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13/06 2023
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INTERNAT DE MÉDECINE GÉNÉRALE: LES SYNDICATS D'ÉTUDIANTS DÉNONCENT UN "MÉPRIS" DU GOUVERNEMENT

PARIS, 13 juin 2023 (APMnews) - Plusieurs syndicats d'étudiants ont dénoncé le "mépris du gouvernement envers les internes de médecine générale", à la suite des annonces du ministre de la santé et de prévention, François Braun, portant sur la création d'une quatrième année d'internat pour cette spécialité, a-t-on appris mardi.

Aprés plusieurs mois de retard (cf dépêche du 09/03/2023 à 12:35), le très attendu rapport portant création d'une quatrième année du diplôme d'études spécialisées (DES) de médecine générale a enfin été rendu public, lundi (cf dépêche du 12/06/2023 à 19:34). A l'occasion de sa remise officielle, François Braun, a dévoilé ses arbitrages (cf dépêche du 12/06/2023 à 18:03).

Ces annonces n'ont pas tardé à faire réagir l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG), l'Intersyndicale nationale des internes (Isni) et l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf).

Les trois syndicats étudiants ont tout d'abord dénoncé le "mauvais timing" de ces annonces qui interviennent à une semaine des épreuves classantes nationales (ECN), alors que la réforme doit s'appliquer aux étudiants entrant en première année d'internat dès 2023 (cf dépêche du 31/10/2022 à 18:37).

"Plus qu'un mauvais timing, c'est presque irresponsable", a fustigé Raphaël Presneau, président de l'Isnar-IMG, contacté par APMnews, mardi: "Alors qu'on a des étudiants qui ont l'impression de jouer leur vie, ces annonces viennent les déstabiliser et perturber leur concentration."

Une colère partagée par Olivia Fraigneau, présidente de l'Isni: "Faire ces annonces à une semaine du concours le plus important dans la vie d'un médecin, c'est intolérable", a-t-elle déploré: "Cela ne permet pas [aux étudiants se destinant à la spécialité de médecine générale] de faire un choix éclairé, ce qui est anxiogène et ne va pas les inciter à vouloir choisir cette spécialité qui n'est déjà pas très populaire."

Dans un communiqué publié lundi, l'Anemf a aussi fait part de son irritation, rappelant que le ministre "s'était engagé à publier l'ensemble des textes réglementaires avant les ECN, afin de garantir un choix éclairé des étudiants". L'association dénonce une réforme qui risque "d'amplifier" la perte d'attrait pour cette spécialité en "plongeant les étudiants dans l'inconnu".

Tous ont demandé que cette réforme soit, au minimum, reportée tant que tous les textes réglementaires n'auront pas été publiés.

Des annonces "incomplètes", "précipitées" et superficielles"

Les étudiants ont également regretté le manque de précisions accompagnant les arbitrages annoncés par le ministre. Tandis que l'Isnar parle d'annonces "incomplètes et précipitées", l'Anemf les qualifie de "superficielles".

Alors que François Braun a annoncé que les internes en médecine générale seraient obligatoirement "soumis à la permanence des soins en ambulatoire" (PDSA), Raphaël Presneau s'est dit "dans l'incompréhension".

"Nous sommes face à un flou total concernant aussi bien notre rémunération, le rythme qui nous sera imposé, que les conditions dans lesquelles on va être encadré", a-t-il noté: "instaurer une telle obligation sans précisions, c'est impensable".

D'autant plus "que les médecins en poste ne sont pas obligés aujourd'hui de participer à la PDSA", a-t-il rappelé avant d'ajouter que "plus des deux tiers des internes interrogés" ont fait part de leur accord pour "découvrir la PDSA sur la base du volontariat, encadré et avec une rémunération qui va avec la tâche".

Concernant, le déroulement des stages, Raphaël Presneau a regretté, là aussi, des annonces "trop floues". "Nous n'avons aucune précision sur les lieux où les internes seront envoyés", a-t-il déclaré. Cela laisse craindre, selon lui, que les étudiants soient envoyés dans "des locaux dysfonctionnels".

Par dysfonctionnels, j'entends une ancienne pièce de stockage transformée en un bureau sans fenêtre avec un pupitre et une chaise pour accueillir le docteur junior car il n'y aura rien d'autre", a-t-il précisé.

