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LA SITUATION FINANCIÈRE "PRÉOCCUPANTE" DU CH D'ANCENIS APPELLE À "DES RÉFORMES STRUCTURELLES" (CRC PAYS DE LA LOIRE)
"Structurellement déficitaire, la dégradation de la situation financière de l'hôpital s'accélère", alerte la CRC Pays de la Loire, qui a contrôlé les comptes et la gestion de l'établissement pour les exercices 2019 et suivants dans le cadre d'une enquête des juridictions financières sur l'organisation territoriale de l'offre hospitalière.
Le CH d'Ancenis est issu de la fusion en 2017 de l'hôpital Francis-Robert d'Ancenis, de l'hôpital Aimé-Jallot de Candé (situé à 25 kilomètres, en Maine-et-Loire), et des Ehpad d'Oudon et de Varades (Loire-Atlantique), rappelle-t-on. Son siège se trouve à Ancenis.
En 2023, l'établissement enregistrait un déficit de 1,45 millions d'euros (M€) sur son budget hôpital, soit environ 5% de ses produits d'exploitation. Fin 2024, ce déficit a atteint 4,6 M€, soit 13,6% des produits d'exploitation, rapporte la CRC.
"L'accumulation des déficits entraîne une augmentation significative du report à nouveau déficitaire, obérant ainsi les fonds propres de l'établissement", en déduit-elle.
"L'établissement présente des indicateurs financiers fortement dégradés, démontrant son incapacité à financer ses investissements. Compte tenu de la faiblesse de la capacité d'autofinancement nette, voire négative excepté en 2020 et 2021, l'établissement ne peut pas financer ses investissements sans aides et subventions", ajoute-t-elle.
Une concurrence forte des CHU de Nantes et d'Angers
Le CHEL est localisé entre Nantes et Angers, à une quarantaine de kilomètres de leurs CHU respectifs. La CRC note que l'attractivité de l'établissement souffre de la proximité de ces CHU, ainsi que de la clinique Jules-Verne de Nantes (groupe Hospi Grand Ouest), qui propose des consultations avancées en anesthésie et en ophtalmologie sur la commune d'Ancenis-Saint-Géréon.
Sur son bassin de recrutement en médecine, la part de marché du CHEL est passé de 9,6% en 2019, à 6,8% en 2023. En chirurgie, sa part de marché est passée de 9,7% à 7,4%. Seule sa part de marché en obstétrique est restée stable depuis 2019, note la CRC.
La chambre estime que le taux de fuite des patients du bassin de recrutement du CHEL dépasse 90% en médecine, chirurgie et obstétrique.
"Le nombre de séjours réalisés par le CHEL sur la période 2019-2024 connaît une diminution globale de 6%", relève aussi la chambre régionale des comptes. La baisse se concentre sur les activités de médecine (-13%), tandis que les activités de chirurgie ont progressé de 4% sur la période.
"Pour la plupart des domaines d'activité, la situation du CHEL est, soit en risque, soit en déclin. Depuis 2019, l'établissement a ainsi perdu des parts de marché sur la quasi-totalité de ses domaines d'activité, alors que le nombre de séjours des habitants de la zone a augmenté", constate la CRC. "La patientèle du territoire est majoritairement captée par les établissements de santé de Nantes et d'Angers, le CHEL ne parvenant pas à être suffisamment attractif".
Néanmoins, entre 2019 et 2024, les charges nettes de personnel ont augmenté de 34,3% sur l'ensemble du CHEL (budget principal et budgets annexes), soit à un rythme de croissance annuel moyen de plus de 5%.
"Cette forte croissance est liée essentiellement à la hausse des rémunérations du personnel non médical, consécutive à l'application des mesures indemnitaires et de reclassement, prévues par le Ségur de la santé", explique la CRC.
Une absence de "mesures structurantes" pour réduire le déficit
La chambre explique que l'établissement a bénéficié d'aides en trésorerie pour 9 M€ entre 2020 et 2024. "Pour autant, l'insuffisance quotidienne de la trésorerie persistante a des répercussions importantes sur le fonctionnement quotidien de l'établissement, traduit par un allongement significatif des délais de paiement des fournisseurs", regrette-t-elle.
En raison de la dégradation continue de la situation financière depuis 2012, l'établissement avait signé un contrat de retour à l'équilibre financier (Cref) en 2016. Ce plan n'a pas permis à le retour à l'équilibre, son déficit s'établissant à 1,9 M€ en 2019.
