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INTÉRIM: DES HÔPITAUX À LA PEINE MAIS UNE DÉTERMINATION INTACTE TROIS SEMAINES APRÈS L'ENTRÉE EN VIGUEUR DE LA LOI RIST
PARIS, 26 avril 2023 (APMnews) - S'il est difficile d'appréhender de manière exhaustive l'impact de la loi Rist, de nombreux établissements hospitaliers rencontrent des tensions accrues en ressources médicales trois semaines après la mise en application du plafonnement de l'intérim médical, en particulier dans les urgences, selon les informations recueillies par la rédaction d'APMnews.
L'article 33 de la loi Rist visant à lutter contre l'intérim médical abusif par le rejet des factures dépassant les plafonds réglementaires (cf dépêche du 27/04/2021 à 10:19) est mis en application effective depuis début avril après un premier essai interrompu en raison d'un contexte épidémique défavorable à l'automne 2022 (cf dépêche du 21/10/2021 à 17:38).
Si le ministre de la santé et de la prévention, François Braun, avait dit à plusieurs reprises qu'il n'y aurait pas de "fermetures sèches" de services hospitaliers au cours des trois premières semaines d'avril (cf dépêche du 03/04/2023 à 10:47), le président de Samu-Urgences de France, le Dr Marc Noizet, a remis en cause cette communication alors que de nombreux services hospitaliers, notamment d'urgence, sont impactés par la défection massive de médecins intérimaires (cf dépêche du 25/04/2023 à 18:39).
De son côté, le Syndicat national des médecins remplaçants hospitaliers (SNMRH) poursuit son bras de fer avec le gouvernement, en saisissant le Conseil d'Etat contre le plafonnement de la rémunération de l'intérim médical (cf dépêche du 13/04/2023 à 13:49), pour une première audience fixée au mardi 2 mai. En parallèle, il publie régulièrement une liste des structures de soins et services "fermés et/ou en grande difficulté suite à la tentative de mise en application de la loi Rist" (NDLR: "214 structures de soins et plus de 365 services", selon la dernière communication du SNMRH), selon un comptage élaboré "grâce aux articles de presse, aux notes internes, aux plannings de gardes en [sa] possession, aux remontées de terrain".
La rédaction d'APMnews a tenté de démêler les différentes informations
En Ile-de-France, au sein du groupement hospitalier de territoire (GHT) Grand Paris Nord-Est (GPNE), le centre hospitalier intercommunal (CHI) d'Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) a annoncé vendredi dernier que "suite à une pénurie de personnel médical", il était "contraint de réguler les admissions aux urgences des patients adultes piétons du vendredi 21 avril à 18h jusqu'au lundi 24 avril à 8h puis toutes les soirées et les nuits (18h-8h) à partir de lundi et jusqu'au mardi 2 mai".
Il invite donc les patients adultes à appeler le 15 pour "être orientés vers un établissement" mais indique qu'il prendra bien en charge les adultes adressés par le centre 15 "en particulier tous les patients dits 'couchés'".
Le CHI maintient par ailleurs les urgences pédiatriques et gynécologiques ouvertes aux patients qui se présenteront de façon spontanée, sans régulation préalable.
Dans les Hauts-de-France, au CH de Douai (Nord), ce sont les urgences pédiatriques qui sont à la peine, comme l'avait expliqué fin mars le directeur de l'agence régionale de santé (ARS) Hauts-de-France, Hugo Gilardi (cf dépêche du 31/03/2023 à 11:20). L'établissement a depuis annoncé sur Facebook la fermeture du service la nuit (de 17h à 8h30) durant une grande partie du mois, notamment du 10 au 26 avril. Elles doivent toutefois retrouver une activité normale à partir de jeudi matin.
Dans le Centre-Val de Loire, la situation est particulièrement tendue au CH de Gien (Loiret). L'établissement a annoncé la fermeture de ses urgences dès le 1er mars, et ce pour une durée initiale de six mois, a expliqué vendredi l'ARS Centre-Val de Loire à APMnews.
Une date de réouverture plus précoce a finalement été décrétée grâce à la mise en place d'une prime d'engagement collectif, mobilisée sur la base du volontariat des professionnels concernés. Les urgences doivent par conséquent reprendre leur activité le lundi 15 mai, a révélé l'ARS.
