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08/03 2023
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LE GOUVERNEMENT AFFICHE SA DÉTERMINATION À L'APPROCHE DE LA MISE EN APPLICATION DU PLAFONNEMENT DE L'INTÉRIM MÉDICAL

PARIS, 8 mars 2023 (APMnews) - La ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo, a assuré mercredi que le gouvernement était "pleinement engagé pour accompagner les territoires et mettre fin" aux "dérives inacceptables" de l'intérim médical, dont le plafonnement sera mis en oeuvre à compter d'avril, à l'occasion des questions au gouvernement au Sénat.

"L'intérim, c'est 359 millions d'euros [M€] de dépenses avec des rémunérations individuelles qui pouvaient atteindre 5.000 euros journaliers", a pointé Agnès Firmin Le Bodo mercredi au Sénat, en réponse à une question de Jean Sol (Les Républicains, Pyrénées-Orientales) sur les risques de dégradation du fonctionnement de certains services hospitaliers avec l'entrée en vigueur de la disposition de la loi Rist sur le plafonnement des rémunérations des médecins intérimaires à l'hôpital.

"Ce n'est tout simplement pas soutenable et cela déstabilise les équipes de soins avec des effectifs tournants, instables, et qui créent de l'injustice entre les professionnels", a-t-elle poursuivi, "face à ces dérives, le législateur a agi et j'y souscris".

L'article 33 de la loi Rist visant à "améliorer le système de santé par la confiance et la simplification" a pour objectif de lutter contre l'intérim médical abusif par le rejet des factures dépassant les plafonds réglementaires prévus pour les rémunérations de médecins intérimaires (cf dépêche du 27/04/2021 à 10:19).

La ministre déléguée a rappelé que deux lois sur l'intérim médical avaient déjà été votées "lors des deux dernières mandatures" pour mieux encadrer l'intérim médical dans les établissements hospitaliers, en citant notamment une disposition qui plafonnait l'intérim médical "à 1.170 euros brut pour une mission de 24h" depuis 2016.

"Les ARS [agences régionales de santé] avaient jusqu'à lundi soir pour nous faire remonter toutes les problématiques de terrain et nous suivons chacune de ces situations locales avec attention", a assuré Agnès Firmin Le Bodo, en assurant que le gouvernement était "pleinement engagé pour accompagner les territoires et mettre fin à ces dérives inacceptables".

"Nous en appelons aussi au secteur privé qui doit prendre ses responsabilités et jouer le jeu de l'éthique, c'est tous ensemble que nous y arriverons", a ajouté la ministre déléguée avant de lancer à l'adresse des sénateurs: "Comptez sur notre engagement, aux côtés des ARS, pour apporter des réponses territoire par territoire, établissement par établissement."

Des conditions pas réunies

De son côté, la conférence des directeurs généraux de CHU prévient que "les conditions qui auraient permis de préparer sereinement les conséquences de cette mesure de moralisation [sur les rémunérations des intérimaires] n'ont pas été réunies", dans son "Cogito", publié mardi.

Elle affirme que "dans l'après-crise des Gilets jaunes, les ARS ont privilégié le maintien des activités les plus consommatrices d'intérimaires (urgences, obstétrique, activités opératoires non programmées dans les petits établissements des déserts médicaux), encourageant les chefs d'établissement à maintenir des rémunérations dérogatoires".

Et "les groupements hospitaliers de territoire (GHT), qui devraient piloter la réorganisation de l'offre dans un souci de qualité et de sécurité équitable en tout point de leur territoire, sont empêchés par manque d'outils juridiques leur permettant d'agir efficacement vis-à-vis des établissements les plus fragiles".

"Les élus locaux défendent le maintien de l'offre au sein de leur territoire, faute d'avoir pu travailler à des propositions convaincantes de revitalisation de l'accès aux soins et de sécurisation des territoires après la fermeture de certaines activités", ajoute l'instance.

Aujourd'hui, "la contrainte ne repose que sur les établissements publics de santé, ce qui risque de renforcer encore la fuite des médecins hospitaliers vers les cliniques à but lucratif et la distorsion concurrentielle sur les rémunérations et les conditions de travail", dénonce-t-elle.

