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29/09 2023
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VIH, HÉPATITES, IST: POINTS FAIBLES ET PISTES D'AMÉLIORATIONS POUR LA SURVEILLANCE EN FRANCE

PARIS, 29 septembre 2023 (APMnews) - Plusieurs outils de surveillance existent en France pour le suivi des épidémies du VIH, des hépatites B et C et des autres infections sexuellement transmissibles (IST) mais ils souffrent de "pas mal de points faibles" et il est nécessaire d'en améliorer la robustesse, au travers notamment de "l'automatisation de l'extraction des données" et de la "remobilisation des déclarants", a exposé l'épidémiologiste Florence Lot, mercredi lors de la journée scientifique annuelle du groupe interassociatif TRT-5 CHV.

Cette journée, organisée au ministère de la santé et de la prévention à Paris, avait pour thème "Données de recherche, recherche de données". Elle a débuté par une présentation de Florence Lot, responsable de l'unité VIH-hépatites B/C-IST à la direction des maladies infectieuses de Santé publique France (SPF), relative à l'organisation de la surveillance de ces infections, aux outils disponibles et aux objectifs poursuivis.

L'épidémiologiste a rappelé que les cibles 2020-2030 fixées par la stratégie nationale de santé sexuelle (SNSS) étaient d'atteindre les 3x95 pour le VIH (soit 95% des personnes infectées effectivement diagnostiquées, 95% d'entre elles mises sous traitement et 95% de ces dernières avec une charge virale contrôlée), de réduire l'incidence des IST bactériennes et d'augmenter les couvertures vaccinales contre l'hépatite B et le papillomavirus (HPV) chez les adolescents.

Il est pour cela nécessaire de "produire des indicateurs de surveillance robustes à un niveau géographique fin, sur la base de systèmes divers", a-t-elle déclaré, pointant que ces éléments étaient "indispensables" pour ensuite estimer d'autres indicateurs clefs -comme l'incidence du VIH et de l'hépatite C, le nombre de personnes non diagnostiquées, les délais entre l'infection et le diagnostic, ou encore les cascades de prise en charge- et ainsi "adapter au mieux les stratégies de prévention".

L'épidémiologiste a alors détaillé les nombreux outils utilisés en France pour la surveillance du VIH, des hépatites B et C et des autres IST en France.

Par exemple pour le VIH, il y a les enquêtes LaboVIH (réalisées par les laboratoires de biologie médicale), la déclaration obligatoire (DO), la surveillance virologique par le Centre national de référence (CNR) du VIH à Tours, mais aussi les données issues du système national des données de santé (SNDS), celles provenant des centres gratuits d'information, de dépistage et de diagnostic (Cegidd) ou encore celles issues d'enquêtes comme Eras, Coquelicot ou Baromètre santé.

Le "point fort" est qu'il y a une "gestion centralisée des données, homogène, basée sur des procédures très détaillées et qui nous permet de produire chaque année des indicateurs corrigés sur l'activité de dépistage et les nouveaux diagnostics", a fait valoir Florence Lot, tout en pointant qu'il y avait aussi "pas mal de points faibles".

Il s'agit par exemple d'"améliorer les méthodes de correction de ces indicateurs dans un contexte de baisse de la participation des laboratoires à LaboVIH (66% en 2021) et de l'exhaustivité de la DO (59% en 2021)", a-t-elle exposé, notant que ce travail était "en cours de finalisation". De plus, ces défauts de participation et de déclaration font qu'il est "impossible de produire des indicateurs fiables à un niveau géographique fin".

Des délais de production trop longs

Un autre problème est celui des délais de production des indicateurs, qui sont "produits en novembre de l'année N+1". Ceci est lié au fait qu'il faut attendre les données de LaboVIH pour corriger celles issues de la DO, pourtant disponibles "quasi en temps réel", en deux mois, grâce à la déclaration en ligne (e-DO) qui est en place depuis 2016, a expliqué Florence Lot.

Elle a formulé plusieurs pistes d'amélioration pour "avoir des indicateurs de surveillance du VIH robustes", avec en premier lieu celle de "remplacer les enquêtes LaboVIH par des extractions automatisées par les laboratoires" -car ces enquêtes, de même que celles menées pour les hépatites (LaboHEP) ou les IST, sont "trop chronophages et pas assez exhaustives".

