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07/05 2024
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L'HOSPITALISATION DOIT ÊTRE SYSTÉMATIQUE DEVANT TOUT CAS DE SUSPICION DE MALTRAITANCE PHYSIQUE SUR ENFANT (ACADÉMIE DE MÉDECINE)

PARIS, 7 mai 2024 (APMnews) - L'Académie nationale de médecine considère prioritaire l'hospitalisation de tout enfant victime ou chez qui l'on soupçonne une maltraitance physique, tant que tous les éléments du diagnostic ne sont pas établis, dans un rapport diffusé mardi.

Ce rapport, assorti de six recommandations, a été adopté par les membres de l'académie à l'unanimité moins une abstention, le 30 avril. Il se limite aux maltraitances physiques chez l'enfant (MPE) dans le secteur de la santé, et exclut les violences sexuelles, les violences psychologiques isolées et le harcèlement scolaire. Il vise à établir des recommandations pour améliorer le repérage, la prise en charge, la recherche et l'évaluation des nouvelles structures.

Après neuf auditions d'experts, des interviews sur le terrain, l'analyse de documents officiels et de publications, et de livres par le groupe de travail, l'académie constate qu'"il existe une réelle prise de conscience de la MPE dans le secteur pédiatrique", et des plans ministériels qui "permettent d'organiser les parcours de soins et médico-judicaires sur le territoire".

Toutefois, "le diagnostic peut être sous-estimé" et la crainte des conséquences d'un signalement judiciaire ou d'une information préoccupante "existe chez tous les personnels de santé".

"La MPE est un problème de santé publique qui doit être abordé en tenant compte de la qualité de l'accueil qui doit être fait avec bienveillance, même si la situation est psychologiquement difficile pour tous. Le rôle de l'équipe médicale n'est pas 1) de savoir qui est l'auteur, 2) ni pourquoi, ni de le juger mais de protéger l'enfant", souligne l'académie.

"L'hospitalisation est la ressource obligatoire permettant une protection immédiate, une évaluation multidisciplinaire, une prise en charge optimale dont les soins des blessures, des actions adaptées, l'alerte des autorités en temps utile, hospitalisation qui est toujours acceptée par les parents et qui souvent les soulage", plaide l'académie.

Elle recommande donc en premier lieu une hospitalisation pour tout enfant victime ou suspect d'une maltraitance physique, pour le soigner et le protéger, et ce, "tant que tous les éléments du diagnostic ne sont pas établis".

Concernant le diagnostic, "tous les diagnostics différentiels doivent être envisagés et éliminés dans chaque cas de suspicion de MPE. Le diagnostic doit être établi de manière multidisciplinaire sans hésiter à prendre un avis auprès d'un [centre de référence maladies rares] si besoin", ni à organiser une réunion de concertation pluridisciplinaire dans les cas complexes.

"L'importance d'éliminer les diagnostics souligne la difficulté de la temporalité du placement éventuel de l'enfant. En cas de difficultés diagnostiques, l'hospitalisation prolongée permet de protéger l'enfant tout en réalisant les bilans indispensables à la confirmation multidisciplinaire du diagnostic par la RCP régionale".

"Le diagnostic peut être sous-estimé et banalisé chez l'enfant, ce qui signifie que l'étiologie 'traumatisme infligé' doit être évoquée largement par le médecin quel que soit son lieu d'intervention", ajoutent les académiciens.

Ils plaident aussi pour "réinstaller" la formation de pédiatre légiste.

Intégrer un temps de pédopsychiatrie aux Uaped

Concernant les unités d'accueil pédiatrique des enfants en danger (Uaped), dont le déploiement fait désormais partie intégrante des plans ministériels contre les violences faites aux enfants, dont le dernier pour 2024-2027 (cf dépêche du 21/11/2023 à 13:27), l'académie juge nécessaire de renforcer les moyens humains de chaque structure et d'y intégrer un temps de pédopsychiatrie.