Elle précise que "certaines entreprises d'intérim, à l'encontre desquelles aucune sanction n'est envisagée, annoncent leur intention de contourner la réglementation, notamment en augmentant les 'frais de gestion' facturés aux établissements pour couvrir certains frais accessoires et ainsi compenser la baisse de rémunération des intérimaires".

Elle observe que la réforme "passe sous silence l'existence de contrats de gré à gré parfois encore plus dérogatoires, mais plus complexes à contrôler, poussant certains établissements à une fuite en avant".

Il existe donc actuellement un "risque de restructuration sauvage de l'offre", alerte la conférence.

Une somme de plusieurs échecs

Si ce scénario arrivait, il faudrait y voir "la somme de plusieurs échecs": celui du "travail de pédagogie et de conviction" auprès des praticiens et des opérateurs qui les salarient, celui d'un recensement des risques "anticipé, homogène et lisible pour l'ensemble des territoires", et celui d'un travail "d'information et de concertation, en particulier auprès des élus locaux et des représentants des usagers pour accompagner en proximité la nécessaire réforme de l'offre de soins".

La conférence évoque aussi l'échec de "la fonction de conseil des comptables publics qui, sous l'impulsion de l'ordonnance du 22 mars 2022 créant le régime de responsabilités des ordonnateurs publics, préféreraient bloquer les paiements ou judiciariser la relation avec les ordonnateurs, plutôt que de questionner la balance entre l'intérêt général et l'absence de dérogation au cadre réglementaire".

"Les chefs d'établissement ne seront pas les débiteurs de ces échecs sur lesquels ils attirent en vain l'attention depuis plusieurs années", prévient l'instance.

Ils "refusent également que les enjeux de la réforme de l'organisation de système de santé soient masqués derrière une nouvelle réforme de la gouvernance hospitalière, alors que par ailleurs les enjeux de financement et de prise de responsabilités dans les territoires semblent parfois méconnus par une partie des acteurs", ajoute-t-elle.

Pour elle, "la sortie du 'tout partout' constitue une des priorités permettant de rendre des marges de manoeuvre".

"À défaut, réformer la gouvernance s'apparenterait à une fausse querelle, éloignée de vrais enjeux autrement plus décisifs", termine-t-elle.

gl-san/ab/APMnews

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PARIS, 8 mars 2023 (APMnews) - La ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo, a assuré mercredi que le gouvernement était "pleinement engagé pour accompagner les territoires et mettre fin" aux "dérives inacceptables" de l'intérim médical, dont le plafonnement sera mis en oeuvre à compter d'avril, à l'occasion des questions au gouvernement au Sénat.

"L'intérim, c'est 359 millions d'euros [M€] de dépenses avec des rémunérations individuelles qui pouvaient atteindre 5.000 euros journaliers", a pointé Agnès Firmin Le Bodo mercredi au Sénat, en réponse à une question de Jean Sol (Les Républicains, Pyrénées-Orientales) sur les risques de dégradation du fonctionnement de certains services hospitaliers avec l'entrée en vigueur de la disposition de la loi Rist sur le plafonnement des rémunérations des médecins intérimaires à l'hôpital.

"Ce n'est tout simplement pas soutenable et cela déstabilise les équipes de soins avec des effectifs tournants, instables, et qui créent de l'injustice entre les professionnels", a-t-elle poursuivi, "face à ces dérives, le législateur a agi et j'y souscris".

L'article 33 de la loi Rist visant à "améliorer le système de santé par la confiance et la simplification" a pour objectif de lutter contre l'intérim médical abusif par le rejet des factures dépassant les plafonds réglementaires prévus pour les rémunérations de médecins intérimaires (cf dépêche du 27/04/2021 à 10:19).

La ministre déléguée a rappelé que deux lois sur l'intérim médical avaient déjà été votées "lors des deux dernières mandatures" pour mieux encadrer l'intérim médical dans les établissements hospitaliers, en citant notamment une disposition qui plafonnait l'intérim médical "à 1.170 euros brut pour une mission de 24h" depuis 2016.

"Les ARS [agences régionales de santé] avaient jusqu'à lundi soir pour nous faire remonter toutes les problématiques de terrain et nous suivons chacune de ces situations locales avec attention", a assuré Agnès Firmin Le Bodo, en assurant que le gouvernement était "pleinement engagé pour accompagner les territoires et mettre fin à ces dérives inacceptables".

