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HAUSSE DES CAS DE DENGUE, CHIKUNGUNYA ET ZIKA EN 2024 EN FRANCE, DES INFECTIONS QUI VONT DEVENIR ENDÉMIQUES EN EUROPE

Au 1er janvier 2025, le moustique était implanté dans 81 départements hexagonaux (Corse comprise), avec une extension en 2024 à la Marne, la Haute-Marne et la Haute-Saône, ajoute l'agence sanitaire dans un communiqué sur le début de la période renforcée de surveillance des arboviroses en France métropolitaine, le 1er mai, avec la mise en œuvre de mesures de lutte antivectorielle.
Le début de l'année est "marqué par un risque particulièrement accru d'importation et de circulation du virus du chikungunya en métropole en raison des épidémies en cours sur les territoires de La Réunion et de Mayotte", poursuit SPF, avec "déjà plus de 1.100 cas importés de dengue et plus de 900 cas importés de chikungunya".
"Cette situation fait craindre la mise en place d'une circulation autochtone de ces maladies dans les prochaines semaines", malgré une tendance à la baisse qui semble s'amorcer pour le chikungunya à La Réunion depuis la dernière semaine d'avril, selon les derniers bulletins hebdomadaires de SPF. Une confirmation est toutefois nécessaire en raison de données manquantes sur les deux premières semaines de mai, en raison de jours fériés. Le point de situation publié le 9 mai pour le chikungunya et la dengue à Mayotte suggère une stabilisation, qui reste à confirmer également.
"En 2024, la France métropolitaine a enregistré un nombre record de cas de dengue", tant importés, revenant principalement de Guadeloupe et de Martinique, qu'autochtones (contractés dans l'Hexagone).
Au total, ce sont 4.683 cas importés de dengue et 11 épisodes de transmission autochtone pour un total de 83 cas en Provence-Alpes-Côte d'Azur, Occitanie et Auvergne-Rhône-Alpes (vs 66 en 2022) qui ont été recensés en 2024.
"Il s'agit du nombre le plus important de foyers et de cas autochtones identifiés depuis la mise en place de la surveillance renforcée en 2006", observe SPF dans son bulletin. Le cas primaire importé à l'origine de la transmission a pu être identifié pour trois épisodes, revenant de la Guyane, de La Réunion et d'Indonésie.
En outre, 34 cas importés de chikungunya, 8 cas importés de Zika et une co-infection dengue-chikungunya ont été signalés par des professionnels de santé dans le cadre du système de déclaration obligatoire ou détectés par les données du réseau de laboratoires partenaires de la surveillance des arboviroses.
Un cas autochtone de chikungunya a été rapporté pour la première fois en Ile-de-France.
Concernant les cas importés, trois pics de signalements ont été observés au cours de 2024, en mars, en août puis en novembre.
Globalement, "le nombre de foyers de transmission de dengue et de cas autochtones rapportés en 2024 confirme l'augmentation du risque de transmission locale des arboviroses transmises par Aedes albopictus (Ae. albopictus) constatée depuis 2022", conclut SPF.
Des maladies qui vont devenir endémiques en Europe
Cette tendance est confirmée dans l'ensemble de l'Europe par une étude de modélisation menée par des chercheurs suédois et allemands et publiée dans The Lancet Planetary Health. Dans le cadre de ce projet financé par le programme de l'Union européenne pour la recherche et l'innovation, ils ont souhaité quantifier les facteurs sous-jacents qui facilitent et accélèrent la transition des épidémies d'arboviroses sporadiques à endémiques, en se concentrant sur la dengue et le chikungunya.
Ils ont réalisé une analyse des données de temps entre l'établissement d'Ae. albopictus jusqu'à la survenue des premiers épisodes autochtones de dengue et de chikungunya dans trois unités territoriales statistiques (NUTS) de l'Union européenne depuis l'arrivée du moustique pour la première fois en Europe, à Gênes en Italie, en 1990.
