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06/09 2023
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MARTINIQUE: FACE À L'ENGORGEMENT DES URGENCES, LE CHU COMPTE SUR LA RÉGULATION, ET SUR LA CRÉATION DE FILIÈRES DE SOINS NON PROGRAMMÉS

FORT-DE-FRANCE, 6 septembre 2023 (APMnews) - Alors que ses urgences débordent dans un contexte de remontée des cas de Covid et d'épidémie de dengue, le CHU de Martinique compte sur la régulation par le 15, mais aussi sur le renforcement des réponses aux besoins de soins non programmés, ont expliqué mardi le directeur du Samu et le chef des urgences, lors d'une conférence de presse, suivie à distance par APMnews.

Si les tensions aux urgences du CHU de Martinique ne sont pas nouvelles, le service traverse une situation critique due notamment à une épidémie de dengue, une circulation "encore active" du Covid, des vagues de chaleur qui ont affecté particulièrement les personnes âgées et des brumes de sable entraînant des affections respiratoires, a expliqué à APMnews le Pr Papa Gueye, directeur du Samu, lors d'un entretien au téléphone, en marge de la conférence de presse.

L'ensemble de ces facteurs ont fait que les urgences débordent particulièrement depuis la mi-août. A Fort-de-France, le service, qui enregistre 120 passages par jour en moyenne, a connu des pics jusqu'à plus de 180 patients.

Dans ce contexte, l'agence régionale de santé (ARS) Martinique a annoncé vendredi qu'à compter de lundi 4 septembre, "les personnes ne relevant pas des urgences seront réorientées par celles-ci vers une prise en charge appropriée".

Le message est donné à la population "de ne pas venir aux urgences lorsque l'on n'a pas une urgence grave", "sans avoir appelé son médecin traitant" ou le Samu, a expliqué Papa Gueye.

Concrètement, les urgences sont depuis cette semaine régulées par le 15. Quand ils se déplacent tout de même sans passer par le Samu, "ils sont réorientés". "On leur propose un téléphone pour appeler le 15" s'ils n'en ont pas.

Le service d'accès aux soins (SAS) fonctionne en Martinique avec la présence de deux médecins libéraux au Samu de 7 heures du matin jusqu'à 23 heures, "en continuité la permanence des soins", a souligné Papa Gueye lors de la conférence de presse. "Cela commence à marcher", même si "les résultats ne sont pas immédiats", a-t-il pointé, précisant qu'à peu près "60% des [appelants] relèvent de la régulation hospitalière."

Interrogé par APMnews en marge de la conférence de presse, le Dr Yannick Brouste, chef du service des urgences du CHU de Martinique, a précisé que la "régulation nocturne" par le 15 avait déjà débuté "depuis quelques mois". Quant au SAS, dont la phase pilote avait été lancée au début de l'année, son fonctionnement avait dû être interrompu avant de reprendre "avant l'été", après que des assistants régulation médicale (ARM) ont pu être formés en interne.

L'engorgement des urgences ayant des incidences pour les patients qui nécessitent une prise en charge, "on a demandé à l'ARS de voir comment trouver des solutions pour éviter cet embouteillage et faire en sorte que l'on puisse donner des soins de qualité", a rapporté Yannick Brouste lors de la conférence de presse. "On compte aussi sur la volonté de chaque patient" en les appelant à ne pas venir aux urgences quand cela "ne le nécessite pas", sachant que la régulation "aura forcément un impact sur l'activité du centre 15".

Parfois, "80-90 patients attendent dans les couloirs" des urgences, a-t-il précisé à APMnews. Une tente a été installée devant l'entrée du service, "sous surveillance des pompiers", afin de libérer "le flux extra-hospitalier" et d'éviter de faire attendre les équipes de secours.

Vendredi, trois personnes étaient hospitalisées pour Covid en réanimation. "Autant que pour la dengue, sachant que pour la dengue, si tout se passe bien, les personnes repartent plus vite", a aussi décrit Yannick Brouste.

