Actualités de l'Urgence - APM

23/10 2023
Retour

SCORE CALCIQUE CORONAIRE: DES INDICATIONS CLAIRES DANS LE DIABÈTE, MAIS PAS ENCORE EN POPULATION GÉNÉRALE

(Par Charlène CATALIFAUD, aux JFR)

PARIS, 23 octobre 2023 (APMnews) - Bien que ses indications ne soient pas encore clairement définies en population générale, le score calcique coronaire est un examen de dépistage très utile, de plus en plus utilisé et qu'il faut continuer de diffuser, a estimé le Pr Olivier Vignaux, radiologue à l'Hôpital américain de Paris à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), à l'occasion d'une session sur le scanner cardiaque lors des Journées francophones de radiologie diagnostique et interventionnelle (JFR) à Paris.

Le score calcique coronaire est mesuré à partir d'un scanner cardiaque sans injection de produit de contraste et est synchronisé avec l'électrocardiogramme (ECG). "Il permet de visualiser les calcifications positionnées sur les artères coronaires et représente l'unique moyen d'avoir une idée de la charge athéromateuse coronaire d'un patient. Il permet ainsi de reclasser le patient selon son risque réel", a expliqué à APMnews le Pr Damien Mandry, radiologue spécialisé en imagerie cardiovasculaire non invasive au CHRU de Nancy.

Plus le score obtenu -en unités d'Agatston, du nom de celui qui l'a décrit il y a une trentaine d'années- est élevé, plus le risque cardiovasculaire est important.

"A Sète, nous réalisons systématiquement un score calcique pour les patients au-dessus de 40 ans. Nos cardiologues y sont très habitués, cela leur permet d'avoir une idée du risque de leur patient", a indiqué le Dr Juliette Vanoverschelde, radiologue au service d'imagerie médicale de l'hôpital Saint-Clair de Sète. "Chez les moins de 40 ans, je ne le fais pas du tout de manière systématique, mais sur demande spécifique du cardiologue, ce qui est finalement assez rare."

De son côté, Damien Mandry, qui a modéré la session des JFR avec Olivier Vignaux, a affirmé en réaliser peu à Nancy par rapport à ses collègues.

Cette diversité des pratiques résulte d'un flou concernant les indications. "Les nombreuses publications sur le score calcique permettent d'affiner les connaissances progressivement, mais ce sont des études qui prennent des années pour voir l'impact sur les patients. Je crois beaucoup au potentiel du score calcique, mais sa place doit être clarifiée pour éviter d'en faire à tout le monde, sans que ce soit utile", a déclaré le radiologue nancéen. "Je pense qu'à moyen terme, nous aurons des recommandations beaucoup plus claires."

Un examen réalisé à l'appréciation du cardiologue

En pratique, "le score calcique est réservé aux patients asymptomatiques, c'est-à-dire qui n'ont pas de symptômes cardiaques, de douleurs thoraciques évocatrices d'une angine de poitrine, de dyspnée d'effort ou d'essoufflement à l'effort, généralement autour de 50 ans", a détaillé Damien Mandry. "C'est le cardiologue qui, en fonction du profil du risque du patient, peut demander une mesure du score calcique coronaire par scanner pour mieux préciser son risque propre."

"Avec ce score, nous savons préciser le niveau de risque d'un patient de façon beaucoup plus détaillée et personnalisée" qu'avec les échelles de risque classiques, a-t-il poursuivi. "Prenons deux patients avec le même profil de risque. L'un va avoir un score calcique nul, avec un pronostic cardiovasculaire très bon. Le second aura un score calcique élevé et sa prise en charge pourra être adaptée." Le score calcique permet ainsi de diagnostiquer de façon plus précoce les patients et d'agir sur leur maladie athéromateuse.

"De larges cohortes et des méta-analyses ont montré que lorsque vous avez un score calcique nul, le taux d'événement cardiovasculaire à 10 ans est très faible, de [l'ordre de] 1,5%. Plus le score augmente, plus ce taux augmente, avec un taux de 15% entre 100 et 400 et de 25% au-delà de 400", a précisé Olivier Vignaux.

L'interprétation du score calcique nécessite néanmoins de prendre en considérations différents paramètres, en particulier l'âge.

