Actualités de l'Urgence - APM

VIOLENCES VERBALES CONTRE DES SOIGNANTS: BILAN POSITIF À L'AP-HP D'UN DÉPÔT DE PLAINTE SIMPLIFIÉ AU PARQUET DE BOBIGNY
PARIS, 6 mai 2025 (APMnews) - L'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) a dressé mardi un premier bilan positif du dépôt de plainte simplifié en cas de violences verbales contre un professionnel, mis en place depuis le 1er octobre 2024 avec le parquet de Bobigny, à l'occasion d'une visite de l'hôpital Saint-Antoine à Paris par le ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification, Laurent Marcangeli.
Le ministre a notamment participé à une table ronde avec des soignants des urgences sur les violences subies par les professionnels.
Cette visite était organisée alors que débute mardi l'examen en première lecture au Sénat de la proposition de loi "visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé", de l'ancien député Philippe Pradal (Horizons, Alpes-Maritimes), qui durcit la répression des violences commises à leur égard ainsi qu'envers tous ceux exerçant au sein d'une structure de soins, sociale ou médico-sociale (cf dépêche du 02/05/2025 à 11:55).
Ce texte, qui porte des mesures d'ordre législatif annoncées en septembre 2023 par le gouvernement dans le cadre du plan de lutte contre les violences faites aux soignants, a été adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale le 14 mars 2024 (cf dépêche du 29/09/2023 à 14:11 et dépêche du 14/03/2024 à 19:27).
Il doit notamment permettre à l'employeur, lorsqu'il a connaissance de faits de violences commises contre les agents d'une structure de soins ou médico-sociale, de déposer plainte "après avoir recueilli le consentement écrit de la victime" et de se constituer partie civile.
En attendant son adoption, l'AP-HP a essayé de "travailler à législation constante" pour améliorer la situation, a relaté son directeur général, Nicolas Revel.
Pauline Marcel, directrice déléguée au sein de la direction des affaires juridiques et des droits des patients du CHU francilien, a énuméré plusieurs pistes pour faciliter le dépôt de plainte, comme l'accompagnement de la victime pour obtenir un rendez-vous au commissariat.
Même si cela reste "symbolique", l'institution a également fait savoir aux procureurs d'Ile-de-France qu'elle souhaitait déposer plainte de "façon systématique" en "complément des professionnels, quand bien même l'AP-HP ne subit pas de préjudice matériel évident", a-t-elle poursuivi. Il existe en effet toujours un préjudice moral quand un agent est agressé, lié à la désorganisation du service et parfois à une absence, a-t-elle expliqué.

Pour faciliter le dépôt de plainte, le CHU a par ailleurs mis en place avec le procureur de Bobigny "un traitement simplifié de toutes les infractions de violence verbale" (menace et outrage à personne chargée de mission de service public), en l'absence de violence physique.
Ainsi, dans les hôpitaux qui dépendent du parquet de Bobigny, les soignants peuvent remplir un formulaire au sein de leur établissement, avec l'aide de l'administration. Celui-ci est ensuite adressé directement au parquet, qui, sans enquête de police, fait convoquer la personne mise en cause devant les délégués du procureur de la République.
Il est alors décidé de procéder au classement sous condition ou pas et, si la personne reconnaît le fait reproché, elle se voit imposer "une alternative aux poursuites": un stage de citoyenneté à accomplir ou une contribution citoyenne à verser. Aucune indemnisation ne peut être obtenue par cette voie, note-t-on.
Si la personne respecte l'obligation, alors la procédure sera classée, mais elle pourra être ouverte à tout moment si la personne est à nouveau mise en cause, a souligné Pauline Marcel.
Cela fait six mois que le dispositif est mis en place en Seine-Saint-Denis. Une cinquantaine de dépôts de plainte simplifiés ont été effectués dans ce cadre, a précisé Pauline Marcel à APMnews.
"Le bilan est très positif côté soignants", a-t-elle fait valoir lors de la table ronde.
Ce bilan doit encore être affiné afin de déterminer par exemple s'il est utilisé en complément des plaintes classiques ou s'il s'y substitue, a-t-elle expliqué à APMnews. Pour elle, les deux situations seront probablement retrouvées car certaines personnes n'auraient peut-être pas déposé plainte sans ce dispositif et d'autres y ont eu recours pour ne pas avoir à se déplacer au commissariat.