L'objectif est de créer une Uaped par tribunal judiciaire, soit 164 en 2025, rappelle-t-elle. Ces unités, le plus souvent rattachées à un service d'urgence, ou un service de pédiatrie générale ou de pédopsychiatrie, associent un volet médical, un volet judiciaire et médico-légal et un volet ressources (conseils, réponse et aide à tout médecin hospitalier, libéral, scolaire, de PMI ou Camsp pour toute question liée au parcours de soins d'un mineur victime de MPE).

"Il est nécessaire de reconnaître un temps médical dédié et suffisant pour les médecins des Uaped qui ont une mission de soins, d'enseignement et de recherche et ont souvent une autre activité. Il faut que les Uaped puissent remplir leur mission 'ressources' pour les médecins de tout le département: les aider, les conseiller, les accompagner sur les situations cliniques, les démarches, organiser des rendez-vous dans l'Uaped et/ou des RCP. Les effectifs de personnel doivent répondre à ces missions en tenant compte d'une égalité territoriale."

L'académie recommande également de renforcer la prévention et le repérage des situations à risque dès la grossesse, "en renforçant la consultation du quatrième mois et le suivi à domicile". Elle souligne sur ce point "l'importance du travail préventif des sages-femmes et des unités mobiles de pédopsychiatrie".

Du côté des médecins, leur protection et leur accompagnement doivent aussi être renforcés afin qu'ils "n'hésitent plus à faire hospitaliser, repérer et signaler les situations à risque ou avérées de maltraitance".

Elle préconise de plus d'étendre le périmètre du numéro 119 "enfance en danger" (Snated) aux médecins et personnels de santé "en facilitant l'orientation de leurs appels vers les Uaped". Un renforcement des moyens de ce service est prévu dans le plan ministériel 2024-2027, rappelle l'académie.

En dernier point, elle recommande de créer un registre national pour suivre l'épidémiologie et juger de l'efficacité des mesures mises en œuvre.

Académie de médecine, "Maltraitance physique chez l'enfant. Améliorer le repérage, le diagnostic et la prise en charge dans le secteur de la santé", 22 pages

cd/nc/APMnews

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PARIS, 7 mai 2024 (APMnews) - L'Académie nationale de médecine considère prioritaire l'hospitalisation de tout enfant victime ou chez qui l'on soupçonne une maltraitance physique, tant que tous les éléments du diagnostic ne sont pas établis, dans un rapport diffusé mardi.

Ce rapport, assorti de six recommandations, a été adopté par les membres de l'académie à l'unanimité moins une abstention, le 30 avril. Il se limite aux maltraitances physiques chez l'enfant (MPE) dans le secteur de la santé, et exclut les violences sexuelles, les violences psychologiques isolées et le harcèlement scolaire. Il vise à établir des recommandations pour améliorer le repérage, la prise en charge, la recherche et l'évaluation des nouvelles structures.

Après neuf auditions d'experts, des interviews sur le terrain, l'analyse de documents officiels et de publications, et de livres par le groupe de travail, l'académie constate qu'"il existe une réelle prise de conscience de la MPE dans le secteur pédiatrique", et des plans ministériels qui "permettent d'organiser les parcours de soins et médico-judicaires sur le territoire".

Toutefois, "le diagnostic peut être sous-estimé" et la crainte des conséquences d'un signalement judiciaire ou d'une information préoccupante "existe chez tous les personnels de santé".

"La MPE est un problème de santé publique qui doit être abordé en tenant compte de la qualité de l'accueil qui doit être fait avec bienveillance, même si la situation est psychologiquement difficile pour tous. Le rôle de l'équipe médicale n'est pas 1) de savoir qui est l'auteur, 2) ni pourquoi, ni de le juger mais de protéger l'enfant", souligne l'académie.

"L'hospitalisation est la ressource obligatoire permettant une protection immédiate, une évaluation multidisciplinaire, une prise en charge optimale dont les soins des blessures, des actions adaptées, l'alerte des autorités en temps utile, hospitalisation qui est toujours acceptée par les parents et qui souvent les soulage", plaide l'académie.

