Actualités de l'Urgence - APM

LES PRATIQUES DE DIAGNOSTIC ET PRISE EN CHARGE DE L'INFERTILITÉ INEXPLIQUÉE SONT HÉTÉROGÈNES ET SANS CONSENSUS (ÉTUDE FRANÇAISE)
L'infertilité inexpliquée concerne 15% à 50% des couples consultant pour infertilité. Il s'agit d'un diagnostic d'exclusion, lorsque les investigations standard n'ont pas permis d'identifier de pathologie du système reproducteur au sein du couple. Il n'y a pas de consensus dans la littérature médicale concernant les méthodes de diagnostic. La plupart des auteurs se fondent uniquement sur la présence d'une fonction ovulatoire normale, des analyses de sperme normales et la présence d'au moins une trompe perméable.
Mais de nombreux facteurs ne sont pas pris en compte dans la définition de l'infertilité inexpliquée, dans la littérature médicale, comme l'âge maternel avancé, la diminution de la réserve ovarienne, l'indice de masse corporelle (IMC), les expositions environnementales, le tabac, l'alcool, l'usage de drogues, et les dysfonctionnements sexuels, soulignent Lucie Rolland de l'Hôpital Saint-Joseph (Marseille) et ses collègues.
On manque de preuves cliniques permettant d'établir la meilleure stratégie de prise en charge, entre attentisme, insémination artificielle, fécondation in vitro (FIV)/injection intracytoplasmique de spermatozoïde (Icsi), ajoutent-ils.
Ils ont réalisé une enquête nationale auprès des praticiens français afin d'évaluer leurs propres critères pour poser un diagnostic d'infertilité inexpliquée d'une part, et quelle était leur stratégie de prise en charge dans ces cas.
Un questionnaire en ligne comportant 10 questions à choix multiple a été envoyé par courriel à 327 médecins de la reproduction travaillant avec 80 centres d'assistance médicale à la procréation (AMP) en France. Au total, 195 ont répondu (59,6%).
Les tests les plus souvent prescrits ou réalisés par les praticiens ayant répondu, avant de conclure à une infertilité inexpliquée, étaient le dosage de l'AMH (87,6%), une échographie des follicules antraux (95,9%), une hystérosalpingographie (92,8%) et un spermogramme (100%) avec comptage des spermatozoïdes mobiles (78,1%).
Parmi les répondants, 14,8% prescrivaient toujours ou souvent un test post-coïtal.
Près d'un tiers (31,7%) ne prescrivaient jamais de test de dépistage de Chlamydia trachomatis.
L'IRM pelvienne était prescrite par 30,2% des praticiens, et 18,4% réalisaient toujours ou souvent une laparoscopie.
Plus d'un tiers des praticiens éliminent toujours ou souvent un diagnostic d'infertilité inexpliquée devant une patiente ayant un indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 30 kg/m², et 57% devant un IMC supérieur à 35 kg/m².
Le tabagisme avec une consommation de plus de 10 cigarettes par jour est également un motif d'éviction du diagnostic de stérilité inexpliquée pour 43,1% des répondants.
Un âge supérieur à 38 ans écarte d'emblée ce diagnostic pour 51% des praticiens.
FIV en première ligne en cas d'âge maternel avancé ou d'AMH diminuée
Concernant la stratégie de prise en charge, l'âge maternel constituait toujours ou souvent une indication de FIV en première ligne pour 87,6% des répondants, avec un âge seuil de 37,4 ans. Plus des deux tiers (68,6%) utilisaient aussi l'AMH diminuée comme une indication à la FIV en première ligne, à un seuil moyen de 1,2 ng/mL.
En outre, 57,4% des praticiens n'attendent pas plus de six mois de rapports sexuels réguliers au sein de couple avant de débuter les traitements d'AMP, pour les femmes entre 36 et 39 ans, une proportion s'élevant à 66,3% pour les patientes de plus de 40 ans.
Pour les trois quarts des praticiens, un long délai sans pouvoir concevoir est une indication de FIV en première intention, avec un délai moyen de 2,75 ans.
Il n'y avait pas de consensus sur la stratégie de FIV en première ligne ou après deux à six cycles d'insémination artificielle.
"Notre étude montre l'hétérogénéité des critères de diagnostic et de prise en charge de l'infertilité inexpliquée au sein d'un échantillon de médecins de la reproduction français. De plus, certaines pratiques cliniques n'ont pas de bases scientifiques claires, comme l'orientation de la prise en charge en fonction du niveau d'AMH", commentent les auteurs.
On manque en outre d'études permettant d'évaluer la valeur des examens supplémentaires comme l'IRM et la laparoscopie dans la stratégie diagnostique, et il existe encore trop peu de preuves pour recommander la FIV ou l'insémination artificielle plutôt qu'une stratégie attentiste, ajoutent-ils.
Il serait par conséquent bénéfique de trouver un consensus diagnostique, afin que toutes les études sur les stratégies de prise en charge soient comparables, concluent-ils.
Un rapport devant établir un état des lieux de l'infertilité en France et analyser les causes du recul de la fertilité est en cours d'élaboration par la mission confiée au Pr Samir Hamamah (CHU de Montpellier) et à Salomé Berlioux, par le ministre des solidarités et de la santé, Olivier Véran (cf dépêche du 10/11/2021 à 12:54). Ce rapport doit donner suite à un plan de lutte contre l'infertilité, répondant à une disposition de la loi de bioéthique qui souligne la nécessité de mettre en oeuvre des mesures nationales de lutte contre l'infertilité, rappelle-t-on. Le rapport devrait être rendu au gouvernement en fin de semaine, selon le Pr Hamamah.
