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MÉDECINS LIBÉRAUX: RÉUNION TENDUE AU MINISTÈRE ENTRE SYNDICATS, ORDRE ET DÉPUTÉS FAVORABLES À LA RÉGULATION DE L'INSTALLATION
Pendant près de deux heures, les organisations de médecins ont rappelé leur hostilité à toute mesure de restriction de la liberté d'installation, tandis que les députés ont confirmé leur volonté de voir aboutir leur proposition de loi, déposée par le député socialiste Guillaume Garot (Mayenne), examinée mardi 1er ou mercredi 2 avril en séance publique (cf dépêche du 11/03/2025 à 17:37).
Le texte, qui passe dès mercredi matin devant la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, propose notamment de réguler l'installation des médecins sauf dans les zones sous-dotées, et de rétablir l'obligation de participation à la permanence des soins.
Le ministre de la santé et de l'accès aux soins, Yannick Neuder, qui assistait à la réunion en visioconférence depuis Varsovie, voulait croire qu'il existait "peut-être des voies de passage" sur ce texte, avait-il expliqué lundi matin sur Franceinfo.
Yannick Neuder avait confirmé, en substance, qu'il était défavorable à "prendre des mesures qui vont complètement dégoûter notre jeunesse de s'installer et de faire des études en médecine [et les inciter à partir à l'étranger et exercer hors convention]", quelques jours après un entretien au Quotidien du médecin publié le 19 mars dans lequel il rappelait son opposition à la coercition.
L'objectif de la réunion était de gagner du temps, d'aboutir à une sorte de "moratoire" de quelques semaines, le temps de réécrire le texte et de l'enrichir afin d'en faire une "véritable loi santé" avec des mesures consensuelles et partagées, selon le Dr Jérôme Marty, président du syndicat de l'Union française pour une médecine libre (UFMLS), contacté mardi.
"Tous les syndicats ont expliqué pourquoi ils étaient contre le texte. Les députés ont expliqué qu'ils entendaient examiner le texte. Donc on va au clash", a résumé Jérôme Marty, soulignant que son syndicat soutiendrait les internes en cas de mobilisation ou de manifestation.
"Manœuvre dilatoire" pour le député Hadrien Clouet
Présent lors de la réunion, le député Hadrien Clouet (La France insoumise-NFP, Haute-Garonne), a critiqué une "manœuvre" visant à pousser le groupe transpartisan à retirer sa proposition de loi.
"Cette réunion était totalement inutile. Le ministre a réuni les opposants au texte, qui ont répété leur position exprimée lors des auditions" préparatoires, a-t-il estimé.
"On pourrait aussi réunir les associations de patients et d'usagers pour voir quel serait leur avis", a ironisé Hadrien Clouet, dénonçant "une manœuvre dilatoire qui ne trompe personne".
Si le premier ministre, François Bayrou, semble apporter en creux son soutien au texte (cf dépêche du 25/03/2025 à 16:09), Hadrien Clouet s'inquiète toutefois du calendrier parlementaire serré qui s'annonce pour la "semaine de l'Assemblée".
Il relève qu'avec quatre séances ouvertes pour six textes d'initiative parlementaire inscrits pour les 1er et 2 avril, il risque d'être compliqué pour les députés de tous les examiner dans le temps imparti.
Le Dr Franck Devulder, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), contacté mardi par APMnews, estime que Guillaume Garot connaît "parfaitement ses dossiers" mais déplore qu'il présente certaines données de manière biaisée, afin de servir son agenda politique.
Il observe ainsi qu'à l'appui de l'article imposant un rétablissement de l'obligation de permanence des soins, l'exposé des motifs évoque l'érosion de la participation au dispositif constatée par l'ordre en 2019, alors que le rapport 2023 montre au contraire un rebond (cf dépêche du 25/04/2024 à 15:46).
Franck Devulder conteste par ailleurs l'affirmation de Guillaume Garot selon laquelle "la régulation de l'installation est une mesure probante qui a déjà été mise en place dans plusieurs Etats comparables à la France", dont le Danemark, l'Allemagne ou la Norvège.