Au CH de Bourges, les urgences "n'ont jamais fermé, ni avant la loi Rist, ni après son application", a assuré la direction. L'établissement n'a par ailleurs "jamais mis de régulation à l'entrée de ses urgences" ni connu de moments sans médecin régulateur.
Le CH a néanmoins reconnu que la loi Rist avait eu "un impact" sur son activité, la fonction de médecin d'accueil et d'orientation (MAO) aux urgences n'étant "plus assurée tous les jours".
Interrogée, la branche CGT du CH de Bourges a également alerté sur l'absence de Smur primaire à plusieurs reprises cette semaine, en raison d'un manque de personnel médical.
La direction du CH de Bourges a néanmoins lancé lundi une équipe paramédicale de médecine d'urgence (EPMU) formée avec des professionnels de l'établissement. "En cas de besoin, le médecin régulateur peut activer l'envoi de cette équipe constituée d'un ambulancier et d'un infirmier expérimenté en soins d'urgence", permettant une prise en charge immédiate d'une situation urgente et éventuellement le rapatriement rapide de la personne vers le CH de Bourges.
Le CH travaille également avec la médecine libérale à la mise en place prochaine d'une régulation déportée des appels au Samu relevant de la médecine de ville.
Dans le Grand Est, le CH de Troyes a été contraint de mettre en place une priorisation des admissions aux urgences préalablement régulées par le Samu-centre 15 à compter du 7 avril, avant de systématiser cette régulation préalable aux admissions aux urgences du samedi 22 avril à 18h au dimanche 23 avril à 8h30 selon le dernier communiqué diffusé par l'établissement.
"On a pu accueillir tous les patients qui se sont présentés dans la nuit grâce aux renforts de médecins volontaires et à une grosse solidarité interne", a précisé Damien Patriat, le directeur des Hôpitaux Champagne Sud (HCS, Troyes), qui regroupent les centres hospitaliers (CH) de Troyes, de Bar-sur-Seine, de Bar-sur-Aube, l'établissement public de santé mentale de l'Aube (EPSMA), le groupement hospitalier (GH) Aube-Marne à Romilly, et les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) de Brienne-le-Château et d'Arcis-sur-Aube (Aube), contacté mardi par APMnews.
Alors que le service d'urgence de l'hôpital employait régulièrement 18 médecins intérimaires et remplaçants avant avril, il n'en compte désormais plus que cinq, ce qui a conduit à une réorganisation systémique des urgences, passées de deux circuits à un circuit unique et une sollicitation plus régulière via le 15 des structures de soins non programmés en ville.
Toujours dans l'Aube, le CH de Bar-sur-Aube, également membre du groupement hospitalier de territoire (GHT) de l'Aube et du Sézannais (dont le CH de Troyes est l'établissement support) a été contraint de fermer son unité de soins de longue durée (USLD) début avril, avec la perspective de redéployer pour partie cette activité sur son service de médecine et soins de suite début mai.
Le CH de Romilly (Aube) a été également fortement impacté par le départ des intérimaires qui y assuraient "100% de l'anesthésie, deux tiers de la pédiatrie et la moitié de la gynécologie, soit 80% d'intérimaires", a rapporté Damien Patriat.
"Le relais a été pris par la clinique [clinique Pays-de-Seine, groupe Avec] en anesthésie", tandis que des solutions ont pu être trouvées pour la pédiatrie et l'anesthésie par le biais d'agences d'intérim, a développé le directeur, en ajoutant que les plannings avaient ainsi pu être sécurisés jusqu'à fin mai.
Alors que le SNMRH rapportait des difficultés concernant le service de réanimation au sein du site de Sedan (Ardennes) du CHI Nord Ardenne, le directeur de l'établissement, Thomas Talec, a indiqué lundi à APMnews qu'il n'y avait "jamais eu" de service de réanimation à Sedan: "Il y avait une unité de surveillance continue qui fonctionnait avec les mêmes anesthésistes que la maternité [NDLR: dont l'activité est suspendue depuis fin mars, après le départ à la retraite de deux anesthésistes], mais ça n'a rien à voir avec la loi Rist" (cf dépêche du 30/03/2023 à 13:14).
"Sur Charleville, pour l'instant on n'a aucune déprogrammation sur le bloc mais c'est vrai que c'est tendu, c'est beaucoup plus dur depuis un mois de faire le planning", a-t-il ajouté.
