Actualités de l'Urgence - APM

28/11 2015
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ORGANISATION DE LA THROMBECTOMIE POUR TRAITER LES AVC: LES CENTRES EXISTANTS À RENFORCER PLUTÔT QU'EN CRÉER D'AUTRES

(Par François BOISSIER, au congrès de la SFNV)

PARIS, 27 novembre 2015 (APM) - Pour faire face à l'augmentation attendue du nombre de thrombectomies à réaliser en traitement d'accidents vasculaires cérébraux (AVC) ischémiques, il serait préférable de renforcer les centres existants de neuroradiologie interventionnelle et d'améliorer le transport des patients plutôt que de créer de nouveaux centres, estiment des spécialistes.

Ils se sont exprimés mercredi lors de la journée des référents et animateurs de la filière AVC qui s'est tenue à la veille du congrès annuel de la Société française neurovasculaire (SFNV) à Paris.

Une série d'études depuis un an ont montré l'efficacité de la thrombectomie mécanique chez les patients recevant également une thrombolyse, avec une amélioration statistiquement significative du nombre de patients ayant une évolution favorable. Cette activité va donc rapidement augmenter.

Actuellement le nombre de centres de neuroradiologie interventionnelle est en nombre modeste: 38 centres sont autorisés en France, situés principalement dans des CHU, et dans plusieurs régions il n'y a qu'un seul centre.

En conséquence, des patients peuvent se trouver à plus d'une heure de transport, voire plus d'une heure et demie, du centre. C'est le cas de la région Midi-Pyrénées dont la situation a été décrite mercredi: le centre de neuroradiologie interventionnelle se situe à Toulouse. Les patients de Rodez, Cahors ou Tarbes sont à 1h30 ou 1h40 par la route.

La question a été posée de la création de nouveaux centres, associés à des unités neurovasculaires (UNV), dans des établissements trop éloignés des centres existants. Une création de quelques centres a été envisagée par Jérôme Berge du CHU de Bordeaux, lors d'une autre session du congrès de la SFNV jeudi. Il a cité Pau ou Bayonne en Aquitaine, Perpignan en Languedoc-Roussillon, qui sont très éloignés du CHU.

Néanmoins, cela n'est "pas simple", a estimé mercredi Christophe Cognard du CHU de Toulouse. Il y a également un nombre insuffisant -au regard de l'activité en développement- de neuroradiologues interventionnels, alors qu'un centre, pour bien fonctionner 24h/24 et 7j/7, doit disposer d'au moins quatre praticiens.

Par ailleurs, bien que l'activité doive globalement augmenter dans les années à venir, la question d'un volume d'activité suffisant pour les nouveaux centres qui seraient créés est posée, a ajouté Jean-François Albucher du CHU de Toulouse.

Sans parler du fait qu'il faudrait arriver à attirer des praticiens dans ces centres. Il y a actuellement un véritable "mercato" des neuroradiologues, où des établissements tentent d'attirer des praticiens, de les faire changer d'établissement, a commenté une personne dans l'assistance.

AMELIORER LES DELAIS DE TRANSPORT

Pour Christophe Cognard, "il faut d'abord renforcer les équipes qui marchent, et renforcer les transports", par exemple avec une "utilisation accrue des hélicoptères", comme pour les infarctus du myocarde.

Mais Jean-François Albucher a souligné le fait qu'un patient doit d'abord aller dans l'UNV la plus proche pour que la thrombolyse soit initiée rapidement, avant d'être transporté vers le centre faisant la thrombectomie. Notant que dans sa région il y a eu parfois une "mauvaise coordination des transports", il estime que c'est à ce niveau qu'une optimisation est nécessaire. Cela passe notamment par une meilleure communication entre neurologues et Samu et une prise de conscience des Samu qu'il s'agit d'une priorité.

En Midi-Pyrénées, "on a mis en place un retour d'expérience". Pour chaque cas, un document est envoyé aux intervenants, décortiquant tous les délais de la procédure afin de comprendre pourquoi certains délais ont pu être excessifs. S'il reconnaît que ces retours ne "sont pas toujours bien vécus" par ceux qui sont pointés du doigt, il note que "la fois suivante c'est mieux".

"TELEFIBRINOLYSE" EN BOURGOGNE

La situation bourguignonne a également été décrite. Cette région ne dispose que de deux UNV, à Dijon et Chalon s/Saône, et un seul centre de neuroradiologie interventionnelle à Dijon.

Marie Hervieu-Begue du CHU de Dijon a expliqué que face au fait que de nombreux patients arrivaient hors délais dans les UNV, "nous avons appareillé 17 services d'urgence des autres CH avec un système de télémédecine", pour que même sans neurologue sur place, ils puissent réaliser la thrombolyse. Les patients thrombolysés dans les services d'urgence sont ensuite transportés à Dijon pour la thrombectomie, si l'indication a été posée lors de la téléconsultation.

