Actualités de l'Urgence - APM
PAS DE FERMETURES DE LITS AU CH DE PERPIGNAN MAIS DES INQUIÉTUDES SUR L'INSÉCURITÉ ET LE RECRUTEMENT AUX URGENCES
PERPIGNAN, 31 janvier 2024 (APMnews) - Le centre hospitalier (CH) de Perpignan a tenu son objectif en 2023 de ne pas fermer de lits ni d'avoir de postes vacants, a annoncé jeudi le directeur de l'établissement, Barthélémy Mayol, au cours d'un entretien à APMnews, où il a également fait part de ses inquiétudes sur les tensions aux urgences.
APMnews: Comment a évolué l'activité du CH de Perpignan en 2023?
On s'en est quand même très bien sorti, puisqu'on a une progression en valeur de notre activité qui est de l'ordre de 5%. Crise Covid mise à part, on est à environ 4% par an ces dernières années.
Deux décisions stratégiques ont été prises depuis trois ans et demi: ne jamais fermer de lits et ne pas avoir de postes vacants. Et nous avons tenu ces objectifs en 2023, mais aussi en 2022. On n'a pas le choix: on est le seul établissement public dans le secteur médecine-chirurgie-obstétrique (MCO) pour un territoire de 500.000 habitants.
Comment réagissez-vous à la crise d'attractivité que traverse l'hôpital public?
D'abord, on essaie d'être très sensibilisés en amont dans nos processus de recrutement, de collaborer pleinement avec les instituts de formation que l'on peut rencontrer.
On a inauguré un institut de formation d'aides-soignants (Ifas) à Bourg-Madame (Pyrénées-Orientales) en novembre, comprenant une vingtaine de places, mais aussi un centre de formation des assistants de régulation médicale (ARM) en janvier, et on va ouvrir un institut de formation en masso-kinésithérapie (IFMK) en septembre.
Et puis on essaie d'avoir une démarche forte de qualité de vie au travail (QVT), de proposer autant que possible des CDI… Nous n'avons par exemple pas recours à l'intérim paramédical.
Et côté médical?
C'est tendu essentiellement sur les urgences. Il y a des tensions sur d'autres services, mais on arrive à trouver des solutions. Aux urgences, maintenant, on n'arrive plus à trouver de candidats.
Les urgences pédiatriques ont aussi été sous la vague, parce qu'on a souffert du Covid cet hiver, avec une quarantaine de patients par jour.
Toutefois, cette image des brancards amassés devant l'hôpital [diffusée sur les réseaux sociaux et reprise par la presse locale, NDLR] a été très orchestrée, par des acteurs extérieurs aux urgences. C'était une mise en scène. Depuis ce moment, j'essaye de faire passer un message: l'hôpital ce n'est pas le problème, c'est la solution.
Par ailleurs, il n'y a pas d'effets sans cause: à partir du moment où nos lits sont ouverts, certains offreurs de soins du territoire ne sont malheureusement pas en capacité de pouvoir répondre aux besoins de la population. Il y a par exemple les urgences de la clinique Saint-Pierre (Elsan), l'une des deux cliniques privées de Perpignan, qui sont fermées depuis plus d'un mois et demi à partir de 21h le soir.
Quelles réponses face à ces tensions?
Une nouvelle maison médicale universitaire de garde (MMUG) doit être inaugurée mardi 6 février. Ses locaux ont été agrandis afin de faire face aux besoins croissants de la population: 50.000 passages par an en 2022, et plus de 31.000 entre janvier et août 2023.
Le CH de Perpignan est aussi, par exemple, expérimentateur du dispositif de service d'accès aux soins (SAS) depuis deux ans, avec un bilan plutôt positif. On travaille actuellement avec les services de l'agence régionale de santé (ARS) Occitanie et l'hôpital de Thuir pour mettre en place une permanence psychiatrique au niveau du SAS.
On est aussi aidés par l'ARS sur le dispositif des 4.000 lits depuis 2020, ce qui nous a permis d'ouvrir des lits supplémentaires là où nous le pouvions, par exemple en pédiatrie cet hiver.
Quels projets porte le CH pour 2024?
Dans le cadre du Ségur des investissements en 2021, nous avons reçu un soutien pour plusieurs projets, notamment pour la construction du centre gérontologique du Roussillon. Après une première pierre posée en 2022, le centre est en train d'être livré, pour une mise en service en juin. Ce projet est partagé avec le groupement de coopération sanitaire (GCS) formé avec l'Association Joseph-Sauvy: nous disposerons de 200 lits et, eux, de 100 lits.
On a également lancé en novembre 2023 le processus de choix de l'équipe de conception/réalisation du pôle de cancérologie, qui fera 6.000 m². La décision doit être prise cette année, pour une mise en service au premier trimestre 2027.
D'autres opérations du Ségur doivent passer cette année devant la commission régionale des investissements techniques (Cris): les travaux sur les urgences, l'extension des blocs, la mise en conformité de l'unité de surveillance de soins polyvalents ou le plateau technique interventionnel.
