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03/01 2025
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MAYOTTE: SANTÉ PUBLIQUE FRANCE MET EN PLACE UNE SURVEILLANCE ÉPIDÉMIOLOGIQUE SPÉCIFIQUE

SAINT-MAURICE (Val-de-Marne), LE PORT (La Réunion), PARIS, 3 janvier 2025 (APMnews) - L'agence Santé publique France (SPF) a mis en place une surveillance épidémiologique spécifique à Mayotte pour s'adapter aux conditions post-cyclone, a rapporté vendredi l'agence dans un premier bulletin sur la situation épidémiologique après le passage de Chido.

"Le passage du cyclone tropical intense Chido le 14 décembre 2024 à Mayotte a provoqué des dégâts matériels majeurs, affectant les infrastructures essentielles telles que les transports, l'alimentation en eau potable et électricité, le réseau d'assainissement, les réseaux de communication mais également les structures d'offre de soins", a rappelé l'agence sanitaire en notant qu'une "grande partie de la population, déjà vulnérable en raison de la précarité sociale et de la prévalence élevée de pathologies chroniques, se trouv[ait] aujourd'hui confrontée à des risques accrus de dénutrition, de traumatismes, de décompensation des maladies chroniques et de troubles psychologiques".

SPF a notamment mis en exergue les difficultés rencontrées par la population mahoraise pour accéder "aux services de santé, à l'eau potable et à une alimentation suffisante" dans ce contexte post-cyclone, difficultés qualifiées de "véritable défi de santé publique pour les autorités".

"A court terme, les risques infectieux, notamment liés à l'eau, doivent être surveillés de près, tandis qu'à moyen terme, la prise en charge des pathologies chroniques et la gestion des troubles de santé mentale seront primordiales", a également souligné l'agence.

En conséquence, les différents partenaires de SPF en charge de la surveillance épidémiologique ont dû s'adapter aux contraintes techniques et matérielles

L'agence a précisé qu'elle s'appuyait notamment "sur les dispositifs de surveillance mis en place pour l'occasion, sur ceux encore opérationnels", comme le laboratoire du centre hospitalier de Mayotte (CHM), "sur ceux adaptés aux nouvelles conditions", tels que les urgences du CHM, mais également sur un réseau de surveillance communautaire ainsi que 8 des 77 réservistes sanitaires actuellement présents à Mayotte.

Un réseau de surveillance à base communautaire

"Une première maraude de surveillance à base communautaire a été organisée dans plusieurs quartiers de la commune de Tsingoni" 10 jours après le passage du cyclone Chido, a ainsi rapporté SPF. "Trois équipes, composées d'environ cinq personnes chacune, ont enquêté auprès d'une soixantaine de foyers."

Aucun décès n'a été recensé lors de ces premières analyses, mais 30% des foyers enquêtés faisaient état de blessés, tandis que 16% comptaient au moins un adulte présentant des symptômes de diarrhée et de toux, et 9% au moins un adulte souffrant de fièvre.

"Une partie importante des familles continue de consommer de l'eau brute provenant de rivières, de pluies ou de la retenue d'eau de Combani, faute d'accès à l'eau potable", rapporte SPF. "Le manque de ressources alimentaires a également été identifié comme un problème majeur, plusieurs personnes ayant exprimé des situations de faim."

L'agence sanitaire a également relevé la complication présentée par les difficultés rencontrées par les Mahorais, avec une mobilité réduite "aggravant les retards dans la prise en charge", et des difficultés pour "obtenir les traitements nécessaires, les contraintes financières et logistiques amplifiant les problématiques".

"Ces observations mettent en lumière la vulnérabilité des habitants face aux conséquences du cyclone, tant sur le plan psychologique que sanitaire, et l'importance de renforcer les moyens d'accès aux ressources essentielles, à l'eau potable, à l'alimentation et aux soins", en conclut SPF.

Selon les données remontées au 31 décembre, les urgences du CHM avaient enregistré 1.440 passages du 21 au 29 décembre, avec pour "principaux motifs de recours" des traumatismes et des plaies.

"Parmi ces patients, 36 ont été hospitalisés en chirurgie orthopédique, 53 en pédiatrie, 26 en chirurgie générale et 29 en réanimation", a précisé SPF. "Durant cette période, au moins 9 décès sont survenus au sein du CHM."