Le CHR Metz-Thionville a connu "une situation tendue sur les services d'urgence mais aussi sur la néonatologie et la psychiatrie", a rapporté le directeur général par intérim du CHR Metz-Thionville, David Larivière, joint mardi par APMnews, en soulignant que la mise en application de la loi Rist était venue se télescoper avec les vacances scolaires sur la zone du CHR.
"Mais la mise en oeuvre de la loi Rist a pu être bien anticipée", a-t-il enchaîné, en soulignant que le travail mené en amont avec la direction territoriale de l'ARS et les autres établissements mosellans avait permis d'empêcher toute rupture de soins.
Il a par ailleurs indiqué que des intérimaires réguliers du CHR commençaient "à revenir" dont "quatre ou cinq ont pu être recrutés dans l'établissement" sous un format contractuel de motif 2.
"Le planning en cours de finalisation pour le mois de mai, avec la difficulté que présente la période des ponts", a complété David Larivière, en se montrant optimiste sur les semaines à venir "alors que les congés d'avril ont pu être sécurisés".
Contactée lundi par APMnews, la présidente de la commission médicale d'établissement (CME) du CHR, la Dr Marie-France Olieric, a également évoqué une "situation tendue" au cours des dernières semaines: "La situation est difficile parce qu'on sollicite beaucoup les forces en présence."
"On a sollicité des médecins libéraux, on va peut-être commencer à demander aux spécialistes de venir aider aux urgences. Pour l'instant on n'a pas déprogrammé mais si l'étape d'après c'est déprogrammer, comme pendant la crise Covid, je ne sais pas ce qu'il va se passer", a-t-elle indiqué.
La Dr Olieric a à son tour salué le travail de préparation mené pour anticiper la situation et la solidarité dont les équipes hospitalières avaient fait preuve au cours des dernières semaines: "C'est un moment charnière et il faut qu'on tienne."
Même problématique en Bretagne, Pays de la Loire, Nouvelle-Aquitaine et Occitanie
En Bretagne, le CH Centre-Bretagne (CHCB) à Noyal-Pontivy (Morbihan) a été contraint depuis le 18 avril de réguler l'accueil de son service d'urgence la nuit. Alors que cette mesure devrait s'étendre au moins jusqu'au 1er mai, l'établissement a précisé mercredi à APMnews que son Smur restait opérationnel H24 "ainsi que l'accueil des parturientes de la maternité".
Dans les Pays-de-la-Loire, aux Sables d'Olonne (Vendée), l'hôpital a annoncé en début de semaine qu'à la suite de la défection de médecins remplaçants, il a dû adapter temporairement l'organisation de son service d'urgence. L'accueil des urgences a été exceptionnellement suspendu de mardi 15h à mercredi 8h30. Un accueil des patients régulés par le centre 15 a été cependant maintenu de 15h à 23h. Au-delà, un infirmier et un aide-soignant étaient présents pour accueillir les patients qui viendraient à se présenter par leurs propres moyens aux urgences et apporter une réponse la plus adaptée en fonction de leur état de santé.
Se trouvant "confronté à un manque d'effectif paramédical", le CH de Château-du-Loir (Sarthe) a fermé son service 24 heures en début de semaine.
En Nouvelle-Aquitaine, le CH de Sainte-Foy-la-Grande (Gironde) a fermé ses urgences 10 jours, du jeudi 13 au dimanche 23 avril "afin de poursuivre la prise en charge de tous les patients dans les conditions optimales de qualité et de sécurité". Evoquant une période particulièrement délicate, la direction a déploré des tensions de recrutement en personnel médical "telles que les leviers utilisés habituellement, tels l'intérim et la réorganisation interne des services, ne suffisent pas à soulager les équipes en place". Les urgences ont rouvert dimanche comme prévu, a noté le CH de Sainte-Foy-la-Grande.
Le CHU de Poitiers a également annoncé la suspension temporaire du centre de soins non programmés du site de Loudun (Vienne) mardi de 8h à minuit.
En Occitanie, le CH de Saint-Affrique (Aveyron), en direction commune avec le CH de Millau, va fermer sa maternité à partir de jeudi (20 heures) jusqu'au mardi 9 mai (7h30) en raison d'un manque de personnels, a indiqué mardi à APMnews la direction de l'hôpital.
La clinique d'Occitanie (Elsan) à Muret (Haute-Garonne) a fermé ses urgences la nuit "de manière temporaire" entre 23 heures et 9 heures depuis lundi, "en l'absence de deux médecins urgentistes au sein de l'équipe", a indiqué mardi le groupe à APMnews. "Si une urgence vitale venait à se présenter pendant la nuit, la prise en charge médicale serait assurée par le réanimateur de l'établissement."