Il estime que d'autres mesures pourraient permettre de favoriser l'installation en libéral dans les zones fragiles, notamment en procédant à une "universitarisation" du troisième cycle de manière à permettre aux étudiants d'aller exercer dans les établissements ou cabinets libéraux de campus qui ne disposent pas de faculté de médecine.
Contacté par APMnews mardi, Bastien Bailleul, président de l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG) a d'abord déploré que le ministre ait dû s'éclipser avant que les organisations représentant les jeunes et futurs médecins aient pu s'exprimer alors qu'ils sont les premiers concernés.
Sur le fond, il dit avoir rappelé l'hostilité des jeunes praticiens à la régulation de l'installation, qui risquerait de détourner les étudiants des études médicales, et de réduire le nombre de médecins libéraux en exercice.
Si le gouvernement, ces 20 dernières années, a réaffirmé régulièrement son opposition à toute contrainte ou régulation de l'installation pour les médecins, de plus en plus de voix s'élèvent pour actionner ce levier, à mesure que les inégalités d'accès aux soins s'aggravent sur le territoire.
Ainsi l'Association des petites villes de France (APVF) fin septembre 2024 (cf dépêche du 20/09/2024 à 17:47), la Cour des comptes en mai 2024 dans un rapport sur l'accès aux soins de premier recours (cf dépêche du 13/05/2024 à 13:58) et l'UFC-Que choisir depuis 2022 (cf dépêche du 13/12/2023 à 11:27) plaident-elles pour des mécanismes de régulation à l'installation ou de conventionnement sélectif en fonction des zones déjà bien pourvues.
Au Parlement, les dernières initiatives parlementaires en ce sens ont échoué jusque-là, comme en juin 2023 lors de l'examen par les députés de la proposition de loi du député Frédéric Valletoux (Horizons, Seine-et-Marne) relative à l'accès aux soins (cf dépêche du 15/06/2023 à 12:44).
Toutefois, si la liberté d'installation reste inscrite dans le code la sécurité sociale (article L162-2), un premier coin a été enfoncé par le Parlement dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2023, ouvrant la voie au conventionnement sélectif des médecins libéraux (cf dépêche du 13/10/2022 à 16:42).
vg/nc/APMnews
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MÉDECINS LIBÉRAUX: RÉUNION TENDUE AU MINISTÈRE ENTRE SYNDICATS, ORDRE ET DÉPUTÉS FAVORABLES À LA RÉGULATION DE L'INSTALLATION
Pendant près de deux heures, les organisations de médecins ont rappelé leur hostilité à toute mesure de restriction de la liberté d'installation, tandis que les députés ont confirmé leur volonté de voir aboutir leur proposition de loi, déposée par le député socialiste Guillaume Garot (Mayenne), examinée mardi 1er ou mercredi 2 avril en séance publique (cf dépêche du 11/03/2025 à 17:37).
Le texte, qui passe dès mercredi matin devant la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, propose notamment de réguler l'installation des médecins sauf dans les zones sous-dotées, et de rétablir l'obligation de participation à la permanence des soins.
Le ministre de la santé et de l'accès aux soins, Yannick Neuder, qui assistait à la réunion en visioconférence depuis Varsovie, voulait croire qu'il existait "peut-être des voies de passage" sur ce texte, avait-il expliqué lundi matin sur Franceinfo.
Yannick Neuder avait confirmé, en substance, qu'il était défavorable à "prendre des mesures qui vont complètement dégoûter notre jeunesse de s'installer et de faire des études en médecine [et les inciter à partir à l'étranger et exercer hors convention]", quelques jours après un entretien au Quotidien du médecin publié le 19 mars dans lequel il rappelait son opposition à la coercition.
L'objectif de la réunion était de gagner du temps, d'aboutir à une sorte de "moratoire" de quelques semaines, le temps de réécrire le texte et de l'enrichir afin d'en faire une "véritable loi santé" avec des mesures consensuelles et partagées, selon le Dr Jérôme Marty, président du syndicat de l'Union française pour une médecine libre (UFMLS), contacté mardi.
"Tous les syndicats ont expliqué pourquoi ils étaient contre le texte. Les députés ont expliqué qu'ils entendaient examiner le texte. Donc on va au clash", a résumé Jérôme Marty, soulignant que son syndicat soutiendrait les internes en cas de mobilisation ou de manifestation.
