Actualités de l'Urgence - APM

23/01 2020
Retour

LA RADIOLOGIE INTERVENTIONNELLE SOUS-UTILISÉE, NOTAMMENT DANS LE FIBROME UTÉRIN, SELON LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE RADIOLOGIE

PARIS, 23 janvier 2020 (APMnews) - La radiologie interventionnelle est une alternative thérapeutique à la chirurgie, aussi efficace et moins invasive, dans de nombreuses pathologies, notamment le fibrome utérin, a plaidé la Société française de radiologie (SFR) lors d'un point presse organisé jeudi à Paris.

Les représentants de cette discipline ont déploré un sous-emploi de cette technique, pourtant moins coûteuse et aux complications majeures moins fréquentes.

"La radiologie interventionnelle, méthode diagnostique et thérapeutique mini-invasive, permet de traiter aussi bien des maladies bénignes mais très handicapantes au quotidien (fibrome utérin, adénome de la prostate, hémorroïdes), que des pathologies lourdes ou à urgence vitale (cancers, anévrisme, AVC, etc.)" a rappelé le Pr Vincent Vidal, radiologue interventionnel à l'Assistance publique-hôpitaux de Marseille (AP-HM).

Parmi les gestes réalisés par radiologie interventionnelle, les médecins pratiquent l'embolisation d'un vaisseau, la pose d'un stent, la destruction de tumeur par cryothérapie, micro-ondes ou radiofréquence, ou encore le traitement in situ d'une tumeur par chimiothérapie. Cette technique permet de limiter significativement le temps d'intervention et de récupération pour les patients et donc les coûts de santé directs et indirects, ont souligné les membres de la SFR.

Malgré ces avantages, ils constatent que la radiologie interventionnelle peine à émerger, en particulier les interventions liées au traitement de pathologies bénignes, comme l'a souligné le Pr Hélène Vernhet-Kovacsik, radiologue interventionnel au CHU de Montpellier.

Elle a pris l'exemple de la prise en charge du fibrome utérin. "Il y a eu un effet de mode, un engouement et puis à mesure que cela intéressait les patientes, l'activité a curieusement diminué... La technique semblait ne plus s'adresser aux mêmes personnes [...] j'ai plutôt reçu des patients issus du milieu médical, des médecins, des avocates qui ne souhaitaient pas que leur utérus soit retiré [...] J'ai également reçu des patientes ayant eu connaissance de la technique grâce à internet", a-t-elle raconté.

Le fibrome utérin concerne 30% des femmes de plus de 35 ans. Il s'accompagne de saignements très abondants, de fatigue possiblement liée à une anémie, de douleurs. Des rapports sexuels douloureux et des infertilités sont aussi évoqués, rappelle-t-on. Trois options thérapeutiques sont disponibles: le traitement médical et hormonal (dont les résultats sont mitigés et plus ou moins bien tolérés), la chirurgie (myomectomie ou hystérectomie) et l'embolisation par radiologie interventionnelle.

Le traitement interventionnel consiste à mener un cathéter jusqu'à la tumeur via l'artère fémorale et injecter des "petites billes" qui bloquent la vascularisation de la tumeur, entraînant une réduction de la taille du fibrome, "d'environ 50% en trois mois", a précisé le Pr Vernhet-Kovacsik. "Les résultats sur les saignements sont immédiats", a-t-elle noté. La patiente peut reprendre le travail 7 à 10 jours après l'intervention.

Seulement 3% des fibromes utérins traités par radiologie interventionnelle

"Bien tolérée, l'embolisation par radiologie interventionnelle donne d'excellents résultats à long terme et permet de conserver l'utérus", a noté le Pr Marc Sapoval, radiologue interventionnel à l'Hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP) à Paris. "La place de cette technique par rapport à la chirurgie est parfaitement validée scientifiquement et représente une alternative à l'hystérectomie chez les patientes n'ayant pas de désir d'enfants."

Cette technique présente deux fois moins de complications majeures que l'hystérectomie, a affirmé le Pr Hélène Vernhet-Kovacsik. Notamment, les patientes ne nécessitent pas de transfusion.

Pourtant, en France, seules 3% des patientes sont traitées par embolisation dans cette indication: 1.500 à 1.800 embolisations de fibrome sont pratiquées chaque année, contre 30.000 hystérectomies.

Or, selon les recommandations du Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France, les patientes doivent être informées qu'il existe une alternative à l'hystérectomie. "Mais la réalité de terrain est toute autre", a déploré le Pr Hélène Vernhet-Kovacsik. "Il existe un véritable scepticisme chirurgical, alors même que l'efficacité de cette technique est reconnue au sein de la communauté médicale."

Elle a constaté en outre qu'il existe une inégalité d'accès à ces techniques sur le territoire national. Certaines régions ne pratiquent pas cette technique. Elle a plaidé pour une meilleure information des patientes.