Un dispositif similaire mais uniquement sur les outrages est en cours de finalisation avec le parquet de Nanterre. "L'idée est vraiment de déclarer davantage sans avoir à [se] déplacer au commissariat", a-t-elle expliqué.
Munie du bilan du dispositif avec le parquet de Bobigny, l'AP-HP espère convaincre la procureure de Paris et étendre cette démarche au parquet de Créteil. Avec ces quatre parquets, la quasi-totalité des établissements de l'AP-HP sont couverts, a indiqué Pauline Marcel à APMnews.
Plus de patients psychiatriques aux urgences sans solution d'hospitalisation
Lors de la table ronde, le chef du service des urgences de l'hôpital Saint-Antoine, Pierre-Alexis Raynal, a rapporté des agressions verbales quotidiennes et des agressions physiques hebdomadaires malgré les dispositifs pour prévenir les violences, la sécurisation des locaux et deux agents de sécurité.
Tout en soulignant l'intérêt des boutons poussoirs permettant d'appeler des collègues à l'aide, une soignante a témoigné des violences verbales que les professionnels arrivent "plus ou moins à gérer" mais aussi des violences physiques, plus difficiles. "On se prend souvent des coups" mais "on n'a pas le réflexe d'aller porter plainte" car "y aller après le travail, c'est compliqué". "Et puis on se dit toujours que c'est moins grave que la fois d'avant, donc on laisse passer."

La violence par les patients atteints de pathologies psychiatriques fait partie du "métier" mais leur stagnation aux urgences pendant des jours "majore le risque de passage à l'acte envers le soignant", a déploré un infirmier. Pour lui, les agressions par des patients sans pathologie psychiatrique sont au contraire "inacceptables".
Pour lever les freins au dépôt de plainte et éviter une banalisation et une sous-déclaration des violences, Pierre-Alexis Raynal a suggéré de permettre un dépôt dématérialisé ou, comme pour les violences conjugales, de prévoir la possibilité de le faire au sein des urgences (cf dépêche du 05/10/2023 à 18:09).
Ne "minimiser" en aucun cas les violences contre des agents du service public (Laurent Marcangeli)
Après les avoir écoutés, Laurent Marcangeli a déclaré aux soignants être conscient des violences qu'ils subissent et des freins au dépôt de plainte, ayant lui-même présidé le conseil de surveillance d'un hôpital pendant huit ans.
Néanmoins, "il ne faut en aucun cas minimiser" ces violences envers des agents du service public car les soignants, malgré leur métier et leurs années d'expérience, ne sont pas "totalement blindés" par rapport à ces situations, a-t-il insisté. "C'est inacceptable que vous fassiez l'objet d'attaques, quelles qu'elles soient, on ne peut pas le laisser passer."
Il considère qu'un agent public attaqué "ne doit jamais se retrouver seul" et a fait part de son soutien à la proposition de loi qui commence son examen mardi au Sénat, en espérant un vote conforme pour une promulgation rapide.
Son "ambition" est de l'étendre à l'ensemble des agents publics. Il avait indiqué en février soutenir la proposition de loi de la députée Violette Spillebout (Ensemble pour la République, Nord) visant à permettre aux employeurs de la fonction publique de porter plainte au nom d'un agent ayant été victime de violences (cf dépêche du 17/02/2025 à 10:48).
Cette proposition de loi n'étant pas inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, il a déclaré qu'il porterait "très certainement un projet de loi" sur ce sujet, comme il l'avait annoncé le 23 avril lors de sa visite du centre pénitentiaire d'Aix-Luynes II (Bouches-du-Rhône).
Il faut que l'Etat, les collectivités territoriales et les hôpitaux "protègent leurs agents lorsqu'ils sont victimes [d'une] agression, quelle que soit la forme que celle-ci prend", a-t-il martelé en souhaitant que le verrou législatif empêchant les employeurs de déclarer à la place de leurs agents soit supprimé.