C'est tout l'objectif du "projet LABOé-SI" (cf dépêche du 01/08/2023 à 11:38 et dépêche du 03/08/2023 à 10:46), qui permettrait "d'avoir des données exhaustives de dépistage et de sérologies positives quasi en temps réel, et nous permettrait de corriger beaucoup mieux les données de la DO du VIH et de produire des indicateurs dès la fin du premier semestre de l'année N+1", a-t-elle souligné.

Mais il s'avère que le VIH, de même que les hépatites et les autres IST, ne figurent pas parmi "les premières pathologies à en bénéficier" car "il s'agira des infections respiratoires", a regretté l'épidémiologiste.

Elle a également appelé à une "remobilisation des déclarants à la DO du VIH", pointant le rôle important des comités de coordination régionale de la lutte contre les IST et le VIH (Corevih) car "l'exhaustivité diffère d'un Corevih à l'autre et d'une région à l'autre", mais a aussi estimé que SPF avait "des efforts à faire", avec notamment "une rétro-information régulière aux établissements de soins et aux Corevih sur les cas qu'ils déclarent".

Il y a aussi un besoin d'améliorer l'application e-DO pour permettre notamment une "connexion en ligne sans avoir à introduire sa carte dans le lecteur de cartes, tout en garantissant une authentification forte telle que demandée par la Cnil", et une "interopérabilité avec les systèmes d'information hospitaliers", a pointé Florence Lot.

Elle a par ailleurs fait savoir qu'un travail était "en cours" pour identifier la "meilleure méthode" d'évaluation de l'incidence du VIH, de sorte à pouvoir produire des estimations régulières au niveau national. SPF a également prévu de travailler en 2024 sur la cascade de prise en charge du VIH, la dernière ayant été produite en 2018 par l'Inserm.

A noter que le TRT-5 CHV a mis en ligne, la semaine dernière, ses recommandations pour l'amélioration des données de surveillance et de recherche en matière de VIH, d'hépatites virales et d'IST.

Le collectif indique avoir contribué à la partie "surveillance épidémiologique" du rapport d'experts "à paraître". Ce dernier, élaboré par le Conseil national du sida et des hépatites virales et coordonné par Pierre Delobel du CHU de Toulouse, était initialement prévu pour fin 2022 (cf dépêche du 16/03/2022 à 11:58). Il devrait finalement être publié fin octobre, a-t-on appris lors de la journée scientifique.

sb/ab/APMnews

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PARIS, 29 septembre 2023 (APMnews) - Plusieurs outils de surveillance existent en France pour le suivi des épidémies du VIH, des hépatites B et C et des autres infections sexuellement transmissibles (IST) mais ils souffrent de "pas mal de points faibles" et il est nécessaire d'en améliorer la robustesse, au travers notamment de "l'automatisation de l'extraction des données" et de la "remobilisation des déclarants", a exposé l'épidémiologiste Florence Lot, mercredi lors de la journée scientifique annuelle du groupe interassociatif TRT-5 CHV.

Cette journée, organisée au ministère de la santé et de la prévention à Paris, avait pour thème "Données de recherche, recherche de données". Elle a débuté par une présentation de Florence Lot, responsable de l'unité VIH-hépatites B/C-IST à la direction des maladies infectieuses de Santé publique France (SPF), relative à l'organisation de la surveillance de ces infections, aux outils disponibles et aux objectifs poursuivis.

L'épidémiologiste a rappelé que les cibles 2020-2030 fixées par la stratégie nationale de santé sexuelle (SNSS) étaient d'atteindre les 3x95 pour le VIH (soit 95% des personnes infectées effectivement diagnostiquées, 95% d'entre elles mises sous traitement et 95% de ces dernières avec une charge virale contrôlée), de réduire l'incidence des IST bactériennes et d'augmenter les couvertures vaccinales contre l'hépatite B et le papillomavirus (HPV) chez les adolescents.

Il est pour cela nécessaire de "produire des indicateurs de surveillance robustes à un niveau géographique fin, sur la base de systèmes divers", a-t-elle déclaré, pointant que ces éléments étaient "indispensables" pour ensuite estimer d'autres indicateurs clefs -comme l'incidence du VIH et de l'hépatite C, le nombre de personnes non diagnostiquées, les délais entre l'infection et le diagnostic, ou encore les cascades de prise en charge- et ainsi "adapter au mieux les stratégies de prévention".

L'épidémiologiste a alors détaillé les nombreux outils utilisés en France pour la surveillance du VIH, des hépatites B et C et des autres IST en France.