Vendredi, le groupe Elsan a annoncé la fermeture définitive des urgences de la clinique Bonnefon à Alès (Gard) (Elsan) à compter du 20 juin (cf dépêche du 21/04/2023 à 17:20).
L'hôpital Joseph-Ducuing à Toulouse, établissement de santé privé d'intérêt collectif (Espic), a été contraint de fermer ses urgences les nuits du 1er, 4, 8, 9, 14, 15, 21, 23 et 25 avril. Le service est resté ouvert la journée et les urgences maternité ont continué de fonctionner 24h/24.
Malgré l'inquiétude exprimée récemment par l'association Sauvons l'hôpital B2B, le CH de Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées) ne va pas fermer ses urgences de jour, a assuré mardi le directeur de l'établissement, Christophe Bouriat. "Le planning est bouclé jusqu'en juillet", a-t-il insisté.
En Paca, au CH de Manosque (Alpes-de-Haute-Provence), le service d'urgence, déjà très fragilisé depuis début 2022 avec de nombreuses fermetures la nuit, a vu ses difficultés accentuées depuis l'application de la loi Rist (cf dépêche du 07/04/2023 à 18:46). Contraint de fermer temporairement ses urgences la nuit ainsi que de réguler l'accueil pendant plusieurs journées depuis avril, l'établissement a annoncé mardi de nouvelles dates.
L'accueil des urgences sera régulé le jour les 1er, 4 et 5 mai, 9 et 10 mai, puis les 12 et 13 mai entre 8h30 et 18h30. Le Smur est maintenu.
Le service sera fermé la nuit entre 18h30 à 08h30 (Smur maintenu) du 1er mai au 6 mai inclus, puis les 9, 10 et 13 mai.
Plusieurs établissements majeurs impactés en Auvergne-Rhône-Alpes
En Auvergne-Rhône-Alpes, plusieurs services d'urgence connaissent aussi de fortes tensions. Mais, même si elles sont aggravées par l'application des règles sur l'intérim médical, certaines ne datent pas d'aujourd'hui.
Tel est le cas à Grenoble où un plan blanc territorial est en cours depuis novembre 2021 en raison d'un manque dans plusieurs services d'urgences, publics et privés (cf dépêche du 08/11/2021 à 19:19). Mais le CHU de Grenoble connaît aussi une pénurie "sévère" d'infirmiers de bloc opératoire (Ibode) en pédiatrie, indispensables au fonctionnement des blocs, liée à la difficulté du marché de l'emploi et à un absentéisme accru et soudain, ce qui le contraint à reporter des opérations de chirurgie pédiatrique, tout en maintenant des interventions urgentes.
Aux urgences de l'hôpital Nord-Ouest, à Villefranche-sur-Saône (Rhône), 30% des postes de médecins aux urgences sont vacants. Début avril, le service (80 passages par jour en moyenne) a vu ses difficultés s'accroître avec l'application de la loi Rist. A la suite du manque d'un médecin (sur deux) survenu dans la nuit du 7 avril, et malgré la régulation faite par le Samu 69, la cheffe des urgences a démissionné de ses fonctions à la tête du service et de l'hôpital, avec un préavis de deux mois. L'hôpital a pris des dispositions pour recruter des remplaçants, et pour réorienter les cas non urgents du 7 au 31 mai. Il espère une amélioration de la situation à partir de fin mai avec le retour d'urgentistes de congé maternité.
Dans la Loire, le CH du Forez a fermé le 1er avril les urgences de son site de Feurs et a effectué une réorganisation pour maintenir trois lignes de garde sur le site de Montbrison. Alors que le ministre François Braun a assuré que les problèmes du site de Feurs étaient "anciens", le conseil de surveillance a estimé que la situation était liée à la loi Rist. Une manifestation a eu lieu le dimanche 22 avril pour réclamer la réouverture des urgences.
