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07/01 2025
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MAYOTTE: DES INFRASTRUCTURES SANITAIRES TOUJOURS FRAGILES TROIS SEMAINES APRÈS CHIDO (DG DE L'ARS)

(Par Geoffroy LANG)

MAMOUDZOU, 7 janvier 2025 (APMnews) - Le centre hospitalier de Mayotte (CHM) et les différents centres médicaux de référence (CMR) qu'il gère sur l'archipel se remettent difficilement du passage du cyclone Chido trois semaines plus tôt, a-t-on appris mardi lors d'un entretien avec le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Mayotte, Sergio Albarello.

"Depuis le passage du cyclone, il y a eu environ 7.000 personnes vues en consultations sur les structures mises en place à l'hôpital de la sécurité civile [Escrim] et à l'hôpital de Mamoudzou [CHM]", a rapporté Sergio Albarello, joint mardi par APMnews.

Sergio Albarello (crédit ARS Mayotte)
Sergio Albarello (crédit ARS Mayotte)

"L'activité de ces deux structures de référence commence à diminuer un peu, on était sur une moyenne de 200 à 220 passages par jour, ça commence à descendre à 140 ou 150 passages par jour", a-t-il développé. "C'est déjà un beau flux mais ça commence à diminuer petit à petit."

Dans son point de situation de lundi, le ministère de l'intérieur recensait 2.692 personnes ayant consulté l'Elément de sécurité civile rapide d'intervention médicale (Escrim) depuis son déploiement le 24 décembre 2024, et 207 consultations et 11 interventions chirurgicales effectuées au cours des dernières 24 heures.

Si le CHM est passé d'une capacité opérationnelle de 25% au lendemain de Chido à près de 70% de capacités de fonctionnement depuis une semaine, "les structures de santé sont toujours fortement impactées", s'est empressé d'ajouter le directeur de l'ARS.

"Les bâtiments sont fortement impactés par les détériorations des toits, certains ont été sanctuarisés par la sécurité civile avec des bâches et des tôles mais d'autres sont fortement endommagés et certains bâtiments ne sont plus exploitables", a-t-il cependant nuancé, en citant notamment le cas des bâtiments de psychiatrie du CHM, en particulier les bâtiments de consultation, actuellement hors d'usage.

"Comme on est en saison des pluies, les jours précédents nous avons eu de fortes pluies qui ont fortement endommagé la structure, et en particulier les services de réanimation et les blocs opératoires", a-t-il également ajouté.

Lundi, le ministère de l'intérieur soulignait de son côté que si le CHM était "opérationnel à 76%" et que le bâchage des toits était "désormais terminé", celui-ci demandait "à être renforcé car l'étanchéité n'est à ce stade pas complète".

Des infrastructures encore insuffisamment étanches

"Les pluies importantes du 3 janvier ont causé des infiltrations d'eau dans certaines salles, nécessitant un appui de la sécurité civile", rapportait ainsi Beauvau, quand Sergio Albarello a noté que cet épisode climatique d'une intensité habituelle avait "impacté la structure qui est déjà très fragilisée". "Sur les six blocs, il y a déjà trois blocs opératoires qui ne sont plus fonctionnels totalement."

Le bâtiment de la réanimation et des blocs souffre d'infiltrations d'eau débordant des terrasses en cas de fortes pluies "parce que le bâti est un peu endommagé et les canalisations d'évacuations sont bouchées par tous les débris", a détaillé le directeur de l'ARS. "L'eau s'accumule sur les terrasses, pénètre dans les faux plafonds, jusqu'à inonder les services de réanimation et les blocs."

Dispositifs clefs du CHM pour assurer un accès aux soins sur l'ensemble du département, les quatre centres médicaux de référence et les 12 centres de consultations périphériques (CCP), ou "dispensaires", ont pu reprendre une activité depuis le passage de Chido.

Le directeur général de l'ARS a cependant mis en exergue la situation du CMR de Kahani, qui assure notamment une activité de maternité, qui est actuellement privé de 50% de ses lits d'hospitalisation, lesquels "ne sont pas ouvrables parce qu'il y a des fenêtres qui sont abîmées". Or "on ne peut pas laisser des patients avec bébés avec des fenêtres ouvertes !"