Par exemple pour le VIH, il y a les enquêtes LaboVIH (réalisées par les laboratoires de biologie médicale), la déclaration obligatoire (DO), la surveillance virologique par le Centre national de référence (CNR) du VIH à Tours, mais aussi les données issues du système national des données de santé (SNDS), celles provenant des centres gratuits d'information, de dépistage et de diagnostic (Cegidd) ou encore celles issues d'enquêtes comme Eras, Coquelicot ou Baromètre santé.

Le "point fort" est qu'il y a une "gestion centralisée des données, homogène, basée sur des procédures très détaillées et qui nous permet de produire chaque année des indicateurs corrigés sur l'activité de dépistage et les nouveaux diagnostics", a fait valoir Florence Lot, tout en pointant qu'il y avait aussi "pas mal de points faibles".

Il s'agit par exemple d'"améliorer les méthodes de correction de ces indicateurs dans un contexte de baisse de la participation des laboratoires à LaboVIH (66% en 2021) et de l'exhaustivité de la DO (59% en 2021)", a-t-elle exposé, notant que ce travail était "en cours de finalisation". De plus, ces défauts de participation et de déclaration font qu'il est "impossible de produire des indicateurs fiables à un niveau géographique fin".

Des délais de production trop longs

Un autre problème est celui des délais de production des indicateurs, qui sont "produits en novembre de l'année N+1". Ceci est lié au fait qu'il faut attendre les données de LaboVIH pour corriger celles issues de la DO, pourtant disponibles "quasi en temps réel", en deux mois, grâce à la déclaration en ligne (e-DO) qui est en place depuis 2016, a expliqué Florence Lot.

Elle a formulé plusieurs pistes d'amélioration pour "avoir des indicateurs de surveillance du VIH robustes", avec en premier lieu celle de "remplacer les enquêtes LaboVIH par des extractions automatisées par les laboratoires" -car ces enquêtes, de même que celles menées pour les hépatites (LaboHEP) ou les IST, sont "trop chronophages et pas assez exhaustives".

C'est tout l'objectif du "projet LABOé-SI" (cf dépêche du 01/08/2023 à 11:38 et dépêche du 03/08/2023 à 10:46), qui permettrait "d'avoir des données exhaustives de dépistage et de sérologies positives quasi en temps réel, et nous permettrait de corriger beaucoup mieux les données de la DO du VIH et de produire des indicateurs dès la fin du premier semestre de l'année N+1", a-t-elle souligné.

Mais il s'avère que le VIH, de même que les hépatites et les autres IST, ne figurent pas parmi "les premières pathologies à en bénéficier" car "il s'agira des infections respiratoires", a regretté l'épidémiologiste.

Elle a également appelé à une "remobilisation des déclarants à la DO du VIH", pointant le rôle important des comités de coordination régionale de la lutte contre les IST et le VIH (Corevih) car "l'exhaustivité diffère d'un Corevih à l'autre et d'une région à l'autre", mais a aussi estimé que SPF avait "des efforts à faire", avec notamment "une rétro-information régulière aux établissements de soins et aux Corevih sur les cas qu'ils déclarent".

Il y a aussi un besoin d'améliorer l'application e-DO pour permettre notamment une "connexion en ligne sans avoir à introduire sa carte dans le lecteur de cartes, tout en garantissant une authentification forte telle que demandée par la Cnil", et une "interopérabilité avec les systèmes d'information hospitaliers", a pointé Florence Lot.

Elle a par ailleurs fait savoir qu'un travail était "en cours" pour identifier la "meilleure méthode" d'évaluation de l'incidence du VIH, de sorte à pouvoir produire des estimations régulières au niveau national. SPF a également prévu de travailler en 2024 sur la cascade de prise en charge du VIH, la dernière ayant été produite en 2018 par l'Inserm.

A noter que le TRT-5 CHV a mis en ligne, la semaine dernière, ses recommandations pour l'amélioration des données de surveillance et de recherche en matière de VIH, d'hépatites virales et d'IST.

Le collectif indique avoir contribué à la partie "surveillance épidémiologique" du rapport d'experts "à paraître". Ce dernier, élaboré par le Conseil national du sida et des hépatites virales et coordonné par Pierre Delobel du CHU de Toulouse, était initialement prévu pour fin 2022 (cf dépêche du 16/03/2022 à 11:58). Il devrait finalement être publié fin octobre, a-t-on appris lors de la journée scientifique.

sb/ab/APMnews

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