Il a aussi insisté sur sa volonté que les personnes intervenant dans les hôpitaux mais employées par des entreprises extérieures soient également couvertes par cette possibilité. La proposition de loi examinée au Sénat prévoit déjà de punir d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende l'injure "envers un membre du personnel" exerçant au sein d'un établissement de santé, note-t-on.
cb/nc/APMnews
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PARIS, 6 mai 2025 (APMnews) - L'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) a dressé mardi un premier bilan positif du dépôt de plainte simplifié en cas de violences verbales contre un professionnel, mis en place depuis le 1er octobre 2024 avec le parquet de Bobigny, à l'occasion d'une visite de l'hôpital Saint-Antoine à Paris par le ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification, Laurent Marcangeli.
Le ministre a notamment participé à une table ronde avec des soignants des urgences sur les violences subies par les professionnels.
Cette visite était organisée alors que débute mardi l'examen en première lecture au Sénat de la proposition de loi "visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé", de l'ancien député Philippe Pradal (Horizons, Alpes-Maritimes), qui durcit la répression des violences commises à leur égard ainsi qu'envers tous ceux exerçant au sein d'une structure de soins, sociale ou médico-sociale (cf dépêche du 02/05/2025 à 11:55).
Ce texte, qui porte des mesures d'ordre législatif annoncées en septembre 2023 par le gouvernement dans le cadre du plan de lutte contre les violences faites aux soignants, a été adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale le 14 mars 2024 (cf dépêche du 29/09/2023 à 14:11 et dépêche du 14/03/2024 à 19:27).
Il doit notamment permettre à l'employeur, lorsqu'il a connaissance de faits de violences commises contre les agents d'une structure de soins ou médico-sociale, de déposer plainte "après avoir recueilli le consentement écrit de la victime" et de se constituer partie civile.
En attendant son adoption, l'AP-HP a essayé de "travailler à législation constante" pour améliorer la situation, a relaté son directeur général, Nicolas Revel.
Pauline Marcel, directrice déléguée au sein de la direction des affaires juridiques et des droits des patients du CHU francilien, a énuméré plusieurs pistes pour faciliter le dépôt de plainte, comme l'accompagnement de la victime pour obtenir un rendez-vous au commissariat.
Même si cela reste "symbolique", l'institution a également fait savoir aux procureurs d'Ile-de-France qu'elle souhaitait déposer plainte de "façon systématique" en "complément des professionnels, quand bien même l'AP-HP ne subit pas de préjudice matériel évident", a-t-elle poursuivi. Il existe en effet toujours un préjudice moral quand un agent est agressé, lié à la désorganisation du service et parfois à une absence, a-t-elle expliqué.

Pour faciliter le dépôt de plainte, le CHU a par ailleurs mis en place avec le procureur de Bobigny "un traitement simplifié de toutes les infractions de violence verbale" (menace et outrage à personne chargée de mission de service public), en l'absence de violence physique.
Ainsi, dans les hôpitaux qui dépendent du parquet de Bobigny, les soignants peuvent remplir un formulaire au sein de leur établissement, avec l'aide de l'administration. Celui-ci est ensuite adressé directement au parquet, qui, sans enquête de police, fait convoquer la personne mise en cause devant les délégués du procureur de la République.
Il est alors décidé de procéder au classement sous condition ou pas et, si la personne reconnaît le fait reproché, elle se voit imposer "une alternative aux poursuites": un stage de citoyenneté à accomplir ou une contribution citoyenne à verser. Aucune indemnisation ne peut être obtenue par cette voie, note-t-on.
Si la personne respecte l'obligation, alors la procédure sera classée, mais elle pourra être ouverte à tout moment si la personne est à nouveau mise en cause, a souligné Pauline Marcel.
Cela fait six mois que le dispositif est mis en place en Seine-Saint-Denis. Une cinquantaine de dépôts de plainte simplifiés ont été effectués dans ce cadre, a précisé Pauline Marcel à APMnews.
"Le bilan est très positif côté soignants", a-t-elle fait valoir lors de la table ronde.
Ce bilan doit encore être affiné afin de déterminer par exemple s'il est utilisé en complément des plaintes classiques ou s'il s'y substitue, a-t-elle expliqué à APMnews. Pour elle, les deux situations seront probablement retrouvées car certaines personnes n'auraient peut-être pas déposé plainte sans ce dispositif et d'autres y ont eu recours pour ne pas avoir à se déplacer au commissariat.