"Il y a surtout un problème électrique", a complété le directeur général de l'ARS. "On a des gros problèmes électriques dans les différents CMR qu'on est en train de régler avec les électriciens et les différents ingénieurs bâtimentaires."

Dans la perspective de la restauration du système de santé mahorais, le directeur de l'ARS a fait des mises "hors eau et hors air" des différents bâtiments du CHM les premières priorités: "C'est ce qui est en train d'être finalisé avec la sécurité civile."

"Ensuite, nous allons mettre en place des structures temporaires type Algeco ou des tentes pour des bases vie, permettant de reprendre l'activité de consultations", a-t-il enchaîné, "en même temps on réfléchit sur la reconstruction d'un hôpital, en particulier l'hôpital de Mamoudzou, et le renforcement des CMR".

"Tout ça est en train d'être réfléchi en même temps", a pris soin de clarifier Sergio Albarello. "Ce n'est pas l'un après l'autre, mais d'emblée la réfection globale de l'offre de soins sur le territoire, en même temps pouvoir continuer cette offre par des moyens temporaires, et sauver dans l'urgence le maximum de structures et assurer l'immédiateté des soins."

Il a souligné que la solidarité nationale était à pied d'œuvre pour soutenir le 101e département dans cette épreuve, avec une forte présence de la réserve sanitaire pour renforcer les ressources humaines, un soutien matériel avec une montée en puissance du pont aérien pour permettre la reconstruction des bâtiments et "un appui technique d'experts qui sont déjà sur place pour réfléchir sur la structure sécure de cet hôpital".

Dès le début de la crise, le ministère de l'intérieur, en fonction des besoins identifiés localement à Mayotte, a examiné les propositions de dons.

Depuis le premier avion-cargo porteur de dons parti de l'Hexagone mercredi 25 décembre, 120 tonnes de dons déjà acheminés à Mayotte (eau, bâches, tissus imperméables, denrées alimentaires, produits alimentaires pour les nourrissons, lits picots…), et 30 tonnes de denrées alimentaires seront envoyées mercredi, a rapporté le ministère de l'intérieur.

Une vigilance accrue mais pas d'alerte épidémique

Alors que Santé publique France a mis en place une veille spécifique (cf dépêche du 03/01/2025 à 18:36) et déployé des effectifs au sein de l'ARS pour assurer la veille sanitaire et la prévention des risques épidémiques, le directeur de l'ARS s'est montré rassurant à ce sujet à date: "Pour le moment, il n'y a pas de signe qui est identifié comme risque majeur, cependant on a une grande vigilance."

En plus de la veille sanitaire, l'ARS se tient ainsi prête à intervenir dès la première alerte pour la prise en charge de premiers cas suspects et de leurs entourages, sur le modèle de ce qui avait permis de circonscrire l'épidémie de choléra il y a un peu moins d'un an (cf dépêche du 22/05/2024 à 15:07 et dépêche du 23/09/2024 à 15:48).

"Je pense que la population n'avait pas pris conscience du niveau de l'alerte de ce cyclone", a estimé le directeur de l'ARS au moment de faire une première relecture du passage de Chido à Mayotte, en jugeant que les services de l'Etat, et plus particulièrement la préfecture, l'ARS et l'hôpital s'étaient tenus prêts. "On a fait venir du renfort en structure matérielle de santé, ce qui nous a permis d'opérer des patients à Petite-Terre par exemple."

"On a eu un regard très attentif sur l'évolution de ce cyclone, encore quelques heures avant l'impact la trajectoire bougeait encore, on pensait qu'elle allait passer au nord de Madagascar et brusquement, il a changé sa trajectoire et il a tapé Petite-Terre et la moitié de l'île", a-t-il cependant fait remarquer.

