Actualités de l'Urgence - APM

16/02 2022
Retour

TRANSPORTS SANITAIRES: UN SYSTÈME COMPLEXE ET COÛTEUX QUI NÉCESSITE DE POURSUIVRE LES RÉFORMES (RAPPORT PARLEMENTAIRE)

PARIS, 16 février 2022 (APMnews) - La mission d'information de l'Assemblée nationale relative aux transports sanitaires dresse le portrait d'un système à la fois très complexe et au coût en constante augmentation, et recommande donc de poursuivre ou d'entamer toute une série de réformes afin d'y remédier, dans un son rapport rendu public mercredi.

Cette mission d'information menée par Julien Borowczyk (LREM, Loire) et Josiane Corneloup (LR, Saône-et-Loire) s'appuie notamment sur le rapport la Cour des comptes de 2019 (cf dépêche du 08/10/2019 à 10:10).

La mission que le volume et le coût des transports sanitaires n'a cessé d'augmenter ces dernières années, hors crise sanitaire en 2020. Cette année-là, "plus de 61 millions de trajets au titre du transport sanitaire ont été réalisés, représentant une dépense pour l'assurance maladie d'environ 4,3 milliards d'euros [Md€], après un pic en 2019 (4,7 Md€)", selon les données de l'assurance maladie reprise par les rapporteurs.

Ces derniers rappellent que ces dépenses s'élevaient à 2,3 Md€ en 2003 puis à 4 Md€ en 2013. "Depuis, la dynamique budgétaire ne s'est pas enrayée" constatent-ils, le taux annuel moyen de croissance étant de 3,7% entre 2013 et 2018.

"Cette dynamique globale des dépenses ne s'est pas enrayée en 2021 puisque, selon les dernières données, entre janvier et septembre 2021, 3,75 Md€ avaient été remboursés sur les neuf premiers mois de 2021, soit une hausse de 7,9% des dépenses entre 2019 et 2021 et de 21,2% entre 2020 et 2021", constate la mission.

Un taux de remboursement de 94,7% en 2020

Les rapporteurs y voient notamment la conséquence de "l'élargissement progressif de ce droit, souvent bien au-delà des dispositions normatives qui s'appliquent au secteur" et du développement des transports les plus coûteux, à savoir les ambulances et taxis (82% de la dépense en 2021 contre 77% en 2013).

Pour pallier cela, ils proposent notamment de faciliter le remboursement des frais de transport en véhicule personnel et de promouvoir l'usage de ce dernier.

Ils proposent d'autoriser le remboursement des transports sanitaires régulés par le service d'accès aux soins [SAS] vers les cabinets médicaux réalisant la permanence des soins non programmés, afin de fluidifier les urgences et de "sortir de la centralisation des soins au sein des hôpitaux".

La part des affections longue durée (ALD) (exonérées de ticket modérateur) parmi les transports remboursés ne cesse de croître (82,7% des remboursements de transport en 2020 contre 79% en 2013), participant ainsi à la hausse des dépenses. De même, les distances parcourues tendent à s'allonger (+3,6% entre 2019 et 2020) "pour accéder à des centres [hospitaliers] toujours plus spécialisés".

Ils rappellent l'existence de 11 motifs de prise en charge par l'assurance maladie des frais de transport sanitaire, l'application d'un ticket modérateur de 35% limité par 12 cas d'exonération et l'existence d'une franchise médicale de 2 € à laquelle s'appliquent 5 cas d'exonération, conduisant au final à une "extrême diversité de situations pouvant conduire à la prise en charge des frais", estimée à 140 situations possibles par la Cour des comptes.

"Il faut aussi y ajouter près de 70 situations liées au transport de malades intra et inter-hospitaliers [273 millions d'euros, M€, en 2020]. Ainsi, en 2020, le taux de remboursement moyen observé était de 94,7 %", ajoutent les rapporteurs, qui mentionnent par ailleurs les différentes aides versées au secteur pour tenir compte de la réforme du transport d'urgence pré-hospitalier ou encore de la crise sanitaire.

Une gouvernance à éclaircir

Julien Borowczyk et Josiane Corneloup estiment par ailleurs que la complexité du système, entre règles et tarifs distincts applicables aux véhicules sanitaires légers (VSL), taxis conventionnés et ambulances, contribue à l'inflation des coûts de transport sanitaire.

Ils s'interrogent sur "l'opportunité d'une harmonisation des réglementations et/ou des tarifs" et estiment que "le secteur des transports sanitaires souffre d'une fragmentation de sa gouvernance entre de nombreuses autorités publiques".