Olivia Fraigneau s'est de son côté montrée agacée "qu'aucun des points de vigilance" soulevés par le syndicat lors de plusieurs réunions avec la DGOS "n'ait été pris en compte".

La représentante syndicale a tout d'abord rappelé que la pratique du "big matching", consistant en une évaluation réciproque entre les terrains de stage et l'étudiant pour choisir un lieu où effectuer celui-ci, pourrait "poser un problème avec les internes en médecine générale où les promotions "sont beaucoup plus nombreuses".

"Cela impliquera donc beaucoup d'analyses de dossiers pour les encadrants", a-t-elle explicité: "Ils n'auront sans doute pas le temps de le faire et cela va les inciter à prendre des étudiants de leur choix et donc entraîner une iniquité dans la procédure."

Elle a également déploré que la possibilité de faire un stage d'un an (si accord des deux parties) ne prenne pas suffisamment en considération les étudiants ayant interrompu leur cursus et/ou "qui auront des périodes de stage décalées par rapport au reste de leur promotion".

"Ceux-là arriveront après la guerre et ne seront pas, par conséquent, prioritaires sur le choix des stages", a-t-elle argumenté, pointant que ces interruptions concernaient surtout "des grossesses ou des problèmes de santé": "Avec un tel système, on contribue à mettre en difficulté les étudiants qui le sont déjà plus que les autres."

"Un salaire de 4.500 euros, ça me fait bien rire"

Alors que le gouvernement a insisté sur la valorisation salariale, permise par la réforme, les syndicats ont grandement relativisé ce chiffre.

Pour rappel, François Braun avait annoncé que les étudiants percevraient en plus de leur rémunération de "docteur junior" (1.900 euros net hors primes), une "rétrocession d'honoraires de 20% du montant des honoraires réalisés, dans la limite d'un plafond de 30 consultations par jour, et d'un plancher de 10 consultations quotidiennes".

Une "indemnité supplémentaire", de l'ordre de 400 euros par mois, serait également mise en place pour les internes volontaires pour effectuer une quatrième année dans les territoires les moins dotés. La rémunération globale ne pourra dans tous les cas pas excéder 4.500 euros net par mois.

"Moi, ces 4.500 euros affichés, ça me fait bien rire", a réagi Raphaël Presneau: "Ce plafond vise juste à rassurer les praticiens hospitaliers, sur le fait que les internes ne seront pas mieux payés. Mais en réalité, la plupart des internes vont toucher bien moins."

"Nous avons bien compris que ces 4.500 euros, ça ne serait pas la norme", a fait écho Olivia Fraigneau, soulignant que le salaire des "docteurs juniors sera amputé de la prime d'autonomie".

Concernant la rétrocession d'honoraires, "les 20% des actes qui nous seront rémunérés seront soumis à l'Urssaf, la caisse de retraites et les cotisations sociales, donc il faut avoir en tête qu'on ne va pas toucher l'entièreté des 20%", a détaillé Raphaël Presneau.

Le président de l'Isnar-IMG a tout de même tenu à saluer la mise en place d'une indemnité supplémentaire en zone sous-dotée: "C'est bien de rester sur de l'incitatif et le montant a le mérite d'exister et d'être relativement significatif."

En outre, il a reconnu la pertinence de permettre aux "docteurs juniors" de tarifer leurs actes: "Cela nous paraît être une bonne chose dans une vision de professionnalisation."

Enfin, le raccourcissement du délai de passage de thèse a été vivement critiqué par l'Isnar, qui dénonce "un recul" des droits des étudiants.

Pour rappel, les internes en médecine générale disposent actuellement de six ans pour passer leur thèse. Avec la réforme, ils devront la passer avant la phase de consolidation.

Une dérogation historique qui trouvait initialement son explication, selon Raphaël Presneau, par "un manque d'enseignants par rapport au nombre d'étudiants".

"Le ratio d'enseignants est environ huit fois inférieur aux autres spécialités", a-t-il détaillé: "Ce qui entraîne des délais plus longs pour trouver un sujet de thèse, qu'il soit validé, avoir un suivi et soutenir."