D'autres points de tension existent dans la région, comme au CH d'Ardèche méridionale (Aubenas). Le 11 avril, l'hôpital a annoncé qu'après 10 jours de fermeture et de régulation, le service des urgences revoyait ses modalités d'ouverture. Il reste fermé la nuit, de 18h30 à 8h30, mais est ouvert la journée.
gl-cb-syl-mg-jyp-san/ab/APMnews
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INTÉRIM: DES HÔPITAUX À LA PEINE MAIS UNE DÉTERMINATION INTACTE TROIS SEMAINES APRÈS L'ENTRÉE EN VIGUEUR DE LA LOI RIST
PARIS, 26 avril 2023 (APMnews) - S'il est difficile d'appréhender de manière exhaustive l'impact de la loi Rist, de nombreux établissements hospitaliers rencontrent des tensions accrues en ressources médicales trois semaines après la mise en application du plafonnement de l'intérim médical, en particulier dans les urgences, selon les informations recueillies par la rédaction d'APMnews.
L'article 33 de la loi Rist visant à lutter contre l'intérim médical abusif par le rejet des factures dépassant les plafonds réglementaires (cf dépêche du 27/04/2021 à 10:19) est mis en application effective depuis début avril après un premier essai interrompu en raison d'un contexte épidémique défavorable à l'automne 2022 (cf dépêche du 21/10/2021 à 17:38).
Si le ministre de la santé et de la prévention, François Braun, avait dit à plusieurs reprises qu'il n'y aurait pas de "fermetures sèches" de services hospitaliers au cours des trois premières semaines d'avril (cf dépêche du 03/04/2023 à 10:47), le président de Samu-Urgences de France, le Dr Marc Noizet, a remis en cause cette communication alors que de nombreux services hospitaliers, notamment d'urgence, sont impactés par la défection massive de médecins intérimaires (cf dépêche du 25/04/2023 à 18:39).
De son côté, le Syndicat national des médecins remplaçants hospitaliers (SNMRH) poursuit son bras de fer avec le gouvernement, en saisissant le Conseil d'Etat contre le plafonnement de la rémunération de l'intérim médical (cf dépêche du 13/04/2023 à 13:49), pour une première audience fixée au mardi 2 mai. En parallèle, il publie régulièrement une liste des structures de soins et services "fermés et/ou en grande difficulté suite à la tentative de mise en application de la loi Rist" (NDLR: "214 structures de soins et plus de 365 services", selon la dernière communication du SNMRH), selon un comptage élaboré "grâce aux articles de presse, aux notes internes, aux plannings de gardes en [sa] possession, aux remontées de terrain".
La rédaction d'APMnews a tenté de démêler les différentes informations
En Ile-de-France, au sein du groupement hospitalier de territoire (GHT) Grand Paris Nord-Est (GPNE), le centre hospitalier intercommunal (CHI) d'Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) a annoncé vendredi dernier que "suite à une pénurie de personnel médical", il était "contraint de réguler les admissions aux urgences des patients adultes piétons du vendredi 21 avril à 18h jusqu'au lundi 24 avril à 8h puis toutes les soirées et les nuits (18h-8h) à partir de lundi et jusqu'au mardi 2 mai".
Il invite donc les patients adultes à appeler le 15 pour "être orientés vers un établissement" mais indique qu'il prendra bien en charge les adultes adressés par le centre 15 "en particulier tous les patients dits 'couchés'".
Le CHI maintient par ailleurs les urgences pédiatriques et gynécologiques ouvertes aux patients qui se présenteront de façon spontanée, sans régulation préalable.
Dans les Hauts-de-France, au CH de Douai (Nord), ce sont les urgences pédiatriques qui sont à la peine, comme l'avait expliqué fin mars le directeur de l'agence régionale de santé (ARS) Hauts-de-France, Hugo Gilardi (cf dépêche du 31/03/2023 à 11:20). L'établissement a depuis annoncé sur Facebook la fermeture du service la nuit (de 17h à 8h30) durant une grande partie du mois, notamment du 10 au 26 avril. Elles doivent toutefois retrouver une activité normale à partir de jeudi matin.
Dans le Centre-Val de Loire, la situation est particulièrement tendue au CH de Gien (Loiret). L'établissement a annoncé la fermeture de ses urgences dès le 1er mars, et ce pour une durée initiale de six mois, a expliqué vendredi l'ARS Centre-Val de Loire à APMnews.
Une date de réouverture plus précoce a finalement été décrétée grâce à la mise en place d'une prime d'engagement collectif, mobilisée sur la base du volontariat des professionnels concernés. Les urgences doivent par conséquent reprendre leur activité le lundi 15 mai, a révélé l'ARS.
