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09/03 2018
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PACA: LES STATUTS DU GIP E-SANTÉ OBSERVATOIRE RÉGIONAL DES URGENCES (ORU) BIENTÔT MODIFIÉS NON SANS REMOUS

(Par Sylvain LABAUNE)

MARSEILLE, 9 mars 2018 (APMnews) - Les statuts du groupement d'intérêt public (GIP) e-santé Observatoire régional des urgences (ORU) Paca, structure de formation et de développement de systèmes d'information, vont changer à partir d'avril, ce qui a provoqué d'importantes tensions entre l'agence régionale de santé (ARS) Paca et le directeur de la structure.

Le GIP e-santé ORU Paca, couramment appelé "ORU", a été créé en 2008 par des urgentistes dans le but de collecter et d'étudier des données relatives aux urgences.

Basée à Hyères (Var), la structure régionale s'est rapidement mise à développer des outils informatiques à destination d'établissements de santé, comme un terminal pour les admissions en soins de suite et réadaptation (SSR) ou encore une base de données accessible aux différents logiciels de Samu/Smur de la région.

Ses missions se sont parallèlement élargies à la formation, au développement de la télémédecine et de l'e-santé en Paca, ainsi qu'à la gestion de l'identitovigilance. L'ORU gère également le répertoire opérationnel des ressources (ROR), c'est-à-dire l'annuaire de l'ensemble de l'offre de soins de la région.

En 2015, la structure a fusionné avec le groupement de coopération sanitaire (GCS) e-santé Paca et a adopté en 2016 le nom de GIP e-santé ORU Paca. Elle a intégré à cette occasion de nouveaux personnels et hérité de nouvelles missions.

L'ORU compte aujourd'hui 50 salariés et une centaine de membres, parmi lesquels des hôpitaux publics, des cliniques, des structures médico-sociales, des associations et collectivités. La structure, financée à 95% par l'ARS Paca, a engagé 70 projets en 2017 pour budget annuel de l'ordre 3,5 millions €.

Elle fournit actuellement des applications informatiques pour 60 sites d'urgences en France et a récemment développé, à la suite des attentats de Nice, un système d'information intitulé SI-VIC pour le recensement des victimes d'attentats.

Modification du mode gouvernance

L'ORU a adopté en 2015 le statut juridique de groupement d’intérêt public (GIP), se dotant à ce titre d’une assemblée générale et d’un conseil d’administration.

Le conseil d'administration de l'ORU a la particularité d'être composé en grande partie de médecins. Les statuts actuels prévoient que celui-ci doit être composé "d'au moins 50% de médecins" parmi les représentants des pôles "urgences" (le plus important), "santé mentale" et "SSR". Ce critère n'est pas mentionné pour les pôles restants (social et médico-social, libéraux et "autres").

Cependant, deux instructions ministérielles du 11 mai 2016 et du 10 janvier 2017 sont venues modifier le mode de gouvernance des structures régionales d'e-santé, dans un souci d'harmoniser les pratiques et de mieux les piloter. Un statut juridique de référence a été défini dans ce cadre, celui de groupement régional d’appui au développement de l'e-santé (Grades).

Un processus a donc été engagé en 2017 pour faire évoluer les statuts du "GIP e-Santé ORU Paca" en "Grades Paca". Le 22 février, le principe de ce changement de statut a été adopté par un vote à l'unanimité de l'assemblée générale.

"[A la suite de ce vote] les documents pour le changement de statuts ont été transmis pour validation à la direction générale des finances publiques [DGFIP]", a expliqué jeudi à APMnews Norbert Nabet, directeur général adjoint de l'ARS Paca.

"Ils devront ensuite être validés par le directeur général de l'ARS pour une entrée en vigueur d'ici un mois", a-t-il ajouté.

Or, selon un document dont APMnews a eu copie, les nouveaux statuts de l'ORU vont considérablement changer le mode de gouvernance de la structure, en donnant plus de poids à l'administration hospitalière et à l'ARS.

Le conseil d'administration sera composé de 7 collèges, répartis selon la nature des structures d'origine de ses membres (ARS, établissements publics, établissements privés, etc.). Le collège ayant le plus de poids sera désormais celui de l'ARS avec 34 droits statuaires sur 100, suivi des "établissements publics, champs sanitaire et médico-social" avec 26 droits statuaires.

