Actualités de l'Urgence - APM

08/02 2018
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INTOXICATIONS PÉDIATRIQUES AU CANNABIS: HAUSSE DES CAS ADMIS EN RÉANIMATION

SAINT-DENIS (Seine-Saint-Denis), 8 février 2018 (APMnews) - La proportion des enfants hospitalisé en réanimation après intoxication au cannabis a "nettement augmenté", passant de 7% sur 2010-2015 à 13% sur la période du 1er janvier 2015 au 30 septembre 2017, selon le dernier compte-rendu de séance de la commission des stupéfiants et des psychotropes de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) diffusé mardi.

Une enquête nationale a été initiée en mars 2017 après le constat de plusieurs cas graves groupés d'intoxication pédiatrique au cannabis, lit-on dans le compte-rendu de cette séance de décembre 2017, au cours de laquelle les résultats ont été présentés.

De ces nouvelles données, l'ANSM avait souligné une hausse du nombre de cas rapportés, de la proportion de cas "graves" avec séjour en réanimation ainsi qu'"une méconnaissance et probable négligence de la part des parents, avec une admission aux urgences retardée", dans le relevé des conclusions de cette réunion diffusé vers la mi-janvier mais sans aucun chiffre.

Après interrogation des centres d'évaluation et d'information sur les pharmacodépendances-addictovigilance (CEIP-A), 194 signalements ont été analysés entre le 1er janvier 2015 et le 30 septembre 2017. La population principale reste celle des enfants âgés de moins de 2 ans.

Le nombre de cas s'avère "particulièrement important dans le sud de la France" et des pics de notifications sont constatés pendant les périodes festives, notamment en fin d'année et durant l'été, est-il rapporté sans davantage de précision.

Par rapport à l'enquête initiale sur 2000-2014 (cf dépêche du 20/10/2015 à 10:40), la description clinique de ces cas fait état d'une proportion plus importante d'enfants pris en charge pour des comas, des complications respiratoires ou des convulsions.

En conséquence, "la proportion d’enfants hospitalisés en réanimation a nettement augmenté (13% versus 7% dans l'enquête précédente). Au moins cinq enfants ont dû être intubés, avec une assistance respiratoire prolongée. La gravité des cas rapportés semble donc s'être accentuée."

Une recherche toxicologique a été réalisée chez deux tiers des enfants. Les concentrations sanguines retrouvées suggèrent dans la plupart des cas, une ingestion et des niveaux relativement élevés de tétrahydrocannabinol (THC) ou de ses métabolites.

Les tableaux d'intoxication correspondent dans tous les cas à des ingestions accidentelles de cannabis par voie orale, principalement de résine. L'ingestion accentue la métabolisation du THC en 11-OH-THC, métabolite aussi actif que le THC mais avec une meilleure diffusion cérébrale. "Ceci explique l’intensité des symptômes neurologiques, d'autant que le système nerveux central des très jeunes enfants présente une sensibilité plus importante".

Informer les parents sans les stigmatiser

Lors de la réunion, les différents participants ont discuté de l'importance de communiquer sur le sujet mais sans stigmatiser les parents.

Le Dr Maryse Lapeyre-Mestre, responsable du CEIP-A de Toulouse, qui a conduit cette nouvelle enquête nationale, a fait observer que "dans une part non négligeable des cas, un délai de plus de 24 heures s'est écoulé avant que les parents conduisent leur enfant aux urgences".

Le Dr Luc De Haro, membre de la commission, a estimé, d'après son expérience, que les cas d'intoxications extrêmement sévères concernent des enfants dont les parents appartiennent à une génération ayant une image positive du cannabis et n'ont pas conscience du risque qu'ils font courir à leurs enfants en le conservant à leur domicile.

De son avis, le retard dans la prise en charge joue peu dans la gravité croissante des cas. En revanche, il a rapporté les craintes des conséquences légales dont font part fréquemment les parents.

Il a fait observer qu'une communication non "stigmatisante" avait été diffusée à l'intention des parents traités par méthadone et avait permis une "très nette diminution" du nombre de cas d'intoxication pédiatrique et une division par deux des délais de prise en charge.

D'autres membres de la commission sont intervenus dans ce sens. Pour le Dr Jean-Michel Delile, de nombreux parents, mais également des professionnels, sous-évaluent la toxicité particulière du cannabis. Il a rappelé que la hausse du nombre d'intoxications pédiatriques correspond à une tendance mondiale. Elle est par exemple constatée aux Etats-Unis, notamment dans les Etats ayant légalisé la consommation de cannabis comme dans le Colorado.

Le Dr Michel Mallaret a aussi considéré que l'information du grand public présentait "une importance majeure, au vu de la méconnaissance persistante de la toxicité du cannabis".

Il a également estimé que l'information qui avait été diffusée par l'ANSM en 2015 s'est avérée "utile, dans la mesure où elle a permis de sensibiliser les professionnels de santé à la nécessité de réaliser des analyses toxicologiques en cas de comas pédiatriques et donc d'épargner une série d'examens, parfois agressifs, aux enfants concernés.

"Cette sensibilisation n'explique pas, en revanche, l'augmentation des teneurs en THC mise en évidence par les analyses sanguines, et qui constitue un motif de préoccupation", a-t-il souligné.

Marie Bonnet a observé que cette problématique rejoint celle des accidents domestiques et qu'il est nécessaire de mener des campagnes d’information, sans stigmatiser ou culpabiliser les parents.