Après l'abandon du Cref, une feuille de route stratégique a été finalisée en 2023, en lien avec l'agence régionale de santé (ARS) Pays de la Loire. Celui-ci comprend sept axes:
- la fluidification du parcours patient et l'amélioration des durées moyennes de séjour
- la restauration du capacitaire à travers des recrutements médicaux, pour relancer l'activité
- l'analyse des coûts et recettes par activité, afin notamment d'identifier les activités porteuses et fiabiliser la facturation des recettes
- l'analyse de l'activité et des recettes des Ehpad et des unités de soins de longue durée (USLD)
- l'élaboration du schéma directeur immobilier
- l'élaboration du schéma directeur informatique
- l'élaboration du projet d'établissement.
"Cette feuille de route ne comporte aucune mesure structurante concernant la réorganisation de l'offre du CHEL, qui paraît pourtant indispensable pour atteindre un équilibre financier", cingle la CRC. Elle recommande donc à l'établissement de mettre en œuvre une stratégie de redressement financier, qui reposerait sur une réorganisation des activités de soins.
Dans une réponse écrite à la CRC, le CHEL fait savoir que des hypothèses de réorganisation structurelle des activités de soins avaient bel et bien été proposées dès 2022, mais n'avaient pas été retenues dans la feuille de route stratégique.
Pour illustrer sa volonté de restructurer ses activités, l'établissement communique sur des travaux en cours pour réorganiser son bloc opératoire, avec l'aide de l'Agence nationale de la performance sanitaire et médico-sociale (Anap). Il déclare aussi se questionner sur l'évolution de son bloc obstétrical, depuis le départ de sa cheffe de service en mai 2025.
Des projets immobiliers jugés inadaptés par la CRC
Dans ce contexte, la CRC juge le schéma directeur immobilier de CHEL "irréaliste".
Le projet actuel est centré sur la reconfiguration du site d'Ancenis. "Il ne s'agit pas strictement d'un schéma directeur, mais d'une étude de faisabilité réalisée par un programmiste en 2024", précise la CRC.
Dans cette étude, le CHEL envisage d'augmenter les capacités de son bloc opératoire, et de son plateau de consultations pour atteindre un potentiel d'activité de 25.000 consultations par an. Sceptique, la CRC note que le nombre de consultations médicales réalisées par le CHEL était de 20.431 en 2024, en baisse de 3% par rapport à 2019.
La chambre considère par ailleurs que le bloc opératoire est déjà sous-utilisé. "Les informations transmises à la chambre font état d'un taux d'occupation pour 2024 qui se situe entre 87% (données identifiées par les outils de l'établissement) et 69% (données calculées selon les indicateurs de l'Anap)", détaille-t-elle.
"En raison de la sous-utilisation, d'une part, et de l'inadéquation de l'utilisation des blocs opératoires, d'autre part, la chambre invite l'établissement à poursuivre sa réflexion sur la rationalisation de ce plateau technique", en conclut la CRC.
L'étude du CHEL envisage aussi d'étendre ses urgences, sur la base d'une cible d'activité à 19.000 passages par an. La CRC a réagi négativement, en arguant que l'activité aux urgences était en baisse depuis 2019. Elle ajoute que le service des urgences fait l'objet de nombreuses fermetures nocturnes depuis 2022, "en raison du manque de personnel médical, entraînant une baisse significative de l'activité des urgences et des répercussions sur les autres services de l'établissement".
Dans sa réponse apportée à la CRC, l'établissement insiste sur le fait que son étude de faisabilité n'engage pas de schéma directeur immobilier, et que celle-ci avait été réalisée en réponse à une demande de l'ARS Pays de la Loire.
"Cette étude a également permis de mener un diagnostic technique complet de tout le bâti et des réseaux techniques du site d'Ancenis, et d'établir la nécessité de leur mise en conformité tout en préconisant une priorisation", défend le CHEL.
L'établissement fait savoir que dans le cadre de la conception du projet d'établissement 2025-2029, le schéma directeur immobilier sera centré sur la reconstruction du service de soins médicaux et de réadaptation (SMR), et sur de possibles opérations de réhabilitation.
En août, l'ARS Pays de la Loire avait approuvé la reconstruction du bâtiment de SMR sur le site d'Ancenis d'ici 2029, en confirmant un financement de 8,5 M€ sur les 10 M€ de budget anticipé, rappelle-t-on (cf dépêche du 27/08/2025 à 15:44).