"Cela faisait longtemps que l'on n'avait pas vu de patients en décubitus ventral ou qui nécessitent de l'oxygène" de manière renforcée en raison du Covid, a-t-il souligné pendant la conférence de presse. "On est en train de discuter du retour du masque chez les soignants et les patients au niveau des secteurs de soins. D'ici 48 heures, on aura une note de service."

Manque d'effectifs médicaux

Le chef des services des urgences a également pointé des difficultés de ressources médicales, précisant qu'au Samu, un seul médecin au lieu de deux était présent H24 en régulation hospitalière. "Au niveau des urgences, on a perdu une ligne d'hospitalisation [de courte durée] et une ligne de filière courte." Concernant les effectifs paramédicaux, "l'établissement a toujours fait en sorte de protéger" les urgences, mais face aux épidémies, "forcément du personnel va commencer à tomber", s'est-il inquiété.

La tension sur les effectifs médicaux aux urgences "est constante depuis plusieurs années" et s'est exacerbée après la mise en œuvre des dispositions sur le plafonnement de la rémunération de l'intérim médical, a complété Papa Gueye, estimant néanmoins que des mesures d'attractivité existent, comme la possibilité de "contrats plus stables" et "l'indemnité de 40% vie chère actée récemment par le gouvernement" (cf dépêche du 03/04/2023 à 17:27).

"Mais quel que soit le nombre de médecins, c'est l'augmentation du flux" qui devient "ingérable", a-t-il insisté. L'enjeu est "d'essayer de faire en sorte que des soins non programmés soient pris en charge par des filières" spécifiques.

L'ARS "est en train de développer plusieurs filières de soins non programmés qui s'articulent autour de la médecine de ville, mais aussi d'autres initiatives de consultations avancées, de centres d'accueil de premiers soins, qui permettront de donner des solutions, car rien ne sert de dire aux personnes de ne pas venir aux urgences si on ne leur trouve pas des solutions convenables de soins", a-t-il considéré.

Sur le territoire, un autre enjeu est d'améliorer la prévention en permettant "que les personnes soient vues régulièrement par leur médecin" en ville, notamment en développant les consultations de spécialité, a-t-il développé.

Yannick Brouste a précisé que, parmi les passages aux urgences, 40% pourraient être réorientés "ou différés". Il a évoqué le problème rencontré par les personnes âgées, "qui n'ont pas forcément de moyen de locomotion, sont souvent isolées chez elles", ce qui pourrait nécessiter, face à l'offre contrainte en médecine libérale, un "développement du maillage des infirmiers libéraux".

"On est en train de rebâtir le maillage de la santé en Martinique avec l'ARS", a-t-il esquissé.

Au niveau des effecteurs, "il y a en Martinique des choses à améliorer", a poursuivi Papa Gueye, soulignant que, face notamment aux besoins de la population âgée, "des médecins s'organisent pour refaire des visites à domicile".

Par ailleurs "le maillage de SOS médecins n'est pas total dans le territoire" et mériterait donc "d'être augmenté".

Le directeur du Samu a fait observer que le territoire est bien doté en infirmiers libéraux. "Ils sont à peu près 1.500, c'est un [atout] qu'il faut utiliser", a-t-il plaidé, appelant notamment à la mise en place de correspondants Samu parmi ces personnels. Concernant les spécialités médicales, "les dentistes s'organisent aussi pour avoir une permanence des soins", a-t-il également illustré.

"L'ensemble de ce système, une collaboration ville-hôpital, va permettre à l'hôpital de se recentrer sur sa mission principale qui est de soigner les patients les plus graves et de les remettre à la maison dans les meilleurs délais."

S'agissant de l'aval, le CHU seul "ne va pas réussir à combler tous les trous, d'où l'importance du groupe hospitalier de territoire (GHT)", a expliqué le directeur du Samu.

Yannick Brouste a précisément évoqué le projet d'ouverture d'un "centre d'urgence" pour lequel "la clinique Saint-Paul fait partie des postulants".

