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23/02 2024
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L'ANALYSE AUTOMATIQUE DES DOSSIERS MÉDICAUX DES PATIENTS HOSPITALISÉS POUR SURVEILLER LES TENTATIVES DE SUICIDE

LONDRES, PARIS, 23 février 2024 (APMnews) - Des chercheurs français ont développé des algorithmes reposant sur l'intelligence artificielle (IA) permettant d'appliquer l'analyse automatique du langage naturel aux dossiers médicaux électroniques de patients admis dans plusieurs hôpitaux afin de surveiller les tentatives de suicide, selon un article publié dans NPJ Mental Health Research.

Ces résultats montrent que "l'analyse des données massives collectées au sein de l'entrepôt de données de santé de l'AP-HP permettra à l'avenir d'améliorer le suivi des besoins sanitaires des populations d'Ile-de-France, notamment en appréhendant mieux leur santé mentale", commente l'AP-HP dans un communiqué diffusé jeudi.

Dans cette étude, Romain Rey, directeur du service des sciences des données à l'AP-HP, et ses collègues se sont intéressés aux problèmes de santé mentale qui ont fortement augmenté dans la population avec la pandémie de Covid-19, pointant la nécessité urgente d'organiser une veille sanitaire pendant de telles périodes de crise afin d'identifier rapidement les groupes les plus fragiles et mettre en place des actions de prévention ciblées.

Le développement récent et rapide des technologies de traitement automatique du langage naturel (ou NPL pour natural language processing) ouvre la voie à des applications cliniques. Des études ont montré l'intérêt de cette approche appliquée aux réseaux sociaux.

Les chercheurs ont voulu savoir si le NPL appliqué aux dossiers médicaux électroniques permettait de surveiller la suicidalité pendant la crise du Covid-19, en recherchant notamment des mots associés comme tentative de suicide, défénestration, saut d'un pont, intoxication médicamenteuse volontaire, pendaison, produit caustique, phlébotomie, autolyse, autodestruction…

Ils ont examiné le nombre mensuel d'hospitalisations pour tentative de suicide ainsi que la prévalence de cinq facteurs de risque connus (antécédents de tentative de suicide, isolement social, violences physiques, sexuelles et domestiques).

Pour cela, ils ont mené une étude de cohorte rétrospective observationnelle multicentrique à partir des données des enfants et adultes hospitalisés entre le 1er août 2017 et le 31 juin 2022 dans 15 des 38 établissements de l'AP-HP, soit un total de plus de 2,9 millions d'enregistrements. Les données de 10 d'entre eux ont servi à entraîner l'algorithme et celles des cinq derniers à le valider.

Les algorithmes ont permis d'identifier 14.023 hospitalisations pour tentative de suicide et l'analyse statistique des données indique une variation du nombre mensuel des hospitalisations après le début de la pandémie de 3,7 par rapport aux chiffres prépandémiques, tirée par une hausse observée principalement chez les filles et adolescentes de 8 à 17 ans (variation de 1,8) ainsi que par les jeunes femmes de 18-25 ans (variation de 1,1).

Il apparaît également qu'après le début de la pandémie, les facteurs de risque connus de tentative de suicide étaient davantage déclarés dans les dossiers médicaux, avec un ratio des prévalences avant/après de 1,3 pour les violences domestiques ainsi que pour les violences physiques et de 1,7 pour les violences sexuelles, principalement chez les femmes.

En revanche, la pandémie semble n'avoir eu qu'un effet mineur mais significatif sur l'isolement social et les antécédents de tentative de suicide, avec un ratio des prévalences avant/après de seulement 1,2 et 1,1 respectivement.

L'analyse des données fait par ailleurs apparaître que les séjours pour tentative de suicide après le début de la pandémie étaient plus courts et que les décès étaient moins nombreux.

Ces résultats montrent une augmentation du nombre de tentatives de suicide pendant la période de Covid-19, deux fois plus chez les femmes que chez les hommes sur ces périodes et une hausse particulièrement importante chez les filles et jeunes femmes, âgées de 8 à 25 ans. "De manière alarmante, les violences domestiques, physiques et sexuelles sont des facteurs de risques régulièrement mentionnés dans les comptes rendus d'hospitalisation de celles-ci", relève le coordonnateur de ces travaux, le Pr Richard Delorme, chef du service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'hôpital Robert-Debré à Paris et chercheur à l'Institut Pasteur, dans le communiqué de l'AP-HP.

Les chercheurs concluent que les données collectées dans les dossiers médicaux électroniques peuvent être exploitées pour en tirer des indicateurs décrivant la santé mentale en population générale.

Ces résultats mettent aussi en lumière l'ampleur du phénomène de violences faites aux femmes, y compris aux âges précoces de la vie, et soulignent l'importance de les prendre davantage en compte pour prévenir le risque de tentative de suicide dans ce groupe particulièrement exposé.

