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LES VIOLENCES CONJUGALES ENCORE LARGEMENT SOUS-DÉPISTÉES DANS LES SERVICES D'URGENCE FRANCILIENS (ORSNP)
Une journée du codage "femmes victimes de violences conjugales" dans les services d'urgence des hôpitaux franciliens a été organisée sur 24 heures -du 19 juin à 9 heures au 20 juin à 9 heures- par l'ORSNP Ile-de-France.
Lors de cette journée, les médecins urgentistes étaient incités à questionner toutes les patientes majeures sur les violences -physiques, psychologiques ou sexuelles- qu'elles auraient pu subir au cours de leur vie, a présenté la Dr Catherine Le Gall, cheffe du service des urgences du centre hospitalier (CH) Victor-Dupouy à Argenteuil (Val-d'Oise).
En cas de réponse positive, il était convenu que les médecins tracent cette révélation "de manière confidentielle" en utilisant le code unique Y340 ("évènement sans précision, intention non déterminée"). Ce code a été préféré à d'autres (Y070 "autres mauvais traitements par le conjoint ou le partenaire", Z630 "difficultés dans les rapports avec le conjoint ou le partenaire", ou Y040 "agression par la force physique, domicile") de façon à protéger la patiente si le conjoint accédait au dossier, a précisé la Dr Le Gall.
Lors de cette expérimentation, seuls 42 encodages Y340 ont été enregistrés dans 11 services d'urgence sur les 52 services ayant participé, a décrit Océane Zhen, ingénieure des données au sein de l'observatoire, en charge de la présentation des résultats.
L'âge médian des femmes identifiées était de 37,5 ans. Concernant la gravité des faits, 45% des cas encodés correspondaient à un niveau CCMU (classification clinique des malades des urgences) 2 et 36% à un niveau CCMU 3.
L'hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris, AP-HP), "un centre très sensibilisé" à ce sujet selon la Dr Le Gall, s'est distingué par un plus fort taux d'encodage: 18 cas y ont été recensés sur 97 passages, soit 19%.
En extrapolant le taux d'encodage de la Pitié-Salpêtrière à la région, "sur 4.306 RPU [résumés de passage aux urgences] enregistrés pour des femmes adultes pendant la période de campagne, on s'attendrait à 799 cas identifiés comme Y340 sur cette journée", a souligné Océane Zhen. Or, la campagne réelle a donné 42 cas encodés, soit 5% de la valeur attendue.
"L'enquête n'a pas été d'un grand succès. Il y a donc du travail auprès des services d'urgence pour améliorer ce repérage. Il convient de travailler cette question au sein de tous les SAU [services d'accueil des urgences]. Un travail d'accompagnement doit suivre ce dépistage", a commenté la Dr Le Gall auprès d'APMnews.
Un dépistage "systématique" aux urgences
Intervenant à la suite de la présentation de l'enquête, la Dr Sophie Duchesne, gynécologue obstétricienne et médecin légiste au sein de la maison de santé des femmes de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière a rappelé que le dépistage devait se faire de façon systématique car les violences pouvaient toucher "tout le monde".
Néanmoins, "dépister ne veut pas dire diagnostiquer ni traiter", a-t-elle précisé, soulignant que même en interrogeant une personne victime de ces violences, la réponse ne sera pas forcément positive "mais au moins cela ouvre une porte […] et si tous les soignants dépistent, à un moment donné, l'un d'entre eux tombera sur le moment où la personne dira" qu'elle est victime de violences.
En cas de réponse positive pour des violences actuelles, "la première chose à faire est d'écouter", puis de "rappeler la loi, en France, les violences conjugales constituent au minimum un délit ou un crime en cas de viol", réaliser les soins adaptés, rédiger un certificat médical et adresser la patiente vers des personnes ou structures de confiance (maisons des femmes, référent violence du service, médecin traitant, sage-femme…) et, en cas d'urgence, signaler la situation au procureur ou à la cellule de recueil des informations préoccupantes (Crip) et en cas de menace de mort, rappeler à la personne qu'elle peut appeler la police, a listé cette gynécologue obstétricienne.
Pour des violences récentes, la Dr Duchesne a insisté sur la nécessité de rédiger et conserver dans le dossier le certificat médical initial -des modèles existent sur le site "arrêtons les violences" du gouvernement- en cas de dépôt de plainte ultérieur par la victime présumée.
Interrogée sur une potentielle violation du secret médical lors d'un signalement par une personne de l'assistance, le Dr Cyrus Macaigne, chef de service de l'unité médico-judiciaire (UMJ) de Créteil, a avancé que l'article 40 du code de la procédure pénale protégeait les médecins en cas de dérogation au secret médical.
Selon ce texte, "toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs".
Par ailleurs, l'article 226-14 du code pénal permet la révélation du secret, sans l'accord de la victime, lorsque le soignant "estime en conscience que ces violences mettent la vie de la victime majeure en danger immédiat et que celle-ci n'est pas en mesure de se protéger en raison de la contrainte morale résultant de l'emprise exercée par l'auteur des violences".