Le collège des corporations de médecins et personnels de santé, qui regroupe notamment les unions régionales des professionnels de Santé (UPRS) des médecins libéraux et des chirurgiens-dentistes possède désormais seulement 12 droits statutaires.

Suspension du directeur de l'ORU

Ce changement de mode de gouvernance a provoqué un important conflit entre l'ARS Paca et le directeur de l'ORU, Gilles Viudes, suspendu de ses fonctions depuis le 17 janvier.

Contacté jeudi par APMnews, Gilles Viudes explique déplorer "la disparition des soignants" dans la nouvelle gouvernance. Et s'il "ne conteste pas l'intérêt" de la faire évoluer, il dénonce "la méthode appliquée" pour y parvenir.

Selon lui, le "but de l'ARS" est de "prendre le contrôle de l'ORU" via la modification des statuts. Celui-ci juge par ailleurs sa suspension "illégale" car contraire "aux statuts" de l'ORU.

Le directeur a également déposé un recours devant la justice en décembre 2017 à la suite d'un rapport d'audit sur le fonctionnement de l'ORU, dont APMnews a eu copie, considérant sa diffusion comme "irrégulière".

Ce rapport de 82 pages, réalisé par les cabinets Stratys et Canopé, pointe de nombreux problèmes dans la gouvernance de l'ORU. Il évoque notamment des problèmes de dialogue dans la prise de décision, un "manque de considération" à l'égard des utilisateurs ou encore des "dysfonctionnements" entre maître d'oeuvre et maître d'ouvrage.

Cependant, le rapport charge aussi bien l'ARS que l'ORU dans ces observations, déplorant une "réaction d'autorité agressive" de part et d'autre.

Pour l'ARS, les accusations de Gilles Viudes sont infondées. Le changement de statuts correspond "simplement" à "l'application stricte des instructions ministérielles", a expliqué Norbert Nabet.

"Au moment où on a essayé de réorienter l'ORU vers le Grades, sont apparues un certain nombre de difficultés liées à la gouvernance. La manière dont le pouvoir était organisé n'était pas conforme à la circulaire et aux exigences de l'ARS en termes de pilotage, de transparence et de dépense de l'argent public", a-t-il poursuivi.

A propos de la suspension du directeur, celle-ci "est devenue inévitable après le refus de ce dernier d'entériner la votation du budget 2018", a ajouté Norbert Nabet.

"Il n'y avait donc pas d'autres solutions, sans cela nous aurions mis en péril le fonctionnement de l'ORU", insiste-t-il.

"Il a été dit que nous avions agi de manière illégale, or je tiens à signaler que tout a été fait dans le plus grand respect des lois, des procédures et de la consultation de chacun", ajoute Norbert Nabet.

Enfin, concernant le rapport d'audit, "son but était d'évaluer le fonctionnement actuel de l'ORU, d'avoir une vision globale dans la perspective d'une accélération du développement de l'e­-santé en Paca", poursuit-il.

"L'ARS y est d'ailleurs autant critiquée que la gouvernance de l'ORU", termine-t-il.

Les fédérations hospitalières favorables à la réforme de la gouvernance

Par ailleurs, la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (Fehap) Paca, la Fédération hospitalière de France (FHF) Paca, la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) Sud-est et l’URPS médecins libéraux Paca, ont souligné mercredi dans un communiqué la nécessité de réformer le mode de gouvernance de l'ORU.

"[Nous tenons] à préciser que le rapport d’audit a mis en lumière des problématiques sérieuses quant à la gouvernance du groupement, constat majoritairement partagé par leurs adhérents", est-il indiqué dans le communiqué.

"L’ORU Paca, initialement fondé pour mettre en place un observatoire des urgences, a vu au fil du temps son périmètre évoluer sans pour autant que [sa] gouvernance [...] n’évolue conformément à ses missions, d’où la nécessité de diligenter une mission d’évaluation."