La SFR a également évoqué durant la conférence de presse le cas de l'hypertrophie bénigne de la prostate, en faisant témoigner un patient. Traité il y a six ans, celui-ci a décrit la réticence de son urologue à l'époque à proposer une technique qu'il ne connaissait pas. Il a aussi plaidé pour une meilleure information auprès des patients pour qu'ils puissent choisir en toute connaissance de causes la technique qui leur convient le mieux. Il a ajouté être très satisfait de l'intervention, ayant bénéficié d'un retour complètement normal de sa fonction urinaire en un mois.

Une valorisation insuffisante, selon la SFR

Le Pr Sapoval pointe la méconnaissance des patients mais également de la communauté médicale de cette technique et ajoute que "nous pourrions augmenter les candidats à l'embolisation avec une meilleure organisation des circuits de prise en charge".

D'autant plus qu'en termes de coûts de santé, l'hystérectomie pèse plus lourd, avec une hospitalisation plus importante, des arrêts de travail prolongés, des souffrances postopératoires et de possibles complications.

La radiologie interventionnelle est ainsi une opportunité d'économies substantielles pour le système de soins, met en avant la SFR.

A cet égard, la Cour des comptes, dans son rapport de 2018, proposait que "la hiérarchie des tarifs de chirurgie et de médecine soit réexaminée afin de favoriser des modalités moins coûteuses et moins lourdes de prise en charge, comme la radiologie interventionnelle", a noté le Dr Sophie Aufort de la Clinique du Parc à Montpellier.

"La radiologie interventionnelle permet des séjours ambulatoires dans 80% des cas", a-t-elle rappelé, soulignant que cela va dans le sens du virage ambulatoire demandé par le ministère.

Enfin, le Dr Sophie Aufort a estimé que la valorisation des actes de radiologie interventionnelle était insuffisante, déplorant que cela ne permette pas aux établissements de s'engager vers ces techniques.

"Nous avons le sentiment qu'il existe une certaine opacité dans le financement de certaines médecines et nous ressentons une absence de motivation des instances décisionnaires à aborder ce sujet", a-t-elle déclaré, souhaitant voir "dépoussiérer le classement des actes valorisants".

vcd/fb/APMnews

Les données APM Santé sont la propriété de APM International. Toute copie, republication ou redistribution des données APM Santé, notamment via la mise en antémémoire, l'encadrement ou des moyens similaires, est expressément interdite sans l'accord préalable écrit de APM. APM ne sera pas responsable des erreurs ou des retards dans les données ou de toutes actions entreprises en fonction de celles-ci ou toutes décisions prises sur la base du service. APM, APM Santé et le logo APM International, sont des marques d'APM International dans le monde. Pour de plus amples informations sur les autres services d'APM, veuillez consulter le site Web public d'APM à l'adresse www.apmnews.com

Copyright © APM-Santé - Tous droits réservés.

Informations professionnelles

23/01 2020
Retour

LA RADIOLOGIE INTERVENTIONNELLE SOUS-UTILISÉE, NOTAMMENT DANS LE FIBROME UTÉRIN, SELON LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE RADIOLOGIE

PARIS, 23 janvier 2020 (APMnews) - La radiologie interventionnelle est une alternative thérapeutique à la chirurgie, aussi efficace et moins invasive, dans de nombreuses pathologies, notamment le fibrome utérin, a plaidé la Société française de radiologie (SFR) lors d'un point presse organisé jeudi à Paris.

Les représentants de cette discipline ont déploré un sous-emploi de cette technique, pourtant moins coûteuse et aux complications majeures moins fréquentes.

"La radiologie interventionnelle, méthode diagnostique et thérapeutique mini-invasive, permet de traiter aussi bien des maladies bénignes mais très handicapantes au quotidien (fibrome utérin, adénome de la prostate, hémorroïdes), que des pathologies lourdes ou à urgence vitale (cancers, anévrisme, AVC, etc.)" a rappelé le Pr Vincent Vidal, radiologue interventionnel à l'Assistance publique-hôpitaux de Marseille (AP-HM).

Parmi les gestes réalisés par radiologie interventionnelle, les médecins pratiquent l'embolisation d'un vaisseau, la pose d'un stent, la destruction de tumeur par cryothérapie, micro-ondes ou radiofréquence, ou encore le traitement in situ d'une tumeur par chimiothérapie. Cette technique permet de limiter significativement le temps d'intervention et de récupération pour les patients et donc les coûts de santé directs et indirects, ont souligné les membres de la SFR.

Malgré ces avantages, ils constatent que la radiologie interventionnelle peine à émerger, en particulier les interventions liées au traitement de pathologies bénignes, comme l'a souligné le Pr Hélène Vernhet-Kovacsik, radiologue interventionnel au CHU de Montpellier.