En 2024, le moustique était implanté dans 358 régions de 14 pays européens, avec une accélération depuis 2022. A ce jour, un total de 66 épisodes autochtones de dengue et le chikungunya ont été recensés dans les trois NUTS de l'étude, en particulier en Italie, France, Espagne et Croatie.
Les données pour ces quatre pays notamment suggèrent une progression des cas sporadiques vers une endémicité pour ces deux arboviroses. Le délai entre l'établissement du moustique et un premier foyer de cas était de plus de 25 ans dans les années 1990 et il se réduit à présent à moins de cinq ans. Le délai entre la survenue d'un deuxième foyer épidémique après un premier se raccourcit également à moins d'une année.
Cette tendance s'explique probablement par le changement climatique et la mobilité des populations. Selon l'analyse multivariée des données, les variations climatiques, notamment la hausse des températures en été, apparaissent comme les facteurs prédictifs les plus fortement associés au risque de foyer épidémique, y compris après ajustement pour les dépenses de santé et le nombre de cas importés. Le risque est plus élevé par ailleurs dans les zones urbaines et semi-urbaines, en raison de la densité de population.
Il apparaît que, pour chaque degré supplémentaire dans la température moyenne au cours de l'été, le risque épidémique augmente de manière significative, avec un hazard ratio (HR) de 1,55, les foyers épidémiques survenant plus tôt dans les zones plus chaudes que dans les zones plus fraîches.
Les chercheurs ont testé différents scénarios et selon les projections du modèle le plus extrême, le HR d'épidémies de dengue et de chikungunya serait presque quintuplé entre 2030 et 2060 par rapport à la période 1990-2024.
"Ces résultats soulignent les besoins pressants de mettre en place des mesures fortes de contrôle, une surveillance renforcée et des systèmes d'alerte précoce dans les pays de l'UE pour atténuer le risque imminent d'endémicité des maladies transmises par le virus Aedes dans la région", concluent les auteurs.
(Santé publique France, Chikungunya, dengue et Zika en France hexagonale, bilan 2024 et The Lancet Planetary Health, vol 9, n°5, e374-e383)
ld/lb/APMnews
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HAUSSE DES CAS DE DENGUE, CHIKUNGUNYA ET ZIKA EN 2024 EN FRANCE, DES INFECTIONS QUI VONT DEVENIR ENDÉMIQUES EN EUROPE

Au 1er janvier 2025, le moustique était implanté dans 81 départements hexagonaux (Corse comprise), avec une extension en 2024 à la Marne, la Haute-Marne et la Haute-Saône, ajoute l'agence sanitaire dans un communiqué sur le début de la période renforcée de surveillance des arboviroses en France métropolitaine, le 1er mai, avec la mise en œuvre de mesures de lutte antivectorielle.
Le début de l'année est "marqué par un risque particulièrement accru d'importation et de circulation du virus du chikungunya en métropole en raison des épidémies en cours sur les territoires de La Réunion et de Mayotte", poursuit SPF, avec "déjà plus de 1.100 cas importés de dengue et plus de 900 cas importés de chikungunya".
"Cette situation fait craindre la mise en place d'une circulation autochtone de ces maladies dans les prochaines semaines", malgré une tendance à la baisse qui semble s'amorcer pour le chikungunya à La Réunion depuis la dernière semaine d'avril, selon les derniers bulletins hebdomadaires de SPF. Une confirmation est toutefois nécessaire en raison de données manquantes sur les deux premières semaines de mai, en raison de jours fériés. Le point de situation publié le 9 mai pour le chikungunya et la dengue à Mayotte suggère une stabilisation, qui reste à confirmer également.
"En 2024, la France métropolitaine a enregistré un nombre record de cas de dengue", tant importés, revenant principalement de Guadeloupe et de Martinique, qu'autochtones (contractés dans l'Hexagone).
Au total, ce sont 4.683 cas importés de dengue et 11 épisodes de transmission autochtone pour un total de 83 cas en Provence-Alpes-Côte d'Azur, Occitanie et Auvergne-Rhône-Alpes (vs 66 en 2022) qui ont été recensés en 2024.
