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23/04 2025

Flash Sécurité de la HAS sur les erreurs diagnostiques aux urgences. Un diagnostic partagé mais les cibles du traitement sont à revoir

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Les urgentistes se préoccupent au quotidien de l’amélioration de la sécurité des soins

Les professionnels de la Médecine d’Urgence prennent acte de la publication « Flash Sécurité Patient » du 11 avril 2025 de la Haute Autorité de Santé (HAS), portant sur les erreurs diagnostiques dans les services d’urgences. Nous saluons cette initiative visant à renforcer la qualité des soins et la sécurité des patients, tout en regrettant la tonalité dramatisante et alarmiste du message, qui pourrait laisser croire à une mise en accusation des professionnels de médecine d’urgence.

Un constat partagé, mais sous un prisme biaisé

Nous partageons le constat de la HAS : les erreurs diagnostiques, bien que rares, peuvent avoir des conséquences graves, particulièrement dans un environnement d'urgence où le facteur temps est déterminant. Ces situations doivent faire l’objet d’une vigilance renforcée.

Toutefois, présenter ces erreurs comme un phénomène quasi-exclusif des services d’urgence, sans mise en perspective avec l’ensemble du système de soins, est méthodologiquement discutable. De même, ne pas avoir évoqué la nécessaire adéquation entre la charge en soins et le personnel – médecins et soignants urgentistes - en poste interroge sur le prisme d’analyse choisi par la HAS.

Plutôt que d’y voir une stigmatisation, nous choisissons de prendre cette alerte comme une opportunité : celle de rappeler au Ministère de la Santé que les conditions d’exercice aux urgences sont un facteur majeur de ces erreurs. Ces conditions relèvent, non pas d’un manque d’engagement des professionnels, mais bien de décisions (ou non-décisions) politiques.

Identifier les causes réelles pour définir des solutions opérationnelles

Nous saluons et partageons les recommandations de la HAS. Mais pour que ces recommandations soient suivies d’effets, il faut une volonté politique :

 Formation : Depuis 2017, date de création du Diplôme d'Études Spécialisées en médecine d’urgence (DESMU), nous demandons inlassablement aux gouvernements successifs que sa durée soit portée de 4 à 5 ans, comme dans la majorité des pays européens ; demande restée lettre morte. Faut-il rappeler que la France fut le 20e pays à reconnaître la médecine d’urgence comme spécialité ? Nous payons encore aujourd’hui ce retard structurel.

 Conditions de travail et surcharge des services : Cela fait des années que nous alertons les pouvoirs publics sur la surmortalité liée au manque de lits d’aval, facteur majeur démontré de surmortalité, et que nous demandons qu’un indicateur sur les patients brancard soit publié au quotidien. Cette situation chronique entraîne unengorgement des services et des prises en charge dégradées et elle expose les patients comme les soignants à des risques évitables. À cela s’ajoute une mise en œuvre encore incomplète des SAS (Services d’Accès aux Soins), et de ses filières spécialisées (psychiatrie, pédiatrie, gériatrie), pourtant cruciales pour améliorer le parcours patient et éviter certains passages aux urgences.

 Travail en équipe : La principale source de désorganisation médicale reste le sous- effectif avec environ 40% des postes vacants, obligeant le recours à des remplaçants, à des médecins non qualifiés en médecine d’urgence ou à celui de médecins juniors. Là encore les mesures d’attractivité des carrières hospitalières et d’amélioration des conditions de travail demandées depuis de nombreuses années n’ont jamais trouvé écho.

 Charge cognitive : Enfin, comment réduire les biais cognitifs alors que les médecins urgentistes doivent gérer simultanément des patients, qui sont en nombre toujours plus important, y compris dans des lit-brancards ? Comment assurer un raisonnement clinique sécurisé et une bonne orientation dans le système de soins lorsque le nombre d’ARM et de médecins n’a pas été dimensionné correctement pour répondre au nombre d’appels reçus par les SAMU-SAS ?

Une responsabilité collective… mais d’abord politique

Pointer du doigt les décès évitables imputables à des erreurs de diagnostic, sans prendre en compte les conditions extrêmes dans lesquelles ces diagnostics sont posés, revient à occulter les responsabilités politique et institutionnelles dans la structuration des soins d’urgence.

Nous remercions néanmoins la HAS de mettre en lumière, à travers ce rapport, des situations de décès évitables que nous dénonçons depuis plus d’une décennie. Cela nous permet, à notre tour, de rappeler à l’État l’urgence d’agir sur les facteurs structurels qui relèvent de sa compétence exclusive. Le Premier Ministre entend mettre en place une grande stratégie sur l’accès aux soins : des solutions nous en avons.

Enfin, nous rappelons à la Haute Autorité de Santé (HAS) que nos organisations souhaitent qu'elle prenne en compte de manière prioritaire notre spécialité pour définir les ratios de soignants nécessaires à l'activité d'urgence, conformément à la loi du 29 janvier 2025.

Sans réforme ambitieuse et sincère de l’organisation des soins d’urgence, le risque n’est pas l’erreur, mais le renoncement à soigner.

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