"Ainsi, la démarche de transformation [...] soutenue par l’ARS, correspond aux enjeux actuels et aux souhaits exprimés par les acteurs régionaux de santé", est-il précisé.

syl/sl/APMnews

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(Par Sylvain LABAUNE)

MARSEILLE, 9 mars 2018 (APMnews) - Les statuts du groupement d'intérêt public (GIP) e-santé Observatoire régional des urgences (ORU) Paca, structure de formation et de développement de systèmes d'information, vont changer à partir d'avril, ce qui a provoqué d'importantes tensions entre l'agence régionale de santé (ARS) Paca et le directeur de la structure.

Le GIP e-santé ORU Paca, couramment appelé "ORU", a été créé en 2008 par des urgentistes dans le but de collecter et d'étudier des données relatives aux urgences.

Basée à Hyères (Var), la structure régionale s'est rapidement mise à développer des outils informatiques à destination d'établissements de santé, comme un terminal pour les admissions en soins de suite et réadaptation (SSR) ou encore une base de données accessible aux différents logiciels de Samu/Smur de la région.

Ses missions se sont parallèlement élargies à la formation, au développement de la télémédecine et de l'e-santé en Paca, ainsi qu'à la gestion de l'identitovigilance. L'ORU gère également le répertoire opérationnel des ressources (ROR), c'est-à-dire l'annuaire de l'ensemble de l'offre de soins de la région.

En 2015, la structure a fusionné avec le groupement de coopération sanitaire (GCS) e-santé Paca et a adopté en 2016 le nom de GIP e-santé ORU Paca. Elle a intégré à cette occasion de nouveaux personnels et hérité de nouvelles missions.

L'ORU compte aujourd'hui 50 salariés et une centaine de membres, parmi lesquels des hôpitaux publics, des cliniques, des structures médico-sociales, des associations et collectivités. La structure, financée à 95% par l'ARS Paca, a engagé 70 projets en 2017 pour budget annuel de l'ordre 3,5 millions €.

Elle fournit actuellement des applications informatiques pour 60 sites d'urgences en France et a récemment développé, à la suite des attentats de Nice, un système d'information intitulé SI-VIC pour le recensement des victimes d'attentats.

Modification du mode gouvernance

L'ORU a adopté en 2015 le statut juridique de groupement d’intérêt public (GIP), se dotant à ce titre d’une assemblée générale et d’un conseil d’administration.

Le conseil d'administration de l'ORU a la particularité d'être composé en grande partie de médecins. Les statuts actuels prévoient que celui-ci doit être composé "d'au moins 50% de médecins" parmi les représentants des pôles "urgences" (le plus important), "santé mentale" et "SSR". Ce critère n'est pas mentionné pour les pôles restants (social et médico-social, libéraux et "autres").

Cependant, deux instructions ministérielles du 11 mai 2016 et du 10 janvier 2017 sont venues modifier le mode de gouvernance des structures régionales d'e-santé, dans un souci d'harmoniser les pratiques et de mieux les piloter. Un statut juridique de référence a été défini dans ce cadre, celui de groupement régional d’appui au développement de l'e-santé (Grades).

Un processus a donc été engagé en 2017 pour faire évoluer les statuts du "GIP e-Santé ORU Paca" en "Grades Paca". Le 22 février, le principe de ce changement de statut a été adopté par un vote à l'unanimité de l'assemblée générale.

"[A la suite de ce vote] les documents pour le changement de statuts ont été transmis pour validation à la direction générale des finances publiques [DGFIP]", a expliqué jeudi à APMnews Norbert Nabet, directeur général adjoint de l'ARS Paca.

"Ils devront ensuite être validés par le directeur général de l'ARS pour une entrée en vigueur d'ici un mois", a-t-il ajouté.

Or, selon un document dont APMnews a eu copie, les nouveaux statuts de l'ORU vont considérablement changer le mode de gouvernance de la structure, en donnant plus de poids à l'administration hospitalière et à l'ARS.

Le conseil d'administration sera composé de 7 collèges, répartis selon la nature des structures d'origine de ses membres (ARS, établissements publics, établissements privés, etc.). Le collège ayant le plus de poids sera désormais celui de l'ARS avec 34 droits statuaires sur 100, suivi des "établissements publics, champs sanitaire et médico-social" avec 26 droits statuaires.