(NPG Mental Health Research, publication en ligne du 14 février)

ld/nc/APMnews

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LONDRES, PARIS, 23 février 2024 (APMnews) - Des chercheurs français ont développé des algorithmes reposant sur l'intelligence artificielle (IA) permettant d'appliquer l'analyse automatique du langage naturel aux dossiers médicaux électroniques de patients admis dans plusieurs hôpitaux afin de surveiller les tentatives de suicide, selon un article publié dans NPJ Mental Health Research.

Ces résultats montrent que "l'analyse des données massives collectées au sein de l'entrepôt de données de santé de l'AP-HP permettra à l'avenir d'améliorer le suivi des besoins sanitaires des populations d'Ile-de-France, notamment en appréhendant mieux leur santé mentale", commente l'AP-HP dans un communiqué diffusé jeudi.

Dans cette étude, Romain Rey, directeur du service des sciences des données à l'AP-HP, et ses collègues se sont intéressés aux problèmes de santé mentale qui ont fortement augmenté dans la population avec la pandémie de Covid-19, pointant la nécessité urgente d'organiser une veille sanitaire pendant de telles périodes de crise afin d'identifier rapidement les groupes les plus fragiles et mettre en place des actions de prévention ciblées.

Le développement récent et rapide des technologies de traitement automatique du langage naturel (ou NPL pour natural language processing) ouvre la voie à des applications cliniques. Des études ont montré l'intérêt de cette approche appliquée aux réseaux sociaux.

Les chercheurs ont voulu savoir si le NPL appliqué aux dossiers médicaux électroniques permettait de surveiller la suicidalité pendant la crise du Covid-19, en recherchant notamment des mots associés comme tentative de suicide, défénestration, saut d'un pont, intoxication médicamenteuse volontaire, pendaison, produit caustique, phlébotomie, autolyse, autodestruction…

Ils ont examiné le nombre mensuel d'hospitalisations pour tentative de suicide ainsi que la prévalence de cinq facteurs de risque connus (antécédents de tentative de suicide, isolement social, violences physiques, sexuelles et domestiques).

Pour cela, ils ont mené une étude de cohorte rétrospective observationnelle multicentrique à partir des données des enfants et adultes hospitalisés entre le 1er août 2017 et le 31 juin 2022 dans 15 des 38 établissements de l'AP-HP, soit un total de plus de 2,9 millions d'enregistrements. Les données de 10 d'entre eux ont servi à entraîner l'algorithme et celles des cinq derniers à le valider.

Les algorithmes ont permis d'identifier 14.023 hospitalisations pour tentative de suicide et l'analyse statistique des données indique une variation du nombre mensuel des hospitalisations après le début de la pandémie de 3,7 par rapport aux chiffres prépandémiques, tirée par une hausse observée principalement chez les filles et adolescentes de 8 à 17 ans (variation de 1,8) ainsi que par les jeunes femmes de 18-25 ans (variation de 1,1).

Il apparaît également qu'après le début de la pandémie, les facteurs de risque connus de tentative de suicide étaient davantage déclarés dans les dossiers médicaux, avec un ratio des prévalences avant/après de 1,3 pour les violences domestiques ainsi que pour les violences physiques et de 1,7 pour les violences sexuelles, principalement chez les femmes.

En revanche, la pandémie semble n'avoir eu qu'un effet mineur mais significatif sur l'isolement social et les antécédents de tentative de suicide, avec un ratio des prévalences avant/après de seulement 1,2 et 1,1 respectivement.

L'analyse des données fait par ailleurs apparaître que les séjours pour tentative de suicide après le début de la pandémie étaient plus courts et que les décès étaient moins nombreux.

Ces résultats montrent une augmentation du nombre de tentatives de suicide pendant la période de Covid-19, deux fois plus chez les femmes que chez les hommes sur ces périodes et une hausse particulièrement importante chez les filles et jeunes femmes, âgées de 8 à 25 ans. "De manière alarmante, les violences domestiques, physiques et sexuelles sont des facteurs de risques régulièrement mentionnés dans les comptes rendus d'hospitalisation de celles-ci", relève le coordonnateur de ces travaux, le Pr Richard Delorme, chef du service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'hôpital Robert-Debré à Paris et chercheur à l'Institut Pasteur, dans le communiqué de l'AP-HP.

Les chercheurs concluent que les données collectées dans les dossiers médicaux électroniques peuvent être exploitées pour en tirer des indicateurs décrivant la santé mentale en population générale.

Ces résultats mettent aussi en lumière l'ampleur du phénomène de violences faites aux femmes, y compris aux âges précoces de la vie, et soulignent l'importance de les prendre davantage en compte pour prévenir le risque de tentative de suicide dans ce groupe particulièrement exposé.

(NPG Mental Health Research, publication en ligne du 14 février)

ld/nc/APMnews

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