L'Elément de sécurité civile rapide d'intervention médicale (Escrim), l'hôpital de campagne déployé par la sécurité civile dans le stade de Cavani, a pris en charge de son côté 1.170 patients entre sa mise en service le 24 décembre et le 29 décembre, dont près d'un tiers pour des traumatismes (31,7%).

Le seuil de 100 patients par jour pour lequel a été conçu l'Escrim a été dépassé dès le premier jour, avec 113 patients, rapporte SPF, avant d'ajouter que "le nombre a doublé dès le deuxième jour, atteignant 200 patients".

Des "plaies surinfectées, nécessitant parfois des interventions chirurgicales lourdes"

Les données de prises en charge hospitalières remontées à SPF une semaine après le passage du cyclone font état de "cas de plaies surinfectées, nécessitant parfois des interventions chirurgicales lourdes (amputations, traitement de fasciites nécrosantes) [..] traduisant des retards dans la prise en charge".

La surveillance épidémiologique indique qu'une épidémie de bronchiolite est toujours en cours tandis que l'épidémie de gastro-entérites à rotavirus donne des signes de reprise.

"Près de 48% des foyers enquêtés lors des maraudes communautaires ont signalé des troubles psychologiques (stress, peur) exacerbés par la perte de logement et l'accès limité à l'eau potable et à l'alimentation", selon SPF, qui mentionne également de nombreux des cas de diarrhée, fièvre et toux.

L'agence a rappelé que la destruction de nombreuses infrastructures et l'accès limité à l'eau potable augmentait "le risque de maladies hydriques (choléra, gastro-entérites à rotavirus), de leptospirose, ainsi que d'infections respiratoires comme la bronchiolite".

Dans un point de situation diffusé jeudi soir, le ministère de l'intérieur a fait état de son côté de 1.947 personnes ayant consulté l'Escrim, tandis que le bilan humain s'établit toujours à 39 personnes décédées depuis le jeudi 26 décembre (cf dépêche du 27/12/2024 à 18:23).

Parallèlement à la mission préfectorale lancée sur le bilan humain du cyclone, SPF a indiqué qu'elle collaborait "avec les associations dans le cadre de la surveillance à base communautaire, pour contribuer à une estimation des causes de décès".

Lors d'un échange vendredi avec APMnews, la directrice générale des Flamboyants, Aude Savalli d'Abbadie, a rapporté que la clinique de réadaptation Uhaju (Mamoudzou) n'avait subi que "des dégâts mineurs" durant le cyclone: "quelques infiltrations, des huisseries et menuiseries endommagées…"

Reprise progressive à compter du 13 janvier pour la clinique Uhaju

Si la remise en état de la clinique ne pourra pas se faire avant plusieurs mois, ce premier établissement privé qui venait d'ouvrir ses portes à Mayotte (cf dépêche du 10/12/2024 à 19:10) devrait pouvoir reprendre peu à peu son activité à partir du lundi 13 janvier.

Cette reprise sera très progressive, avec une quinzaine de patients par jour au départ, alors que la clinique sert actuellement de base vie pour une vingtaine de personnes.

Les professionnels de la clinique prêtent déjà main forte à plusieurs acteurs sur le terrain, notamment Médecins sans frontières et le CHM, a cependant fait remarquer Aude Savalli d'Abbadie.

"On apporte un soutien matériel, on envoie des masques puisqu'on a une ligne de production de masques, de la literie", a ajouté la directrice du groupe qui comprenait jusqu'alors cinq cliniques privées à La Réunion: trois établissements spécialisés en psychiatrie et deux en rééducation.

"Ce qu'on n'avait pas anticipé, c'est un arrêt d'activité totale sur toute l'île", a-t-elle reconnu après avoir assuré que ses équipes s'étaient préparées "au scénario du pire": "Les conséquences ont été désastreuse sur l'ensemble du territoire."

"Ce sont des scénarios qu'il faudra travailler pour tous les territoires exposés aux cyclones", a-t-elle ajouté.