Il faut "faire en sorte que les communications sur ce sujet ne dissuadent pas les parents de conduire leur enfant aux urgences", a estimé le Dr Lapeyre-Mestre.

ld/cd/APMnews

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SAINT-DENIS (Seine-Saint-Denis), 8 février 2018 (APMnews) - La proportion des enfants hospitalisé en réanimation après intoxication au cannabis a "nettement augmenté", passant de 7% sur 2010-2015 à 13% sur la période du 1er janvier 2015 au 30 septembre 2017, selon le dernier compte-rendu de séance de la commission des stupéfiants et des psychotropes de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) diffusé mardi.

Une enquête nationale a été initiée en mars 2017 après le constat de plusieurs cas graves groupés d'intoxication pédiatrique au cannabis, lit-on dans le compte-rendu de cette séance de décembre 2017, au cours de laquelle les résultats ont été présentés.

De ces nouvelles données, l'ANSM avait souligné une hausse du nombre de cas rapportés, de la proportion de cas "graves" avec séjour en réanimation ainsi qu'"une méconnaissance et probable négligence de la part des parents, avec une admission aux urgences retardée", dans le relevé des conclusions de cette réunion diffusé vers la mi-janvier mais sans aucun chiffre.

Après interrogation des centres d'évaluation et d'information sur les pharmacodépendances-addictovigilance (CEIP-A), 194 signalements ont été analysés entre le 1er janvier 2015 et le 30 septembre 2017. La population principale reste celle des enfants âgés de moins de 2 ans.

Le nombre de cas s'avère "particulièrement important dans le sud de la France" et des pics de notifications sont constatés pendant les périodes festives, notamment en fin d'année et durant l'été, est-il rapporté sans davantage de précision.

Par rapport à l'enquête initiale sur 2000-2014 (cf dépêche du 20/10/2015 à 10:40), la description clinique de ces cas fait état d'une proportion plus importante d'enfants pris en charge pour des comas, des complications respiratoires ou des convulsions.

En conséquence, "la proportion d’enfants hospitalisés en réanimation a nettement augmenté (13% versus 7% dans l'enquête précédente). Au moins cinq enfants ont dû être intubés, avec une assistance respiratoire prolongée. La gravité des cas rapportés semble donc s'être accentuée."

Une recherche toxicologique a été réalisée chez deux tiers des enfants. Les concentrations sanguines retrouvées suggèrent dans la plupart des cas, une ingestion et des niveaux relativement élevés de tétrahydrocannabinol (THC) ou de ses métabolites.

Les tableaux d'intoxication correspondent dans tous les cas à des ingestions accidentelles de cannabis par voie orale, principalement de résine. L'ingestion accentue la métabolisation du THC en 11-OH-THC, métabolite aussi actif que le THC mais avec une meilleure diffusion cérébrale. "Ceci explique l’intensité des symptômes neurologiques, d'autant que le système nerveux central des très jeunes enfants présente une sensibilité plus importante".

Informer les parents sans les stigmatiser

Lors de la réunion, les différents participants ont discuté de l'importance de communiquer sur le sujet mais sans stigmatiser les parents.

Le Dr Maryse Lapeyre-Mestre, responsable du CEIP-A de Toulouse, qui a conduit cette nouvelle enquête nationale, a fait observer que "dans une part non négligeable des cas, un délai de plus de 24 heures s'est écoulé avant que les parents conduisent leur enfant aux urgences".

Le Dr Luc De Haro, membre de la commission, a estimé, d'après son expérience, que les cas d'intoxications extrêmement sévères concernent des enfants dont les parents appartiennent à une génération ayant une image positive du cannabis et n'ont pas conscience du risque qu'ils font courir à leurs enfants en le conservant à leur domicile.

De son avis, le retard dans la prise en charge joue peu dans la gravité croissante des cas. En revanche, il a rapporté les craintes des conséquences légales dont font part fréquemment les parents.

Il a fait observer qu'une communication non "stigmatisante" avait été diffusée à l'intention des parents traités par méthadone et avait permis une "très nette diminution" du nombre de cas d'intoxication pédiatrique et une division par deux des délais de prise en charge.

D'autres membres de la commission sont intervenus dans ce sens. Pour le Dr Jean-Michel Delile, de nombreux parents, mais également des professionnels, sous-évaluent la toxicité particulière du cannabis. Il a rappelé que la hausse du nombre d'intoxications pédiatriques correspond à une tendance mondiale. Elle est par exemple constatée aux Etats-Unis, notamment dans les Etats ayant légalisé la consommation de cannabis comme dans le Colorado.

Le Dr Michel Mallaret a aussi considéré que l'information du grand public présentait "une importance majeure, au vu de la méconnaissance persistante de la toxicité du cannabis".

Il a également estimé que l'information qui avait été diffusée par l'ANSM en 2015 s'est avérée "utile, dans la mesure où elle a permis de sensibiliser les professionnels de santé à la nécessité de réaliser des analyses toxicologiques en cas de comas pédiatriques et donc d'épargner une série d'examens, parfois agressifs, aux enfants concernés.

"Cette sensibilisation n'explique pas, en revanche, l'augmentation des teneurs en THC mise en évidence par les analyses sanguines, et qui constitue un motif de préoccupation", a-t-il souligné.

Marie Bonnet a observé que cette problématique rejoint celle des accidents domestiques et qu'il est nécessaire de mener des campagnes d’information, sans stigmatiser ou culpabiliser les parents.

Il faut "faire en sorte que les communications sur ce sujet ne dissuadent pas les parents de conduire leur enfant aux urgences", a estimé le Dr Lapeyre-Mestre.

ld/cd/APMnews

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