Elle recommande donc en premier lieu une hospitalisation pour tout enfant victime ou suspect d'une maltraitance physique, pour le soigner et le protéger, et ce, "tant que tous les éléments du diagnostic ne sont pas établis".

Concernant le diagnostic, "tous les diagnostics différentiels doivent être envisagés et éliminés dans chaque cas de suspicion de MPE. Le diagnostic doit être établi de manière multidisciplinaire sans hésiter à prendre un avis auprès d'un [centre de référence maladies rares] si besoin", ni à organiser une réunion de concertation pluridisciplinaire dans les cas complexes.

"L'importance d'éliminer les diagnostics souligne la difficulté de la temporalité du placement éventuel de l'enfant. En cas de difficultés diagnostiques, l'hospitalisation prolongée permet de protéger l'enfant tout en réalisant les bilans indispensables à la confirmation multidisciplinaire du diagnostic par la RCP régionale".

"Le diagnostic peut être sous-estimé et banalisé chez l'enfant, ce qui signifie que l'étiologie 'traumatisme infligé' doit être évoquée largement par le médecin quel que soit son lieu d'intervention", ajoutent les académiciens.

Ils plaident aussi pour "réinstaller" la formation de pédiatre légiste.

Intégrer un temps de pédopsychiatrie aux Uaped

Concernant les unités d'accueil pédiatrique des enfants en danger (Uaped), dont le déploiement fait désormais partie intégrante des plans ministériels contre les violences faites aux enfants, dont le dernier pour 2024-2027 (cf dépêche du 21/11/2023 à 13:27), l'académie juge nécessaire de renforcer les moyens humains de chaque structure et d'y intégrer un temps de pédopsychiatrie.

L'objectif est de créer une Uaped par tribunal judiciaire, soit 164 en 2025, rappelle-t-elle. Ces unités, le plus souvent rattachées à un service d'urgence, ou un service de pédiatrie générale ou de pédopsychiatrie, associent un volet médical, un volet judiciaire et médico-légal et un volet ressources (conseils, réponse et aide à tout médecin hospitalier, libéral, scolaire, de PMI ou Camsp pour toute question liée au parcours de soins d'un mineur victime de MPE).

"Il est nécessaire de reconnaître un temps médical dédié et suffisant pour les médecins des Uaped qui ont une mission de soins, d'enseignement et de recherche et ont souvent une autre activité. Il faut que les Uaped puissent remplir leur mission 'ressources' pour les médecins de tout le département: les aider, les conseiller, les accompagner sur les situations cliniques, les démarches, organiser des rendez-vous dans l'Uaped et/ou des RCP. Les effectifs de personnel doivent répondre à ces missions en tenant compte d'une égalité territoriale."

L'académie recommande également de renforcer la prévention et le repérage des situations à risque dès la grossesse, "en renforçant la consultation du quatrième mois et le suivi à domicile". Elle souligne sur ce point "l'importance du travail préventif des sages-femmes et des unités mobiles de pédopsychiatrie".

Du côté des médecins, leur protection et leur accompagnement doivent aussi être renforcés afin qu'ils "n'hésitent plus à faire hospitaliser, repérer et signaler les situations à risque ou avérées de maltraitance".

Elle préconise de plus d'étendre le périmètre du numéro 119 "enfance en danger" (Snated) aux médecins et personnels de santé "en facilitant l'orientation de leurs appels vers les Uaped". Un renforcement des moyens de ce service est prévu dans le plan ministériel 2024-2027, rappelle l'académie.

En dernier point, elle recommande de créer un registre national pour suivre l'épidémiologie et juger de l'efficacité des mesures mises en œuvre.

Académie de médecine, "Maltraitance physique chez l'enfant. Améliorer le repérage, le diagnostic et la prise en charge dans le secteur de la santé", 22 pages

cd/nc/APMnews