"En effet, sans prétendre à l'exhaustivité, pas moins de six autorités, dont cinq ministères et la Cnam, sont concernées", ajoutent-ils, considérant que l'assurance maladie "semble constituer l'interlocuteur le plus connu et le plus à même de dialoguer directement avec les représentants de la profession".

Laisser la main aux départements

"De nombreuses réformes, récentes ou en cours, viennent profondément renouveler le cadre juridique et budgétaire", admettent les auteurs, mais celles-ci "devraient être prolongées, voire approfondies, afin notamment de garantir que la gouvernance du secteur soit suffisamment efficiente et de revaloriser la profession de transporteur sanitaire".

Ils regrettent notamment "la difficulté à obtenir un calendrier précis sur la parution du décret relatif aux transports urgents pré-hospitaliers", traitant notamment des nouveaux gestes autorisés pour les sapeurs-pompiers.

"Il faut laisser aux départements une marge de manoeuvre pour décider, dans un cadre commun, de l'organisation des rapports entre Samu et SIS [services d'incendie et de secours], afin notamment de prendre en compte les situations très différentes des territoires", ajoutent-ils, tout en s'alarmant du risque de "réponse à deux vitesses" entre territoires urbains (sapeurs-pompiers et ambulanciers) et ruraux (sapeurs-pompiers uniquement).

La mission alerte aussi sur le risque de "brouiller la chaîne pré-hospitalière" que ne doit pas revêtir "l'élargissement potentiel des missions des transporteurs privés vers le secours d'urgence", et appelle à engager une réflexion "sur les moyens de transport pris en charge pour le retour à domicile post-urgence".

Les bienfaits de la réforme du financement des transports de 2018

Concernant l'expérimentation d'un numéro d'urgence unique porté par la loi du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels (cf dépêche du 26/11/2021 à 10:52), les députés considèrent que "le numéro unique n'est pas un préalable, mais qu'il faut au contraire commencer, lorsque les acteurs y consentent, par rassembler les différents services, afin de travailler ensemble, de créer des passerelles et de limiter les carences".

Ils jugent par ailleurs que la réforme du financement des transports de patient entrée en vigueur en 2018 malgré l'opposition de la Fédération hospitalière de France (FHF) (cf dépêche du 04/09/2018 à 17:51) et des transporteurs (cf dépêche du 03/12/2018 à 13:59) a "rapidement permis [...] de faire régresser les dépenses" et que son extension aux soins de suite et de réadaptation (SSR) et à la psychiatrie en 2022 "va certainement permettre de limiter la dépense en responsabilisant les établissements hospitaliers", sous réserve d'une "évaluation fine et régulière, afin de permettre à ces établissements d'en anticiper le coût".

Les rapporteurs appellent à réaliser une cartographie de l'offre et de la demande en transports sanitaires à l'échelle départementale, et à créer des "plateformes de coordination des trajets" permettant des analyses des flux et de centraliser les demandes via un guichet unique, et donc d'améliorer la gestion des coûts.

Pédagogie auprès des patients comme des prescripteurs

Ils invitent aussi à lancer "un travail majeur de pédagogie auprès des patients sur les conditions de remboursement des transports sanitaires" et à produire un "nouveau référentiel de prescriptions des transports" (le précédent ayant 16 ans).

Les autorités pourraient par ailleurs mettre à jour et utiliser les quotas départementaux de nombres de véhicules sanitaires par population afin de réguler l'activité et donc la dépense, et étendre la régulation aux taxis conventionnés, suggèrent-ils.

Ils proposent que les établissements de santé créent des salons d'entrée et de sortie des urgences afin de centraliser ces dernières, libérer les équipages et les lits plus vite, et fluidifier la file active tout en "optimisant les conditions de sortie".

Les auteurs invitent enfin à prendre des mesures d'attractivité concernant le métier d'ambulancier (intégration du permis de conduire à la formation, élargissement des gestes de soin autorisés, passerelles vers les métiers du soin, meilleure rémunération) ou encore à réfléchir au "verdissement du parc des véhicules affectés au transport sanitaire" et à "inciter les entreprises à s'orienter vers l'utilisation systématique de véhicules à grande capacité pour les VSL".

bd/ed/APMnews

Les données APM Santé sont la propriété de APM International. Toute copie, republication ou redistribution des données APM Santé, notamment via la mise en antémémoire, l'encadrement ou des moyens similaires, est expressément interdite sans l'accord préalable écrit de APM. APM ne sera pas responsable des erreurs ou des retards dans les données ou de toutes actions entreprises en fonction de celles-ci ou toutes décisions prises sur la base du service. APM, APM Santé et le logo APM International, sont des marques d'APM International dans le monde. Pour de plus amples informations sur les autres services d'APM, veuillez consulter le site Web public d'APM à l'adresse www.apmnews.com

Copyright © APM-Santé - Tous droits réservés.