Les intervenants du Smur et du Samu ont aussi un rôle spécifique à jouer dans le dépistage des violences conjugales, ont souligné des intervenants lors du séminaire (cf dépêche du 20/11/2025 à 10:19).
ah/sl/APMnews
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LES VIOLENCES CONJUGALES ENCORE LARGEMENT SOUS-DÉPISTÉES DANS LES SERVICES D'URGENCE FRANCILIENS (ORSNP)
Une journée du codage "femmes victimes de violences conjugales" dans les services d'urgence des hôpitaux franciliens a été organisée sur 24 heures -du 19 juin à 9 heures au 20 juin à 9 heures- par l'ORSNP Ile-de-France.
Lors de cette journée, les médecins urgentistes étaient incités à questionner toutes les patientes majeures sur les violences -physiques, psychologiques ou sexuelles- qu'elles auraient pu subir au cours de leur vie, a présenté la Dr Catherine Le Gall, cheffe du service des urgences du centre hospitalier (CH) Victor-Dupouy à Argenteuil (Val-d'Oise).
En cas de réponse positive, il était convenu que les médecins tracent cette révélation "de manière confidentielle" en utilisant le code unique Y340 ("évènement sans précision, intention non déterminée"). Ce code a été préféré à d'autres (Y070 "autres mauvais traitements par le conjoint ou le partenaire", Z630 "difficultés dans les rapports avec le conjoint ou le partenaire", ou Y040 "agression par la force physique, domicile") de façon à protéger la patiente si le conjoint accédait au dossier, a précisé la Dr Le Gall.
Lors de cette expérimentation, seuls 42 encodages Y340 ont été enregistrés dans 11 services d'urgence sur les 52 services ayant participé, a décrit Océane Zhen, ingénieure des données au sein de l'observatoire, en charge de la présentation des résultats.
L'âge médian des femmes identifiées était de 37,5 ans. Concernant la gravité des faits, 45% des cas encodés correspondaient à un niveau CCMU (classification clinique des malades des urgences) 2 et 36% à un niveau CCMU 3.
L'hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris, AP-HP), "un centre très sensibilisé" à ce sujet selon la Dr Le Gall, s'est distingué par un plus fort taux d'encodage: 18 cas y ont été recensés sur 97 passages, soit 19%.
En extrapolant le taux d'encodage de la Pitié-Salpêtrière à la région, "sur 4.306 RPU [résumés de passage aux urgences] enregistrés pour des femmes adultes pendant la période de campagne, on s'attendrait à 799 cas identifiés comme Y340 sur cette journée", a souligné Océane Zhen. Or, la campagne réelle a donné 42 cas encodés, soit 5% de la valeur attendue.
"L'enquête n'a pas été d'un grand succès. Il y a donc du travail auprès des services d'urgence pour améliorer ce repérage. Il convient de travailler cette question au sein de tous les SAU [services d'accueil des urgences]. Un travail d'accompagnement doit suivre ce dépistage", a commenté la Dr Le Gall auprès d'APMnews.
Un dépistage "systématique" aux urgences
Intervenant à la suite de la présentation de l'enquête, la Dr Sophie Duchesne, gynécologue obstétricienne et médecin légiste au sein de la maison de santé des femmes de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière a rappelé que le dépistage devait se faire de façon systématique car les violences pouvaient toucher "tout le monde".
Néanmoins, "dépister ne veut pas dire diagnostiquer ni traiter", a-t-elle précisé, soulignant que même en interrogeant une personne victime de ces violences, la réponse ne sera pas forcément positive "mais au moins cela ouvre une porte […] et si tous les soignants dépistent, à un moment donné, l'un d'entre eux tombera sur le moment où la personne dira" qu'elle est victime de violences.
En cas de réponse positive pour des violences actuelles, "la première chose à faire est d'écouter", puis de "rappeler la loi, en France, les violences conjugales constituent au minimum un délit ou un crime en cas de viol", réaliser les soins adaptés, rédiger un certificat médical et adresser la patiente vers des personnes ou structures de confiance (maisons des femmes, référent violence du service, médecin traitant, sage-femme…) et, en cas d'urgence, signaler la situation au procureur ou à la cellule de recueil des informations préoccupantes (Crip) et en cas de menace de mort, rappeler à la personne qu'elle peut appeler la police, a listé cette gynécologue obstétricienne.
Pour des violences récentes, la Dr Duchesne a insisté sur la nécessité de rédiger et conserver dans le dossier le certificat médical initial -des modèles existent sur le site "arrêtons les violences" du gouvernement- en cas de dépôt de plainte ultérieur par la victime présumée.
Interrogée sur une potentielle violation du secret médical lors d'un signalement par une personne de l'assistance, le Dr Cyrus Macaigne, chef de service de l'unité médico-judiciaire (UMJ) de Créteil, a avancé que l'article 40 du code de la procédure pénale protégeait les médecins en cas de dérogation au secret médical.
Selon ce texte, "toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs".
Par ailleurs, l'article 226-14 du code pénal permet la révélation du secret, sans l'accord de la victime, lorsque le soignant "estime en conscience que ces violences mettent la vie de la victime majeure en danger immédiat et que celle-ci n'est pas en mesure de se protéger en raison de la contrainte morale résultant de l'emprise exercée par l'auteur des violences".
Les intervenants du Smur et du Samu ont aussi un rôle spécifique à jouer dans le dépistage des violences conjugales, ont souligné des intervenants lors du séminaire (cf dépêche du 20/11/2025 à 10:19).
ah/sl/APMnews
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