A court terme, le gros morceau de l'an prochain c'est la certification, avec une visite de la Haute autorité de santé (HAS) prévue fin mars.
Enfin, on va créer une fondation hospitalière, qui sera présidée par l'ancien international français de rugby Guilhem Guirado, avec l'aide de la chambre de commerce et d'industrie de Perpignan.
Ce que je voudrais c'est que l'on puisse faire périodiquement, une à deux fois par an, un temps d'échange entre le monde économique et social et les projets de l'hôpital, qui seront liés à la médecine du sport, à la QVT, etc.
Côté recherche, deux expérimentations article 51 portées par le CH ont récemment été interrompues, faute de résultats (cf dépêche du 03/01/2024 à 17:21)…
Je l'ai appris en vous lisant. Ces projets avaient une faible importance et n'étaient pas dans nos radars: ils ne faisaient pas partie des 170 projets mentionnés dans notre projet médical, par exemple.
On porte d'autres expérimentations plus importantes qui se passent plutôt pas mal. Mais sur ces deux expérimentations, il y avait vraiment zéro enjeu.
Un soignant du CH de Perpignan a été blessé au couteau, le soir de Noël, après s'être interposé dans une rixe entre familles de patients. Quel est votre regard sur l'insécurité à l'hôpital?
Le soignant a été bien pris en charge au CH, où il a pu être soigné. On l'a ensuite accompagné pour porter plainte et faire en sorte qu'il ait une protection fonctionnelle.
Sans rentrer dans les détails sur ce cas précis, je trouve que l'on est confrontés à une société de plus en plus violente, avec des agressions de plus en plus fréquentes, y compris avec des armes blanches dans les services de l'hôpital.
Cette situation m'interroge beaucoup. On a donc décidé de renforcer la présence d'agents de sécurité aux urgences, notamment les soirs un peu difficiles (25 décembre, 31 décembre, 14 juillet). On va également renforcer la présence de maîtres-chiens au niveau de l'hôpital.
Et on a décidé de systématiquement porter plainte en cas d'agression. Il y a quelques jours, une personne est venue balancer un obus d'oxygène dans la tête d'un soignant… Ce n'est plus possible.
On essaie donc de faire très attention. J'en suis à me demander s'il ne faudrait pas procéder comme dans les aéroports à l'accueil des urgences, avec des zones filtres. On a eu des gens qui arrivaient avec des battes de base-ball, des armes à feu, factices ou non… C'est un sujet qui nous préoccupe beaucoup.
mg/ab/APMnews
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PAS DE FERMETURES DE LITS AU CH DE PERPIGNAN MAIS DES INQUIÉTUDES SUR L'INSÉCURITÉ ET LE RECRUTEMENT AUX URGENCES
PERPIGNAN, 31 janvier 2024 (APMnews) - Le centre hospitalier (CH) de Perpignan a tenu son objectif en 2023 de ne pas fermer de lits ni d'avoir de postes vacants, a annoncé jeudi le directeur de l'établissement, Barthélémy Mayol, au cours d'un entretien à APMnews, où il a également fait part de ses inquiétudes sur les tensions aux urgences.
APMnews: Comment a évolué l'activité du CH de Perpignan en 2023?
On s'en est quand même très bien sorti, puisqu'on a une progression en valeur de notre activité qui est de l'ordre de 5%. Crise Covid mise à part, on est à environ 4% par an ces dernières années.
Deux décisions stratégiques ont été prises depuis trois ans et demi: ne jamais fermer de lits et ne pas avoir de postes vacants. Et nous avons tenu ces objectifs en 2023, mais aussi en 2022. On n'a pas le choix: on est le seul établissement public dans le secteur médecine-chirurgie-obstétrique (MCO) pour un territoire de 500.000 habitants.
Comment réagissez-vous à la crise d'attractivité que traverse l'hôpital public?
D'abord, on essaie d'être très sensibilisés en amont dans nos processus de recrutement, de collaborer pleinement avec les instituts de formation que l'on peut rencontrer.
On a inauguré un institut de formation d'aides-soignants (Ifas) à Bourg-Madame (Pyrénées-Orientales) en novembre, comprenant une vingtaine de places, mais aussi un centre de formation des assistants de régulation médicale (ARM) en janvier, et on va ouvrir un institut de formation en masso-kinésithérapie (IFMK) en septembre.
Et puis on essaie d'avoir une démarche forte de qualité de vie au travail (QVT), de proposer autant que possible des CDI… Nous n'avons par exemple pas recours à l'intérim paramédical.
Et côté médical?
C'est tendu essentiellement sur les urgences. Il y a des tensions sur d'autres services, mais on arrive à trouver des solutions. Aux urgences, maintenant, on n'arrive plus à trouver de candidats.
Les urgences pédiatriques ont aussi été sous la vague, parce qu'on a souffert du Covid cet hiver, avec une quarantaine de patients par jour.