Parmi les premiers enseignements à tirer à chaud de cette crise, le directeur de l'ARS a confié qu'il faudrait améliorer la sensibilisation de la population aux risques naturels qui pèsent sur certains territoires comme Mayotte, mais aussi mettre le bâtimentaire stratégique aux normes nécessaires pour ces risques et prévoir des exercices de préparation aux situations sanitaires exceptionnelles (SSE) et du matériel permettant de faire face à un nombre élevé de victimes en cas de séisme ou de cyclone.

gl/ab/APMnews

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MAMOUDZOU, 7 janvier 2025 (APMnews) - Le centre hospitalier de Mayotte (CHM) et les différents centres médicaux de référence (CMR) qu'il gère sur l'archipel se remettent difficilement du passage du cyclone Chido trois semaines plus tôt, a-t-on appris mardi lors d'un entretien avec le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Mayotte, Sergio Albarello.

"Depuis le passage du cyclone, il y a eu environ 7.000 personnes vues en consultations sur les structures mises en place à l'hôpital de la sécurité civile [Escrim] et à l'hôpital de Mamoudzou [CHM]", a rapporté Sergio Albarello, joint mardi par APMnews.

Sergio Albarello (crédit ARS Mayotte)
Sergio Albarello (crédit ARS Mayotte)

"L'activité de ces deux structures de référence commence à diminuer un peu, on était sur une moyenne de 200 à 220 passages par jour, ça commence à descendre à 140 ou 150 passages par jour", a-t-il développé. "C'est déjà un beau flux mais ça commence à diminuer petit à petit."

Dans son point de situation de lundi, le ministère de l'intérieur recensait 2.692 personnes ayant consulté l'Elément de sécurité civile rapide d'intervention médicale (Escrim) depuis son déploiement le 24 décembre 2024, et 207 consultations et 11 interventions chirurgicales effectuées au cours des dernières 24 heures.

Si le CHM est passé d'une capacité opérationnelle de 25% au lendemain de Chido à près de 70% de capacités de fonctionnement depuis une semaine, "les structures de santé sont toujours fortement impactées", s'est empressé d'ajouter le directeur de l'ARS.

"Les bâtiments sont fortement impactés par les détériorations des toits, certains ont été sanctuarisés par la sécurité civile avec des bâches et des tôles mais d'autres sont fortement endommagés et certains bâtiments ne sont plus exploitables", a-t-il cependant nuancé, en citant notamment le cas des bâtiments de psychiatrie du CHM, en particulier les bâtiments de consultation, actuellement hors d'usage.

"Comme on est en saison des pluies, les jours précédents nous avons eu de fortes pluies qui ont fortement endommagé la structure, et en particulier les services de réanimation et les blocs opératoires", a-t-il également ajouté.

Lundi, le ministère de l'intérieur soulignait de son côté que si le CHM était "opérationnel à 76%" et que le bâchage des toits était "désormais terminé", celui-ci demandait "à être renforcé car l'étanchéité n'est à ce stade pas complète".

Des infrastructures encore insuffisamment étanches

"Les pluies importantes du 3 janvier ont causé des infiltrations d'eau dans certaines salles, nécessitant un appui de la sécurité civile", rapportait ainsi Beauvau, quand Sergio Albarello a noté que cet épisode climatique d'une intensité habituelle avait "impacté la structure qui est déjà très fragilisée". "Sur les six blocs, il y a déjà trois blocs opératoires qui ne sont plus fonctionnels totalement."

Le bâtiment de la réanimation et des blocs souffre d'infiltrations d'eau débordant des terrasses en cas de fortes pluies "parce que le bâti est un peu endommagé et les canalisations d'évacuations sont bouchées par tous les débris", a détaillé le directeur de l'ARS. "L'eau s'accumule sur les terrasses, pénètre dans les faux plafonds, jusqu'à inonder les services de réanimation et les blocs."

Dispositifs clefs du CHM pour assurer un accès aux soins sur l'ensemble du département, les quatre centres médicaux de référence et les 12 centres de consultations périphériques (CCP), ou "dispensaires", ont pu reprendre une activité depuis le passage de Chido.

Le directeur général de l'ARS a cependant mis en exergue la situation du CMR de Kahani, qui assure notamment une activité de maternité, qui est actuellement privé de 50% de ses lits d'hospitalisation, lesquels "ne sont pas ouvrables parce qu'il y a des fenêtres qui sont abîmées". Or "on ne peut pas laisser des patients avec bébés avec des fenêtres ouvertes !"