Alors que la présentation d'une "loi d'urgence" pour Mayotte avait été initialement annoncée par le premier ministre François Bayrou pour le conseil des ministres de vendredi (cf dépêche du 30/12/2024 à 20:10), Matignon a indiqué jeudi à APMnews que "la loi spéciale sera[it] présentée lors du conseil des ministres de la semaine prochaine".

gl/rm/APMnews

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MAYOTTE: SANTÉ PUBLIQUE FRANCE MET EN PLACE UNE SURVEILLANCE ÉPIDÉMIOLOGIQUE SPÉCIFIQUE

SAINT-MAURICE (Val-de-Marne), LE PORT (La Réunion), PARIS, 3 janvier 2025 (APMnews) - L'agence Santé publique France (SPF) a mis en place une surveillance épidémiologique spécifique à Mayotte pour s'adapter aux conditions post-cyclone, a rapporté vendredi l'agence dans un premier bulletin sur la situation épidémiologique après le passage de Chido.

"Le passage du cyclone tropical intense Chido le 14 décembre 2024 à Mayotte a provoqué des dégâts matériels majeurs, affectant les infrastructures essentielles telles que les transports, l'alimentation en eau potable et électricité, le réseau d'assainissement, les réseaux de communication mais également les structures d'offre de soins", a rappelé l'agence sanitaire en notant qu'une "grande partie de la population, déjà vulnérable en raison de la précarité sociale et de la prévalence élevée de pathologies chroniques, se trouv[ait] aujourd'hui confrontée à des risques accrus de dénutrition, de traumatismes, de décompensation des maladies chroniques et de troubles psychologiques".

SPF a notamment mis en exergue les difficultés rencontrées par la population mahoraise pour accéder "aux services de santé, à l'eau potable et à une alimentation suffisante" dans ce contexte post-cyclone, difficultés qualifiées de "véritable défi de santé publique pour les autorités".

"A court terme, les risques infectieux, notamment liés à l'eau, doivent être surveillés de près, tandis qu'à moyen terme, la prise en charge des pathologies chroniques et la gestion des troubles de santé mentale seront primordiales", a également souligné l'agence.

En conséquence, les différents partenaires de SPF en charge de la surveillance épidémiologique ont dû s'adapter aux contraintes techniques et matérielles

L'agence a précisé qu'elle s'appuyait notamment "sur les dispositifs de surveillance mis en place pour l'occasion, sur ceux encore opérationnels", comme le laboratoire du centre hospitalier de Mayotte (CHM), "sur ceux adaptés aux nouvelles conditions", tels que les urgences du CHM, mais également sur un réseau de surveillance communautaire ainsi que 8 des 77 réservistes sanitaires actuellement présents à Mayotte.

Un réseau de surveillance à base communautaire

"Une première maraude de surveillance à base communautaire a été organisée dans plusieurs quartiers de la commune de Tsingoni" 10 jours après le passage du cyclone Chido, a ainsi rapporté SPF. "Trois équipes, composées d'environ cinq personnes chacune, ont enquêté auprès d'une soixantaine de foyers."

Aucun décès n'a été recensé lors de ces premières analyses, mais 30% des foyers enquêtés faisaient état de blessés, tandis que 16% comptaient au moins un adulte présentant des symptômes de diarrhée et de toux, et 9% au moins un adulte souffrant de fièvre.

"Une partie importante des familles continue de consommer de l'eau brute provenant de rivières, de pluies ou de la retenue d'eau de Combani, faute d'accès à l'eau potable", rapporte SPF. "Le manque de ressources alimentaires a également été identifié comme un problème majeur, plusieurs personnes ayant exprimé des situations de faim."

L'agence sanitaire a également relevé la complication présentée par les difficultés rencontrées par les Mahorais, avec une mobilité réduite "aggravant les retards dans la prise en charge", et des difficultés pour "obtenir les traitements nécessaires, les contraintes financières et logistiques amplifiant les problématiques".

"Ces observations mettent en lumière la vulnérabilité des habitants face aux conséquences du cyclone, tant sur le plan psychologique que sanitaire, et l'importance de renforcer les moyens d'accès aux ressources essentielles, à l'eau potable, à l'alimentation et aux soins", en conclut SPF.

Selon les données remontées au 31 décembre, les urgences du CHM avaient enregistré 1.440 passages du 21 au 29 décembre, avec pour "principaux motifs de recours" des traumatismes et des plaies.

"Parmi ces patients, 36 ont été hospitalisés en chirurgie orthopédique, 53 en pédiatrie, 26 en chirurgie générale et 29 en réanimation", a précisé SPF. "Durant cette période, au moins 9 décès sont survenus au sein du CHM."