"Manœuvre dilatoire" pour le député Hadrien Clouet
Présent lors de la réunion, le député Hadrien Clouet (La France insoumise-NFP, Haute-Garonne), a critiqué une "manœuvre" visant à pousser le groupe transpartisan à retirer sa proposition de loi.
"Cette réunion était totalement inutile. Le ministre a réuni les opposants au texte, qui ont répété leur position exprimée lors des auditions" préparatoires, a-t-il estimé.
"On pourrait aussi réunir les associations de patients et d'usagers pour voir quel serait leur avis", a ironisé Hadrien Clouet, dénonçant "une manœuvre dilatoire qui ne trompe personne".
Si le premier ministre, François Bayrou, semble apporter en creux son soutien au texte (cf dépêche du 25/03/2025 à 16:09), Hadrien Clouet s'inquiète toutefois du calendrier parlementaire serré qui s'annonce pour la "semaine de l'Assemblée".
Il relève qu'avec quatre séances ouvertes pour six textes d'initiative parlementaire inscrits pour les 1er et 2 avril, il risque d'être compliqué pour les députés de tous les examiner dans le temps imparti.
Le Dr Franck Devulder, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), contacté mardi par APMnews, estime que Guillaume Garot connaît "parfaitement ses dossiers" mais déplore qu'il présente certaines données de manière biaisée, afin de servir son agenda politique.
Il observe ainsi qu'à l'appui de l'article imposant un rétablissement de l'obligation de permanence des soins, l'exposé des motifs évoque l'érosion de la participation au dispositif constatée par l'ordre en 2019, alors que le rapport 2023 montre au contraire un rebond (cf dépêche du 25/04/2024 à 15:46).
Franck Devulder conteste par ailleurs l'affirmation de Guillaume Garot selon laquelle "la régulation de l'installation est une mesure probante qui a déjà été mise en place dans plusieurs Etats comparables à la France", dont le Danemark, l'Allemagne ou la Norvège.
Il estime que d'autres mesures pourraient permettre de favoriser l'installation en libéral dans les zones fragiles, notamment en procédant à une "universitarisation" du troisième cycle de manière à permettre aux étudiants d'aller exercer dans les établissements ou cabinets libéraux de campus qui ne disposent pas de faculté de médecine.
Contacté par APMnews mardi, Bastien Bailleul, président de l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG) a d'abord déploré que le ministre ait dû s'éclipser avant que les organisations représentant les jeunes et futurs médecins aient pu s'exprimer alors qu'ils sont les premiers concernés.
Sur le fond, il dit avoir rappelé l'hostilité des jeunes praticiens à la régulation de l'installation, qui risquerait de détourner les étudiants des études médicales, et de réduire le nombre de médecins libéraux en exercice.
Si le gouvernement, ces 20 dernières années, a réaffirmé régulièrement son opposition à toute contrainte ou régulation de l'installation pour les médecins, de plus en plus de voix s'élèvent pour actionner ce levier, à mesure que les inégalités d'accès aux soins s'aggravent sur le territoire.
Ainsi l'Association des petites villes de France (APVF) fin septembre 2024 (cf dépêche du 20/09/2024 à 17:47), la Cour des comptes en mai 2024 dans un rapport sur l'accès aux soins de premier recours (cf dépêche du 13/05/2024 à 13:58) et l'UFC-Que choisir depuis 2022 (cf dépêche du 13/12/2023 à 11:27) plaident-elles pour des mécanismes de régulation à l'installation ou de conventionnement sélectif en fonction des zones déjà bien pourvues.
Au Parlement, les dernières initiatives parlementaires en ce sens ont échoué jusque-là, comme en juin 2023 lors de l'examen par les députés de la proposition de loi du député Frédéric Valletoux (Horizons, Seine-et-Marne) relative à l'accès aux soins (cf dépêche du 15/06/2023 à 12:44).
Toutefois, si la liberté d'installation reste inscrite dans le code la sécurité sociale (article L162-2), un premier coin a été enfoncé par le Parlement dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2023, ouvrant la voie au conventionnement sélectif des médecins libéraux (cf dépêche du 13/10/2022 à 16:42).
vg/nc/APMnews