Une évaluation montre qu'il n'y a pas de différence de résultat de la thrombectomie selon que les patients avaient été thrombolysés sur place à Dijon ou s'ils avaient été "téléfibrinolysés" puis transportés. Toutefois, pour le moment, le nombre de patients transportés à Dijon pour une thrombectomie après "téléfibrinolyse" est encore faible. Et là aussi il faut travailler sur les transports pour améliorer les délais, a souligné Marie Hervieu-Begue: "Le Samu doit être mis en pré-alerte pour acheminer le patient vers le CHU".

ILE-DE-FRANCE : LA QUESTION DU RETOUR DES PATIENTS A L'UNV D'ORIGINE

En Ile-de-France, il y a sept centres de neuroradiologie interventionnelle, tous situés au centre de la région: quatre dans Paris et trois en proche banlieue, avec des niveaux d'activité très variables, a indiqué Isabelle Crassard de l'agence régionale de santé (ARS).

Une organisation a été mise en place dans la région. "Il a été demandé à chaque SAU [service d'accueil des urgences] de conventionner avec deux UNV de territoire", qui elles-mêmes doivent conventionner avec des UNV de recours. Les patients adressés aux UNV de recours pour une thrombectomie sont, dans une partie des cas ré-acheminés rapidement vers l'UNV d'origine pour le suivi.

Bien que cette région semble mieux dotée que d'autres, tout n'est pas optimal. "Nous avons identifié des parcours préférentiels de certaines UNV qui ne vont pas toujours vers la proximité". Et certains centres de neuroradiologie interventionnelle ont une faible activité, ce qui suggère la nécessité d'une réorganisation.

Il y a également une nécessité de "travailler sur la disponibilité des Smur pour éviter l'immobilisation des équipes". En effet, actuellement une équipe de Smur peut être mobilisée pour acheminer un patients de l'UNV vers le centre de neuroradiologie, et attendre sur place tout le temps qu'a lieu l'intervention avant de ramener le patient à l'UNV d'origine, pour une durée globale de mobilisation de l'équipe pouvant aller jusqu'à cinq heures.

"Il y a un dysfonctionnement qu'il faut améliorer", a commenté France Woimant, de l'ARS Ile-de-France. "Il faut redimensionner certains centres pour que les patients retournent plus tard dans l'UNV d'origine, et pas avec un Samu".

fb/ab/APM polsan

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(Par François BOISSIER, au congrès de la SFNV)

PARIS, 27 novembre 2015 (APM) - Pour faire face à l'augmentation attendue du nombre de thrombectomies à réaliser en traitement d'accidents vasculaires cérébraux (AVC) ischémiques, il serait préférable de renforcer les centres existants de neuroradiologie interventionnelle et d'améliorer le transport des patients plutôt que de créer de nouveaux centres, estiment des spécialistes.

Ils se sont exprimés mercredi lors de la journée des référents et animateurs de la filière AVC qui s'est tenue à la veille du congrès annuel de la Société française neurovasculaire (SFNV) à Paris.

Une série d'études depuis un an ont montré l'efficacité de la thrombectomie mécanique chez les patients recevant également une thrombolyse, avec une amélioration statistiquement significative du nombre de patients ayant une évolution favorable. Cette activité va donc rapidement augmenter.

Actuellement le nombre de centres de neuroradiologie interventionnelle est en nombre modeste: 38 centres sont autorisés en France, situés principalement dans des CHU, et dans plusieurs régions il n'y a qu'un seul centre.

En conséquence, des patients peuvent se trouver à plus d'une heure de transport, voire plus d'une heure et demie, du centre. C'est le cas de la région Midi-Pyrénées dont la situation a été décrite mercredi: le centre de neuroradiologie interventionnelle se situe à Toulouse. Les patients de Rodez, Cahors ou Tarbes sont à 1h30 ou 1h40 par la route.

La question a été posée de la création de nouveaux centres, associés à des unités neurovasculaires (UNV), dans des établissements trop éloignés des centres existants. Une création de quelques centres a été envisagée par Jérôme Berge du CHU de Bordeaux, lors d'une autre session du congrès de la SFNV jeudi. Il a cité Pau ou Bayonne en Aquitaine, Perpignan en Languedoc-Roussillon, qui sont très éloignés du CHU.

Néanmoins, cela n'est "pas simple", a estimé mercredi Christophe Cognard du CHU de Toulouse. Il y a également un nombre insuffisant -au regard de l'activité en développement- de neuroradiologues interventionnels, alors qu'un centre, pour bien fonctionner 24h/24 et 7j/7, doit disposer d'au moins quatre praticiens.