Si une dérogation a été proposée, cela est insuffisant, selon lui, alors que "plus de 1.500 thèses sont actuellement en retard" de soutenance.

jr/nc/APMnews

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PARIS, 13 juin 2023 (APMnews) - Plusieurs syndicats d'étudiants ont dénoncé le "mépris du gouvernement envers les internes de médecine générale", à la suite des annonces du ministre de la santé et de prévention, François Braun, portant sur la création d'une quatrième année d'internat pour cette spécialité, a-t-on appris mardi.

Aprés plusieurs mois de retard (cf dépêche du 09/03/2023 à 12:35), le très attendu rapport portant création d'une quatrième année du diplôme d'études spécialisées (DES) de médecine générale a enfin été rendu public, lundi (cf dépêche du 12/06/2023 à 19:34). A l'occasion de sa remise officielle, François Braun, a dévoilé ses arbitrages (cf dépêche du 12/06/2023 à 18:03).

Ces annonces n'ont pas tardé à faire réagir l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG), l'Intersyndicale nationale des internes (Isni) et l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf).

Les trois syndicats étudiants ont tout d'abord dénoncé le "mauvais timing" de ces annonces qui interviennent à une semaine des épreuves classantes nationales (ECN), alors que la réforme doit s'appliquer aux étudiants entrant en première année d'internat dès 2023 (cf dépêche du 31/10/2022 à 18:37).

"Plus qu'un mauvais timing, c'est presque irresponsable", a fustigé Raphaël Presneau, président de l'Isnar-IMG, contacté par APMnews, mardi: "Alors qu'on a des étudiants qui ont l'impression de jouer leur vie, ces annonces viennent les déstabiliser et perturber leur concentration."

Une colère partagée par Olivia Fraigneau, présidente de l'Isni: "Faire ces annonces à une semaine du concours le plus important dans la vie d'un médecin, c'est intolérable", a-t-elle déploré: "Cela ne permet pas [aux étudiants se destinant à la spécialité de médecine générale] de faire un choix éclairé, ce qui est anxiogène et ne va pas les inciter à vouloir choisir cette spécialité qui n'est déjà pas très populaire."

Dans un communiqué publié lundi, l'Anemf a aussi fait part de son irritation, rappelant que le ministre "s'était engagé à publier l'ensemble des textes réglementaires avant les ECN, afin de garantir un choix éclairé des étudiants". L'association dénonce une réforme qui risque "d'amplifier" la perte d'attrait pour cette spécialité en "plongeant les étudiants dans l'inconnu".

Tous ont demandé que cette réforme soit, au minimum, reportée tant que tous les textes réglementaires n'auront pas été publiés.

Des annonces "incomplètes", "précipitées" et superficielles"

Les étudiants ont également regretté le manque de précisions accompagnant les arbitrages annoncés par le ministre. Tandis que l'Isnar parle d'annonces "incomplètes et précipitées", l'Anemf les qualifie de "superficielles".

Alors que François Braun a annoncé que les internes en médecine générale seraient obligatoirement "soumis à la permanence des soins en ambulatoire" (PDSA), Raphaël Presneau s'est dit "dans l'incompréhension".

"Nous sommes face à un flou total concernant aussi bien notre rémunération, le rythme qui nous sera imposé, que les conditions dans lesquelles on va être encadré", a-t-il noté: "instaurer une telle obligation sans précisions, c'est impensable".

D'autant plus "que les médecins en poste ne sont pas obligés aujourd'hui de participer à la PDSA", a-t-il rappelé avant d'ajouter que "plus des deux tiers des internes interrogés" ont fait part de leur accord pour "découvrir la PDSA sur la base du volontariat, encadré et avec une rémunération qui va avec la tâche".

Concernant, le déroulement des stages, Raphaël Presneau a regretté, là aussi, des annonces "trop floues". "Nous n'avons aucune précision sur les lieux où les internes seront envoyés", a-t-il déclaré. Cela laisse craindre, selon lui, que les étudiants soient envoyés dans "des locaux dysfonctionnels".

Par dysfonctionnels, j'entends une ancienne pièce de stockage transformée en un bureau sans fenêtre avec un pupitre et une chaise pour accueillir le docteur junior car il n'y aura rien d'autre", a-t-il précisé.