(Journal of Gynecology Obstetrics and Human Reproduction, publication en ligne du 29 décembre 2021)
cd/nc/APMnews
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LES PRATIQUES DE DIAGNOSTIC ET PRISE EN CHARGE DE L'INFERTILITÉ INEXPLIQUÉE SONT HÉTÉROGÈNES ET SANS CONSENSUS (ÉTUDE FRANÇAISE)
L'infertilité inexpliquée concerne 15% à 50% des couples consultant pour infertilité. Il s'agit d'un diagnostic d'exclusion, lorsque les investigations standard n'ont pas permis d'identifier de pathologie du système reproducteur au sein du couple. Il n'y a pas de consensus dans la littérature médicale concernant les méthodes de diagnostic. La plupart des auteurs se fondent uniquement sur la présence d'une fonction ovulatoire normale, des analyses de sperme normales et la présence d'au moins une trompe perméable.
Mais de nombreux facteurs ne sont pas pris en compte dans la définition de l'infertilité inexpliquée, dans la littérature médicale, comme l'âge maternel avancé, la diminution de la réserve ovarienne, l'indice de masse corporelle (IMC), les expositions environnementales, le tabac, l'alcool, l'usage de drogues, et les dysfonctionnements sexuels, soulignent Lucie Rolland de l'Hôpital Saint-Joseph (Marseille) et ses collègues.
On manque de preuves cliniques permettant d'établir la meilleure stratégie de prise en charge, entre attentisme, insémination artificielle, fécondation in vitro (FIV)/injection intracytoplasmique de spermatozoïde (Icsi), ajoutent-ils.
Ils ont réalisé une enquête nationale auprès des praticiens français afin d'évaluer leurs propres critères pour poser un diagnostic d'infertilité inexpliquée d'une part, et quelle était leur stratégie de prise en charge dans ces cas.
Un questionnaire en ligne comportant 10 questions à choix multiple a été envoyé par courriel à 327 médecins de la reproduction travaillant avec 80 centres d'assistance médicale à la procréation (AMP) en France. Au total, 195 ont répondu (59,6%).
Les tests les plus souvent prescrits ou réalisés par les praticiens ayant répondu, avant de conclure à une infertilité inexpliquée, étaient le dosage de l'AMH (87,6%), une échographie des follicules antraux (95,9%), une hystérosalpingographie (92,8%) et un spermogramme (100%) avec comptage des spermatozoïdes mobiles (78,1%).
Parmi les répondants, 14,8% prescrivaient toujours ou souvent un test post-coïtal.
Près d'un tiers (31,7%) ne prescrivaient jamais de test de dépistage de Chlamydia trachomatis.
L'IRM pelvienne était prescrite par 30,2% des praticiens, et 18,4% réalisaient toujours ou souvent une laparoscopie.
Plus d'un tiers des praticiens éliminent toujours ou souvent un diagnostic d'infertilité inexpliquée devant une patiente ayant un indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 30 kg/m², et 57% devant un IMC supérieur à 35 kg/m².
Le tabagisme avec une consommation de plus de 10 cigarettes par jour est également un motif d'éviction du diagnostic de stérilité inexpliquée pour 43,1% des répondants.
Un âge supérieur à 38 ans écarte d'emblée ce diagnostic pour 51% des praticiens.
FIV en première ligne en cas d'âge maternel avancé ou d'AMH diminuée
Concernant la stratégie de prise en charge, l'âge maternel constituait toujours ou souvent une indication de FIV en première ligne pour 87,6% des répondants, avec un âge seuil de 37,4 ans. Plus des deux tiers (68,6%) utilisaient aussi l'AMH diminuée comme une indication à la FIV en première ligne, à un seuil moyen de 1,2 ng/mL.
En outre, 57,4% des praticiens n'attendent pas plus de six mois de rapports sexuels réguliers au sein de couple avant de débuter les traitements d'AMP, pour les femmes entre 36 et 39 ans, une proportion s'élevant à 66,3% pour les patientes de plus de 40 ans.
Pour les trois quarts des praticiens, un long délai sans pouvoir concevoir est une indication de FIV en première intention, avec un délai moyen de 2,75 ans.
Il n'y avait pas de consensus sur la stratégie de FIV en première ligne ou après deux à six cycles d'insémination artificielle.
"Notre étude montre l'hétérogénéité des critères de diagnostic et de prise en charge de l'infertilité inexpliquée au sein d'un échantillon de médecins de la reproduction français. De plus, certaines pratiques cliniques n'ont pas de bases scientifiques claires, comme l'orientation de la prise en charge en fonction du niveau d'AMH", commentent les auteurs.
On manque en outre d'études permettant d'évaluer la valeur des examens supplémentaires comme l'IRM et la laparoscopie dans la stratégie diagnostique, et il existe encore trop peu de preuves pour recommander la FIV ou l'insémination artificielle plutôt qu'une stratégie attentiste, ajoutent-ils.
Il serait par conséquent bénéfique de trouver un consensus diagnostique, afin que toutes les études sur les stratégies de prise en charge soient comparables, concluent-ils.
Un rapport devant établir un état des lieux de l'infertilité en France et analyser les causes du recul de la fertilité est en cours d'élaboration par la mission confiée au Pr Samir Hamamah (CHU de Montpellier) et à Salomé Berlioux, par le ministre des solidarités et de la santé, Olivier Véran (cf dépêche du 10/11/2021 à 12:54). Ce rapport doit donner suite à un plan de lutte contre l'infertilité, répondant à une disposition de la loi de bioéthique qui souligne la nécessité de mettre en oeuvre des mesures nationales de lutte contre l'infertilité, rappelle-t-on. Le rapport devrait être rendu au gouvernement en fin de semaine, selon le Pr Hamamah.
(Journal of Gynecology Obstetrics and Human Reproduction, publication en ligne du 29 décembre 2021)
cd/nc/APMnews