Un score calcique préconisé dès 35 ans chez les diabétiques

Pour les patients diabétiques, les indications sont claires depuis le consensus de 2021 de la Société française de cardiologie (SFC) et de la Société francophone de diabétologie (SFD) portant sur l'évaluation du risque et le dépistage de la maladie coronaire chez le patient diabétique asymptomatique. Les deux sociétés savantes préconisent de réaliser un score calcique pour tous les patients diabétiques de 35 à 75 ans. Néanmoins, "il faut du temps pour que les praticiens s'approprient ces nouvelles recommandations", a constaté Damien Mandry. "Je sens toutefois une montée des demandes de score calcique."

Le score calcique peut par ailleurs être établi à l'occasion d'un scanner thoracique, qui permet aussi de visualiser les calcifications coronaires. "Les images ne sont pas synchronisées avec l'ECG et sont donc un peu moins nettes qu'avec le scanner cardiaque", a néanmoins souligné Damien Mandry, insistant là aussi sur le besoin de recommandations. "Quand le radiologue décrit des calcifications coronaires à partir du scanner thoracique, le cardiologue est embêté: comment adapter la prise en charge des patients?"

La réalisation d'une mammographie représente également une opportunité de visualiser les calcifications. "Il faut se servir de cet examen utilisé en routine, qui permet de 'récupérer' des patientes qui viennent pour un dépistage mammaire et qui se révèlent à risque cardiovasculaire", a plaidé Olivier Vignaux. La mammographie permet en effet de mesurer un score de calcifications vasculaires -le score BAC (Breast Arterial Calcification). "S'il est élevé, nous recommandons un score calcique", a indiqué le radiologue parisien. Une sous-étude issue de l'étude écossaise Scot-Heart, parue dans Clinical Radiology en 2019, a montré qu'en cas de calcification vasculaire mammaire, le score calcique est souvent pathologique, a-t-il rapporté.

Le coroscanner, un intérêt potentiel chez les diabétiques asymptomatiques

Damien Mandry et Olivier Vignaux ont par ailleurs évoqué la place du coroscanner, qui permet notamment de dépister les plaques hypodenses, et qui est habituellement indiqué chez les patients symptomatiques, en cas de douleur évocatrice d'angine de poitrine plus ou moins typique. D'autres résultats issus de l'essai Scot-Heart, publiés en 2020 dans Circulation, ont mis en évidence la corrélation entre les plaques hypodenses et la survenue d'événements cardiovasculaires, a décrit Olivier Vignaux, précisant que des traitements capables de faire régresser ces plaques sont disponibles.

A travers des résultats de la Miami Heart Study, publiés fin septembre dans Circulation, Olivier Vignaux a souligné l'intérêt du coroscanner en population asymptomatique. Cette étude a montré que parmi les patients diabétiques, asymptomatiques sur le plan cardiovasculaire et ayant un score calcique nul, 30% présentaient néanmoins des plaques et 3% une sténose ≥ 50%, ce qui suggère "probablement une place pour le coroscanner, dans les populations asymptomatiques à risque, notamment diabétiques".

Les radiologues attendent de l'intelligence artificielle (IA) qu'elle fasse évoluer le score calcique vers "un score calcique du futur", notamment en permettant de contourer de manière automatique les calcifications, afin de rendre la tâche moins fastidieuse pour les radiologues. L'IA est par ailleurs déjà entrée dans les pratiques puisque la plupart des scanners sont équipés d'un logiciel basé sur l'IA qui permet de "débruiter" les images afin d'améliorer la netteté, a souligné Damien Mandry.

"Le score calcique et le coroscanner sont deux méthodes extrêmement importantes pour agir plus précocement dans l'évolution de la maladie et améliorer le pronostic des patients. Leur développement et leur accès sont des enjeux de santé publique", a conclu Damien Mandry, précisant qu'il n'existe pas de registres recensant le nombre d'examens réalisés en France.

cc/fb/ed/APMnews

Les données APM Santé sont la propriété de APM International. Toute copie, republication ou redistribution des données APM Santé, notamment via la mise en antémémoire, l'encadrement ou des moyens similaires, est expressément interdite sans l'accord préalable écrit de APM. APM ne sera pas responsable des erreurs ou des retards dans les données ou de toutes actions entreprises en fonction de celles-ci ou toutes décisions prises sur la base du service. APM, APM Santé et le logo APM International, sont des marques d'APM International dans le monde. Pour de plus amples informations sur les autres services d'APM, veuillez consulter le site Web public d'APM à l'adresse www.apmnews.com

Copyright © APM-Santé - Tous droits réservés.