Un dispositif similaire mais uniquement sur les outrages est en cours de finalisation avec le parquet de Nanterre. "L'idée est vraiment de déclarer davantage sans avoir à [se] déplacer au commissariat", a-t-elle expliqué.
Munie du bilan du dispositif avec le parquet de Bobigny, l'AP-HP espère convaincre la procureure de Paris et étendre cette démarche au parquet de Créteil. Avec ces quatre parquets, la quasi-totalité des établissements de l'AP-HP sont couverts, a indiqué Pauline Marcel à APMnews.
Plus de patients psychiatriques aux urgences sans solution d'hospitalisation
Lors de la table ronde, le chef du service des urgences de l'hôpital Saint-Antoine, Pierre-Alexis Raynal, a rapporté des agressions verbales quotidiennes et des agressions physiques hebdomadaires malgré les dispositifs pour prévenir les violences, la sécurisation des locaux et deux agents de sécurité.
Tout en soulignant l'intérêt des boutons poussoirs permettant d'appeler des collègues à l'aide, une soignante a témoigné des violences verbales que les professionnels arrivent "plus ou moins à gérer" mais aussi des violences physiques, plus difficiles. "On se prend souvent des coups" mais "on n'a pas le réflexe d'aller porter plainte" car "y aller après le travail, c'est compliqué". "Et puis on se dit toujours que c'est moins grave que la fois d'avant, donc on laisse passer."

La violence par les patients atteints de pathologies psychiatriques fait partie du "métier" mais leur stagnation aux urgences pendant des jours "majore le risque de passage à l'acte envers le soignant", a déploré un infirmier. Pour lui, les agressions par des patients sans pathologie psychiatrique sont au contraire "inacceptables".
Pour lever les freins au dépôt de plainte et éviter une banalisation et une sous-déclaration des violences, Pierre-Alexis Raynal a suggéré de permettre un dépôt dématérialisé ou, comme pour les violences conjugales, de prévoir la possibilité de le faire au sein des urgences (cf dépêche du 05/10/2023 à 18:09).
Ne "minimiser" en aucun cas les violences contre des agents du service public (Laurent Marcangeli)
Après les avoir écoutés, Laurent Marcangeli a déclaré aux soignants être conscient des violences qu'ils subissent et des freins au dépôt de plainte, ayant lui-même présidé le conseil de surveillance d'un hôpital pendant huit ans.
Néanmoins, "il ne faut en aucun cas minimiser" ces violences envers des agents du service public car les soignants, malgré leur métier et leurs années d'expérience, ne sont pas "totalement blindés" par rapport à ces situations, a-t-il insisté. "C'est inacceptable que vous fassiez l'objet d'attaques, quelles qu'elles soient, on ne peut pas le laisser passer."
Il considère qu'un agent public attaqué "ne doit jamais se retrouver seul" et a fait part de son soutien à la proposition de loi qui commence son examen mardi au Sénat, en espérant un vote conforme pour une promulgation rapide.
Son "ambition" est de l'étendre à l'ensemble des agents publics. Il avait indiqué en février soutenir la proposition de loi de la députée Violette Spillebout (Ensemble pour la République, Nord) visant à permettre aux employeurs de la fonction publique de porter plainte au nom d'un agent ayant été victime de violences (cf dépêche du 17/02/2025 à 10:48).
Cette proposition de loi n'étant pas inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, il a déclaré qu'il porterait "très certainement un projet de loi" sur ce sujet, comme il l'avait annoncé le 23 avril lors de sa visite du centre pénitentiaire d'Aix-Luynes II (Bouches-du-Rhône).
Il faut que l'Etat, les collectivités territoriales et les hôpitaux "protègent leurs agents lorsqu'ils sont victimes [d'une] agression, quelle que soit la forme que celle-ci prend", a-t-il martelé en souhaitant que le verrou législatif empêchant les employeurs de déclarer à la place de leurs agents soit supprimé.
Il a aussi insisté sur sa volonté que les personnes intervenant dans les hôpitaux mais employées par des entreprises extérieures soient également couvertes par cette possibilité. La proposition de loi examinée au Sénat prévoit déjà de punir d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende l'injure "envers un membre du personnel" exerçant au sein d'un établissement de santé, note-t-on.
cb/nc/APMnews