACE À UNE PÉNURIE ATTENDUE DE CARDIOLOGUES INTERVENTIONNELS, L'ACADÉMIE DE MÉDECINE FAIT DES PROPOSITIONS

PARIS, 28 septembre 2023 (APMnews) - Le nombre de cardiologues interventionnels aptes à traiter en urgence des syndromes coronaires aigus est amené à diminuer dans les prochaines années, mettant en péril l'accessibilité 24 h/24 et 7 j/7 de ce traitement, constate l'Académie de médecine dans un rapport rendu public jeudi qui fait des propositions pour y faire face.

"Environ 60.000 syndromes coronaires aigus avec sus-décalage du segment ST font l'objet d'une angioplastie en urgence par an, avec une augmentation d'environ 4% par an", rappelle l'Académie.

A l'heure actuelle, la prise en charge de ces urgences coronaires avec possibilité de réalisation en urgence d'une angioplastie transluminale percutanée dans les 60 à 90 minutes après le premier contact médical est "satisfaisante", soulignent les auteurs du rapport dont le rapporteur est le Pr Christian Spaulding.

En effet, "95% de la population est à proximité (moins d'une heure de transport) d'une salle de cathétérisme. Seules des régions montagneuses (au sein du Massif central, des Alpes et des Pyrénées ainsi qu'en Corse) et quelques autres zones (notamment dans le Grand Est, la Bourgogne-Franche Comté, la Normandie) sont à plus d'une heure de transport.

Ces interventions en urgence sont réalisées dans 46% des cas dans des hôpitaux généraux, dans 27% dans des CHU et dans 27% dans des centres privés. On compte aujourd'hui 212 centres d'angioplastie (207 en métropole) où officient 1.093 cardiologues interventionnels. "Il n'y a pas besoin d'ouverture de centre supplémentaire", estiment les auteurs.

Mais plusieurs problèmes se posent. D'abord, "pour assurer une astreinte de cardiologie interventionnelle, une équipe composée d'un minimum de cinq cardiologues interventionnels est nécessaire". Dès à présent, "si ce nombre est facilement atteint dans les grands centres hospitaliers universitaires, la composition des listes d'astreintes est plus difficile dans certains centres hospitaliers généraux ou dans des centres privés".

Ensuite, parmi les 1.093 cardiologues interventionnels, 38% ont plus de 55 ans et 25% plus de 60 ans. Des calculs prenant en compte l'âge supposé de départ en retraite font estimer qu'"il faudra former 273 cardiologues interventionnels dans les cinq prochaines années pour remplacer les départs en retraite, soit plus de 50 par an".

Un chiffre qui pourrait être majoré, pour d'autres raisons. D'une part, le nombre de femmes, bien qu'aujourd'hui très minoritaire (7% des cardiologues interventionnels), est amené à croître, ce qui a des conséquences avec l'impossibilité de poursuivre une activité exposant aux rayonnements ionisants durant la grossesse puis le congé maternité. D'autre part, les aspirations des jeunes médecins en termes d'équilibre entre vie professionnelle et vie privée ont évolué. Or, les astreintes de cardiologie interventionnelle sont lourdes.

De ce fait, une certaine désaffection pour cette discipline a été observée. De plus, les académiciens constatent que la répartition des postes dans les différentes régions n'est pas en adéquation avec la demande; ainsi, des candidats à Reims ou Clermont-Ferrand peuvent ne pas trouver de poste alors qu'en Ile-de-France des postes ne sont pas pourvus.

Plus largement, est aussi constatée une pénurie de cardiologues en raison d'un nombre insuffisant de médecins formés dans cette spécialité, ce qui rend difficile pour certains centres d'assurer une permanence des soins en unité de soins intensifs cardiologiques (Usic), et ce d'autant plus que la mise en œuvre de la réduction du temps de travail et du repos de garde obligatoire complexifie encore la situation.

Six propositions

Pour faire face à ces difficultés annoncées, les auteurs du rapport avancent d'abord l'idée d'un regroupement de centres qui "permettrait de concentrer sur un site les moyens techniques et humains". Mais c'est pour souligner immédiatement le défaut de cette idée: cela risquerait dans certaines régions d'"augmenter le délai d'accès".

Ils font six autres propositions. Ils recommandent notamment d'"adapter le nombre de cardiologues en formation par le troisième cycle des études médicales ('docteur junior") au nombre de départs en retraite et aux modifications de pratique médicale" et d'assouplir les modalités de choix des lieux de stage.

Ensuite, ils recommandent de "créer une commission d'équivalence pour reconnaître les formations en cardiologie interventionnelle obtenues en dehors du troisième cycle des études médicales", par exemple à l'étranger, et "développer les passerelles", par exemple pour des médecins étrangers et pour des cardiologues déjà en exercice désirant s'orienter vers l'interventionnel. Il faudrait aussi "rendre plus attractif l'exercice de la cardiologie interventionnelle", notamment via une revalorisation du statut de praticien hospitalier et une revalorisation des astreintes.

Enfin, de façon large, il est proposé d'"engager une réflexion avec tous les acteurs impliqués dans la prise en charge des urgences coronaires", au niveau régional en particulier. L'objectif serait d'aller vers "des collaborations entre établissements et des collaborations avec la médecine préhospitalière".

Sont également évoqués (mais sans faire partie des recommandations) la réalisation des gestes interventionnels cardiologiques par des non-cardiologues, comme les radiologues interventionnels, après une formation, ce qui "permettrait d'élargir les listes d'astreinte", ainsi que "la robotisation de la coronarographie et de l'angioplastie".

Une robotisation "permettra peut-être une prise en charge à distance: mise en place du matériel par des interventionnels non-cardiologues, voire des infirmières de pratique avancée, avec une réalisation ou supervision à distance par un cardiologue interventionnel".

Rapport de l'Académie de médecine

fb/ab/APMnews

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