Informations professionnelles

16/02 2022
Retour

TRANSPORTS SANITAIRES: UN SYSTÈME COMPLEXE ET COÛTEUX QUI NÉCESSITE DE POURSUIVRE LES RÉFORMES (RAPPORT PARLEMENTAIRE)

PARIS, 16 février 2022 (APMnews) - La mission d'information de l'Assemblée nationale relative aux transports sanitaires dresse le portrait d'un système à la fois très complexe et au coût en constante augmentation, et recommande donc de poursuivre ou d'entamer toute une série de réformes afin d'y remédier, dans un son rapport rendu public mercredi.

Cette mission d'information menée par Julien Borowczyk (LREM, Loire) et Josiane Corneloup (LR, Saône-et-Loire) s'appuie notamment sur le rapport la Cour des comptes de 2019 (cf dépêche du 08/10/2019 à 10:10).

La mission que le volume et le coût des transports sanitaires n'a cessé d'augmenter ces dernières années, hors crise sanitaire en 2020. Cette année-là, "plus de 61 millions de trajets au titre du transport sanitaire ont été réalisés, représentant une dépense pour l'assurance maladie d'environ 4,3 milliards d'euros [Md€], après un pic en 2019 (4,7 Md€)", selon les données de l'assurance maladie reprise par les rapporteurs.

Ces derniers rappellent que ces dépenses s'élevaient à 2,3 Md€ en 2003 puis à 4 Md€ en 2013. "Depuis, la dynamique budgétaire ne s'est pas enrayée" constatent-ils, le taux annuel moyen de croissance étant de 3,7% entre 2013 et 2018.

"Cette dynamique globale des dépenses ne s'est pas enrayée en 2021 puisque, selon les dernières données, entre janvier et septembre 2021, 3,75 Md€ avaient été remboursés sur les neuf premiers mois de 2021, soit une hausse de 7,9% des dépenses entre 2019 et 2021 et de 21,2% entre 2020 et 2021", constate la mission.

Un taux de remboursement de 94,7% en 2020

Les rapporteurs y voient notamment la conséquence de "l'élargissement progressif de ce droit, souvent bien au-delà des dispositions normatives qui s'appliquent au secteur" et du développement des transports les plus coûteux, à savoir les ambulances et taxis (82% de la dépense en 2021 contre 77% en 2013).

Pour pallier cela, ils proposent notamment de faciliter le remboursement des frais de transport en véhicule personnel et de promouvoir l'usage de ce dernier.

Ils proposent d'autoriser le remboursement des transports sanitaires régulés par le service d'accès aux soins [SAS] vers les cabinets médicaux réalisant la permanence des soins non programmés, afin de fluidifier les urgences et de "sortir de la centralisation des soins au sein des hôpitaux".

La part des affections longue durée (ALD) (exonérées de ticket modérateur) parmi les transports remboursés ne cesse de croître (82,7% des remboursements de transport en 2020 contre 79% en 2013), participant ainsi à la hausse des dépenses. De même, les distances parcourues tendent à s'allonger (+3,6% entre 2019 et 2020) "pour accéder à des centres [hospitaliers] toujours plus spécialisés".

Ils rappellent l'existence de 11 motifs de prise en charge par l'assurance maladie des frais de transport sanitaire, l'application d'un ticket modérateur de 35% limité par 12 cas d'exonération et l'existence d'une franchise médicale de 2 € à laquelle s'appliquent 5 cas d'exonération, conduisant au final à une "extrême diversité de situations pouvant conduire à la prise en charge des frais", estimée à 140 situations possibles par la Cour des comptes.

"Il faut aussi y ajouter près de 70 situations liées au transport de malades intra et inter-hospitaliers [273 millions d'euros, M€, en 2020]. Ainsi, en 2020, le taux de remboursement moyen observé était de 94,7 %", ajoutent les rapporteurs, qui mentionnent par ailleurs les différentes aides versées au secteur pour tenir compte de la réforme du transport d'urgence pré-hospitalier ou encore de la crise sanitaire.

Une gouvernance à éclaircir

Julien Borowczyk et Josiane Corneloup estiment par ailleurs que la complexité du système, entre règles et tarifs distincts applicables aux véhicules sanitaires légers (VSL), taxis conventionnés et ambulances, contribue à l'inflation des coûts de transport sanitaire.