Le collège des corporations de médecins et personnels de santé, qui regroupe notamment les unions régionales des professionnels de Santé (UPRS) des médecins libéraux et des chirurgiens-dentistes possède désormais seulement 12 droits statutaires.

Suspension du directeur de l'ORU

Ce changement de mode de gouvernance a provoqué un important conflit entre l'ARS Paca et le directeur de l'ORU, Gilles Viudes, suspendu de ses fonctions depuis le 17 janvier.

Contacté jeudi par APMnews, Gilles Viudes explique déplorer "la disparition des soignants" dans la nouvelle gouvernance. Et s'il "ne conteste pas l'intérêt" de la faire évoluer, il dénonce "la méthode appliquée" pour y parvenir.

Selon lui, le "but de l'ARS" est de "prendre le contrôle de l'ORU" via la modification des statuts. Celui-ci juge par ailleurs sa suspension "illégale" car contraire "aux statuts" de l'ORU.

Le directeur a également déposé un recours devant la justice en décembre 2017 à la suite d'un rapport d'audit sur le fonctionnement de l'ORU, dont APMnews a eu copie, considérant sa diffusion comme "irrégulière".

Ce rapport de 82 pages, réalisé par les cabinets Stratys et Canopé, pointe de nombreux problèmes dans la gouvernance de l'ORU. Il évoque notamment des problèmes de dialogue dans la prise de décision, un "manque de considération" à l'égard des utilisateurs ou encore des "dysfonctionnements" entre maître d'oeuvre et maître d'ouvrage.

Cependant, le rapport charge aussi bien l'ARS que l'ORU dans ces observations, déplorant une "réaction d'autorité agressive" de part et d'autre.

Pour l'ARS, les accusations de Gilles Viudes sont infondées. Le changement de statuts correspond "simplement" à "l'application stricte des instructions ministérielles", a expliqué Norbert Nabet.

"Au moment où on a essayé de réorienter l'ORU vers le Grades, sont apparues un certain nombre de difficultés liées à la gouvernance. La manière dont le pouvoir était organisé n'était pas conforme à la circulaire et aux exigences de l'ARS en termes de pilotage, de transparence et de dépense de l'argent public", a-t-il poursuivi.

A propos de la suspension du directeur, celle-ci "est devenue inévitable après le refus de ce dernier d'entériner la votation du budget 2018", a ajouté Norbert Nabet.

"Il n'y avait donc pas d'autres solutions, sans cela nous aurions mis en péril le fonctionnement de l'ORU", insiste-t-il.

"Il a été dit que nous avions agi de manière illégale, or je tiens à signaler que tout a été fait dans le plus grand respect des lois, des procédures et de la consultation de chacun", ajoute Norbert Nabet.

Enfin, concernant le rapport d'audit, "son but était d'évaluer le fonctionnement actuel de l'ORU, d'avoir une vision globale dans la perspective d'une accélération du développement de l'e­-santé en Paca", poursuit-il.

"L'ARS y est d'ailleurs autant critiquée que la gouvernance de l'ORU", termine-t-il.

Les fédérations hospitalières favorables à la réforme de la gouvernance

Par ailleurs, la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (Fehap) Paca, la Fédération hospitalière de France (FHF) Paca, la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) Sud-est et l’URPS médecins libéraux Paca, ont souligné mercredi dans un communiqué la nécessité de réformer le mode de gouvernance de l'ORU.

"[Nous tenons] à préciser que le rapport d’audit a mis en lumière des problématiques sérieuses quant à la gouvernance du groupement, constat majoritairement partagé par leurs adhérents", est-il indiqué dans le communiqué.

"L’ORU Paca, initialement fondé pour mettre en place un observatoire des urgences, a vu au fil du temps son périmètre évoluer sans pour autant que [sa] gouvernance [...] n’évolue conformément à ses missions, d’où la nécessité de diligenter une mission d’évaluation."

"Ainsi, la démarche de transformation [...] soutenue par l’ARS, correspond aux enjeux actuels et aux souhaits exprimés par les acteurs régionaux de santé", est-il précisé.

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