Au CH de Bourges, les urgences "n'ont jamais fermé, ni avant la loi Rist, ni après son application", a assuré la direction. L'établissement n'a par ailleurs "jamais mis de régulation à l'entrée de ses urgences" ni connu de moments sans médecin régulateur.
Le CH a néanmoins reconnu que la loi Rist avait eu "un impact" sur son activité, la fonction de médecin d'accueil et d'orientation (MAO) aux urgences n'étant "plus assurée tous les jours".
Interrogée, la branche CGT du CH de Bourges a également alerté sur l'absence de Smur primaire à plusieurs reprises cette semaine, en raison d'un manque de personnel médical.
La direction du CH de Bourges a néanmoins lancé lundi une équipe paramédicale de médecine d'urgence (EPMU) formée avec des professionnels de l'établissement. "En cas de besoin, le médecin régulateur peut activer l'envoi de cette équipe constituée d'un ambulancier et d'un infirmier expérimenté en soins d'urgence", permettant une prise en charge immédiate d'une situation urgente et éventuellement le rapatriement rapide de la personne vers le CH de Bourges.
Le CH travaille également avec la médecine libérale à la mise en place prochaine d'une régulation déportée des appels au Samu relevant de la médecine de ville.
Dans le Grand Est, le CH de Troyes a été contraint de mettre en place une priorisation des admissions aux urgences préalablement régulées par le Samu-centre 15 à compter du 7 avril, avant de systématiser cette régulation préalable aux admissions aux urgences du samedi 22 avril à 18h au dimanche 23 avril à 8h30 selon le dernier communiqué diffusé par l'établissement.
"On a pu accueillir tous les patients qui se sont présentés dans la nuit grâce aux renforts de médecins volontaires et à une grosse solidarité interne", a précisé Damien Patriat, le directeur des Hôpitaux Champagne Sud (HCS, Troyes), qui regroupent les centres hospitaliers (CH) de Troyes, de Bar-sur-Seine, de Bar-sur-Aube, l'établissement public de santé mentale de l'Aube (EPSMA), le groupement hospitalier (GH) Aube-Marne à Romilly, et les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) de Brienne-le-Château et d'Arcis-sur-Aube (Aube), contacté mardi par APMnews.
Alors que le service d'urgence de l'hôpital employait régulièrement 18 médecins intérimaires et remplaçants avant avril, il n'en compte désormais plus que cinq, ce qui a conduit à une réorganisation systémique des urgences, passées de deux circuits à un circuit unique et une sollicitation plus régulière via le 15 des structures de soins non programmés en ville.
Toujours dans l'Aube, le CH de Bar-sur-Aube, également membre du groupement hospitalier de territoire (GHT) de l'Aube et du Sézannais (dont le CH de Troyes est l'établissement support) a été contraint de fermer son unité de soins de longue durée (USLD) début avril, avec la perspective de redéployer pour partie cette activité sur son service de médecine et soins de suite début mai.
Le CH de Romilly (Aube) a été également fortement impacté par le départ des intérimaires qui y assuraient "100% de l'anesthésie, deux tiers de la pédiatrie et la moitié de la gynécologie, soit 80% d'intérimaires", a rapporté Damien Patriat.
"Le relais a été pris par la clinique [clinique Pays-de-Seine, groupe Avec] en anesthésie", tandis que des solutions ont pu être trouvées pour la pédiatrie et l'anesthésie par le biais d'agences d'intérim, a développé le directeur, en ajoutant que les plannings avaient ainsi pu être sécurisés jusqu'à fin mai.
Alors que le SNMRH rapportait des difficultés concernant le service de réanimation au sein du site de Sedan (Ardennes) du CHI Nord Ardenne, le directeur de l'établissement, Thomas Talec, a indiqué lundi à APMnews qu'il n'y avait "jamais eu" de service de réanimation à Sedan: "Il y avait une unité de surveillance continue qui fonctionnait avec les mêmes anesthésistes que la maternité [NDLR: dont l'activité est suspendue depuis fin mars, après le départ à la retraite de deux anesthésistes], mais ça n'a rien à voir avec la loi Rist" (cf dépêche du 30/03/2023 à 13:14).
"Sur Charleville, pour l'instant on n'a aucune déprogrammation sur le bloc mais c'est vrai que c'est tendu, c'est beaucoup plus dur depuis un mois de faire le planning", a-t-il ajouté.