Ils s'interrogent sur "l'opportunité d'une harmonisation des réglementations et/ou des tarifs" et estiment que "le secteur des transports sanitaires souffre d'une fragmentation de sa gouvernance entre de nombreuses autorités publiques".

"En effet, sans prétendre à l'exhaustivité, pas moins de six autorités, dont cinq ministères et la Cnam, sont concernées", ajoutent-ils, considérant que l'assurance maladie "semble constituer l'interlocuteur le plus connu et le plus à même de dialoguer directement avec les représentants de la profession".

Laisser la main aux départements

"De nombreuses réformes, récentes ou en cours, viennent profondément renouveler le cadre juridique et budgétaire", admettent les auteurs, mais celles-ci "devraient être prolongées, voire approfondies, afin notamment de garantir que la gouvernance du secteur soit suffisamment efficiente et de revaloriser la profession de transporteur sanitaire".

Ils regrettent notamment "la difficulté à obtenir un calendrier précis sur la parution du décret relatif aux transports urgents pré-hospitaliers", traitant notamment des nouveaux gestes autorisés pour les sapeurs-pompiers.

"Il faut laisser aux départements une marge de manoeuvre pour décider, dans un cadre commun, de l'organisation des rapports entre Samu et SIS [services d'incendie et de secours], afin notamment de prendre en compte les situations très différentes des territoires", ajoutent-ils, tout en s'alarmant du risque de "réponse à deux vitesses" entre territoires urbains (sapeurs-pompiers et ambulanciers) et ruraux (sapeurs-pompiers uniquement).

La mission alerte aussi sur le risque de "brouiller la chaîne pré-hospitalière" que ne doit pas revêtir "l'élargissement potentiel des missions des transporteurs privés vers le secours d'urgence", et appelle à engager une réflexion "sur les moyens de transport pris en charge pour le retour à domicile post-urgence".

Les bienfaits de la réforme du financement des transports de 2018

Concernant l'expérimentation d'un numéro d'urgence unique porté par la loi du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels (cf dépêche du 26/11/2021 à 10:52), les députés considèrent que "le numéro unique n'est pas un préalable, mais qu'il faut au contraire commencer, lorsque les acteurs y consentent, par rassembler les différents services, afin de travailler ensemble, de créer des passerelles et de limiter les carences".

Ils jugent par ailleurs que la réforme du financement des transports de patient entrée en vigueur en 2018 malgré l'opposition de la Fédération hospitalière de France (FHF) (cf dépêche du 04/09/2018 à 17:51) et des transporteurs (cf dépêche du 03/12/2018 à 13:59) a "rapidement permis [...] de faire régresser les dépenses" et que son extension aux soins de suite et de réadaptation (SSR) et à la psychiatrie en 2022 "va certainement permettre de limiter la dépense en responsabilisant les établissements hospitaliers", sous réserve d'une "évaluation fine et régulière, afin de permettre à ces établissements d'en anticiper le coût".

Les rapporteurs appellent à réaliser une cartographie de l'offre et de la demande en transports sanitaires à l'échelle départementale, et à créer des "plateformes de coordination des trajets" permettant des analyses des flux et de centraliser les demandes via un guichet unique, et donc d'améliorer la gestion des coûts.

Pédagogie auprès des patients comme des prescripteurs

Ils invitent aussi à lancer "un travail majeur de pédagogie auprès des patients sur les conditions de remboursement des transports sanitaires" et à produire un "nouveau référentiel de prescriptions des transports" (le précédent ayant 16 ans).

Les autorités pourraient par ailleurs mettre à jour et utiliser les quotas départementaux de nombres de véhicules sanitaires par population afin de réguler l'activité et donc la dépense, et étendre la régulation aux taxis conventionnés, suggèrent-ils.

Ils proposent que les établissements de santé créent des salons d'entrée et de sortie des urgences afin de centraliser ces dernières, libérer les équipages et les lits plus vite, et fluidifier la file active tout en "optimisant les conditions de sortie".

Les auteurs invitent enfin à prendre des mesures d'attractivité concernant le métier d'ambulancier (intégration du permis de conduire à la formation, élargissement des gestes de soin autorisés, passerelles vers les métiers du soin, meilleure rémunération) ou encore à réfléchir au "verdissement du parc des véhicules affectés au transport sanitaire" et à "inciter les entreprises à s'orienter vers l'utilisation systématique de véhicules à grande capacité pour les VSL".

bd/ed/APMnews

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies pour réaliser des statistiques de visites.