Informations professionnelles

23/10 2023
Retour

SCORE CALCIQUE CORONAIRE: DES INDICATIONS CLAIRES DANS LE DIABÈTE, MAIS PAS ENCORE EN POPULATION GÉNÉRALE

(Par Charlène CATALIFAUD, aux JFR)

PARIS, 23 octobre 2023 (APMnews) - Bien que ses indications ne soient pas encore clairement définies en population générale, le score calcique coronaire est un examen de dépistage très utile, de plus en plus utilisé et qu'il faut continuer de diffuser, a estimé le Pr Olivier Vignaux, radiologue à l'Hôpital américain de Paris à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), à l'occasion d'une session sur le scanner cardiaque lors des Journées francophones de radiologie diagnostique et interventionnelle (JFR) à Paris.

Le score calcique coronaire est mesuré à partir d'un scanner cardiaque sans injection de produit de contraste et est synchronisé avec l'électrocardiogramme (ECG). "Il permet de visualiser les calcifications positionnées sur les artères coronaires et représente l'unique moyen d'avoir une idée de la charge athéromateuse coronaire d'un patient. Il permet ainsi de reclasser le patient selon son risque réel", a expliqué à APMnews le Pr Damien Mandry, radiologue spécialisé en imagerie cardiovasculaire non invasive au CHRU de Nancy.

Plus le score obtenu -en unités d'Agatston, du nom de celui qui l'a décrit il y a une trentaine d'années- est élevé, plus le risque cardiovasculaire est important.

"A Sète, nous réalisons systématiquement un score calcique pour les patients au-dessus de 40 ans. Nos cardiologues y sont très habitués, cela leur permet d'avoir une idée du risque de leur patient", a indiqué le Dr Juliette Vanoverschelde, radiologue au service d'imagerie médicale de l'hôpital Saint-Clair de Sète. "Chez les moins de 40 ans, je ne le fais pas du tout de manière systématique, mais sur demande spécifique du cardiologue, ce qui est finalement assez rare."

De son côté, Damien Mandry, qui a modéré la session des JFR avec Olivier Vignaux, a affirmé en réaliser peu à Nancy par rapport à ses collègues.

Cette diversité des pratiques résulte d'un flou concernant les indications. "Les nombreuses publications sur le score calcique permettent d'affiner les connaissances progressivement, mais ce sont des études qui prennent des années pour voir l'impact sur les patients. Je crois beaucoup au potentiel du score calcique, mais sa place doit être clarifiée pour éviter d'en faire à tout le monde, sans que ce soit utile", a déclaré le radiologue nancéen. "Je pense qu'à moyen terme, nous aurons des recommandations beaucoup plus claires."

Un examen réalisé à l'appréciation du cardiologue

En pratique, "le score calcique est réservé aux patients asymptomatiques, c'est-à-dire qui n'ont pas de symptômes cardiaques, de douleurs thoraciques évocatrices d'une angine de poitrine, de dyspnée d'effort ou d'essoufflement à l'effort, généralement autour de 50 ans", a détaillé Damien Mandry. "C'est le cardiologue qui, en fonction du profil du risque du patient, peut demander une mesure du score calcique coronaire par scanner pour mieux préciser son risque propre."

"Avec ce score, nous savons préciser le niveau de risque d'un patient de façon beaucoup plus détaillée et personnalisée" qu'avec les échelles de risque classiques, a-t-il poursuivi. "Prenons deux patients avec le même profil de risque. L'un va avoir un score calcique nul, avec un pronostic cardiovasculaire très bon. Le second aura un score calcique élevé et sa prise en charge pourra être adaptée." Le score calcique permet ainsi de diagnostiquer de façon plus précoce les patients et d'agir sur leur maladie athéromateuse.

"De larges cohortes et des méta-analyses ont montré que lorsque vous avez un score calcique nul, le taux d'événement cardiovasculaire à 10 ans est très faible, de [l'ordre de] 1,5%. Plus le score augmente, plus ce taux augmente, avec un taux de 15% entre 100 et 400 et de 25% au-delà de 400", a précisé Olivier Vignaux.