Le CHR Metz-Thionville a connu "une situation tendue sur les services d'urgence mais aussi sur la néonatologie et la psychiatrie", a rapporté le directeur général par intérim du CHR Metz-Thionville, David Larivière, joint mardi par APMnews, en soulignant que la mise en application de la loi Rist était venue se télescoper avec les vacances scolaires sur la zone du CHR.
"Mais la mise en oeuvre de la loi Rist a pu être bien anticipée", a-t-il enchaîné, en soulignant que le travail mené en amont avec la direction territoriale de l'ARS et les autres établissements mosellans avait permis d'empêcher toute rupture de soins.
Il a par ailleurs indiqué que des intérimaires réguliers du CHR commençaient "à revenir" dont "quatre ou cinq ont pu être recrutés dans l'établissement" sous un format contractuel de motif 2.
"Le planning en cours de finalisation pour le mois de mai, avec la difficulté que présente la période des ponts", a complété David Larivière, en se montrant optimiste sur les semaines à venir "alors que les congés d'avril ont pu être sécurisés".
Contactée lundi par APMnews, la présidente de la commission médicale d'établissement (CME) du CHR, la Dr Marie-France Olieric, a également évoqué une "situation tendue" au cours des dernières semaines: "La situation est difficile parce qu'on sollicite beaucoup les forces en présence."
"On a sollicité des médecins libéraux, on va peut-être commencer à demander aux spécialistes de venir aider aux urgences. Pour l'instant on n'a pas déprogrammé mais si l'étape d'après c'est déprogrammer, comme pendant la crise Covid, je ne sais pas ce qu'il va se passer", a-t-elle indiqué.
La Dr Olieric a à son tour salué le travail de préparation mené pour anticiper la situation et la solidarité dont les équipes hospitalières avaient fait preuve au cours des dernières semaines: "C'est un moment charnière et il faut qu'on tienne."
Même problématique en Bretagne, Pays de la Loire, Nouvelle-Aquitaine et Occitanie
En Bretagne, le CH Centre-Bretagne (CHCB) à Noyal-Pontivy (Morbihan) a été contraint depuis le 18 avril de réguler l'accueil de son service d'urgence la nuit. Alors que cette mesure devrait s'étendre au moins jusqu'au 1er mai, l'établissement a précisé mercredi à APMnews que son Smur restait opérationnel H24 "ainsi que l'accueil des parturientes de la maternité".
Dans les Pays-de-la-Loire, aux Sables d'Olonne (Vendée), l'hôpital a annoncé en début de semaine qu'à la suite de la défection de médecins remplaçants, il a dû adapter temporairement l'organisation de son service d'urgence. L'accueil des urgences a été exceptionnellement suspendu de mardi 15h à mercredi 8h30. Un accueil des patients régulés par le centre 15 a été cependant maintenu de 15h à 23h. Au-delà, un infirmier et un aide-soignant étaient présents pour accueillir les patients qui viendraient à se présenter par leurs propres moyens aux urgences et apporter une réponse la plus adaptée en fonction de leur état de santé.
Se trouvant "confronté à un manque d'effectif paramédical", le CH de Château-du-Loir (Sarthe) a fermé son service 24 heures en début de semaine.
En Nouvelle-Aquitaine, le CH de Sainte-Foy-la-Grande (Gironde) a fermé ses urgences 10 jours, du jeudi 13 au dimanche 23 avril "afin de poursuivre la prise en charge de tous les patients dans les conditions optimales de qualité et de sécurité". Evoquant une période particulièrement délicate, la direction a déploré des tensions de recrutement en personnel médical "telles que les leviers utilisés habituellement, tels l'intérim et la réorganisation interne des services, ne suffisent pas à soulager les équipes en place". Les urgences ont rouvert dimanche comme prévu, a noté le CH de Sainte-Foy-la-Grande.
Le CHU de Poitiers a également annoncé la suspension temporaire du centre de soins non programmés du site de Loudun (Vienne) mardi de 8h à minuit.
En Occitanie, le CH de Saint-Affrique (Aveyron), en direction commune avec le CH de Millau, va fermer sa maternité à partir de jeudi (20 heures) jusqu'au mardi 9 mai (7h30) en raison d'un manque de personnels, a indiqué mardi à APMnews la direction de l'hôpital.