CRC Pays de la Loire, "Centre hospitalier Erdre et Loire"
al/sl/APMnews
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LA SITUATION FINANCIÈRE "PRÉOCCUPANTE" DU CH D'ANCENIS APPELLE À "DES RÉFORMES STRUCTURELLES" (CRC PAYS DE LA LOIRE)
"Structurellement déficitaire, la dégradation de la situation financière de l'hôpital s'accélère", alerte la CRC Pays de la Loire, qui a contrôlé les comptes et la gestion de l'établissement pour les exercices 2019 et suivants dans le cadre d'une enquête des juridictions financières sur l'organisation territoriale de l'offre hospitalière.
Le CH d'Ancenis est issu de la fusion en 2017 de l'hôpital Francis-Robert d'Ancenis, de l'hôpital Aimé-Jallot de Candé (situé à 25 kilomètres, en Maine-et-Loire), et des Ehpad d'Oudon et de Varades (Loire-Atlantique), rappelle-t-on. Son siège se trouve à Ancenis.
En 2023, l'établissement enregistrait un déficit de 1,45 millions d'euros (M€) sur son budget hôpital, soit environ 5% de ses produits d'exploitation. Fin 2024, ce déficit a atteint 4,6 M€, soit 13,6% des produits d'exploitation, rapporte la CRC.
"L'accumulation des déficits entraîne une augmentation significative du report à nouveau déficitaire, obérant ainsi les fonds propres de l'établissement", en déduit-elle.
"L'établissement présente des indicateurs financiers fortement dégradés, démontrant son incapacité à financer ses investissements. Compte tenu de la faiblesse de la capacité d'autofinancement nette, voire négative excepté en 2020 et 2021, l'établissement ne peut pas financer ses investissements sans aides et subventions", ajoute-t-elle.
Une concurrence forte des CHU de Nantes et d'Angers
Le CHEL est localisé entre Nantes et Angers, à une quarantaine de kilomètres de leurs CHU respectifs. La CRC note que l'attractivité de l'établissement souffre de la proximité de ces CHU, ainsi que de la clinique Jules-Verne de Nantes (groupe Hospi Grand Ouest), qui propose des consultations avancées en anesthésie et en ophtalmologie sur la commune d'Ancenis-Saint-Géréon.
Sur son bassin de recrutement en médecine, la part de marché du CHEL est passé de 9,6% en 2019, à 6,8% en 2023. En chirurgie, sa part de marché est passée de 9,7% à 7,4%. Seule sa part de marché en obstétrique est restée stable depuis 2019, note la CRC.
La chambre estime que le taux de fuite des patients du bassin de recrutement du CHEL dépasse 90% en médecine, chirurgie et obstétrique.
"Le nombre de séjours réalisés par le CHEL sur la période 2019-2024 connaît une diminution globale de 6%", relève aussi la chambre régionale des comptes. La baisse se concentre sur les activités de médecine (-13%), tandis que les activités de chirurgie ont progressé de 4% sur la période.
"Pour la plupart des domaines d'activité, la situation du CHEL est, soit en risque, soit en déclin. Depuis 2019, l'établissement a ainsi perdu des parts de marché sur la quasi-totalité de ses domaines d'activité, alors que le nombre de séjours des habitants de la zone a augmenté", constate la CRC. "La patientèle du territoire est majoritairement captée par les établissements de santé de Nantes et d'Angers, le CHEL ne parvenant pas à être suffisamment attractif".
Néanmoins, entre 2019 et 2024, les charges nettes de personnel ont augmenté de 34,3% sur l'ensemble du CHEL (budget principal et budgets annexes), soit à un rythme de croissance annuel moyen de plus de 5%.
"Cette forte croissance est liée essentiellement à la hausse des rémunérations du personnel non médical, consécutive à l'application des mesures indemnitaires et de reclassement, prévues par le Ségur de la santé", explique la CRC.
Une absence de "mesures structurantes" pour réduire le déficit
La chambre explique que l'établissement a bénéficié d'aides en trésorerie pour 9 M€ entre 2020 et 2024. "Pour autant, l'insuffisance quotidienne de la trésorerie persistante a des répercussions importantes sur le fonctionnement quotidien de l'établissement, traduit par un allongement significatif des délais de paiement des fournisseurs", regrette-t-elle.
En raison de la dégradation continue de la situation financière depuis 2012, l'établissement avait signé un contrat de retour à l'équilibre financier (Cref) en 2016. Ce plan n'a pas permis à le retour à l'équilibre, son déficit s'établissant à 1,9 M€ en 2019.