L'interprétation du score calcique nécessite néanmoins de prendre en considérations différents paramètres, en particulier l'âge.

Un score calcique préconisé dès 35 ans chez les diabétiques

Pour les patients diabétiques, les indications sont claires depuis le consensus de 2021 de la Société française de cardiologie (SFC) et de la Société francophone de diabétologie (SFD) portant sur l'évaluation du risque et le dépistage de la maladie coronaire chez le patient diabétique asymptomatique. Les deux sociétés savantes préconisent de réaliser un score calcique pour tous les patients diabétiques de 35 à 75 ans. Néanmoins, "il faut du temps pour que les praticiens s'approprient ces nouvelles recommandations", a constaté Damien Mandry. "Je sens toutefois une montée des demandes de score calcique."

Le score calcique peut par ailleurs être établi à l'occasion d'un scanner thoracique, qui permet aussi de visualiser les calcifications coronaires. "Les images ne sont pas synchronisées avec l'ECG et sont donc un peu moins nettes qu'avec le scanner cardiaque", a néanmoins souligné Damien Mandry, insistant là aussi sur le besoin de recommandations. "Quand le radiologue décrit des calcifications coronaires à partir du scanner thoracique, le cardiologue est embêté: comment adapter la prise en charge des patients?"

La réalisation d'une mammographie représente également une opportunité de visualiser les calcifications. "Il faut se servir de cet examen utilisé en routine, qui permet de 'récupérer' des patientes qui viennent pour un dépistage mammaire et qui se révèlent à risque cardiovasculaire", a plaidé Olivier Vignaux. La mammographie permet en effet de mesurer un score de calcifications vasculaires -le score BAC (Breast Arterial Calcification). "S'il est élevé, nous recommandons un score calcique", a indiqué le radiologue parisien. Une sous-étude issue de l'étude écossaise Scot-Heart, parue dans Clinical Radiology en 2019, a montré qu'en cas de calcification vasculaire mammaire, le score calcique est souvent pathologique, a-t-il rapporté.

Le coroscanner, un intérêt potentiel chez les diabétiques asymptomatiques

Damien Mandry et Olivier Vignaux ont par ailleurs évoqué la place du coroscanner, qui permet notamment de dépister les plaques hypodenses, et qui est habituellement indiqué chez les patients symptomatiques, en cas de douleur évocatrice d'angine de poitrine plus ou moins typique. D'autres résultats issus de l'essai Scot-Heart, publiés en 2020 dans Circulation, ont mis en évidence la corrélation entre les plaques hypodenses et la survenue d'événements cardiovasculaires, a décrit Olivier Vignaux, précisant que des traitements capables de faire régresser ces plaques sont disponibles.

A travers des résultats de la Miami Heart Study, publiés fin septembre dans Circulation, Olivier Vignaux a souligné l'intérêt du coroscanner en population asymptomatique. Cette étude a montré que parmi les patients diabétiques, asymptomatiques sur le plan cardiovasculaire et ayant un score calcique nul, 30% présentaient néanmoins des plaques et 3% une sténose ≥ 50%, ce qui suggère "probablement une place pour le coroscanner, dans les populations asymptomatiques à risque, notamment diabétiques".

Les radiologues attendent de l'intelligence artificielle (IA) qu'elle fasse évoluer le score calcique vers "un score calcique du futur", notamment en permettant de contourer de manière automatique les calcifications, afin de rendre la tâche moins fastidieuse pour les radiologues. L'IA est par ailleurs déjà entrée dans les pratiques puisque la plupart des scanners sont équipés d'un logiciel basé sur l'IA qui permet de "débruiter" les images afin d'améliorer la netteté, a souligné Damien Mandry.

"Le score calcique et le coroscanner sont deux méthodes extrêmement importantes pour agir plus précocement dans l'évolution de la maladie et améliorer le pronostic des patients. Leur développement et leur accès sont des enjeux de santé publique", a conclu Damien Mandry, précisant qu'il n'existe pas de registres recensant le nombre d'examens réalisés en France.

cc/fb/ed/APMnews

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies pour réaliser des statistiques de visites.