"Il y a surtout un problème électrique", a complété le directeur général de l'ARS. "On a des gros problèmes électriques dans les différents CMR qu'on est en train de régler avec les électriciens et les différents ingénieurs bâtimentaires."

Dans la perspective de la restauration du système de santé mahorais, le directeur de l'ARS a fait des mises "hors eau et hors air" des différents bâtiments du CHM les premières priorités: "C'est ce qui est en train d'être finalisé avec la sécurité civile."

"Ensuite, nous allons mettre en place des structures temporaires type Algeco ou des tentes pour des bases vie, permettant de reprendre l'activité de consultations", a-t-il enchaîné, "en même temps on réfléchit sur la reconstruction d'un hôpital, en particulier l'hôpital de Mamoudzou, et le renforcement des CMR".

"Tout ça est en train d'être réfléchi en même temps", a pris soin de clarifier Sergio Albarello. "Ce n'est pas l'un après l'autre, mais d'emblée la réfection globale de l'offre de soins sur le territoire, en même temps pouvoir continuer cette offre par des moyens temporaires, et sauver dans l'urgence le maximum de structures et assurer l'immédiateté des soins."

Il a souligné que la solidarité nationale était à pied d'œuvre pour soutenir le 101e département dans cette épreuve, avec une forte présence de la réserve sanitaire pour renforcer les ressources humaines, un soutien matériel avec une montée en puissance du pont aérien pour permettre la reconstruction des bâtiments et "un appui technique d'experts qui sont déjà sur place pour réfléchir sur la structure sécure de cet hôpital".

Dès le début de la crise, le ministère de l'intérieur, en fonction des besoins identifiés localement à Mayotte, a examiné les propositions de dons.

Depuis le premier avion-cargo porteur de dons parti de l'Hexagone mercredi 25 décembre, 120 tonnes de dons déjà acheminés à Mayotte (eau, bâches, tissus imperméables, denrées alimentaires, produits alimentaires pour les nourrissons, lits picots…), et 30 tonnes de denrées alimentaires seront envoyées mercredi, a rapporté le ministère de l'intérieur.

Une vigilance accrue mais pas d'alerte épidémique

Alors que Santé publique France a mis en place une veille spécifique (cf dépêche du 03/01/2025 à 18:36) et déployé des effectifs au sein de l'ARS pour assurer la veille sanitaire et la prévention des risques épidémiques, le directeur de l'ARS s'est montré rassurant à ce sujet à date: "Pour le moment, il n'y a pas de signe qui est identifié comme risque majeur, cependant on a une grande vigilance."

En plus de la veille sanitaire, l'ARS se tient ainsi prête à intervenir dès la première alerte pour la prise en charge de premiers cas suspects et de leurs entourages, sur le modèle de ce qui avait permis de circonscrire l'épidémie de choléra il y a un peu moins d'un an (cf dépêche du 22/05/2024 à 15:07 et dépêche du 23/09/2024 à 15:48).

"Je pense que la population n'avait pas pris conscience du niveau de l'alerte de ce cyclone", a estimé le directeur de l'ARS au moment de faire une première relecture du passage de Chido à Mayotte, en jugeant que les services de l'Etat, et plus particulièrement la préfecture, l'ARS et l'hôpital s'étaient tenus prêts. "On a fait venir du renfort en structure matérielle de santé, ce qui nous a permis d'opérer des patients à Petite-Terre par exemple."

"On a eu un regard très attentif sur l'évolution de ce cyclone, encore quelques heures avant l'impact la trajectoire bougeait encore, on pensait qu'elle allait passer au nord de Madagascar et brusquement, il a changé sa trajectoire et il a tapé Petite-Terre et la moitié de l'île", a-t-il cependant fait remarquer.

Parmi les premiers enseignements à tirer à chaud de cette crise, le directeur de l'ARS a confié qu'il faudrait améliorer la sensibilisation de la population aux risques naturels qui pèsent sur certains territoires comme Mayotte, mais aussi mettre le bâtimentaire stratégique aux normes nécessaires pour ces risques et prévoir des exercices de préparation aux situations sanitaires exceptionnelles (SSE) et du matériel permettant de faire face à un nombre élevé de victimes en cas de séisme ou de cyclone.

gl/ab/APMnews

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