Le CHU doit aussi "se réorganiser au niveau des services de soins, du système informatique", car "on compte énormément sur certains outils qui nous permettaient d'anticiper les flux", a ajouté le chef du service des urgences.

mlb/san/APMnews

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FORT-DE-FRANCE, 6 septembre 2023 (APMnews) - Alors que ses urgences débordent dans un contexte de remontée des cas de Covid et d'épidémie de dengue, le CHU de Martinique compte sur la régulation par le 15, mais aussi sur le renforcement des réponses aux besoins de soins non programmés, ont expliqué mardi le directeur du Samu et le chef des urgences, lors d'une conférence de presse, suivie à distance par APMnews.

Si les tensions aux urgences du CHU de Martinique ne sont pas nouvelles, le service traverse une situation critique due notamment à une épidémie de dengue, une circulation "encore active" du Covid, des vagues de chaleur qui ont affecté particulièrement les personnes âgées et des brumes de sable entraînant des affections respiratoires, a expliqué à APMnews le Pr Papa Gueye, directeur du Samu, lors d'un entretien au téléphone, en marge de la conférence de presse.

L'ensemble de ces facteurs ont fait que les urgences débordent particulièrement depuis la mi-août. A Fort-de-France, le service, qui enregistre 120 passages par jour en moyenne, a connu des pics jusqu'à plus de 180 patients.

Dans ce contexte, l'agence régionale de santé (ARS) Martinique a annoncé vendredi qu'à compter de lundi 4 septembre, "les personnes ne relevant pas des urgences seront réorientées par celles-ci vers une prise en charge appropriée".

Le message est donné à la population "de ne pas venir aux urgences lorsque l'on n'a pas une urgence grave", "sans avoir appelé son médecin traitant" ou le Samu, a expliqué Papa Gueye.

Concrètement, les urgences sont depuis cette semaine régulées par le 15. Quand ils se déplacent tout de même sans passer par le Samu, "ils sont réorientés". "On leur propose un téléphone pour appeler le 15" s'ils n'en ont pas.

Le service d'accès aux soins (SAS) fonctionne en Martinique avec la présence de deux médecins libéraux au Samu de 7 heures du matin jusqu'à 23 heures, "en continuité la permanence des soins", a souligné Papa Gueye lors de la conférence de presse. "Cela commence à marcher", même si "les résultats ne sont pas immédiats", a-t-il pointé, précisant qu'à peu près "60% des [appelants] relèvent de la régulation hospitalière."

Interrogé par APMnews en marge de la conférence de presse, le Dr Yannick Brouste, chef du service des urgences du CHU de Martinique, a précisé que la "régulation nocturne" par le 15 avait déjà débuté "depuis quelques mois". Quant au SAS, dont la phase pilote avait été lancée au début de l'année, son fonctionnement avait dû être interrompu avant de reprendre "avant l'été", après que des assistants régulation médicale (ARM) ont pu être formés en interne.

L'engorgement des urgences ayant des incidences pour les patients qui nécessitent une prise en charge, "on a demandé à l'ARS de voir comment trouver des solutions pour éviter cet embouteillage et faire en sorte que l'on puisse donner des soins de qualité", a rapporté Yannick Brouste lors de la conférence de presse. "On compte aussi sur la volonté de chaque patient" en les appelant à ne pas venir aux urgences quand cela "ne le nécessite pas", sachant que la régulation "aura forcément un impact sur l'activité du centre 15".

Parfois, "80-90 patients attendent dans les couloirs" des urgences, a-t-il précisé à APMnews. Une tente a été installée devant l'entrée du service, "sous surveillance des pompiers", afin de libérer "le flux extra-hospitalier" et d'éviter de faire attendre les équipes de secours.

Vendredi, trois personnes étaient hospitalisées pour Covid en réanimation. "Autant que pour la dengue, sachant que pour la dengue, si tout se passe bien, les personnes repartent plus vite", a aussi décrit Yannick Brouste.

"Cela faisait longtemps que l'on n'avait pas vu de patients en décubitus ventral ou qui nécessitent de l'oxygène" de manière renforcée en raison du Covid, a-t-il souligné pendant la conférence de presse. "On est en train de discuter du retour du masque chez les soignants et les patients au niveau des secteurs de soins. D'ici 48 heures, on aura une note de service."