Elle a pris l'exemple de la prise en charge du fibrome utérin. "Il y a eu un effet de mode, un engouement et puis à mesure que cela intéressait les patientes, l'activité a curieusement diminué... La technique semblait ne plus s'adresser aux mêmes personnes [...] j'ai plutôt reçu des patients issus du milieu médical, des médecins, des avocates qui ne souhaitaient pas que leur utérus soit retiré [...] J'ai également reçu des patientes ayant eu connaissance de la technique grâce à internet", a-t-elle raconté.

Le fibrome utérin concerne 30% des femmes de plus de 35 ans. Il s'accompagne de saignements très abondants, de fatigue possiblement liée à une anémie, de douleurs. Des rapports sexuels douloureux et des infertilités sont aussi évoqués, rappelle-t-on. Trois options thérapeutiques sont disponibles: le traitement médical et hormonal (dont les résultats sont mitigés et plus ou moins bien tolérés), la chirurgie (myomectomie ou hystérectomie) et l'embolisation par radiologie interventionnelle.

Le traitement interventionnel consiste à mener un cathéter jusqu'à la tumeur via l'artère fémorale et injecter des "petites billes" qui bloquent la vascularisation de la tumeur, entraînant une réduction de la taille du fibrome, "d'environ 50% en trois mois", a précisé le Pr Vernhet-Kovacsik. "Les résultats sur les saignements sont immédiats", a-t-elle noté. La patiente peut reprendre le travail 7 à 10 jours après l'intervention.

Seulement 3% des fibromes utérins traités par radiologie interventionnelle

"Bien tolérée, l'embolisation par radiologie interventionnelle donne d'excellents résultats à long terme et permet de conserver l'utérus", a noté le Pr Marc Sapoval, radiologue interventionnel à l'Hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP) à Paris. "La place de cette technique par rapport à la chirurgie est parfaitement validée scientifiquement et représente une alternative à l'hystérectomie chez les patientes n'ayant pas de désir d'enfants."

Cette technique présente deux fois moins de complications majeures que l'hystérectomie, a affirmé le Pr Hélène Vernhet-Kovacsik. Notamment, les patientes ne nécessitent pas de transfusion.

Pourtant, en France, seules 3% des patientes sont traitées par embolisation dans cette indication: 1.500 à 1.800 embolisations de fibrome sont pratiquées chaque année, contre 30.000 hystérectomies.

Or, selon les recommandations du Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France, les patientes doivent être informées qu'il existe une alternative à l'hystérectomie. "Mais la réalité de terrain est toute autre", a déploré le Pr Hélène Vernhet-Kovacsik. "Il existe un véritable scepticisme chirurgical, alors même que l'efficacité de cette technique est reconnue au sein de la communauté médicale."

Elle a constaté en outre qu'il existe une inégalité d'accès à ces techniques sur le territoire national. Certaines régions ne pratiquent pas cette technique. Elle a plaidé pour une meilleure information des patientes.

La SFR a également évoqué durant la conférence de presse le cas de l'hypertrophie bénigne de la prostate, en faisant témoigner un patient. Traité il y a six ans, celui-ci a décrit la réticence de son urologue à l'époque à proposer une technique qu'il ne connaissait pas. Il a aussi plaidé pour une meilleure information auprès des patients pour qu'ils puissent choisir en toute connaissance de causes la technique qui leur convient le mieux. Il a ajouté être très satisfait de l'intervention, ayant bénéficié d'un retour complètement normal de sa fonction urinaire en un mois.

Une valorisation insuffisante, selon la SFR

Le Pr Sapoval pointe la méconnaissance des patients mais également de la communauté médicale de cette technique et ajoute que "nous pourrions augmenter les candidats à l'embolisation avec une meilleure organisation des circuits de prise en charge".

D'autant plus qu'en termes de coûts de santé, l'hystérectomie pèse plus lourd, avec une hospitalisation plus importante, des arrêts de travail prolongés, des souffrances postopératoires et de possibles complications.

La radiologie interventionnelle est ainsi une opportunité d'économies substantielles pour le système de soins, met en avant la SFR.

A cet égard, la Cour des comptes, dans son rapport de 2018, proposait que "la hiérarchie des tarifs de chirurgie et de médecine soit réexaminée afin de favoriser des modalités moins coûteuses et moins lourdes de prise en charge, comme la radiologie interventionnelle", a noté le Dr Sophie Aufort de la Clinique du Parc à Montpellier.

"La radiologie interventionnelle permet des séjours ambulatoires dans 80% des cas", a-t-elle rappelé, soulignant que cela va dans le sens du virage ambulatoire demandé par le ministère.

Enfin, le Dr Sophie Aufort a estimé que la valorisation des actes de radiologie interventionnelle était insuffisante, déplorant que cela ne permette pas aux établissements de s'engager vers ces techniques.

"Nous avons le sentiment qu'il existe une certaine opacité dans le financement de certaines médecines et nous ressentons une absence de motivation des instances décisionnaires à aborder ce sujet", a-t-elle déclaré, souhaitant voir "dépoussiérer le classement des actes valorisants".

vcd/fb/APMnews

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies pour réaliser des statistiques de visites.