"Il s'agit du nombre le plus important de foyers et de cas autochtones identifiés depuis la mise en place de la surveillance renforcée en 2006", observe SPF dans son bulletin. Le cas primaire importé à l'origine de la transmission a pu être identifié pour trois épisodes, revenant de la Guyane, de La Réunion et d'Indonésie.
En outre, 34 cas importés de chikungunya, 8 cas importés de Zika et une co-infection dengue-chikungunya ont été signalés par des professionnels de santé dans le cadre du système de déclaration obligatoire ou détectés par les données du réseau de laboratoires partenaires de la surveillance des arboviroses.
Un cas autochtone de chikungunya a été rapporté pour la première fois en Ile-de-France.
Concernant les cas importés, trois pics de signalements ont été observés au cours de 2024, en mars, en août puis en novembre.
Globalement, "le nombre de foyers de transmission de dengue et de cas autochtones rapportés en 2024 confirme l'augmentation du risque de transmission locale des arboviroses transmises par Aedes albopictus (Ae. albopictus) constatée depuis 2022", conclut SPF.
Des maladies qui vont devenir endémiques en Europe
Cette tendance est confirmée dans l'ensemble de l'Europe par une étude de modélisation menée par des chercheurs suédois et allemands et publiée dans The Lancet Planetary Health. Dans le cadre de ce projet financé par le programme de l'Union européenne pour la recherche et l'innovation, ils ont souhaité quantifier les facteurs sous-jacents qui facilitent et accélèrent la transition des épidémies d'arboviroses sporadiques à endémiques, en se concentrant sur la dengue et le chikungunya.
Ils ont réalisé une analyse des données de temps entre l'établissement d'Ae. albopictus jusqu'à la survenue des premiers épisodes autochtones de dengue et de chikungunya dans trois unités territoriales statistiques (NUTS) de l'Union européenne depuis l'arrivée du moustique pour la première fois en Europe, à Gênes en Italie, en 1990.
En 2024, le moustique était implanté dans 358 régions de 14 pays européens, avec une accélération depuis 2022. A ce jour, un total de 66 épisodes autochtones de dengue et le chikungunya ont été recensés dans les trois NUTS de l'étude, en particulier en Italie, France, Espagne et Croatie.
Les données pour ces quatre pays notamment suggèrent une progression des cas sporadiques vers une endémicité pour ces deux arboviroses. Le délai entre l'établissement du moustique et un premier foyer de cas était de plus de 25 ans dans les années 1990 et il se réduit à présent à moins de cinq ans. Le délai entre la survenue d'un deuxième foyer épidémique après un premier se raccourcit également à moins d'une année.
Cette tendance s'explique probablement par le changement climatique et la mobilité des populations. Selon l'analyse multivariée des données, les variations climatiques, notamment la hausse des températures en été, apparaissent comme les facteurs prédictifs les plus fortement associés au risque de foyer épidémique, y compris après ajustement pour les dépenses de santé et le nombre de cas importés. Le risque est plus élevé par ailleurs dans les zones urbaines et semi-urbaines, en raison de la densité de population.
Il apparaît que, pour chaque degré supplémentaire dans la température moyenne au cours de l'été, le risque épidémique augmente de manière significative, avec un hazard ratio (HR) de 1,55, les foyers épidémiques survenant plus tôt dans les zones plus chaudes que dans les zones plus fraîches.
Les chercheurs ont testé différents scénarios et selon les projections du modèle le plus extrême, le HR d'épidémies de dengue et de chikungunya serait presque quintuplé entre 2030 et 2060 par rapport à la période 1990-2024.
"Ces résultats soulignent les besoins pressants de mettre en place des mesures fortes de contrôle, une surveillance renforcée et des systèmes d'alerte précoce dans les pays de l'UE pour atténuer le risque imminent d'endémicité des maladies transmises par le virus Aedes dans la région", concluent les auteurs.
(Santé publique France, Chikungunya, dengue et Zika en France hexagonale, bilan 2024 et The Lancet Planetary Health, vol 9, n°5, e374-e383)
ld/lb/APMnews