La clinique d'Occitanie (Elsan) à Muret (Haute-Garonne) a fermé ses urgences la nuit "de manière temporaire" entre 23 heures et 9 heures depuis lundi, "en l'absence de deux médecins urgentistes au sein de l'équipe", a indiqué mardi le groupe à APMnews. "Si une urgence vitale venait à se présenter pendant la nuit, la prise en charge médicale serait assurée par le réanimateur de l'établissement."
Vendredi, le groupe Elsan a annoncé la fermeture définitive des urgences de la clinique Bonnefon à Alès (Gard) (Elsan) à compter du 20 juin (cf dépêche du 21/04/2023 à 17:20).
L'hôpital Joseph-Ducuing à Toulouse, établissement de santé privé d'intérêt collectif (Espic), a été contraint de fermer ses urgences les nuits du 1er, 4, 8, 9, 14, 15, 21, 23 et 25 avril. Le service est resté ouvert la journée et les urgences maternité ont continué de fonctionner 24h/24.
Malgré l'inquiétude exprimée récemment par l'association Sauvons l'hôpital B2B, le CH de Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées) ne va pas fermer ses urgences de jour, a assuré mardi le directeur de l'établissement, Christophe Bouriat. "Le planning est bouclé jusqu'en juillet", a-t-il insisté.
En Paca, au CH de Manosque (Alpes-de-Haute-Provence), le service d'urgence, déjà très fragilisé depuis début 2022 avec de nombreuses fermetures la nuit, a vu ses difficultés accentuées depuis l'application de la loi Rist (cf dépêche du 07/04/2023 à 18:46). Contraint de fermer temporairement ses urgences la nuit ainsi que de réguler l'accueil pendant plusieurs journées depuis avril, l'établissement a annoncé mardi de nouvelles dates.
L'accueil des urgences sera régulé le jour les 1er, 4 et 5 mai, 9 et 10 mai, puis les 12 et 13 mai entre 8h30 et 18h30. Le Smur est maintenu.
Le service sera fermé la nuit entre 18h30 à 08h30 (Smur maintenu) du 1er mai au 6 mai inclus, puis les 9, 10 et 13 mai.
Plusieurs établissements majeurs impactés en Auvergne-Rhône-Alpes
En Auvergne-Rhône-Alpes, plusieurs services d'urgence connaissent aussi de fortes tensions. Mais, même si elles sont aggravées par l'application des règles sur l'intérim médical, certaines ne datent pas d'aujourd'hui.
Tel est le cas à Grenoble où un plan blanc territorial est en cours depuis novembre 2021 en raison d'un manque dans plusieurs services d'urgences, publics et privés (cf dépêche du 08/11/2021 à 19:19). Mais le CHU de Grenoble connaît aussi une pénurie "sévère" d'infirmiers de bloc opératoire (Ibode) en pédiatrie, indispensables au fonctionnement des blocs, liée à la difficulté du marché de l'emploi et à un absentéisme accru et soudain, ce qui le contraint à reporter des opérations de chirurgie pédiatrique, tout en maintenant des interventions urgentes.
Aux urgences de l'hôpital Nord-Ouest, à Villefranche-sur-Saône (Rhône), 30% des postes de médecins aux urgences sont vacants. Début avril, le service (80 passages par jour en moyenne) a vu ses difficultés s'accroître avec l'application de la loi Rist. A la suite du manque d'un médecin (sur deux) survenu dans la nuit du 7 avril, et malgré la régulation faite par le Samu 69, la cheffe des urgences a démissionné de ses fonctions à la tête du service et de l'hôpital, avec un préavis de deux mois. L'hôpital a pris des dispositions pour recruter des remplaçants, et pour réorienter les cas non urgents du 7 au 31 mai. Il espère une amélioration de la situation à partir de fin mai avec le retour d'urgentistes de congé maternité.
Dans la Loire, le CH du Forez a fermé le 1er avril les urgences de son site de Feurs et a effectué une réorganisation pour maintenir trois lignes de garde sur le site de Montbrison. Alors que le ministre François Braun a assuré que les problèmes du site de Feurs étaient "anciens", le conseil de surveillance a estimé que la situation était liée à la loi Rist. Une manifestation a eu lieu le dimanche 22 avril pour réclamer la réouverture des urgences.
D'autres points de tension existent dans la région, comme au CH d'Ardèche méridionale (Aubenas). Le 11 avril, l'hôpital a annoncé qu'après 10 jours de fermeture et de régulation, le service des urgences revoyait ses modalités d'ouverture. Il reste fermé la nuit, de 18h30 à 8h30, mais est ouvert la journée.
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