Olivia Fraigneau s'est de son côté montrée agacée "qu'aucun des points de vigilance" soulevés par le syndicat lors de plusieurs réunions avec la DGOS "n'ait été pris en compte".

La représentante syndicale a tout d'abord rappelé que la pratique du "big matching", consistant en une évaluation réciproque entre les terrains de stage et l'étudiant pour choisir un lieu où effectuer celui-ci, pourrait "poser un problème avec les internes en médecine générale où les promotions "sont beaucoup plus nombreuses".

"Cela impliquera donc beaucoup d'analyses de dossiers pour les encadrants", a-t-elle explicité: "Ils n'auront sans doute pas le temps de le faire et cela va les inciter à prendre des étudiants de leur choix et donc entraîner une iniquité dans la procédure."

Elle a également déploré que la possibilité de faire un stage d'un an (si accord des deux parties) ne prenne pas suffisamment en considération les étudiants ayant interrompu leur cursus et/ou "qui auront des périodes de stage décalées par rapport au reste de leur promotion".

"Ceux-là arriveront après la guerre et ne seront pas, par conséquent, prioritaires sur le choix des stages", a-t-elle argumenté, pointant que ces interruptions concernaient surtout "des grossesses ou des problèmes de santé": "Avec un tel système, on contribue à mettre en difficulté les étudiants qui le sont déjà plus que les autres."

"Un salaire de 4.500 euros, ça me fait bien rire"

Alors que le gouvernement a insisté sur la valorisation salariale, permise par la réforme, les syndicats ont grandement relativisé ce chiffre.

Pour rappel, François Braun avait annoncé que les étudiants percevraient en plus de leur rémunération de "docteur junior" (1.900 euros net hors primes), une "rétrocession d'honoraires de 20% du montant des honoraires réalisés, dans la limite d'un plafond de 30 consultations par jour, et d'un plancher de 10 consultations quotidiennes".

Une "indemnité supplémentaire", de l'ordre de 400 euros par mois, serait également mise en place pour les internes volontaires pour effectuer une quatrième année dans les territoires les moins dotés. La rémunération globale ne pourra dans tous les cas pas excéder 4.500 euros net par mois.

"Moi, ces 4.500 euros affichés, ça me fait bien rire", a réagi Raphaël Presneau: "Ce plafond vise juste à rassurer les praticiens hospitaliers, sur le fait que les internes ne seront pas mieux payés. Mais en réalité, la plupart des internes vont toucher bien moins."

"Nous avons bien compris que ces 4.500 euros, ça ne serait pas la norme", a fait écho Olivia Fraigneau, soulignant que le salaire des "docteurs juniors sera amputé de la prime d'autonomie".

Concernant la rétrocession d'honoraires, "les 20% des actes qui nous seront rémunérés seront soumis à l'Urssaf, la caisse de retraites et les cotisations sociales, donc il faut avoir en tête qu'on ne va pas toucher l'entièreté des 20%", a détaillé Raphaël Presneau.

Le président de l'Isnar-IMG a tout de même tenu à saluer la mise en place d'une indemnité supplémentaire en zone sous-dotée: "C'est bien de rester sur de l'incitatif et le montant a le mérite d'exister et d'être relativement significatif."

En outre, il a reconnu la pertinence de permettre aux "docteurs juniors" de tarifer leurs actes: "Cela nous paraît être une bonne chose dans une vision de professionnalisation."

Enfin, le raccourcissement du délai de passage de thèse a été vivement critiqué par l'Isnar, qui dénonce "un recul" des droits des étudiants.

Pour rappel, les internes en médecine générale disposent actuellement de six ans pour passer leur thèse. Avec la réforme, ils devront la passer avant la phase de consolidation.

Une dérogation historique qui trouvait initialement son explication, selon Raphaël Presneau, par "un manque d'enseignants par rapport au nombre d'étudiants".

"Le ratio d'enseignants est environ huit fois inférieur aux autres spécialités", a-t-il détaillé: "Ce qui entraîne des délais plus longs pour trouver un sujet de thèse, qu'il soit validé, avoir un suivi et soutenir."

Si une dérogation a été proposée, cela est insuffisant, selon lui, alors que "plus de 1.500 thèses sont actuellement en retard" de soutenance.

jr/nc/APMnews

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