Toutefois, cette image des brancards amassés devant l'hôpital [diffusée sur les réseaux sociaux et reprise par la presse locale, NDLR] a été très orchestrée, par des acteurs extérieurs aux urgences. C'était une mise en scène. Depuis ce moment, j'essaye de faire passer un message: l'hôpital ce n'est pas le problème, c'est la solution.
Par ailleurs, il n'y a pas d'effets sans cause: à partir du moment où nos lits sont ouverts, certains offreurs de soins du territoire ne sont malheureusement pas en capacité de pouvoir répondre aux besoins de la population. Il y a par exemple les urgences de la clinique Saint-Pierre (Elsan), l'une des deux cliniques privées de Perpignan, qui sont fermées depuis plus d'un mois et demi à partir de 21h le soir.
Quelles réponses face à ces tensions?
Une nouvelle maison médicale universitaire de garde (MMUG) doit être inaugurée mardi 6 février. Ses locaux ont été agrandis afin de faire face aux besoins croissants de la population: 50.000 passages par an en 2022, et plus de 31.000 entre janvier et août 2023.
Le CH de Perpignan est aussi, par exemple, expérimentateur du dispositif de service d'accès aux soins (SAS) depuis deux ans, avec un bilan plutôt positif. On travaille actuellement avec les services de l'agence régionale de santé (ARS) Occitanie et l'hôpital de Thuir pour mettre en place une permanence psychiatrique au niveau du SAS.
On est aussi aidés par l'ARS sur le dispositif des 4.000 lits depuis 2020, ce qui nous a permis d'ouvrir des lits supplémentaires là où nous le pouvions, par exemple en pédiatrie cet hiver.
Quels projets porte le CH pour 2024?
Dans le cadre du Ségur des investissements en 2021, nous avons reçu un soutien pour plusieurs projets, notamment pour la construction du centre gérontologique du Roussillon. Après une première pierre posée en 2022, le centre est en train d'être livré, pour une mise en service en juin. Ce projet est partagé avec le groupement de coopération sanitaire (GCS) formé avec l'Association Joseph-Sauvy: nous disposerons de 200 lits et, eux, de 100 lits.
On a également lancé en novembre 2023 le processus de choix de l'équipe de conception/réalisation du pôle de cancérologie, qui fera 6.000 m². La décision doit être prise cette année, pour une mise en service au premier trimestre 2027.
D'autres opérations du Ségur doivent passer cette année devant la commission régionale des investissements techniques (Cris): les travaux sur les urgences, l'extension des blocs, la mise en conformité de l'unité de surveillance de soins polyvalents ou le plateau technique interventionnel.
A court terme, le gros morceau de l'an prochain c'est la certification, avec une visite de la Haute autorité de santé (HAS) prévue fin mars.
Enfin, on va créer une fondation hospitalière, qui sera présidée par l'ancien international français de rugby Guilhem Guirado, avec l'aide de la chambre de commerce et d'industrie de Perpignan.
Ce que je voudrais c'est que l'on puisse faire périodiquement, une à deux fois par an, un temps d'échange entre le monde économique et social et les projets de l'hôpital, qui seront liés à la médecine du sport, à la QVT, etc.
Côté recherche, deux expérimentations article 51 portées par le CH ont récemment été interrompues, faute de résultats (cf dépêche du 03/01/2024 à 17:21)…
Je l'ai appris en vous lisant. Ces projets avaient une faible importance et n'étaient pas dans nos radars: ils ne faisaient pas partie des 170 projets mentionnés dans notre projet médical, par exemple.
On porte d'autres expérimentations plus importantes qui se passent plutôt pas mal. Mais sur ces deux expérimentations, il y avait vraiment zéro enjeu.
Un soignant du CH de Perpignan a été blessé au couteau, le soir de Noël, après s'être interposé dans une rixe entre familles de patients. Quel est votre regard sur l'insécurité à l'hôpital?
Le soignant a été bien pris en charge au CH, où il a pu être soigné. On l'a ensuite accompagné pour porter plainte et faire en sorte qu'il ait une protection fonctionnelle.
Sans rentrer dans les détails sur ce cas précis, je trouve que l'on est confrontés à une société de plus en plus violente, avec des agressions de plus en plus fréquentes, y compris avec des armes blanches dans les services de l'hôpital.
Cette situation m'interroge beaucoup. On a donc décidé de renforcer la présence d'agents de sécurité aux urgences, notamment les soirs un peu difficiles (25 décembre, 31 décembre, 14 juillet). On va également renforcer la présence de maîtres-chiens au niveau de l'hôpital.
Et on a décidé de systématiquement porter plainte en cas d'agression. Il y a quelques jours, une personne est venue balancer un obus d'oxygène dans la tête d'un soignant… Ce n'est plus possible.
On essaie donc de faire très attention. J'en suis à me demander s'il ne faudrait pas procéder comme dans les aéroports à l'accueil des urgences, avec des zones filtres. On a eu des gens qui arrivaient avec des battes de base-ball, des armes à feu, factices ou non… C'est un sujet qui nous préoccupe beaucoup.
mg/ab/APMnews