Manque d'effectifs médicaux

Le chef des services des urgences a également pointé des difficultés de ressources médicales, précisant qu'au Samu, un seul médecin au lieu de deux était présent H24 en régulation hospitalière. "Au niveau des urgences, on a perdu une ligne d'hospitalisation [de courte durée] et une ligne de filière courte." Concernant les effectifs paramédicaux, "l'établissement a toujours fait en sorte de protéger" les urgences, mais face aux épidémies, "forcément du personnel va commencer à tomber", s'est-il inquiété.

La tension sur les effectifs médicaux aux urgences "est constante depuis plusieurs années" et s'est exacerbée après la mise en œuvre des dispositions sur le plafonnement de la rémunération de l'intérim médical, a complété Papa Gueye, estimant néanmoins que des mesures d'attractivité existent, comme la possibilité de "contrats plus stables" et "l'indemnité de 40% vie chère actée récemment par le gouvernement" (cf dépêche du 03/04/2023 à 17:27).

"Mais quel que soit le nombre de médecins, c'est l'augmentation du flux" qui devient "ingérable", a-t-il insisté. L'enjeu est "d'essayer de faire en sorte que des soins non programmés soient pris en charge par des filières" spécifiques.

L'ARS "est en train de développer plusieurs filières de soins non programmés qui s'articulent autour de la médecine de ville, mais aussi d'autres initiatives de consultations avancées, de centres d'accueil de premiers soins, qui permettront de donner des solutions, car rien ne sert de dire aux personnes de ne pas venir aux urgences si on ne leur trouve pas des solutions convenables de soins", a-t-il considéré.

Sur le territoire, un autre enjeu est d'améliorer la prévention en permettant "que les personnes soient vues régulièrement par leur médecin" en ville, notamment en développant les consultations de spécialité, a-t-il développé.

Yannick Brouste a précisé que, parmi les passages aux urgences, 40% pourraient être réorientés "ou différés". Il a évoqué le problème rencontré par les personnes âgées, "qui n'ont pas forcément de moyen de locomotion, sont souvent isolées chez elles", ce qui pourrait nécessiter, face à l'offre contrainte en médecine libérale, un "développement du maillage des infirmiers libéraux".

"On est en train de rebâtir le maillage de la santé en Martinique avec l'ARS", a-t-il esquissé.

Au niveau des effecteurs, "il y a en Martinique des choses à améliorer", a poursuivi Papa Gueye, soulignant que, face notamment aux besoins de la population âgée, "des médecins s'organisent pour refaire des visites à domicile".

Par ailleurs "le maillage de SOS médecins n'est pas total dans le territoire" et mériterait donc "d'être augmenté".

Le directeur du Samu a fait observer que le territoire est bien doté en infirmiers libéraux. "Ils sont à peu près 1.500, c'est un [atout] qu'il faut utiliser", a-t-il plaidé, appelant notamment à la mise en place de correspondants Samu parmi ces personnels. Concernant les spécialités médicales, "les dentistes s'organisent aussi pour avoir une permanence des soins", a-t-il également illustré.

"L'ensemble de ce système, une collaboration ville-hôpital, va permettre à l'hôpital de se recentrer sur sa mission principale qui est de soigner les patients les plus graves et de les remettre à la maison dans les meilleurs délais."

S'agissant de l'aval, le CHU seul "ne va pas réussir à combler tous les trous, d'où l'importance du groupe hospitalier de territoire (GHT)", a expliqué le directeur du Samu.

Yannick Brouste a précisément évoqué le projet d'ouverture d'un "centre d'urgence" pour lequel "la clinique Saint-Paul fait partie des postulants".

Le CHU doit aussi "se réorganiser au niveau des services de soins, du système informatique", car "on compte énormément sur certains outils qui nous permettaient d'anticiper les flux", a ajouté le chef du service des urgences.

mlb/san/APMnews

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