Après l'abandon du Cref, une feuille de route stratégique a été finalisée en 2023, en lien avec l'agence régionale de santé (ARS) Pays de la Loire. Celui-ci comprend sept axes:
- la fluidification du parcours patient et l'amélioration des durées moyennes de séjour
- la restauration du capacitaire à travers des recrutements médicaux, pour relancer l'activité
- l'analyse des coûts et recettes par activité, afin notamment d'identifier les activités porteuses et fiabiliser la facturation des recettes
- l'analyse de l'activité et des recettes des Ehpad et des unités de soins de longue durée (USLD)
- l'élaboration du schéma directeur immobilier
- l'élaboration du schéma directeur informatique
- l'élaboration du projet d'établissement.
"Cette feuille de route ne comporte aucune mesure structurante concernant la réorganisation de l'offre du CHEL, qui paraît pourtant indispensable pour atteindre un équilibre financier", cingle la CRC. Elle recommande donc à l'établissement de mettre en œuvre une stratégie de redressement financier, qui reposerait sur une réorganisation des activités de soins.
Dans une réponse écrite à la CRC, le CHEL fait savoir que des hypothèses de réorganisation structurelle des activités de soins avaient bel et bien été proposées dès 2022, mais n'avaient pas été retenues dans la feuille de route stratégique.
Pour illustrer sa volonté de restructurer ses activités, l'établissement communique sur des travaux en cours pour réorganiser son bloc opératoire, avec l'aide de l'Agence nationale de la performance sanitaire et médico-sociale (Anap). Il déclare aussi se questionner sur l'évolution de son bloc obstétrical, depuis le départ de sa cheffe de service en mai 2025.
Des projets immobiliers jugés inadaptés par la CRC
Dans ce contexte, la CRC juge le schéma directeur immobilier de CHEL "irréaliste".
Le projet actuel est centré sur la reconfiguration du site d'Ancenis. "Il ne s'agit pas strictement d'un schéma directeur, mais d'une étude de faisabilité réalisée par un programmiste en 2024", précise la CRC.
Dans cette étude, le CHEL envisage d'augmenter les capacités de son bloc opératoire, et de son plateau de consultations pour atteindre un potentiel d'activité de 25.000 consultations par an. Sceptique, la CRC note que le nombre de consultations médicales réalisées par le CHEL était de 20.431 en 2024, en baisse de 3% par rapport à 2019.
La chambre considère par ailleurs que le bloc opératoire est déjà sous-utilisé. "Les informations transmises à la chambre font état d'un taux d'occupation pour 2024 qui se situe entre 87% (données identifiées par les outils de l'établissement) et 69% (données calculées selon les indicateurs de l'Anap)", détaille-t-elle.
"En raison de la sous-utilisation, d'une part, et de l'inadéquation de l'utilisation des blocs opératoires, d'autre part, la chambre invite l'établissement à poursuivre sa réflexion sur la rationalisation de ce plateau technique", en conclut la CRC.
L'étude du CHEL envisage aussi d'étendre ses urgences, sur la base d'une cible d'activité à 19.000 passages par an. La CRC a réagi négativement, en arguant que l'activité aux urgences était en baisse depuis 2019. Elle ajoute que le service des urgences fait l'objet de nombreuses fermetures nocturnes depuis 2022, "en raison du manque de personnel médical, entraînant une baisse significative de l'activité des urgences et des répercussions sur les autres services de l'établissement".
Dans sa réponse apportée à la CRC, l'établissement insiste sur le fait que son étude de faisabilité n'engage pas de schéma directeur immobilier, et que celle-ci avait été réalisée en réponse à une demande de l'ARS Pays de la Loire.
"Cette étude a également permis de mener un diagnostic technique complet de tout le bâti et des réseaux techniques du site d'Ancenis, et d'établir la nécessité de leur mise en conformité tout en préconisant une priorisation", défend le CHEL.
L'établissement fait savoir que dans le cadre de la conception du projet d'établissement 2025-2029, le schéma directeur immobilier sera centré sur la reconstruction du service de soins médicaux et de réadaptation (SMR), et sur de possibles opérations de réhabilitation.
En août, l'ARS Pays de la Loire avait approuvé la reconstruction du bâtiment de SMR sur le site d'Ancenis d'ici 2029, en confirmant un financement de 8,5 M€ sur les 10 M€ de budget anticipé, rappelle-t-on (cf dépêche du 27/08/2025 à 15:44).
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