Par ailleurs, bien que l'activité doive globalement augmenter dans les années à venir, la question d'un volume d'activité suffisant pour les nouveaux centres qui seraient créés est posée, a ajouté Jean-François Albucher du CHU de Toulouse.

Sans parler du fait qu'il faudrait arriver à attirer des praticiens dans ces centres. Il y a actuellement un véritable "mercato" des neuroradiologues, où des établissements tentent d'attirer des praticiens, de les faire changer d'établissement, a commenté une personne dans l'assistance.

AMELIORER LES DELAIS DE TRANSPORT

Pour Christophe Cognard, "il faut d'abord renforcer les équipes qui marchent, et renforcer les transports", par exemple avec une "utilisation accrue des hélicoptères", comme pour les infarctus du myocarde.

Mais Jean-François Albucher a souligné le fait qu'un patient doit d'abord aller dans l'UNV la plus proche pour que la thrombolyse soit initiée rapidement, avant d'être transporté vers le centre faisant la thrombectomie. Notant que dans sa région il y a eu parfois une "mauvaise coordination des transports", il estime que c'est à ce niveau qu'une optimisation est nécessaire. Cela passe notamment par une meilleure communication entre neurologues et Samu et une prise de conscience des Samu qu'il s'agit d'une priorité.

En Midi-Pyrénées, "on a mis en place un retour d'expérience". Pour chaque cas, un document est envoyé aux intervenants, décortiquant tous les délais de la procédure afin de comprendre pourquoi certains délais ont pu être excessifs. S'il reconnaît que ces retours ne "sont pas toujours bien vécus" par ceux qui sont pointés du doigt, il note que "la fois suivante c'est mieux".

"TELEFIBRINOLYSE" EN BOURGOGNE

La situation bourguignonne a également été décrite. Cette région ne dispose que de deux UNV, à Dijon et Chalon s/Saône, et un seul centre de neuroradiologie interventionnelle à Dijon.

Marie Hervieu-Begue du CHU de Dijon a expliqué que face au fait que de nombreux patients arrivaient hors délais dans les UNV, "nous avons appareillé 17 services d'urgence des autres CH avec un système de télémédecine", pour que même sans neurologue sur place, ils puissent réaliser la thrombolyse. Les patients thrombolysés dans les services d'urgence sont ensuite transportés à Dijon pour la thrombectomie, si l'indication a été posée lors de la téléconsultation.

Une évaluation montre qu'il n'y a pas de différence de résultat de la thrombectomie selon que les patients avaient été thrombolysés sur place à Dijon ou s'ils avaient été "téléfibrinolysés" puis transportés. Toutefois, pour le moment, le nombre de patients transportés à Dijon pour une thrombectomie après "téléfibrinolyse" est encore faible. Et là aussi il faut travailler sur les transports pour améliorer les délais, a souligné Marie Hervieu-Begue: "Le Samu doit être mis en pré-alerte pour acheminer le patient vers le CHU".

ILE-DE-FRANCE : LA QUESTION DU RETOUR DES PATIENTS A L'UNV D'ORIGINE

En Ile-de-France, il y a sept centres de neuroradiologie interventionnelle, tous situés au centre de la région: quatre dans Paris et trois en proche banlieue, avec des niveaux d'activité très variables, a indiqué Isabelle Crassard de l'agence régionale de santé (ARS).

Une organisation a été mise en place dans la région. "Il a été demandé à chaque SAU [service d'accueil des urgences] de conventionner avec deux UNV de territoire", qui elles-mêmes doivent conventionner avec des UNV de recours. Les patients adressés aux UNV de recours pour une thrombectomie sont, dans une partie des cas ré-acheminés rapidement vers l'UNV d'origine pour le suivi.

Bien que cette région semble mieux dotée que d'autres, tout n'est pas optimal. "Nous avons identifié des parcours préférentiels de certaines UNV qui ne vont pas toujours vers la proximité". Et certains centres de neuroradiologie interventionnelle ont une faible activité, ce qui suggère la nécessité d'une réorganisation.

Il y a également une nécessité de "travailler sur la disponibilité des Smur pour éviter l'immobilisation des équipes". En effet, actuellement une équipe de Smur peut être mobilisée pour acheminer un patients de l'UNV vers le centre de neuroradiologie, et attendre sur place tout le temps qu'a lieu l'intervention avant de ramener le patient à l'UNV d'origine, pour une durée globale de mobilisation de l'équipe pouvant aller jusqu'à cinq heures.

"Il y a un dysfonctionnement qu'il faut améliorer", a commenté France Woimant, de l'ARS Ile-de-France. "Il faut redimensionner certains centres pour que les patients retournent plus tard dans l'UNV d'origine, et pas avec un Samu".

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