L'Elément de sécurité civile rapide d'intervention médicale (Escrim), l'hôpital de campagne déployé par la sécurité civile dans le stade de Cavani, a pris en charge de son côté 1.170 patients entre sa mise en service le 24 décembre et le 29 décembre, dont près d'un tiers pour des traumatismes (31,7%).

Le seuil de 100 patients par jour pour lequel a été conçu l'Escrim a été dépassé dès le premier jour, avec 113 patients, rapporte SPF, avant d'ajouter que "le nombre a doublé dès le deuxième jour, atteignant 200 patients".

Des "plaies surinfectées, nécessitant parfois des interventions chirurgicales lourdes"

Les données de prises en charge hospitalières remontées à SPF une semaine après le passage du cyclone font état de "cas de plaies surinfectées, nécessitant parfois des interventions chirurgicales lourdes (amputations, traitement de fasciites nécrosantes) [..] traduisant des retards dans la prise en charge".

La surveillance épidémiologique indique qu'une épidémie de bronchiolite est toujours en cours tandis que l'épidémie de gastro-entérites à rotavirus donne des signes de reprise.

"Près de 48% des foyers enquêtés lors des maraudes communautaires ont signalé des troubles psychologiques (stress, peur) exacerbés par la perte de logement et l'accès limité à l'eau potable et à l'alimentation", selon SPF, qui mentionne également de nombreux des cas de diarrhée, fièvre et toux.

L'agence a rappelé que la destruction de nombreuses infrastructures et l'accès limité à l'eau potable augmentait "le risque de maladies hydriques (choléra, gastro-entérites à rotavirus), de leptospirose, ainsi que d'infections respiratoires comme la bronchiolite".

Dans un point de situation diffusé jeudi soir, le ministère de l'intérieur a fait état de son côté de 1.947 personnes ayant consulté l'Escrim, tandis que le bilan humain s'établit toujours à 39 personnes décédées depuis le jeudi 26 décembre (cf dépêche du 27/12/2024 à 18:23).

Parallèlement à la mission préfectorale lancée sur le bilan humain du cyclone, SPF a indiqué qu'elle collaborait "avec les associations dans le cadre de la surveillance à base communautaire, pour contribuer à une estimation des causes de décès".

Lors d'un échange vendredi avec APMnews, la directrice générale des Flamboyants, Aude Savalli d'Abbadie, a rapporté que la clinique de réadaptation Uhaju (Mamoudzou) n'avait subi que "des dégâts mineurs" durant le cyclone: "quelques infiltrations, des huisseries et menuiseries endommagées…"

Reprise progressive à compter du 13 janvier pour la clinique Uhaju

Si la remise en état de la clinique ne pourra pas se faire avant plusieurs mois, ce premier établissement privé qui venait d'ouvrir ses portes à Mayotte (cf dépêche du 10/12/2024 à 19:10) devrait pouvoir reprendre peu à peu son activité à partir du lundi 13 janvier.

Cette reprise sera très progressive, avec une quinzaine de patients par jour au départ, alors que la clinique sert actuellement de base vie pour une vingtaine de personnes.

Les professionnels de la clinique prêtent déjà main forte à plusieurs acteurs sur le terrain, notamment Médecins sans frontières et le CHM, a cependant fait remarquer Aude Savalli d'Abbadie.

"On apporte un soutien matériel, on envoie des masques puisqu'on a une ligne de production de masques, de la literie", a ajouté la directrice du groupe qui comprenait jusqu'alors cinq cliniques privées à La Réunion: trois établissements spécialisés en psychiatrie et deux en rééducation.

"Ce qu'on n'avait pas anticipé, c'est un arrêt d'activité totale sur toute l'île", a-t-elle reconnu après avoir assuré que ses équipes s'étaient préparées "au scénario du pire": "Les conséquences ont été désastreuse sur l'ensemble du territoire."

"Ce sont des scénarios qu'il faudra travailler pour tous les territoires exposés aux cyclones", a-t-elle ajouté.

Alors que la présentation d'une "loi d'urgence" pour Mayotte avait été initialement annoncée par le premier ministre François Bayrou pour le conseil des ministres de vendredi (cf dépêche du 30/12/2024 à 20:10), Matignon a indiqué jeudi à APMnews que "la loi spéciale sera[it] présentée lors du conseil des ministres de la semaine prochaine".

gl/rm/APMnews

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