"Nous en appelons aussi au secteur privé qui doit prendre ses responsabilités et jouer le jeu de l'éthique, c'est tous ensemble que nous y arriverons", a ajouté la ministre déléguée avant de lancer à l'adresse des sénateurs: "Comptez sur notre engagement, aux côtés des ARS, pour apporter des réponses territoire par territoire, établissement par établissement."

Des conditions pas réunies

De son côté, la conférence des directeurs généraux de CHU prévient que "les conditions qui auraient permis de préparer sereinement les conséquences de cette mesure de moralisation [sur les rémunérations des intérimaires] n'ont pas été réunies", dans son "Cogito", publié mardi.

Elle affirme que "dans l'après-crise des Gilets jaunes, les ARS ont privilégié le maintien des activités les plus consommatrices d'intérimaires (urgences, obstétrique, activités opératoires non programmées dans les petits établissements des déserts médicaux), encourageant les chefs d'établissement à maintenir des rémunérations dérogatoires".

Et "les groupements hospitaliers de territoire (GHT), qui devraient piloter la réorganisation de l'offre dans un souci de qualité et de sécurité équitable en tout point de leur territoire, sont empêchés par manque d'outils juridiques leur permettant d'agir efficacement vis-à-vis des établissements les plus fragiles".

"Les élus locaux défendent le maintien de l'offre au sein de leur territoire, faute d'avoir pu travailler à des propositions convaincantes de revitalisation de l'accès aux soins et de sécurisation des territoires après la fermeture de certaines activités", ajoute l'instance.

Aujourd'hui, "la contrainte ne repose que sur les établissements publics de santé, ce qui risque de renforcer encore la fuite des médecins hospitaliers vers les cliniques à but lucratif et la distorsion concurrentielle sur les rémunérations et les conditions de travail", dénonce-t-elle.

Elle précise que "certaines entreprises d'intérim, à l'encontre desquelles aucune sanction n'est envisagée, annoncent leur intention de contourner la réglementation, notamment en augmentant les 'frais de gestion' facturés aux établissements pour couvrir certains frais accessoires et ainsi compenser la baisse de rémunération des intérimaires".

Elle observe que la réforme "passe sous silence l'existence de contrats de gré à gré parfois encore plus dérogatoires, mais plus complexes à contrôler, poussant certains établissements à une fuite en avant".

Il existe donc actuellement un "risque de restructuration sauvage de l'offre", alerte la conférence.

Une somme de plusieurs échecs

Si ce scénario arrivait, il faudrait y voir "la somme de plusieurs échecs": celui du "travail de pédagogie et de conviction" auprès des praticiens et des opérateurs qui les salarient, celui d'un recensement des risques "anticipé, homogène et lisible pour l'ensemble des territoires", et celui d'un travail "d'information et de concertation, en particulier auprès des élus locaux et des représentants des usagers pour accompagner en proximité la nécessaire réforme de l'offre de soins".

La conférence évoque aussi l'échec de "la fonction de conseil des comptables publics qui, sous l'impulsion de l'ordonnance du 22 mars 2022 créant le régime de responsabilités des ordonnateurs publics, préféreraient bloquer les paiements ou judiciariser la relation avec les ordonnateurs, plutôt que de questionner la balance entre l'intérêt général et l'absence de dérogation au cadre réglementaire".

"Les chefs d'établissement ne seront pas les débiteurs de ces échecs sur lesquels ils attirent en vain l'attention depuis plusieurs années", prévient l'instance.

Ils "refusent également que les enjeux de la réforme de l'organisation de système de santé soient masqués derrière une nouvelle réforme de la gouvernance hospitalière, alors que par ailleurs les enjeux de financement et de prise de responsabilités dans les territoires semblent parfois méconnus par une partie des acteurs", ajoute-t-elle.

Pour elle, "la sortie du 'tout partout' constitue une des priorités permettant de rendre des marges de manoeuvre".

"À défaut, réformer la gouvernance s'apparenterait à une fausse querelle, éloignée de vrais enjeux autrement plus décisifs", termine-t-elle.

gl-san/ab/APMnews

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